Aller au contenu

Abrégé de l’histoire générale des voyages/Tome XXII/Cinquième partie/Livre I/Chapitre XI

La bibliothèque libre.

CHAPITRE XI.

Tasman.

La compagnie hollandaise des Indes orientales n’envoya plus de grandes flottes dans le grand Océan après le retour de celle dont L’Hermite avait eu le commandement ; mais, jugeant qu’il était nécessaire d’acquérir des connaissances plus étendues sur les terres australes et sur les pays déjà découverts à l’est de la Nouvelle-Guinée, elle donna ordre, en 1642, au gouverneur-général de ses possessions, et au conseil de Batavia, d’envoyer dans ces parages un navigateur habile pour bien décrire les côtes, et en même temps étendre les découvertes faites précédemment dans cette région du monde.

Plusieurs vaisseaux hollandais avaient, avant cette époque, abordé à différens points de la côte occidentale du continent, que l’on a depuis appelée la Nouvelle-Hollande ; mais les travaux des navigateurs qui firent ces découvertes sont perdus pour l’histoire de la géographie. La crainte d’inspirer aux autres nations de l’Europe l’idée de s’établir dans des pays si voisins des établissemens hollandais dans les îles du midi de l’Asie engagea la compagnie à supprimer tout ce qui pouvait fournir quelques lumières sur ces contrées : voici à quoi se borne ce que l’on sait sur ces découvertes.

En 1605 l’yacht hollandais le Duyfhen (la Colombe) fut expédié de Bantam pour explorer les îles de la Nouvelle-Guinée. Il navigua le long de ce que l’on croyait être la côte occidentale de ce pays jusqu’à 13° 45′ sud. Il trouva que cette vaste étendue de côtes était en grande partie déserte, et en quelques endroits habitée par des sauvages farouches et cruels, de couleur noire, qui tuèrent des hommes de son équipage. C’est ce qui empêcha de rien apprendre sur ce pays ni sur les parages voisins, comme on était chargé de le faire. Ainsi le manque de vivres et de provisions de tout genre obligea de laisser la découverte incomplète. La pointe de terre la plus éloignée, marquée sur la carte de route, fut nommée cap Keer-Veer (cap du Retour).

En quittant la Nouvelle-Guinée, le Duyfhen fit route au sud, le long des îles de la partie occidentale du détroit de Torrès, jusqu’à la partie de la terre australe un peu à l’ouest et au sud du cap York. On regardait toutes ces terres comme jointes à la Nouvelle-Guinée ; ainsi ce navire fit, sans le soupçonner, la première découverte authentique de la grande terre australe ou Nouvelle-Hollande, vers le mois de mars 1606 ; car il paraît qu’il fut de retour à Banda vers le commencement de juin de la même année.

Une seconde expédition tentée en 1617 eut peu de succès ; les journaux et les observations furent perdus. En janvier 1623 les yachts Pera et Arnhem furent expédiés d’Amboine par les ordres de Jean Pieters Coen, sous le commandement de Jean Carstens. Ce capitaine fut traîtreusement assassiné avec huit hommes de son équipage par les habitans de la Nouvelle-Guinée. Les bâtimens continuèrent le voyage et découvrirent les grandes îles d’Arnhem et de Speult. Alors ils se séparèrent ; l’Arnhem revint à Amboine, le Pera continua la navigation le long de la côte méridionale de la Nouvelle-Guinée jusqu’au cap Keer-Veer ; ensuite il découvrit la côte plus au sud jusqu’à Staten-River, par 17° sud. Ce que l’on pouvait apercevoir du pays au delà semblait s’étendre à l’ouest. Alors le Pera revint à Amboine. Dans ce voyage l’on trouva partout des eaux peu profondes et des côtes stériles, des îles mal peuplées d’hommes cruels, pauvres et brutaux.

Dirk Hartighs, d’Amsterdam, découvrit, le 25 octobre 1616, la terre d’Eendraght ou de la Concorde, ainsi nommée d’après son vaisseau ; de Witt, en 1628, Edel, en 1629, Nuyt, le 26 janvier 1627, découvrirent les terres qui portent leur nom, et qui, ainsi qu’on l’a dit plus haut, sont des parties occidentales de la Nouvelle-Hollande. On ignore quel était le capitaine du navire de Leeuwin (la Lionne), dont le nom fut donné à une autre portion de la côte de cette contrée, découverte en 1622.

L’on ne savait pas jusqu’où ces terres s’étendaient dans le sud, lorsque l’ordre de les reconnaître parvint à van Diemen, gouverneur-général depuis 1636, et l’un de ceux qui ont occupé avec le plus de distinction cette place éminente.

Dès la première année de son gouvernement il avait expédié Gerrit Thomas Poel, qui partit de Banda avec les yachts Klein-Amsterdam et Wesel. Poel éprouva le même sort que Carstens, et au même endroit. Malgré ce fâcheux événement, le voyage fut continué sous le commandement du subrécargue Pierre Pietersen ; il visita les îles de Key et d’Arou. La force et la continuité des vents d’est l’empêchèrent d’atteindre la côte occidentale de la Nouvelle-Guinée, c’est-à-dire de la Carpentarie. Mais, se dirigeant à peu près au sud, il découvrit la côte d’Arnhem ou terre de van Diemen par 11° sud, et suivit la côte pendant cent vingt milles sans voir aucun habitant ; mais il aperçut de la fumée en différens endroits.

Pour la nouvelle expédition, van Diemen jeta les yeux sur Abel-Jansren Tasman, marin expérimenté, et qui connaissait très-bien toutes les découvertes faites précédemment. Il lui donna deux vaisseaux, le Heemskerk et le Zeehaan (le coq de Mer), avec lesquels Tasman partit de Batavia le 14 août 1652.

Tasman vint d’abord relâcher à l’île Maurice, nommée depuis Île-de-France, la quitta le 8 octobre et fit voile au sud, puis au sud-est. Le 24 novembre, par le 42° 25′ de latitude sud, et 163° 10′ à l’est de Paris, il découvrit, à dix milles dans l’est, une terre à laquelle il donna le nom de Van Diemen. Le temps était affreux. Tasman continua sa route au sud-est, en prolongeant la côte jusqu’à une baie dans laquelle il mouilla le 1er. décembre, et qu’il nomma baie de Frédéric Henry.

Le lendemain matin il envoya le maître avec deux canots armés reconnaître une anse au nord-ouest, pour voir s’il était possible d’y faire de l’eau et du bois et d’y trouver des provisions. Les canots côtoyèrent le rivage de la baie l’espace d’une lieue ; le pays était très-élevé, mais uni, couvert de bois et de plantes antiscorbutiques ; une source coulait sur un terrain en pente : il était très-difficile d’y faire de l’eau. On n’aperçut aucun habitant ; toutefois on crut distinguer des cris et entendre un bruit assez semblable au son d’une trompette. On observa deux arbres de quatre à cinq pieds de diamètre et de soixante pieds d’élévation, sur l’écorce desquels on avait pratiqué des entailles, à cinq pieds de distance les unes des autres, pour monter jusqu’au sommet, ce qui fit supposer que les habitans de ce pays étaient d’une très-haute stature. Les entailles de l’un de ces arbres paraissaient n’être faites que depuis très-peu de jours. On vit des traces de bêtes sauvages que l’on crut être celles d’un tigre, et l’on trouva des excrémens de quadrupèdes. On ramassa sur plusieurs arbres de la résine rougeâtre, claire et transparente. Les arbres étaient clair-semés, mais extrêmement embarrassés de buissons et de broussailles. Des vestiges de feu se faisaient remarquer en différens endroits. On vit des oies sauvages, des canards et différens oiseaux aquatiques. On observa que vers la pointe de l’anse la profondeur de l’eau n’était que de quatorze pieds, et que la marée montait à trois pieds.

Les Hollandais, jugeant qu’il serait imprudent de s’avancer dans le pays, chargèrent leurs canots d’herbages, et retournèrent à leurs vaisseaux. Pendant la nuit, ils virent briller des feux qui annonçaient que cette terre était habitée. Le lendemain, on dressa un poteau sur la côte sud-est de la baie ; on y attacha le pavillon de la compagnie, et chacun y inscrivit son nom ou sa marque.

Le 5 décembre, Tasman fit voile à l’est, se proposant de courir dans cette direction jusqu’à ce qu’il découvrît les îles de Salomon. Les vent contraires ne lui permirent pas de ranger la côte de près. Quelques jours après, la mer fut très-agitée ; les lames venaient du sud-ouest, ce qui annonçait que la mer était libre de ce côté.

Le 13 décembre, par 42° 10′ sud et 189° 40′ est, Tasman eut connaissance, dans le sud-est, d’une terre haute et montueuse ; il la nomma Staaten-Land (Terre des États) ; cette dénomination a depuis fait place à celle de Nieuwee-Zeeland (Nouvelle-Zélande). Sa grande élévation et l’étendue indéterminée de cette terre donnèrent lieu à Tasman de penser qu’elle faisait partie du continent austral. Il en suivit la côte en se dirigeant au nord-est ; et le 17 il mouilla dans une grande baie située par 40° 50′ sud et 192° 49′ est.

On ne tarda pas à voir des pirogues montées par des Indiens. Ils s’avancèrent vers les vaisseaux, mais s’arrêtèrent à la distance d’un jet de pierre. L’un d’eux soufflait dans un instrument qui rendait un son aigu ; on y répondait des vaisseaux en jouant de la trompette. Ces Indiens étaient de haute taille et bien proportionnés ; leur langage avait quelque chose de rude et de grossier ; leur couleur était bronzée, mais variait d’intensité chez les différens individus. Leurs cheveux, longs, épais et d’un noir d’ébène, étaient bruns et relevés sur la tête en une touffe ornée d’une aigrette de plumes. Une draperie qui les couvrait de la ceinture aux genoux paraissait être faite de nattes ; ils avaient le reste du corps nu. On leur fit des signes d’amitié : on les invita à monter à bord en leur montrant de la toile et diverses bagatelles ; mais, se défiant sans doute de ces démonstrations amicales, ils se retirèrent.

Le maître du Zeehaan se rendit à bord du Heemskerk pour prendre les ordres de Tasman. Comme on avait reconnu les sondes le long du rivage, il fut décidé que l’on s’en approcherait le plus près possible, pour être plus à portée de lier quelque commerce avec les insulaires. On avait à peine pris cette résolution, que l’on aperçut sept pirogues se détacher du rivage et ramer vers les vaisseaux. L’une, dont l’avant était très-élevé et ayant à bord dix-sept hommes, s’approcha du Zeehaan, et un autre, portant treize hommes robustes et vigoureux, s’avança vers le Heemskerk, à la portée du trait ; ces deux pirogues se répondaient l’une à l’autre en un langage absolument inintelligible aux Hollandais, et paraissaient ne rien comprendre à ce que ceux-ci leur criaient dans la langue des habitans de l’île de Hoorn. On leur fit des signes d’amitié, on déploya des pièces d’étoffe blanche pour les engager à venir à bord, mais ils ne répondirent pas à ces invitations.

Cependant le maître du Zeehaan, qui était encore à bord du Heemskerk, dépêcha le patron du canot avec six hommes pour avertir son contre-maître de ne pas recevoir les Indiens en trop grand nombre, s’ils se présentaient pour monter sur le navire, de les bien observer et de se tenir sur ses gardes. Au moment où le canot partit pour rejoindre le Zeehaan, la pirogue qui était près du Heemskerk héla celle qui se tenait à l’arrière de l’autre vaisseau, en haussant ses pagaies, sans que les Hollandais pussent rien comprendre. Dès que le canot fut à une certaine distance, les pirogues qui se tenaient entre les deux vaisseaux coururent brusquement sur l’embarcation et s’en saisirent. Dans cette attaque, le patron du canot et deux matelots tombèrent par-dessus le bord, trois autres furent tués, et le quatrième fut blessé mortellement. Le patron et les deux matelots nagèrent vers le Heemskerk ; on mit à l’instant un canot à la mer, qui les prit et les ramena au vaisseau. Heureusement les Indiens abandonnèrent le canot dont ils s’étaient emparés ; ils emportèrent un des morts, dans leur pirogue, et jetèrent l’autre dans la mer. On fit feu sur eux de l’artillerie et de la mousqueterie ; mais ils étaient déjà trop éloignés pour qu’on pût les atteindre. En même temps le maître du Heemskerk vint avec la chaloupe bien armée pour ramener le canot du Zeehaan ; les Indiens y avaient laissé deux matelots, l’un mort, l’autre dangereusement blessé. Une si funeste aventure fit donner à cette baie le nom de Moordenaars bay (baie des Assassins). Tasman, persuadé qu’on ne pouvait rien espérer des habitans, appareilla pour sortir de cette baie. Vingt-deux pirogues se mirent bientôt à la poursuite des vaisseaux. On fit feu sur ces embarcations. Un des Indiens, qui tenait à la main une espèce de pavillon blanc, atteint d’une balle, tomba raide mort ; les autres, saisis d’épouvante, se hâtèrent de retourner à terre. Deux de ces pirogues étaient à la voile.

Tasman en faisant route à l’est-nord-est, se trouva de tous côtés environné de terres ; elles lui parurent fertiles et bien arrosées. Il éprouva beaucoup de difficultés à se dégager de ces côtes, parce que les vents forcés de l’ouest et l’agitation extrême de la mer rendaient la navigation périlleuse. Le 26 décembre les vents devenus plus maniables lui permirent de naviguer au nord-nord-ouest.

Le 4 janvier 1643 il se trouva par le travers de la pointe nord-ouest qu’il avait prolongée ; un courant violent qui portait à l’ouest, et la force des lames qui venaient du nord-est firent penser à Tasman que la mer était ouverte en cet endroit, et qu’il devait y trouver un passage. Il eut alors connaissance d’un groupe de petites îles qu’il appela de Drie Koninge (les trois Rois), du nom du jour. La principale gît par 34° 12′ sud et 191° 48′ est. Il envoya les canots armés y faire une descente, et voir si l’on pourrait s’y procurer quelques rafraîchissemens. Ils trouvèrent une source d’eau fraîche ; ils découvrirent une quarantaine d’Indiens qui, dans l’éloignement, leur parurent de haute taille. Ils étaient armés de lances et de casse-têtes. Ils crièrent d’une voix forte et rauque, sans qu’on pût rien comprendre de ce qu’ils voulaient. Les canots continuèrent de côtoyer le rivage. Ils aperçurent des Indiens, et virent des terres cultivées le long des bords d’un ruisseau. Leur dessein était d’y faire de l’eau, mais il ne leur fut pas possible d’aborder. Ces terres, partagées par de petits enclos, étaient couvertes d’une verdure riante, mais l’espèce de plante cultivée était inconnue. Ils virent aussi deux pirogues halées sur le rivage, au-dessus de la marque de l’eau dans le vif de la marée.

Tasman, supposant avec raison qu’il était le premier navigateur européen qui eût navigué dans ces parages, donna son nom au cap le plus occidental de la terre qu’il venait de découvrir. Il résolut de faire ensuite voile à l’est jusque par les 220° de longitude, ensuite au nord jusque par les 17° de latitude sud, et ensuite à l’ouest pour attérir aux îles des Cocos et de Hoorn, reconnues par Schouten, dans le dessein de s’y rafraîchir.

Le 6 janvier il vit une île dans le sud, à trois lieues de distance. Le 8, étant à 25° sud et 193° de longitude, les lames qui venaient du sud-est avertissaient qu’il ne fallait pas chercher la terre de ce côté. Le 19 on eut, par 22° 35′ sud et 205° 23′ de longitude, la vue d’une île de deux à trois lieues de circuit ; elle parut haute, escarpée et stérile. On l’appela Pylstaart eylandt (île des Plongeons), à cause du grand nombre de ces oiseaux qui voltigeaient le long de ses bords. Les vents de sud-est empêchèrent d’en ranger les côtes de près pour la mieux reconnaître. Le lendemain on eut connaissance de deux autres îles ; le 21 on approcha de la plus septentrionale, qui n’était pas très-élevée ; elle reçut le nom d’Amsterdam, l’autre celui de Middelbourg. Les habitans de la première apportèrent dans leurs pirogues des cochons, des poules, et diverses espèces de fruits. Ils se montrèrent civils, doux et obligeans, mais voleurs déterminés. Ils parurent toujours sans armes autour des vaisseaux.

Ces deux îles gisent entre elles nord-est et sud-ouest. La plus méridionale est la plus haute ; la plus septentrionale est basse et plate, à peu près comme la Hollande. À midi, une pirogue ayant trois hommes à bord rama vers les vaisseaux ; ces Indiens étaient de couleur bronzée, d’une taille au-dessus de la commune ; l’un avait ses cheveux coupés courts, les deux autres les portaient longs : ils étaient sans autre vêtement qu’une ceinture qui leur cachait les parties naturelles. Leur pirogue était étroite ; mais de l’avant et de l’arrière elle avait une espèce de tendelet. Leurs pagaies étaient de longueur ordinaire. Après leur avoir montré une pièce de toile, on la leur jeta. L’un d’eux sauta à l’instant dans la mer, resta quelques minutes sous l’eau, et reparut avec la toile. Rentré dans sa pirogue, il éleva plusieurs fois cette toile autour de sa tête comme un témoignage de reconnaissance ; la pirogue s’étant approchée des vaisseaux, on descendit aux Indiens, dans un filet, deux grands clous, un petit miroir, et quelques grains de rassade : ils y mirent en retour quelques-uns de leurs hameçons de nacre de perle délicatement travaillés. L’un d’eux se fit un collier de grains de passade, et suspendit les deux clous dans le milieu. On leur montra des cocos et des poules, et, d’après le vocabulaire de Schouten, on leur demanda des cochons, de l’eau, etc. ; mais ils ne comprirent rien à ce qu’on voulait leur dire. Ils montrèrent le rivage comme pour faire entendre qu’ils allaient chercher des rafraîchissemens, et ramèrent vers la terre.

Dans l’après-midi, un nombre considérable d’Indiens se montrèrent sur le rivage. L’un d’eux portait une espèce de pavillon blanc, qu’on regarda comme un signe de paix. Les vaisseaux y répondirent en arborant le pavillon blanc. À l’instant une pirogue se détacha du rivage et nagea vers les vaisseaux. Elle portait quatre Indiens de haute stature. Ils avaient le corps peint d’un blanc foncé depuis le nombril jusqu’au bas des cuisses ; des feuilles attachées ensemble formaient une espèce de guirlande autour de leur cou. Ils apportèrent avec eux une pièce d’étoffe faite d’écorce d’arbre, et un petit pavillon blanc qu’ils attachèrent à la proue de la chaloupe. Leur pirogue était d’une construction très-bien entendue ; ses côtés étaient ornés de divers coquillages et d’autres productions marines. Cette décoration fit présumer qu’elle appartenait au roi du pays. On fit présent au plus apparent de ces Indiens d’un petit miroir, d’un couteau, de grains de rassade et de quelques clous. On lui présenta un verre de vin ; il le but, ne crut pas devoir rendre le verre, et la pirogue se retira.

Bientôt après arrivèrent d’autres pirogues chargées de fruits qu’elles échangèrent pour des dons. Un vieillard, pour lequel les autres insulaires montraient de la considération, monta à bord et salua les Hollandais en se courbant de manière que sa tête touchait à ses pieds. On l’accueillit de la manière la plus affectueuse y et on lui fit plusieurs petits présens qui le comblèrent de joie. Vers le soir, une vingtaine de pirogues arrivèrent au vaisseau de Tasman ; elles apportèrent un cochon, des régimes de bananes, des cocos et des ignames. On leur donna en échange un plat de bois, du fil de laiton, et des grains de rassade. À l’approche de la nuit, tous ces Indiens se retirèrent, à l’exception d’un seul qui passa la nuit à bord.

Le lendemain les pirogues revinrent chargées de diverses provisions ;. elles avaient à bord de très-jolies femmes accompagnées de quelques vieilles. On observa qu’il manquait à celles-ci le petit doigt de chaque main ; mais on ne put jamais deviner la cause de cette étrange mutilation. Cependant le vieillard dont on a déjà parlé se rendit à bord avec un cochon et des corbeilles de fruit. En retour on lui fit présent d’une robe de satin, d’une chemise et d’un chapeau. À midi les vaisseaux étaient entourés de trente-deux petites pirogues, et d’une grande qui avait une voilure ; toutes ces pirogues étaient pleines d’hommes, de femmes, d’enfans. Les échanges continuèrent le reste du jour. Tasman fit présent d’une chemise et d’une culotte à l’un de ces Indiens, qui paraissait être un chef. L’Indien s’en revêtit à l’instant même ; il ne se lassait pas de s’admirer dans cette nouvelle parure. On joua devant ces insulaires quelques airs de trompettes ; le son éclatant de ces instrumens leur causa au moins autant de peur que de plaisir.

Le bon vieillard, qu’on avait comblé d’amitié et de présens, fit entendre qu’on pouvait remplir les barriques d’eau dans l’île, où l’on trouverait des ruisseaux limpides. En conséquence, Tasman envoya les canots à terre pour reconnaître un lieu propre à l’aiguade. On eut soin de les bien armer, quoique cette précaution semblât inutile d’après le caractère de douceur de ce peuple et les témoignages d’amitié qu’on en recevait.

Les canots allèrent descendre sur la pointe du nord-est de l’île, où les Hollandais ne tardèrent pas à découvrir trois sources ; ils y puisèrent l’eau avec des écales de cocos ; mais elle était si saumâtre, qu’on ne put en faire usage. Les insulaires invitèrent les Hollandais à les suivre un peu plus avant dans le pays. On ne tarda pas à arriver devant une maison de très-belle apparence. Les insulaires firent asseoir les Hollandais sur des nattes très-fines et nuancées de diverses couleurs ; puis on leur servit des rafraichissemens préparés à la manière du pays. Le soir les canots revinrent, apportant un gros cochon, quarante cochons de lait, soixante-dix poules, et une grande quantité de fruits et de racines qu’ils avaient eus pour des clous et un peu de toile.

Ces insulaires ne portent d’autres vêtemens qu’une pièce de natte qui les couvre de la ceinture aux genoux. Les hommes ont en général les cheveux longs, une barbe de quatre pouces de largeur, et des moustaches soigneusement relevées et longues d’un pouce. Ces peuples heureux paraissent vivre au sein de l’abondance et de la paix. Les Hollandais n’aperçurent dans l’île aucune espèce d’arme.

Le lendemain les canots retournèrent à terre à dessein d’y creuser un puits. Les insulaires s’empressèrent à donner aux Hollandais des marques du plaisir qu’ils éprouvaient de les voir chez eux. Ils leur demandèrent par signes d’où ils venaient, et où ils se proposaient d’aller. Quand on réussit à leur faire entendre qu’on tenait la mer déjà depuis cent jours, ils ne pouvaient revenir de leur surprise.

Le fond sur lequel on avait mouillé était de très-mauvaise tenue : les vents ayant fraîchi dans l’après-midi, les vaisseaux chassèrent sur leurs ancres, et furent forcés de gagner le large ; mais, vers le soir, ils rentrèrent dans la baie, et mouillèrent de nouveau leurs ancres.

Durant le séjour que l’on fit dans la baie, l’on découvrit deux petites îles dont les terres sont d’une médiocre élévation. Elles ont chacune environ une lieue et demie de tour. À la distance de six milles on en aperçut une autre dans le nord-ouest qui était fort grande, mais plus basse : à l’est on en reconnut trois petites, et encore deux au sud-est ; mais ces dernières étaient si rases, qu’elles ne semblaient pas s’élever au-dessus de la surface de la mer. Les courans ne se font presque pas sentir sur ces côtes. La marée monte à sept ou huit pieds de haut ; les vents soufflent généralement du sud-est et du sud-sud-est.

Le 25 janvier Tasman arriva par 22° 15′ sud, et 207° 27′ de longitude. Après avoir reconnu plusieurs petites îles, on vint mouiller à celle de Rotterdam. Les insulaires firent l’accueil le plus amical aux Hollandais ; ils ressemblaient par l’extérieur et par la caractère aux habitans de l’île d’Amsterdam. Ils s’adonnent à l’agriculture ; on vit dans leur île beaucoup de champs cultivés, de belles plantations d’arbres fruitiers très-bien alignés, des jardins très-bien entretenus ; de sorte que les Hollandais, qui se promenaient d’un bout de l’île à l’autre, se croyaient dans un pays de l’Europe civilisée. Ils rencontrèrent un réservoir d’eau fraîche d’un demi-mille de circonférence, et élevé de neuf pieds au-dessus du niveau de la mer. La surface de cette pièce d’eau était couverte d’un grand nombre de canards sauvages très-peu farouches. On fit de l’eau dans cette île, et on s’y pourvut de vivres. Les naturels la nomment Ana-Mocka.

L’Archipel dont elle fait partie a été visité plus tard par les navigateurs qui ont parcouru le grand Océan ; ayant trouvé chez ces habitans le caractère doux et obligeant auquel Tasman avait rendu témoignage, ils ont donné à ce groupe le nom d’îles des Amis. On a su par les relations modernes que les naturels nommaient Amsterdam Tonga-Tabou, et Middlebourg Eoa. Ces noms figurent avec raison sur les cartes.

Le 1er. février, Tasman appareilla de l’île de Rotterdam, et, faisant route au nord, il eut la vue de plusieurs îles : comme il était bien ravitaillé, il se proposa de suivre cette direction ainsi qu’il l’avait d’abord résolu, puis de se porter ensuite à l'ouest, sans passer près des îles des Cocos et de Hoorn. Mais cette détermination fut encore changée par la suite.

Le 6 février étant par 17° 19′ sud et 202° 43′ de longitude, Tasman se trouva engagé au milieu d’une vingtaine de petites îles entourées de récifs, de bancs de sable et de rochers. On les nomma îles du prince Guillaume, et Heemskerks-Droogte (Basses du Heemskerk). Deux jours après, le ciel se couvrit de nuages épais, la pluie tomba à torrens, les vents du nord-est et du nord-nord-est soufflèrent avec violence et par rafales. Ce temps orageux et sombre fit craindre à Tasman d’être plus à l’ouest qu’il ne le supposait, et de tomber au sud de la Nouvelle-Guinée, ou d’être jeté sur une côte inconnue, d’où il lui serait très-difficile de se relever ; en conséquence il prit le parti de gouverner au nord et au nord-est jusqu’à 5 ou sud, puis de courir à l’ouest sur la Nouvelle-Guinée.

Le temps fut pluvieux et embrumé jusqu’au 20 mars. Ce jour-là, étant par 5° 2′ sud, Tasman fut porté par les vents d’est alisés à la vue de terre. Il reconnut bientôt que c’étaient vingt-deux petites îles nommées sur les cartes Ontong-Java. Elles sont à quatre-vingt-dix milles à l’est de la Nouvelle-Guinée. Trois jours après il vit les îles de La Mark, au nombre d’une quinzaine, découvertes par Le Maire et Schouten. Elles sont habitées par des sauvages très-féroces. Ils sont très-noirs, et vont nus, à l’exception d’un pagne à la ceinture. Ils portent leurs cheveux, d’un noir de jais, relevés sur le sommet de la tête, à la mode des habitans de la baie des Assassins dans la Nouvelle-Zélande. Dans le voisinage des îles de La Mark, les vaisseaux de Tasman furent au moment de s’échouer sur un grand banc de sable ; heureusement un vent frais du sud les tira de ce danger. Le 29, ils passèrent devant les îles Vertes ; le 30, devant l’île Saint-Jean.

Le 1er. avril Tasman eut la vue de la Nouvelle-Guinée, et parvint à doubler le cap Sainte-Marie. Il est bon de faire observer à ce sujet que l’on a reconnu depuis que ce cap appartenait à la Nouvelle-Irlande, située à l’est de la Nouvelle-Guinée. Tasman prolongea toute la côte de ce dernier pays, en essayant de trouver un passage au sud. Le 12, on essuya plusieurs secousses de tremblement de terre dans la baie de Bonne-Espérance. Le choc que les bâtimens éprouvèrent réveilla les équipages. Tasman courut sur le pont, croyant que le Heemskerk avait touché ; mais ayant fait jeter la sonde, on ne trouva pas de fond. On ressentit ensuite plusieurs autres secousses ; mais elles furent bien moins fortes que la première.

Le 20, pendant la nuit, on était devant l’île Brûlante de Le Maire et Schouten, et on aperçut en effet des globes de feu qui sortaient du sommet d’une haute montagne. Lorsque l’on fut entre l’île où elle est située et le continent, on vit un grand nombre de feux sur le rivage et jusqu’à la moitié de la montagne, ce qui fit juger que cette île était très-peuplée. On fut retenu sur cette côte par les calmes, et l’on aperçut souvent des arbustes, des bambous, et de petits arbres que les rivières entraînaient dans la mer ; d’où l’on conclut que cette partie était bien arrosée, et que le sol devait être fertile.

Le 27 on crut être devant l’île de Moa ; mais c’était celle d’Iama, située un peu plus à l’est. On y trouva beaucoup de cocos et d’autres rafraîchissemens ; Les habitans sont absolument noirs, et répètent avec facilité les mots que l’on prononce devant eux ; ce qui fait présumer que leur langue est riche ; mais la prononciation en est très-difficile, parce qu’ils font un usage très-fréquent de la lettre r, qui se trouve jusqu’à deux ou trois fois dans un même mot. Le lendemain on jeta l’ancre devant l’île de Moa, où l’abondance des rafraichissemens fit supporter avec patience la contrariété d’y être retenu par le mauvais temps jusqu’au 6 de mai. Les Hollandais achetèrent par échange six mille cocos et cent sacs de bananes. Dans les premiers momens où ils trafiquaient avec ces insulaires, un matelot fut blessé par une flèche que ceux-ci tirèrent, soit à dessein, soit par inadvertance. Alors Tasman fit approcher ses bâtimens plus près de la côte ; ce qui épouvanta tellement les Indiens, qu’ils amenèrent volontairement à bord celui qui avait tiré la flèche, et le laissèrent à la merci des Hollandais. Tasman trouva ensuite les insulaires beaucoup plus traitables qu’avant l’accident. Les matelots, pour se procurer de nouveaux moyens d’échange, arrachèrent les cercles de fer des vieilles pièces à l’eau, y ajustèrent des manches de bois, firent à ces lames grossières un côté tranchant, et troquèrent avec les insulaires ces prétendus couteaux pour des fruits.

Il est vraisemblable que ces Indiens n’avaient pas oublié la leçon qu’ils reçurent de Le Maire et Schouten le 16 de juillet 1616. Comme ils s’étaient mal conduits envers les Hollandais, ceux-ci firent avancer le vaisseau près du rivage, et tirèrent une bordée au travers des bois. Les boulets se répandirent entre les arbres, et causèrent une telle frayeur aux nègres, qu’ils prirent aussitôt la fuite dans l’intérieur du pays, et n’osèrent plus se montrer avant d’avoir fait une pleine satisfaction du passé, et donné des otages. Alors le commerce avait été rétabli, et s’était fait paisiblement à la satisfaction réciproque des deux nations.

Le 12 mai, Tasman suivit la côte septentrionale de l’île de Guillaume Schouten, dont les habitans sont très-vifs et très-actifs. Le 18 il était à l’extrémité la plus occidentale de la Nouvelle-Guinée, où il éprouva des calmes, des temps variables, des vents contraires et des pluies abondantes. Il fit ensuite voile pour Ceram, et ayant parcouru toute l’étendue de mer qu’il avait été chargé de reconnaître, il ne s’occupa plus que de retourner à Batavia pour y rendre compte de ses découvertes.

Le 27 mai il passa les détroits de Bouron ou Bouton, et continua sa course jusqu’à Batavia, où il arriva le 15 de juin 1643. Tasman termina ainsi en dix mois un voyage qui donna les connaissances les plus claires et les plus exactes que l’on eut eues jusqu’alors sur les terres australes. La compagnie hollandaise des Indes orientales, ajoutent les historiens, jugea que ces découvertes étaient de la plus grande importance, et, afin qu’elles ne fussent pas perdues pour la postérité, elle a fait graver et tracer la carte de cette partie du monde sur le pavé de sa salle d’assemblée à Amsterdam. Cependant le même sentiment de crainte et de jalousie qui lui avait fait garder le silence sur les découvertes partielles de divers points de la Nouvelle-Hollande la portèrent à tenir secrets les détails de la navigation de Tasman. Il est, en effet, très-vraisemblable que la compagnie ne désirait pas que ce voyage fût publié. Il se passa un temps très-considérable sans qu’il fut donné au public ; enfin, dans les dernières années du dix-septième siècle, il en parut un extrait extrêmement succinct ; plusieurs années après, Valentyn, auquel on doit un très-bon ouvrage sur les possessions hollandaises dans les Indes orientales, publia un extrait plus ample du voyage de Tasman, accompagné de cartes et de vues.

Le succès du Voyage de Tasman engagea van Diemen à lui confier la conduite d’une seconde expédition, dont le but était de reconnaître avec plus d’exactitude toute la partie septentrionale de la Nouvelle-Hollande, déjà explorée en 1636, ainsi qu’on l’a vu plus haut. On lui donna pour ce second voyage deux vaisseaux, le Zeehaan et le Braak. Ses instructions, signées par van Diemen et les membres du conseil de la compagnie, et datées du 29 janvier 1644, portent qu’après avoir quitté le cap Falsé ou la pointe Turé, situe à la côte méridionale de la Nouvelle-Guinée par sud, il continuera de prolonger la côte à l’est jusqu’à sud, examinera si un passage ne conduit pas à la mer du sud, puis suivra la côte occidentale de la Nouvelle-Guinée jusqu’à 17° sud, pour s’assurer de sa direction. Ainsi, l’on ignorait alors l’existence du détroit découvert par Torrès en 1606.

Tasman devait aussi, en partant de la Terre de Witt, sur la côte nord-ouest de la Nouvelle-Hollande, aller le plus loin qu’il pourrait à l’est, pour compléter la découverte des terres d’Arnhem et de van Diemen du nord, et déterminer avec précision si ces terres n’appartenaient pas à une seule et même île.

On a lieu de présumer que Tasman remplit cette seconde mission avec la même habileté que la première ; mais l’on en ignore complétement les détails. On ne sait ni l’époque du départ de Tasman, ni celle de son retour. On est sûr qu’il a eu lieu ; parce que la carte de la Nouvelle-Hollande indique les noms qu’il a donnés à cette partie de sa découverte. Mais la jalousie qui avait fait supprimer par la compagnie hollandaise des Indes orientales tout ce qui concernait la découverte des côtes occidentales de la Nouvelle-Hollande, aura agi bien plus puissamment pour l’engager à cacher les détails relatifs à la partie de ce continent si voisine de leurs établissemens dans l’archipel méridional et oriental des Indes. Elle a si bien dérobé la connaissance de tous les renseignemens qui avaient rapport au second voyage de Tasman, qu’on ignore s’ils existent encore ou s’ils ont été anéantis.

Le journal du second voyage de Tasman n’ayant pas été publié, on en est réduit aux conjectures pour connaître la route qu’il suivit. Voici la plus vraisemblable. Après avoir suivi la côte de la Nouvelle-Guinée jusqu’au cap Falsé, il aura fait route au sud, et reconnu qu’il existait un large bras de mer entre cette île immense et la Nouvelle-Hollande ; ensuite, arrivé à la pointe la plus septentrionale de ce continent, il aura prolongé la côte orientale du golfe de Carpentarie jusqu’au fond, puis navigué vers l’ouest tout le long de la côte jusqu’au cap du nord-ouest de la Nouvelle-Hollande, conformément à ses instructions. Il sera ensuite allé au sud, en contournant la terre d’Eendraght, jusqu’au tropique du capricorne. La reconnaissance des côtes terminée à ce point, il sera sans doute retourné à Batavia.

Des fragmens épars et très-courts font voir que Tasman avait essayé d’établir des communications avec les naturels. Par 13° 8′ sud, il trouva le terrain extrêmement aride. Les habitans étaient farouches ; ils tiraient sur les Hollandais qui débarquaient, lors même que ceux-ci ne leur faisaient pas de mal. Un peu plus bas, les naturels du pays étaient noirs, avec les cheveux crépus. Ils allaient tout nus, et portaient pour armes des arcs, des flèches, des zagaies et des dards. Ils vinrent une fois au nombre de cinquante, complétement armés, pour surprendre les Hollandais, qui avaient mis à terre vingt-cinq hommes ; mais le feu du canon les effraya tellement, qu’ils prirent la fuite. Leurs pirogues sont faites d’écorce d’arbres. Ils n’ont pas de maisons. La côte est dangereuse ; le sol produit peu de plantes.

Par 19° 35′ sud, les naturels étaient très-nombreux ; ils jetèrent des pierres aux canots envoyés par les Hollandais à terre ; ils firent du feu et de la fumée tout le long de la côte. On supposa que c’était pour avertir leurs voisins que des étrangers étaient débarqués. Ils semblent vivre misérablement, vont nus, mangent des ignames et d’autres racines.

Le nom de Nouvelle-Hollande, appliqué au continent qui le porte aujourd’hui, est passé en usage ; mais il ne fut d’abord donné qu’aux parties situées à l’ouest de 140° de longitude orientale de Paris. Tout ce qui était à l’est portait le nom de Terre australe, ou grande Terre du sud.

Toutes les découvertes de Tasman ont été successivement reconnues par les navigateurs modernes. Ils ont conservé les noms qu’il avait donnés aux différens lieux qu’il avait vus le premier, et se sont fait un devoir de rendre justice à son exactitude et à son habileté. Il est avec Magellan, Mendaña, Quiros, Le Maire et Schouten, du petit nombre des voyageurs antérieurs à ceux du dix-huitième siècle, qui, par leurs courses dans le grand Océan, ont fait faire des progrès à la géographie.