Bakounine/Œuvres/TomeVI7

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Œuvres - Tome VI.
Circulaire. À mes amis d'Italie — AVANT-PROPOS


AVANT-PROPOS
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Dans le même numéro de La Roma del Popolo où il avait attaqué l’Internationale et la Commune de Paris (13 juillet 1871), Mazzini avait lancé l’idée de la réunion à Rome d’un Congrès ouvrier italien. Ce Congrès fut effectivement convoqué pour le 1er novembre suivant, par une Commission siégeant à Gênes (circulaire de convocation datée du 14 août).

Dans La Roma del Popolo du 12 octobre, Mazzini publia une lettre ouverte adressée « aux représentants des artisans dans le Congrès de Rome », Ai rappresentanti gli artigiani nel Congresso di Roma.

À ce moment, Bakounine travaillait à la rédaction du livre qui devait faire suite à sa Risposta d’un Internazionale a Mazzini, et qui porta ce titre : La Théologie Politique de Mazzini et l’Internationale ; il m’avait déjà envoyé, pour les imprimer, les premiers feuillets de ce nouveau manuscrit jusqu’au feuillet 49 inclusivement (17 octobre). Mais dès qu’il eut lu, dans La Roma del Popolo, la lettre de Mazzini aux représentants des ouvriers italiens, il interrompit sa besogne pour commencer, le 19 octobre au soir, une « circulaire en réponse à la circulaire de Mazzini ». Son calendrier-journal nous le montre occupé à la rédaction de cette circulaire jusqu’au 28 octobre ; voici le texte des notes qui y sont relatives, et qui nous font voir le brusque abandon du livre doctrinal en préparation contre Mazzini (qu’il appelle « 2e brochure mazzinienne » ou « brochure 2 Mazzini ») pour l’improvisation hâtive de cet appel à ses jeunes amis italiens[1], destiné à les mettre en garde contre la manœuvre de Mazzini et à les pousser à une action immédiate :

« Octobre 18. Brochure Mazzini 2. — 19. Brochure 2 Mazzini. (Soir) Circulaire en réponse à la circulaire de Mazzini. — 20. Circulaire contre Mazzini fini, demain considérants, — 21. Circulaire dicté à Émile [Bellerio]. — 22. Circulaire dicté à Émile ; envoyé première moitié circulaire à Paolo [un ami à Milan]. — 23. Écrit matin et soir, continuation de la circulaire. — 24. Envoyé à Milan encore quatre feuilles[2] de la circulaire ; écrit matin et soir. — 25. Envoyé à Milan quatre feuilles, jusqu’à la treizième inclusivement. — 26. Presque fin de la circulaire, matin et soir. — 27. Toujours épître aux amis contre Mazzini. — 28. Lettre de Burbero [Vincenzo Pezza, à Milan] ; fin de l’épître, en tout vingt-cinq feuilles, près de cent pages, envoyées à Burbero. »

Le Congrès « ouvrier » convoqué par la Commission de Gênes s’ouvrit à Rome le 1er novembre. Tous les délégués acceptèrent le programme mazzinien, à l’exception de trois opposants : Carlo Cafiero, qui représentait la Section de l’Internationale de Girgenti (Sicile), Alberto Tucci, qui représentait la section de l’Internationale de Naples, nouvellement reconstituée, et un délégué de Livourne, De Montel. Après avoir signé, le 3 novembre, une déclaration disant qu’ils regardaient les principes acceptés par le Congrès « comme contraires aux vrais intérêts de la classe ouvrière et au progrès de l’humanité », les trois opposants se retirèrent. Les délégués votèrent un Patto di Fratellanza, comme base d’une organisation à laquelle adhérèrent 135 sociétés ouvrières, et qui eut pour journal l’Emancipazione, rédigée à Rome par Maurizio Quadrio,

Le Congrès de Rome fit grand bruit en Italie ; il souleva les protestations des ouvriers socialistes et de la jeunesse révolutionnaire ; Garibaldi, pressé de s’expliquer au sujet des attaques dirigées par les mazziniens contre l’Internationale, répondit par sa fameuse lettre à Giorgio Pallavicini-Trivulzio, où il disait : « L’Internationale est le soleil de l’avenir » (L’Internazionale è il sole dell’avvenire).

Au moment même du Congrès avait paru une brochure de 15 pages, intitulée Agli Opérai delegati al Congresso di Roma, et signée Un gruppo d’Internazionali : elle avait été imprimée à Naples, et fut distribuée aux délégués. Dans La Roma del Popolo du 16 novembre, Mazzini, sans nommer Bakounine, le désigna comme l’auteur de cette brochure ; et, en effet, le contenu en avait été tiré du manuscrit expédié par Bakounine à Milan du 22 au 28 octobre. N’ayant pu me procurer ce document, qui est fort rare, je ne puis indiquer d’une façon précise quel en était le contenu ; mais, puisqu’il fut distribué entre le 1er et le 3 novembre, il est certain que seuls les premiers feuillets du manuscrit de Bakounine, ceux qui furent envoyés le 22 octobre, et peut-être aussi, en partie, ceux qui furent expédiés le 24 et le 25, purent être utilisés par le traducteur. D’après un renseignement recueilli par Max Nettlau, ce serait Palladino qui aurait traduit, et probablement adapté et abrégé, les parties du manuscrit publiées dans ces 15 pages d’impression.

Quatorze ans plus tard, en 1885, il a paru une traduction italienne complète du manuscrit d’octobre 1871, dans le Piccone, bulletin communiste anarchiste, à Naples, et, presque simultanément, dans le Paria, à Ancône, sous ce titre : Circolare. Ai miei amici d’Italia in occasione del Congresso operaio convocato a Roma pel I. Novembre 1871 dal Partito Mazziniano ; en 1886, cette traduction a été réimprimée en une brochure de 103 pages petit in-16, à Ancône, intitulée : Il Socialismo e Mazzini, Lettera agli amici d’Italia[3]. Une autre édition fut faite à Imola en 1901. En 1905, Fortunato Serantoni fit paraître à Florence une autre édition de la même traduction, précédée de la note suivante :

« Cet opuscule fut publié pour la première fois [en brochure] en 1887 (sic) à Milan[4]. Il a été réimprimé ensuite en éditions successives à Ancône en 1886 et à Imola en 1901, sans avoir jamais été poursuivi. C’est donc à titre de document historique… que nous présentons au public cette nouvelle édition. »

Une édition plus récente (qui s’intitule elle-même Cinquième édition) a été publiée à Rome en 1910, à la Libreria Editrice Sociologica (précédemment Casa Editrice Libraria « Il Pensiero »). C’est sur cette édition de 1910 que nous avons fait notre traduction.


J. G.

  1. Il avait reçu, le 16 septembre, une lettre, la première, de Carmelo Palladino, de Naples, ami de Cafiero et de Malatesta ; le 15 octobre, Vincenzo Pezza, de Milan, était venu le voir à Locarno, et une « entente complète » s’était établie entre eux.
  2. Ce sont, comme on le verra, des feuilles contenant quatre pages.
  3. Nettlau, Biographie, p. 627.
  4. Il est possible qu’il y ait eu en effet une première édition publiée à Milan : mais la date de « 1887 » ne peut pas être exacte, puisque l’édition de Milan, si elle a existé, doit avoir été antérieure à l’édition d’Ancône de 1886.