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Œuvres littéraires de Napoléon Bonaparte/Lettres de Famille/36

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Texte établi par Tancrède MartelAlbert Savine (Tome 1p. 258-259).

XXXVI

À LA REINE HORTENSE.

Ebersdorf, 28 mai 1809.

Ma fille, je suis mécontent que vous soyez sortie de France sans ma permission, et surtout que vous ayez fait sortir mes neveux[1]. Puisque vous êtes aux eaux de Bade, restez-y ; mais une heure après avoir reçu la présente lettre, renvoyez mes deux neveux à Strasbourg, auprès de l’impératrice ; ils ne doivent jamais sortir de France. C’est la première fois que j’ai lieu d’être mécontent de vous ; mais vous ne deviez pas disposer de mes neveux sans ma permission ; vous devez sentir le mauvais effet que cela produit. Puisque les eaux de Bade vous font du bien, vous pouvez y rester quelques jours ; mais, je vous le répète, ne perdez pas un moment pour renvoyer mes neveux à Strasbourg. Si l’impératrice va aux eaux de Plombières, ils l’y accompagneront ; mais ils ne doivent jamais passer le pont de Strasbourg. Votre affectionné père,

Napoléon[2].

  1. Ces deux neveux de l’empereur étaient les jeunes Charles-Napoléon-Louis, né en 1804, et Charles-Louis-Napoléon, né en 1808, le futur Napoléon III.
  2. Cette lettre sévère donne une idée de la rigidité avec laquelle Napoléon comprenait son rôle de chef de la famille impériale. N’ayant pas d’enfant, il se réservait encore à ce moment-là la faculté d’adopter l’un des deux fils de Louis et d’Hortense. Aussi a-t -il eu la précaution de charger l’impératrice Joséphine de faire parvenir à la reine de Hollande la terrible épître. Le soin jaloux avec lequel Napoléon veillait sur les enfants d’Hortense ne dut pas peu contribuer à