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Astronomie populaire (Arago)/XIV/29

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 2p. 181-182).

CHAPITRE XXIX

le soleil est-il habité ?


Si l’on me posait simplement cette question : le Soleil est-il habité ? je répondrais que je n’en sais rien. Mais qu’on me demande si le Soleil peut être habité par des êtres organisés d’une manière analogue à ceux qui peuplent notre globe, et je n’hésiterai pas à faire une réponse affirmative. L’existence dans le Soleil d’un noyau central obscur enveloppé d’une atmosphère opaque, loin de laquelle se trouve seulement l’atmosphère lumineuse, ne s’oppose nullement, en effet, à une telle conception.

Herschel croyait que le Soleil est habité. Suivant lui, si la profondeur de l’atmosphère solaire dans laquelle s’opère la réaction chimique lumineuse s’élève à un million de lieues, il n’est pas nécessaire qu’en chaque point l’éclat surpasse celui d’une aurore boréale ordinaire. Les arguments sur lesquels le grand astronome se fonde pour prouver en tout cas que le noyau solaire peut ne pas être très-chaud malgré l’incandescence de l’atmosphère, ne sont ni les seuls ni les meilleurs qu’on pourrait invoquer. L’observation directe faite par le père Secchi de l’abaissement de température qu’éprouvent les points du disque solaire où apparaissent tes taches, est à cet égard plus importante que tous les raisonnements.

Le docteur Elliot avait soutenu, dès l’année 1787, que la lumière du Soleil provenait de ce qu’il appelait une aurore dense et universelle. Il pensait encore, avec d’anciens philosophes, que cet astre pouvait être habité. Lorsque le docteur fut traduit aux assises de Old Bailey pour avoir tué miss Boydell, ses amis, le docteur Simmons entre autres, soutinrent qu’il était fou et crurent le prouver surabondamment en montrant les écrits où les opinions que nous venons de rapporter se trouvaient développées. Les conceptions d’un fou sont aujourd’hui presque généralement adoptées. L’anecdote me paraît mériter de figurer dans l’histoire des sciences. Je l’emprunte à l’article Astronomie du docteur Brewster, inséré dans l’Encyclopédie d’Édimbourg.