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Bible Sacy/II Rois

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ROIS.


LIVRE SECOND.
________




APRÈS la mort de Saül, David étant revenu à Siceleg, après la défaite des Amalécites, y avait passé deux jours.

2 Le troisième jour, il parut un homme qui venait du camp de Saül ; ses habits étaient déchirés, et il avait la tête pleine de poussière. S’étant approché de David, il le salua en se prosternant jusqu’en terre.

3 David lui dit : D’où venez-vous ? Je me suis sauvé, dit-il, de l’armée d’Israël.

4 David ajouta : Qu’est-il arrive ? dites-le-moi. Il lui répondit : La bataille s’est donnée : le peuple a fui ; plusieurs sont morts dans cette défaite : Saül même et Jonathas, son fils, y ont été tués.

5 David dit au jeune homme qui lui apportait cette nouvelle : Comment savez-vous que Saül et son fils Jonathas soient morts ?

6 Ce jeune homme lui répondit : Je me suis rencontré par hasard sur la montagne de Gelboé, et j’y ai trouvé Saül qui s’était jeté sur la pointe de sa lance. Et comme des chariots et des cavaliers s’approchaient,

7 il m’a aperçu en se tournant, et m’a appelé. Je lui ai répondu : Me voici.

8 Il m’a demandé qui j’étais ; et je lui ai dit que j’étais Amalécite.

9 Et il a ajouté : Approchez-vous de moi, et me tuez ; parce que je suis accablé de douleur, et que je suis encore plein de vie.

10 M’étant donc approché de lui, je l’ai tué : car je savais bien qu’il ne pouvait pas survivre à sa ruine. Et je lui ai ôté son diadème de dessus la tête, et le bracelet de son bras ; et je vous les ai apportés, à vous qui êtes mon seigneur.

11 Alors David prit ses vêtements et les déchira, et tous ceux qui étaient auprès de lui firent la même chose.

12 Ils s’abandonnèrent au deuil et aux larmes, et ils jeûnèrent jusqu’au soir, à cause de la mort de Saül et de Jonathas, son fils, et du malheur du peuple du Seigneur et de la maison d’Israël, dont un si grand nombre avait été passé au fil de l’épée.

13 David dit au jeune homme qui lui avait apporté cette nouvelle : D’où êtes-vous ? Il lui répondit : Je suis fils d’un étranger, d’un Amalécite.

14 David lui dit : Comment n’avez-vous point craint de mettre la main sur le christ du Seigneur, et de le tuer ?

15 Et David appelant un de ses gens, lui dit : Jetez-vous sur cet homme, et le tuez. Aussitôt il le frappa, et il mourut ;

16 et David ajouta : C’est vous seul qui êtes cause de votre mort ; parce que votre propre bouche a porté témoignage contre vous, en disant : C’est moi qui ai tué le christ du Seigneur.

17 Or David fit cette complainte sur la mort de Saül et de Jonathas, son fils,

18 (et il ordonna à ceux de Juda d’apprendre à leurs enfants à tirer de l’arc, comme il est écrit dans le livre des Justes ;) et il dit : Considérez, ô Israël ! qui sont ceux qui sont morts sur vos coteaux, percés de leurs plaies.

19 Les plus illustres d’Israël ont été tués sur vos montagnes. Comment ces vaillants hommes sont-ils tombés morts ?

20 N’annoncez point cette nouvelle dans Geth, ne la publiez point dans les places publiques d’Ascalon : de peur que les filles des Philistins ne s’en glorifient, et que les filles des incirconcis n’en triomphent de joie.

21 Montagnes de Gelboé, que la rosée et la pluie ne tombent jamais sur vous ; qu’il n’y ait point sur vos coteaux de champs dont on offre les prémices : parce que c’est là qu’a été jeté le bouclier des vaillants d’Israël, le bouclier de Saül, comme s’il n’eût point été sacré de l’huile sainte.

22 Jamais la flèche de Jonathas n’est retournée en arrière ; mais elle a toujours été teinte du sang des morts, du carnage des plus vaillants ; et l’épée de Saül n’a jamais été tirée en vain.

23 Saül et Jonathas, ces princes qui pendant leur vie étaient si aimables, et d’une si grande majesté, n’ont point été divisés dans leur mort même. Ils étaient plus vîtes que les aigles, et plus courageux que les lions.

24 Filles d’Israël, pleurez sur Saül, qui vous revêtait d’écarlate parmi la pompe et les délices, et qui vous donnait des ornements d’or pour vous parer.

25 Comment les forts sont-ils tombés dans le combat ? Comment Jonathas a-t-il été tué sur vos montagnes ?

26 Votre mort me perce de douleur, Jonathas, mon frère, le plus beau des princes, plus aimable que les plus aimables des femmes. Je vous aimais comme une mère aime son fils unique.

27 Comment les forts sont-ils tombés ? Comment la gloire des armes a-t-elle été anéantie ?



APRÈS cela David consulta le Seigneur, et lui dit : Irai-je dans quelqu’une des villes de Juda ? Le Seigneur lui dit : Allez. David lui demanda : Où irai-je ? Le Seigneur lui répondit : Allez à Hébron.

2 David y alla donc avec ses deux femmes, Achinoam de Jezrahel, et Abigaïl, veuve de Nabal du Carmel.

3 David y mena aussi les gens qui étaient avec lui, dont chacun y vint avec sa famille : et ils demeurèrent dans les villes d’Hébron.

4 Alors ceux de la tribu de Juda étant venus à Hébron, y sacrèrent David de l’huile sainte, afin qu’il régnât sur la maison de Juda. En même temps on rapporta à David, que ceux de Jabès en Galaad avaient enseveli Saul.

5 Il y envoya aussitôt des gens, et leur fit dire : Bénis soyez-vous du Seigneur, de ce que vous avez usé de cette humanité envers Saul, votre seigneur, et que vous l’avez enseveli.

6 Maintenant donc le Seigneur vous le rendra selon sa miséricorde et sa vérité ; et moi-même je vous récompenserai de cette action que vous avez faite.

7 Ne vous laissez point abattre, et soyez gens de cœur : car encore que Saül, votre roi, soit mort, néanmoins la maison de Juda m’a sacré pour être son roi.

8 D’un autre côté Abner, fils de Ner, général de l’armée de Saül, prit Isboseth, fils de Saül, et l’ayant fait mener dans tout le camp,

9 l’établit roi sur Galaad, sur Gessuri, sur Jezrahel, sur Ephraïm, sur Benjamin, et sur tout Israël.

10 Isboseth, fils de Saül, avait quarante ans lorsqu’il commença à régner sur Israël ; et il régna deux ans. Il n’y avait alors que la seule maison de Juda qui suivît David.

11 Et il demeura à Hébron sept ans et demi, n’étant roi que de la tribu de Juda.

12 Alors Abner, fils de Ner, sortit de son camp, et vint à Gabaon avec les gens d’Isboseth, fils de Saül.

13 Joab, fils de Sarvia, marcha contre lui avec les troupes de David, et ils se rencontrèrent près de la piscine de Gabaon. Les armées s’étant approchées, s’arrêtèrent l’une devant l’autre : l’une était d’un côté de la piscine, et l’autre de l’autre.

14 Alors Abner dit à Joab : Que quelques jeunes gens s’avancent, et qu’ils s’exercent devant nous. Joab répondit : Qu’ils s’avancent.

15 Aussitôt douze hommes de Benjamin du côté d’Isboseth, fils de Saül, parurent, et se présentèrent : il en vint aussi douze du côté de David.

16 Et chacun d’eux ayant pris par la tête celui qui se présenta devant lui, ils se passèrent tous l’épée au travers du corps, et tombèrent morts tous ensemble : et ce lieu s’appela, le Champ des vaillants, à Gabaon.

17 Il se donna aussitôt un rude combat ; et Abner fut défait avec ceux d’Israël par les troupes de David.

18 Les trois fils de Sarvia, Joab, Abisaï et Asaël, étaient dans ce combat. Or Asaël était extrêmement agile et léger à la course, en quoi il égalait les chevreuils qui sont dans les bois.

19 Il s’attacha donc à poursuivre Abner, sans se détourner ni à droite ni à gauche, et sans le quitter jamais.

20 Abner regardant derrière lui, lui dit : Etes-vous Asaël ? Il lui répondit : Oui, je le suis.

21 Abner lui dit : Allez ou à droite ou à gauche, et attaquez quelqu’un de ces jeunes gens, et prenez ses dépouilles. Mais Asaël ne voulut point cesser de le poursuivre.

22 Abner parla donc encore à Asaël, et lui dit : Retirez-vous, ne me suivez pas davantage, de peur que je ne sois obligé de vous percer de ma lance, et qu’après cela je ne puisse plus paraître devant Joab, votre frère.

23 Mais Asaël méprisa ce qu’il lui disait, et ne voulut point se détourner. Abner lui porta donc de l’arrière-main dans l’aine un coup de la pointe de sa lance, qui le perça, et le tua sur la place. Tous ceux qui passaient par ce lieu où Asaël était tombé mort, s’arrêtaient.

24 Mais Joab et Abisaï continuant à poursuivre Abner qui s’enfuyait, le soleil se coucha lorsqu’ils arrivèrent à la colline de l’Aqueduc, qui est vis-à-vis de la vallée, au chemin du désert de Gabaon :

25 et les enfants de Benjamin se rallièrent auprès d’Abner ; et ayant fait un gros, s’arrêtèrent sur le sommet d’une éminence.

26 Alors Abner cria à Joab : Votre épée ne se rassasiera-t-elle donc point de sang et de meurtres ? Ignorez-vous qu’il est dangereux de jeter son ennemi dans le désespoir ? N’est-il pas temps enfin de dire au peuple qu’il cesse de poursuivre ses frères ?

27 Joab lui répondit : Vive le Seigneur ! si vous l’eussiez plus tôt dit, le peuple se fût retiré dès le matin, et il eût cessé de poursuivre ses frères.

28 Joab fit donc sonner la retraite ; et toute l’armée s’arrêta, et cessa de poursuivre Israël, et de le combattre.

29 Abner avec ses gens marcha par la campagne toute cette nuit ; et ayant passé le Jourdain et traversé tout Béthoron, il revint au camp.

30 Joab ayant cessé de poursuivre Abner, et étant revenu, assembla toute l’armée ; et on ne trouva de morts du côté de David, que dix-neuf hommes, sans compter Asaël.

31 Mais les gens de David tuèrent de Benjamin et de ceux qui étaient avec Abner, trois cent soixante hommes qui moururent en cette défaite.

32 On emporta le corps d’Asaël, et on le mit dans le sépulcre de son père à Bethléhem. Et Joab ayant marché toute la nuit avec les gens qui étaient avec lui, arriva à Hébron au point du jour.



IL se fit donc une longue guerre entre la maison de Saül et la maison de David ; David s’avançant toujours et se fortifiant de plus en plus, et la maison de Saül au contraire s’affaiblissant de jour en jour.

2 Pendant que David était à Hébron, il eut plusieurs enfants : L’aîné fut Amnon, qu’il eut d’Achinoam de Jezrahel ;

3 le second, Chéléab, qu’il eut d’Abigaïl, veuve de Nabal du Carmel ; le troisième, Absalom, qu’il eut de Maacha, fille de Tholmaï, roi de Gessur ;

4 le quatrième, Adonias, fils d’Haggith ; le cinquième, Saphathia, fils d’Abital ;

5 le sixième, Jethraam, fils d’Egla, femme de David. David eut ces six enfants à Hébron.

6 La maison de Saül était donc en guerre avec la maison de David, et Abner, fils de Ner, était le chef de la maison de Saül.

7 Or Saül avait eu une concubine nommée Respha, fille d’Aïa. Et Isboseth dit à Abner :

8 Pourquoi vous êtes-vous approché de la concubine de mon père ? Abner, étrangement irrité de ce reproche, lui répondit : Suis-je un homme à être traité comme un chien, moi qui me suis déclaré aujourd’hui contre Juda pour soutenir dans sa chute la maison de Saül, votre père, ses frères et ses proches, et qui ne vous ai point livré entre les mains de David ? Et après cela vous venez aujourd’hui chercher querelle avec moi pour une femme !

9 Que Dieu traite Abner avec toute sa séverité, si je ne procure à David ce que le Seigneur a juré en sa faveur,

10 en faisant que le royaume soit transféré de la maison de Saül en la sienne, et que le trône de David soit élevé sur Israël comme sur Juda, depuis Dan jusqu’à Bersabée.

11 Isboseth n’osa lui répondre, parce qu’il le craignait.

12 Abner envoya donc des courriers à David pour lui dire de sa part : A qui appartient tout ce pays, sinon à vous ? et pour ajouter : Si vous voulez me donner part à votre amitié, je prendrai votre parti, et je ferai que tout Israël se réunira à vous.

13 David lui répondit : Je le veux bien : je ferai amitié avec vous ; mais je vous demande une chose : Vous ne me verrez point que vous ne m’ayez ramené auparavant Michol, fille de Saül : à cette condition vous pourrez venir et me voir.

14 David ensuite envoya des courriers à Isboseth, fils de Saül, et lui fit dire : Rendez-moi Michol, ma femme, que j’ai épousée pour cent prépuces de Philistins.

15 Isboseth l’envoya querir aussitôt, et l’ôta à son mari Phaltiel, fils de Laïs.

16 Son mari la suivait en pleurant jusqu’à Bahurim. Et Abner lui dit : Allez, retournez-vous-en. Et il s’en retourna.

17 Après cela Abner parla aux anciens d’Israël, et leur dit : Il y a déjà longtemps que vous souhaitiez d’avoir David pour roi.

18 Faites-le donc maintenant ; puisque le Seigneur a parlé à David, et a dit de lui : Je sauverai par David, mon serviteur, Israël, mon peuple, de la main des Philistins, et de tous ses ennemis.

19 Abner parla aussi à ceux de Benjamin ; et il alla trouver David à Hébron, pour lui dire tout ce qu’Israël et tous ceux de la tribu de Benjamin avaient résolu.

20 Il y arriva accompagné de vingt hommes. David lui fit un festin, et à ceux qui étaient venus avec lui.

21 Alors Abner dit à David : Je vais rassembler tout Israël, afin qu’il vous reconnaisse, comme je fais, pour seigneur et pour roi ; qu’ils fassent tous alliance avec vous, et que vous régniez sur eux tous comme vous le désirez. David ayant donc reconduit Abner, et Abner s’en étant allé en paix,

22 les gens de David survinrent aussitôt avec Joab, revenant de tailler en pièces des brigands, et rapportant un très-grand butin. Abner n’était plus à Hébron avec David, parce qu’il avait déjà pris congé de lui, et s’en était retourné en paix,

23 lorsque Joab arriva avec toute l’armée. Joab apprit donc de quelqu’un, qu’Abner, fils de Ner, était venu parler au roi ; que le roi l’avait renvoyé, et qu’il s’en était retourné en paix.

24 Joab aussitôt alla trouver le roi, et lui dit : Qu’avez-vous fait ? Abner vient de venir vers vous ; pourquoi l’avez-vous renvoyé, et l’avez-vous laissé aller ?

25 Ignorez-vous quel est Abner, fils de Ner, et qu’il n’est venu ici que pour vous tromper, pour reconnaître toutes vos démarches, et pour savoir tout ce que vous faites ?

26 Joab étant donc sorti d’avec David, envoya des courriers après Abner, et le fit revenir de la citerne de Sira, sans que David le sût.

27 Et lorsqu’il fut arrivé à Hébron, Joab le tira à part au milieu de la porte pour lui parler en trahison, et il le frappa dans l’aine, et le tua pour venger la mort de son frère Asaël.

28 David ayant su ce qui s’était passé, dit : Je suis innocent pour jamais devant le Seigneur, moi et mon royaume, du sang d’Abner, fils de Ner.

29 Que son sang retombe sur Joab et sur la maison de son père ; et qu’il y ait à jamais dans la maison de Joab des gens qui souffrent un flux honteux, qui soient lépreux, qui tiennent le fuseau, qui tombent sous l’épée, et qui demandent leur pain.

30 Joab et Abisaï, son frère, tuèrent donc Abner ; parce qu’il avait tué Asaël, leur frère, dans le combat à Gabaon.

31 Alors David dit à Joab, et à tout le peuple qui était avec lui : Déchirez vos vêtements, couvrez-vous de sacs, et pleurez aux funérailles d’Abner. Et le roi David marchait après le cercueil.

32 Après qu’Abner eut été enseveli à Hébron, le roi David éleva sa voix, et pleura sur son tombeau, tout le peuple pleurant aussi avec lui.

33 Et le roi témoignant son deuil par ses larmes, dit ces paroles : Abner n’est point mort comme les lâches ont coutume de mourir.

34 Vos mains n’ont point été liées, et vos pieds n’ont point été chargés de fers ; mais vous êtes mort comme les hommes de cœur, qui tombent devant les enfants d’iniquité. Tout le peuple à ces mots redoubla ses larmes.

35 Et tous étant revenus pour manger avec David, lorsqu’il était encore grand jour, David jura et dit : Que Dieu me traite avec toute sa sévérité, si je prends une bouchée de pain, ou quoi que ce soit, avant que le soleil soit couché !

36 Tout le peuple entendit ces paroles ; et tout ce que le roi avait fait, lui plut extrêmement.

37 Et le peuple et tout Israël fut persuadé ce jour-là, que le roi n’avait eu aucune part à l’assassinat d’Abner, fils de Ner.

38 Le roi dit aussi à ses serviteurs : Ignorez-vous que c’est un prince et un grand prince qui est mort aujourd’hui dans Israël ?

39 Pour moi je ne suis roi que par l’onction, et encore peu affermi ; et ces gens-ci, ces enfants de Sarvia, sont trop violents pour moi. Que le Seigneur traite celui qui fait le mal selon sa malice !



ISBOSETH, fils de Saül, ayant appris qu’Abner avait été tué à Hébron, perdit courage, et tout Israël se trouva dans un grand trouble.

2 Isboseth avait à son service deux chefs de voleurs, dont l’un s’appelait Baana, l’autre Réchab : ils étaient fils de Remmon de Béroth, de la tribu de Benjamin ; car Béroth a été autrefois censée de Benjamin.

3 Mais les habitants de cette ville s’enfuirent à Gethaïm, où ils ont demeuré comme étrangers jusqu’aujourd’hui.

4 Or Jonathas, fils de Saül, avait un fils qui était incommodé des deux jambes : car il n’avait que cinq ans, lorsque la nouvelle vint de Jezrahel de la mort de Saül et de Jonathas ; sa nourrice l’ayant pris entre ses bras, s’enfuit ; et comme elle fuyait avec précipitation, l’enfant tomba, et en fut boiteux. Il s’appelait Miphiboseth.

5 Réchab et Baana, fils de Remmon de Béroth, entrèrent dans la maison d’Isboseth, lorsqu’il dormait sur son lit, vers le midi en la plus grande chaleur du jour. La femme qui gardait la porte de la maison s’était endormie en nettoyant du blé.

6 Ils vinrent donc secrètement dans la maison, en prenant des épis de blé, et ils frappèrent Isboseth dans l’aine, et s’enfuirent.

7 Car étant entrés dans sa maison, et l’ayant trouvé dans sa chambre qui dormait sur son lit, ils le tuèrent, prirent sa tête, et ayant marché toute la nuit par le chemin du désert,

8 ils la présentèrent à David dans Hébron, et lui dirent : Voici la tête d’Isboseth, fils de Saül, votre ennemi, qui cherchait à vous ôter la vie ; et le Seigneur venge aujourd’hui mon seigneur et mon roi, de Saül et de sa race.

9 David répondit à Réchab et à Baana, son frère, fils de Remmon de Béroth : Vive le Seigneur, qui a délivré mon âme de tous les maux dont elle était pressée !

10 Si j’ai fait arrêter et tuer à Siceleg, celui qui vint me dire que Saül était mort, lui qui crut m’apporter une bonne nouvelle, et qui en attendait une grande récompense ;

11 combien plus maintenant que des méchants ont tué un homme innocent dans sa maison, sur son lit, vengerai-je son sang sur vous qui l’avez répandu de vos mains, et vous exterminerai-je de dessus la terre !

12 David commanda donc à ses gens de les tuer ; et ils les tuèrent : et leur ayant coupé les mains et les pieds, ils les pendirent près la piscine d’Hébron. Ils prirent aussi la tête d’Isboseth, et l’ensevelirent dans le sépulcre d’Abner, à Hébron.



ALORS toutes les tribus d’Israël vinrent trouver David à Hébron, et lui dirent : Nous sommes vos os et votre chair.

2 Il y a déjà longtemps que lorsque Saül était notre roi, vous meniez Israël au combat, et vous l’en rameniez ; et le Seigneur vous a dit : C’est vous qui serez le pasteur d’Israël, mon peuple ; c’est vous qui serez le chef d’Israël.

3 Les anciens d’Israël vinrent aussi trouver David à Hébron. David y fit alliance avec eux devant le Seigneur ; et ils le sacrèrent roi sur Israël.

4 David avait trente ans lorsqu’il commença à régner, et il régna quarante ans.

5 Il régna sept ans et demi à Hébron sur Juda, et trente-trois dans Jérusalem sur Juda et sur tout Israël.

6 Alors le roi accompagné de tous ceux qui étaient avec lui, marcha vers Jérusalem contre les Jébuséens qui y habitaient. Les assiégés disaient à David, Vous n’entrerez point ici que vous n’en ayez chassé les aveugles et les boiteux ; comme pour lui dire qu’il n’y entrerait jamais.

7 Néanmoins David prit la forteresse de Sion, qui est appelée aujourd’hui, la Ville de David.

8 Car David avait proposé alors une récompense pour celui qui battrait les Jébuséens, qui pourrait gagner le haut de la forteresse, et qui chasserait les aveugles et les boiteux, ennemis de David. C’est pourquoi on dit en proverbe : Les aveugles et les boiteux n’entreront point dans le temple.

9 David prit son logement dans la forteresse, et il l’appela, la Ville de David : il la fit environner depuis Mello, et fit bâtir au dedans.

10 David s’avançait toujours et croissait de plus en plus ; et le Seigneur, le Dieu des armées, était avec lui.

11 Hiram, roi de Tyr, envoya aussi des ambassadeurs à David, avec du bois de cèdre, des charpentiers et des tailleurs de pierres ; et ils bâtirent la maison de David.

12 Et David reconnut que le Seigneur l’avait confirmé roi sur Israël, et qu’il l’avait élevé au gouvernement d’Israël, son peuple.

13 Il prit donc encore des concubines et des femmes de Jérusalem, après qu’il y fut venu d’Hébron ; et il en eut d’autres fils et d’autres filles.

14 Voici le nom des fils qu’il eut à Jérusalem : Samua, Sobab, Nathan, Salomon,

15 Jéhahar, Elisua, Eliphaleth, Nogé, Népheg,

16 Japhia, Elisama, Elioda et Eliphaleth.

17 Les Philistins ayant appris que David avait été sacré roi sur Israël, s’assemblèrent tous pour lui faire la guerre. David l’ayant su, se retira dans un lieu fort.

18 Les Philistins vinrent se répandre dans la vallée de Raphaïm.

19 Et David consulta le Seigneur, et lui dit : Marcherai-je contre les Philistins, et les livrerez-vous entre mes mains ? Le Seigneur lui dit : Allez : car je les livrerai assurément entre vos mains.

20 David vint donc à Baal-Pharasim, où il défit les Philistins, et il dit : Le Seigneur a dispersé mes ennemis de devant moi, comme les eaux qui se dispersent et se perdent dans la campagne. C’est pour cette raison que ce lieu fut appelé Baal-Pharasim, c’est-à-dire, la plaine des divisions.

21 Les Philistins laissèrent là leurs idoles, que David et ses gens emportèrent.

22 Les Philistins revinrent encore une autre fois, et ils se répandirent dans la vallée de Raphaïm.

23 David consulta le Seigneur, et lui dit : Irai-je contre les Philistins, et les livrerez-vous entre mes mains ? Le Seigneur lui répondit : N’allez point droit à eux ; mais tournez derrière leur camp, jusqu’à ce que vous soyez venu vis-à-vis des poiriers.

24 Et lorsque vous entendrez au haut des poiriers comme le bruit de quelqu’un qui marche, vous commencerez à combattre ; parce que le Seigneur marchera alors devant vous pour combattre l’armée des Philistins.

25 David fit donc ce que le Seigneur lui avait commandé ; et il battit et poursuivit les Philistins depuis Gabaa jusqu’à Gézer.



DAVID assembla encore toute l’élite d’Israël, au nombre de trente mille hommes,

2 et s’en alla accompagné de tous ceux de la tribu de Juda qui se trouvèrent avec lui, pour amener l’arche de Dieu, en présence de laquelle est invoqué le nom du Seigneur des armées, qui est assis au-dessus d’elle sur les chérubins.

3 Ils mirent l’arche de Dieu sur un chariot tout neuf, et l’emmenèrent de la maison d’Abinadab, habitant de Gabaa. Oza et Ahio, fils d’Abinadab, conduisaient ce chariot tout neuf.

4 Et l’arche ayant été tirée de la maison d’Abinadab qui la gardait à Gabaa, Ahio la conduisait en marchant devant.

5 Cependant David et tout Israël jouaient devant le Seigneur de toutes sortes d’instruments de musique, de la harpe, de la lyre, du tambour, des sistres et des timbales.

6 Mais lorsqu’on fut arrivé près de l’aire de Nachon, Oza porta la main à l’arche de Dieu, et la retint ; parce que les bœufs regimbaient, et l’avaient fait pencher.

7 En même temps la colère du Seigneur s’alluma contre Oza, et il le frappa de mort à cause de sa témérité : et Oza tomba mort sur la place devant l’arche de Dieu.

8 David fut affligé de ce que le Seigneur avait frappé Oza ; et ce lieu fut appelé, le Châtiment d’Oza, qui est le nom qu’il garde encore aujourd’hui.

9 Alors David eut une grande crainte du Seigneur, et il dit : Comment l’arche du Seigneur viendra-t-elle chez moi ?

10 Et il ne voulut pas que l’on amenât l’arche du Seigneur chez lui en la ville de David ; mais il la fit entrer dans la maison d’Obédédom de Geth.

11 L’arche du Seigneur demeura donc trois mois dans la maison d’Obédédom de Geth ; et le Seigneur le bénit, lui et toute sa maison.

12 On vint dire ensuite au roi David, que le Seigneur avait béni Obédédom et tout ce qui lui appartenait, à cause de l’arche de Dieu. David s’en alla donc en la maison d’Obédédom, et il en amena l’arche de Dieu en la ville de David avec une grande joie. Il y avait toujours auprès de David sept chœurs, et un veau pour servir de victime.

13 Et lorsque ceux qui portaient l’arche avaient fait six pas, il immolait un bœuf et un bélier.

14 David revêtu d’un éphod de lin, dansait devant l’arche de toute sa force ;

15 et étant accompagne de toute la maison d’Israël, il conduisait l’arche de l’alliance du Seigneur, avec des cris de joie, et au son des trompettes.

16 Lorsque l’arche du Seigneur fut entrée dans la ville de David, Michol, fille de Saül, regardant par une fenêtre, vit le roi David qui dansait et qui sautait devant le Seigneur ; et elle s’en moqua en elle-même.

17 Les Lévites firent donc entrer l’arche du Seigneur dans la tente que David avait fait dresser, et ils la posèrent au milieu, en la place qui lui avait été destinée ; et David offrit des holocaustes et des sacrifices d’action de grâces devant l’arche du Seigneur.

18 Lorsqu’il eut achevé d’offrir les holocaustes et les sacrifices d’action de grâces, il bénit le peuple au nom du Seigneur des armées.

19 Et il donna à toute cette troupe d’Israélites, tant hommes que femmes, à chacun un pain en façon de gâteau, un morceau de bœuf rôti, et un tourteau de farine cuite avec l’huile : et chacun s’en retourna chez soi.

20 David se retira aussi en son palais, pour faire part à sa maison de la bénédiction de ce jour. Et Michol, fille de Saül, étant venue au-devant de David, lui dit : Que le roi d’Israël a eu de gloire aujourd’hui, en se découvrant devant les servantes de ses sujets, et paraissant nu comme ferait un bouffon !

21 David répondit à Michol : Oui, devant le Seigneur, qui m’a choisi plutôt que votre père et que toute sa maison, et qui m’a commandé d’être chef de son peuple dans Israël,

22 je danserai, et je paraîtrai vil encore plus que je n’ai paru : je serai méprisable à mes yeux, et par là j’aurai plus de gloire devant les servantes dont vous parlez.

23 C’est pour cette raison que Michol, fille de Saül, n’eut point d’enfants jusqu’à sa mort.



LE roi s’étant établi dans sa maison, et le Seigneur lui ayant donné la paix de tous côtés avec tous ses ennemis,

2 il dit au prophète Nathan : Ne voyez-vous pas que je demeure dans une maison de cèdre, et que l’arche de Dieu ne loge que sous des peaux ?

3 Nathan dit au roi : Allez, faites tout ce que vous avez dans le cœur ; parce que le Seigneur est avec vous.

4 Mais la nuit suivante le Seigneur parla à Nathan, et lui dit :

5 Allez vers mon serviteur David, et dites-lui : Voici ce que dit le Seigneur : Me bâtirez-vous une maison afin que j’y habite ?

6 Car depuis que j’ai tiré de l’Egypte les enfants d’Israël jusqu’aujourd’hui, je n’ai eu aucune maison ; mais j’ai toujours été sous des pavillons et sous des tentes.

7 Dans tous les lieux où j’ai passé avec tous les enfants d’Israël, quand j’ai donné ordre à quelqu’une des tribus de conduire mon peuple, lui ai-je dit : Pourquoi ne m’avez-vous point bâti une maison de cèdre ?

8 Maintenant vous direz donc ceci à mon serviteur David : Voici ce que dit le Seigneur des armées : Je vous ai choisi lorsque vous meniez paître les troupeaux, afin que vous fussiez le chef d’Israël, mon peuple.

9 J’ai été avec vous partout où vous avez été ; j’ai extermine tous vos ennemis devant vous ; et j’ai rendu votre nom illustre comme est celui des grands de la terre.

10 Je mettrai Israël, mon peuple, dans un lieu stable : je l’y établirai, et il y demeurera ferme sans être plus agité de trouble ; et les enfants d’iniquité n’entreprendront plus de l’affliger comme ils ont fait auparavant,

11 depuis le temps que j’ai établi des juges sur Israël, mon peuple ; et je vous donnerai la paix avec tous vos ennemis. De plus, le Seigneur vous promet qu’il fera lui-même votre maison.

12 Et lorsque vos jours seront accomplis, et que vous vous serez endormi avec vos pères, je mettrai sur votre trône après vous votre fils qui sortira de vous, et j’affermirai son règne.

13 Ce sera lui qui bâtira une maison à mon nom ; et j’établirai pour jamais le trône de son royaume.

14 Je serai son père, et il sera mon fils ; et s’il commet quelque chose d’injuste, je le châtierai avec la verge dont on châtie les hommes, et je le punirai des plaies dont on punit les enfants des hommes.

15 Mais je ne retirerai point ma miséricorde de lui, comme je l’ai retirée de Saül, que j’ai rejeté de devant ma face.

16 Votre maison sera stable, vous verrez votre royaume subsister éternellement, et votre trône s’affermira pour jamais.

17 Nathan parla donc à David, et lui rapporta tout ce que Dieu lui avait dit, et tout ce qu’il lui avait fait voir sur son sujet.

18 Alors le roi David alla se présenter devant le Seigneur, et dit : Qui suis-je, ô Seigneur mon Dieu ! et quelle est ma maison, pour que vous m’ayez élevé à l’état où je me trouve aujourd’hui ?

19 Mais cela même a paru peu de chose à vos yeux, ô Seigneur mon Dieu ! si vous n’assuriez encore votre serviteur de l’établissement de sa maison pour les siècles à venir : car c’est là la loi des enfants d’Adam, ô Seigneur mon Dieu !

20 Après cela que peut vous dire David pour vous exprimer son ressentiment ? Car vous connaissez votre serviteur, ô Seigneur mon Dieu !

21 Vous avez fait toutes ces grandes merveilles pour accomplir votre parole, selon qu’il vous a plu ; et vous les avez même fait connaître à votre serviteur.

22 Je reconnais donc, ô Seigneur mon Dieu ! par toutes les choses que nous avons entendues de nos oreilles, que vous êtes infiniment grand ; qu’il n’y a rien qui vous soit semblable, et que hors vous il n’y a point de Dieu.

23 Y a-t-il encore sur toute la terre une nation comme Israël, votre peuple, que vous avez vous-même été racheter pour en faire votre peuple ; où vous avez rendu votre nom célèbre par les merveilles et les prodiges terribles que vous avez faits dans votre terre pour chasser les nations et leurs dieux de devant votre peuple que vous avez racheté de l’Egypte ?

24 Car vous avez choisi Israël pour être éternellement votre peuple ; et vous êtes devenu leur Dieu, ô Seigneur mon Dieu !

25 Maintenant donc, ô Seigneur mon Dieu ! accomplissez pour jamais la parole que vous avez prononcée sur votre serviteur et sur sa maison, et exécutez ce que vous avez dit :

26 afin que votre nom soit éternellement glorifié, et que l’on dise, Le Seigneur des armées est le Dieu d’Israël ; et que la maison de votre serviteur David demeure stable devant le Seigneur.

27 Vous avez révélé à votre serviteur, ô Seigneur des armées ! ô Dieu d’Israël ! que vous vouliez lui établir sa maison : c’est pour cela que votre serviteur a trouvé son cœur pour vous adresser cette prière.

28 Seigneur mon Dieu ! vous êtes Dieu, et vos paroles se trouveront véritables : car vous avez fait à votre serviteur ces grandes promesses.

29 Commencez donc, et bénissez la maison de votre serviteur, afin qu’elle subsiste éternellement devant vous ; parce que c’est vous, ô Seigneur mon Dieu ! qui avez parlé, et qui répandrez pour jamais votre bénédiction sur la maison de votre serviteur.



APRÈS cela David battit les Philistins, les humilia, et affranchit Israël de la servitude du tribut qu’il leur payait.

2 Il défit aussi les Moabites ; et les ayant fait coucher par terre, il les fit mesurer avec des cordes, comme on aurait mesuré un champ, et il en fit deux parts, dont il destina l’une à la mort, et l’autre à la vie. Et Moab fut assujetti à David, et lui paya tribut.

3 David défit aussi Adarézer, fils de Rohob, roi de Soba, lorsqu’il marcha pour étendre sa domination jusque sur l’Euphrate.

4 David lui prit dix-sept cents chevaux, et vingt mille hommes de pied ; coupa les nerfs des jambes à tous les chevaux des chariots, et n’en réserva que pour cent chariots.

5 Les Syriens de Damas vinrent au secours d’Adarézer, roi de Soba ; et David en tua vingt-deux mille.

6 Il mit des garnisons dans la Syrie de Damas : la Syrie lui fut assujettie, et lui paya tribut ; et le Seigneurie conserva dans toutes les guerres qu’il entreprit.

7 Il prit les armes d’or des serviteurs d’Adarézer, et les porta à Jérusalem.

8 Il enleva encore une prodigieuse quantité d’airain des villes de Bété et de Béroth, qui appartenaient à Adarézer.

9 Thoü, roi d’Emath, ayant appris que David avait défait toutes les troupes d’Adarézer,

10 envoya Joram, son fils, lui faire compliment, pour lui témoigner sa joie, et lui rendre grâces de ce qu’il avait vaincu Adarézer, et avait taillé son armée en pièces. Car Thoü était ennemi d’Adarézer. Joram apporta avec lui des vases d’or, d’argent et d’airain,

11 que le roi David consacra au Seigneur, avec ce qu’il lui avait déjà consacré d’argent et d’or pris sur toutes les nations qu’il s’était assujetties ;

12 sur la Syrie, sur Moab, sur les Ammonites, sur les Philistins, sur Amalec, avec les dépouilles d’Adarézer, fils de Rohob et roi de Soba.

13 David s’acquit aussi un grand nom dans la vallée des Salines, où il tailla en pièces dix-huit mille hommes, lorsqu’il retournait après avoir pris la Syrie.

14 Il mit de plus des officiers et des garnisons dans l’Idumée ; et toute l’Idumée lui fut assujettie. Le Seigneur le conserva dans toutes les guerres qu’il entreprit.

15 David régna donc sur tout Israël ; et dans les jugements qu’il rendait, il faisait justice à tout son peuple.

16 Joab, fils de Sarvia, était général de ses armées ; et Josaphat, fils d’Ahilud, avait la charge des requêtes.

17 Sadoc, fils d’Achitob, et Achimélech, fils d’Abiathar, étaient grands prêtres ; Saraïas était secrétaire.

18 Banaïas, fils de Joïada, commandait les Céréthiens et les Phéléthiens ; et les enfants de David étaient prêtres.



DAVID dit alors : N’est-il point resté quelqu’un de la maison de Saül, à qui je puisse faire du bien à cause de Jonathas ?

2 Or il y avait un serviteur de la maison de Saül, qui s’appelait Siba. Et le roi l’ayant fait venir, lui dit : Etes-vous Siba ? Il lui répondit : Je le suis, pour vous servir.

3 Le roi lui dit : Est-il resté quelqu’un de la maison de Saül, que je puisse combler de grâces ? Siba dit au roi : Il reste encore un fils de Jonathas, qui est incommodé des jambes.

4 Où est-il ? dit David. Il est, dit Siba, à Lodabar, dans la maison de Machir, fils d’Ammiel.

5 Le roi David envoya donc des gens, et le fit venir de Lodabar, de la maison de Machir, fils d’Ammiel.

6 Miphiboseth, fils de Jonathas, fils de Saül, étant venu devant David, lui fit une profonde révérence en se prosternant en terre. David lui dit : Miphiboseth ! Il lui répondit : Me voici pour vous servir.

7 David lui dit : Ne craignez point ; parce que je suis résolu de vous traiter avec toute sorte d’affection, à cause de Jonathas, votre père. Je vous rendrai toutes les terres de Saül. votre aïeul, et vous mangerez toujours a ma table.

8 Miphiboseth se prosternant devant lui, lui dit : Qui suis-je moi, votre serviteur, pour avoir mérité que vous regardiez un chien mort tel que je suis ?

9 Le roi fit donc venir Siba, serviteur de Saül, et lui dit : J’ai donné au fils de votre maître tout ce qui était à Saül, et toute sa maison.

10 Faites donc valoir ses terres pour lui, vous et vos fils, et vos serviteurs ; afin que le fils de votre maître ait de quoi subsister : mais Miphiboseth. fils de votre maître, mangera toujours à ma table. Or Siba avait quinze fils, et vingt serviteurs.

11 Et il dit au roi : Mon seigneur et mon roi, votre serviteur fera comme vous lui avez commandé. Et Miphiboseth mangera à ma table comme l’un des enfants du roi.

12 Or Miphiboseth avait un fils encore enfant, appelé Micha. Toute la famille de Siba servait Miphiboseth.

13 Miphiboseth demeurait à Jérusalem, parce qu’il mangeait toujours à la table du roi ; et il était boiteux des deux jambes.



IL arriva que quelque temps après le roi des Ammonites vint à mourir ; et Hanon, son fils, régna en sa place.

2 Alors David dit : Je veux témoigner de l’affection envers Hanon, fils de Naas, comme son père m’en a témoigné. Il lui envoya donc des ambassadeurs pour le consoler de la mort de son père. Mais lorsqu’ils furent arrivés sur les terres des Ammonites,

3 les plus grands du pays dirent à Hanon, leur maître : Croyez-vous que ce soit pour honorer votre père et pour vous consoler, que David vous ait envoyé ici des ambassadeurs ? et ne voyez-vous pas qu’il ne l’a fait que pour reconnaître la principale ville de vos États, pour y remarquer toutes choses, et pour la détruire un jour ?

4 Hanon fit donc prendre les serviteurs de David, leur fit raser la moitié de la barbe, et leur fit couper la moitié de leurs habits, jusqu’au haut des cuisses, et les renvoya.

5 David avant reçu la nouvelle qu’ils avaient été outragés si honteusement, envoya au-devant d’eux, et leur donna cet ordre : Demeurez à Jéricho jusqu’à ce que votre barbe soit crue ; et après cela vous reviendrez.

6 Or les Ammonites voyant qu’ils avaient offensé David, envoyèrent vers les Syriens de Rohob, et les Syriens de Soba, et ils firent lever à leurs dépens vingt mille hommes de pied. Ils prirent aussi mille hommes du roi de Maacha, et douze mille d’Istob.

7 David en ayant été averti, envoya contre eux Joab avec toutes ses troupes.

8 Les Ammonites s’étant mis en campagne, rangèrent leur armée en bataille a l’entrée de la porte de la ville ; et les Syriens de Soba et de Rohob, d’Istob et de Maacha, étaient dans un corps séparé dans la plaine.

9 Joab voyant donc les ennemis préparés à le combattre de front et par derrière, choisit des gens de toutes les meilleures troupes d’Israël, et marcha en bataille contre les Syriens.

10 Il donna le reste de l’armée à Abisaï, son frère, qui marcha pour combattre les Ammonites.

11 Et Joab dit à Abisaï : Si les Syriens ont de l’avantage sur moi, vous viendrez à mon secours ; et si les Ammonites eu ont sur vous, je viendrai aussi vous secourir.

12 Agissez en homme de cœur, et combattons pour notre peuple et pour la cité de notre Dieu ; et le Seigneur ordonnera de tout comme il lui plaira.

13 Joab attaqua donc les Syriens avec les troupes qu’il commandait ; et aussitôt les Syriens fuirent devant lui.

14 Les Ammonites voyant la fuite des Syriens, s’enfuirent aussi eux-mêmes devant Abisaï, et se retirèrent dans la ville. Joab après avoir battu les Ammonites, s’en retourna, et revint à Jérusalem.

15 Les Syriens voyant qu’ils avaient été défaits par Israël, s’assemblèrent tous.

16 Adarézer envoya demander du secours aux Syriens qui étaient au delà du fleuve, et en tira des troupes dont il donna le commandement à Sobach, général de son armée.

17 David en ayant reçu nouvelle, assembla toutes les troupes d’Israël, passa le Jourdain, et vint à Hélam. Les Syriens marchèrent contre David, et lui donnèrent bataille.

18 Mais ils s’enfuirent dès qu’ils furent en présence de l’armée d’Israël, et David tailla en pièces sept cents chariots de leurs troupes et quarante mille chevaux ; et blessa tellement Sobach, général de l’armée, qu’il mourut sur-le-champ.

19 Tous les rois qui étaient venus au secours d’Adarézer, se voyant vaincus par les Israélites, furent saisis de frayeur, et s’enfuirent devant eux avec cinquante-huit mille hommes. Ils firent la paix ensuite avec les Israélites, et leur furent assujettis. Depuis ce temps-là les Syriens appréhendèrent de donner secours aux Ammonites.



L’ANNÉE suivante, au temps où les rois ont accoutumé d’aller à la guerre, David envoya Joab avec ses officiers et toutes les troupes d’Israël, qui ravagèrent le pays des Ammonites, et assiégèrent Rabba. Mais David demeura à Jérusalem.

2 Pendant que ces choses se passaient, il arriva que David s’étant levé de dessus son lit après midi, se promenait sur la terrasse de son palais ; alors il vit une femme vis-à-vis de lui, qui se baignait sur la terrasse de sa maison ; et cette femme était fort belle.

3 Le roi envoya donc savoir qui elle était. On vint lui dire que c’était Bethsabée, fille d’Eliam, femme d’Urie, Héthéen.

4 David ayant envoyé des gens, la fit venir ; et quand elle fut venue vers lui, il dormit avec elle ; et aussitôt elle se purifia de son impureté,

5 et retourna chez elle ayant conçu. Dans la suite elle envoya dire à David : J’ai conçu.

6 Après quoi David manda à Joab de lui envoyer Urie, Héthéen. Joab le lui envoya.

7 Et quand il fut venu, David lui demanda en quel état était Joab et le peuple, et ce qui se passait à la guerre.

8 Et il dit à Urie : Allez-vous-en chez vous, lavez-vous les pieds. Urie sortit du palais ; et le roi lui envoya des mets de sa table.

9 Mais Urie passa la nuit suivante devant la porte du palais du roi avec les autres officiers ; et il n’alla point en sa maison.

10 David en ayant été averti, dit à Urie : D’où vient que revenant d’un voyage, vous n’êtes pas allé chez vous ?

11 Urie répondit à David : L’arche de Dieu, Israël et Juda demeurent sous des tentes ; et Joab, mon seigneur, et les serviteurs de mon seigneur couchent à plate terre : et moi cependant j’irai en ma maison manger et boire, et dormir avec ma femme. Je jure par la vie et par le salut de mon roi, que je ne le ferai jamais.

12 David dit à Urie : Demeurez ici encore aujourd’hui, et je vous renverrai demain. Urie demeura donc à Jérusalem ce jour-là, et jusqu’au lendemain.

13 David le fit venir pour manger et pour boire à sa table, et il l’enivra. Mais s’en étant retourné au soir, il dormit dans son lit avec les officiers du roi ; et il n’alla point chez lui.

14 Le lendemain matin David envoya à Joab, par Urie même, une lettre,

15 écrite en ces termes : Mettez Urie à la tête de vos gens où le combat sera le plus rude ; et faites en sorte qu’il soit abandonné, et qu’il y périsse.

16 Joab continuant donc le siège de la ville, mit Urie vis-à-vis le lieu où il savait qu’étaient les meilleures troupes des ennemis.

17 Les assiégés ayant fait une sortie, chargèrent Joab et tuèrent quelques-uns des gens de David, entre lesquels Urie, Héthéen, demeura mort sur la place.

18 Joab envoya donc aussitôt à David, pour lui faire savoir tout ce qui s’était passé dans le combat,

19 en donnant cet ordre au courrier : Lorsque vous aurez achevé de dire au roi tout ce qui s’est passé à l’armée,

20 si vous voyez qu’il se fâche, et qu’il dise : Pourquoi êtes-vous allés combattre si près des murs ? Ignoriez-vous combien on lance de traits de dessus une muraille ?

21 Qui tua Abimélech, fils de Jérobaal ? Ne fut-ce pas une femme qui jeta sur lui du haut de la muraille un morceau d’une meule, et le tua à Thèbes ? Pourquoi vous êtes-vous approchés si près des murs ? Vous lui direz : Urie, Héthéen, votre serviteur, a aussi été tué.

22 Le courrier partit donc, et vint dire à David ce que Joab lui avait commandé ;

23 et il lui parla en ces termes : Les assiégés ont eu quelque avantage sur nous ; ils sont sortis hors de la ville pour nous charger, et nous les avons poursuivis avec grande vigueur jusqu’à la porte de la ville.

24 Mais les archers ont lancé leurs traits contre nous du haut des murailles. Quelques-uns de vos gens y ont été tués ; et Urie, Héthéen, votre serviteur, y est demeuré mort entre les autres.

25 David répondit au courrier : Vous direz ceci à Joab : Que cela ne vous étonne point : car les événements de la guerre sont journaliers ; et tantôt l’un, tantôt l’autre, périt par l’épée. Relevez le courage de vos soldats, et animez-les contre la ville, afin que vous puissiez la détruire.

26 La femme d’Urie ayant appris que son mari était mort, le pleura.

27 Et après que le temps du deuil fut passé, David la fit venir en sa maison, et l’épousa. Elle lui enfanta un fils. Et cette action qu’avait faite David, déplut au Seigneur.



LE Seigneur envoya donc Nathan vers David. Et Nathan étant venu le trouver, lui dit : Il y avait deux hommes dans une ville, dont l’un était riche, et l’autre pauvre.

2 Le riche avait un grand nombre de brebis et de bœufs.

3 Le pauvre n’avait rien du tout qu’une petite brebis, qu’il avait achetée et avait nourrie ; qui était crue parmi ses enfants en mangeant de son pain, buvant de sa coupe, et dormant dans son sein ; et il la chérissait comme sa fille.

4 Un étranger étant venu voir le riche, celui-ci ne voulut point toucher à ses brebis ni à ses bœufs pour lui faire festin ; mais il prit la brebis de ce pauvre homme et la donna à manger à son hôte.

5 David entra dans une grande indignation contre cet homme, et dit à Nathan : Vive le Seigneur ! celui qui a fait cette action est digne de mort.

6 Il rendra la brebis au quadruple pour en avoir usé de la sorte, et pour n’avoir point épargné ce pauvre.

7 Alors Nathan dit à David : C’est vous-même qui êtes cet homme. Voici ce que dit le Seigneur, le Dieu d’Israël : Je vous ai sacré roi sur Israël, et vous ni délivré de la main de Saül.

8 Je vous ai mis entre les mains la maison et les femmes de votre seigneur, et vous ai rendu maître de toute la maison d’Israël et de Juda. Si cela paraît peu de chose, je suis prêt à y en ajouter encore beaucoup d’autres.

9 Pourquoi donc avez-vous méprisé ma parole, jusqu’à commettre le mal devant mes yeux ? Vous avez fait perdre la vie à Urie, Héthéen : vous lui avez ôté sa femme, et l’avez prise pour vous ; et vous l’avez tué par l’épee des enfants d’Ammon.

10 C’est pourquoi l’épée ne sortira jamais de votre maison ; parce que vous m’avez méprisé, et que vous avez pris pour vous la femme d’Urie, Héthéen.

11 Voici donc ce que dit le Seigneur : Je vais vous susciter des maux qui naîtront de votre propre maison. Je prendrai vos femmes à vos yeux ; je les donnerai à un autre qui vous est proche, et il dormira avec elles aux yeux de ce soleil que vous voyez.

12 Car pour vous, vous avez fait cette action en secret ; mais pour moi je la ferai à la vue de tout Israël, et à la vue du soleil.

13 David dit à Nathan : J’ai péché contre le Seigneur. Et Nathan lui répondit : Le Seigneur aussi a transféré votre péché ; et vous ne mourrez point.

14 Mais néanmoins, parce que vous avez été cause par votre péché que les ennemis du Seigneur ont blasphémé contre lui, le fils qui vous est né va certainement perdre la vie.

15 Nathan retourna ensuite à sa maison. En même temps le Seigneur frappa l’enfant que la femme d’Urie avait eu de David, et il fut désespéré.

16 David pria le Seigneur pour l’enfant ; il jeûna, il se retira en particulier, et demeura couché sur la terre.

17 Les principaux de sa maison vinrent le trouver, et lui firent de grandes instances pour l’obliger à se lever de terre ; mais il le refusa, et ne mangea point avec eux.

18 Le septième jour l’enfant mourut, et les serviteurs de David n’osaient lui dire qu’il était mort ; car ils s’entre-disaient : Lorsque l’enfant vivait encore et que nous lui parlions, il ne voulait pas nous écouter : combien donc s’affligera-t-il encore davantage, si nous lui disons qu’il est mort ?

19 David voyant que ses officiers parlaient tout bas entre eux, reconnut que l’enfant était mort ; et le leur ayant demandé, ils lui répondirent qu’il était mort.

20 Aussitôt il se leva de terre, alla au bain, prit de l’huile de parfum ; et ayant changé d’habit, il entra dans la maison du Seigneur, et l’adora : il revint ensuite en sa maison, il demanda qu’on lui servît à manger, et il prit de la nourriture.

21 Alors ses officiers lui dirent : D’où vient cette conduite si extraordinaire ? Vous jeûniez et vous pleuriez pour l’enfant lorsqu’il vivait encore : et après qu’il est mort, vous vous êtes levé, et vous avez mangé.

22 David leur répondit : J’ai jeûné et j’ai pleuré pour l’enfant tant qu’il a vécu ; parce que je disais : Qui sait si le Seigneur ne me le donnera point, et s’il ne lui sauvera point la vie ?

23 Mais maintenant qu’il est mort, pourquoi jeûnerais-je ? Est-ce que je puis encore le faire revivre ? C’est moi plutôt qui irai à lui ; et il ne reviendra jamais à moi.

24 David ensuite consola sa femme Bethsabée ; il dormit avec elle, et elle eut un fils, qu’il appela Salomon : le Seigneur aima cet enfant.

25 Et ayant envoyé à David le prophète Nathan, il donna à l’enfant le nom d’Aimable-au-Seigneur ; parce que le Seigneur l’aimait.

26 Joab continua à battre Rabbath, ville des Ammonites ; et étant près de prendre cette ville royale,

27 il envoya des courriers à David, avec ordre de lui dire : J’ai battu jusqu’ici Rabbath ; et cette ville environnée d’eau va être prise.

28 Faites assembler le reste du peuple, et venez au siège de la ville, et la prenez ; de peur que lorsque je l’aurai détruite, on ne m’attribue l’honneur de cette victoire.

29 David assembla donc tout le peuple, et marcha contre Rabbath ; et apres quelques combats, il la prit.

30 Il ôta de dessus la tête du roi des Ammonites le diadème qui pesait un talent d’or, et était enrichi de pierreries très-précieuses ; et il fut mis sur la tête de David. Il remporta aussi de la ville un fort grand butin :

31 et ayant fait sortir les habitants, il les coupa avec des scies ; fit passer sur eux des chariots avec des roues de fer ; les tailla en pièces avec des couteaux, et les jeta dans des fourneaux où l’on cuit la brique : c’est ainsi qu’il traita toutes les villes des Ammonites. David revint ensuite à Jérusalem avec toute son armée.



APRÈS cela Amnon, fils de David, conçut une passion violente pour la sœur d’Absalom, aussi fils de David, qui était très-belle, et qui s’appelait Thamar.

2 L’affection qu’il avait pour elle devint si excessive, que cet amour le rendit malade ; parce que, comme elle était vierge, il paraissait difficile à Amnon de rien faire avec elle contre l’honnêteté.

3 Or Amnon avait un ami fort prudent, qui s’appelait Jonadab, fils de Semmaa, frère de David.

4 Jonadab dit donc à Amnon : D’où vient, mon prince, que vous maigrissez ainsi de jour en jour ? pourquoi ne m’en dites-vous point la cause ? Amnon lui répondit : J’aime Thamar, sœur de mon frère Absalom.

5 Jonadab lui dit : Couchez-vous sur votre lit, et faites semblant d’être malade ; et lorsque votre père viendra vous visiter, dites-lui : Que ma sœur Thamar vienne, je vous prie, pour m’apprêter à manger ; et qu’elle me prépare quelque chose que je reçoive de sa main.

6 Amnon se mit donc au lit, et commença à faire le malade. Et lorsque le roi fut venu le visiter, Amnon lui dit : Que ma sœur Thamar vienne, je vous prie, et qu’elle fasse devant moi deux petits gâteaux, afin que je prenne à manger de sa main.

7 David envoya donc chez Thamar, et lui fit dire : Allez à l’appartement de votre frère Amnon, et préparez-lui à manger.

8 Thamar y étant venue, trouva son frère Amnon qui était couché. Elle prit de la farine, la pétrit et la délaya, et fit cuire le tout devant lui.

9 Et prenant ce qu’elle avait fait cuire, elle le mit dans un vase, et le lui présenta ; mais Amnon n’en voulut point manger, et il dit : Qu’on fasse sortir tout le monde. Lorsque tout le monde fut sorti,

10 Amnon dit à Thamar : Apportez ici dans mon alcôve ce que vous avez apprêté, afin que je le reçoive de votre main. Thamar prit donc les petits gâteaux qu’elle avait faits, et les porta à Amnon, son frère, dans son alcôve.

11 Et après qu’elle les lui eut présentés, Amnon se saisit d’elle, et lui dit : Venez, ma sœur, couchez avec moi.

12 Elle lui répondit : Non, mon frère ; ne me faites pas violence, cela n’est pas permis dans Israël : ne faites pas cette folie.

13 Car je ne pourrai porter mon opprobre ; et vous passerez dans Israël pour un insensé. Mais demandez-moi plutôt au roi en mariage, et il ne refusera pas de me donner à vous.

14 Mais Amnon ne voulut point se rendre à ses prières ; et étant plus fort qu’elle, il lui fit violence, et abusa d’elle.

15 Aussitôt il conçut pour elle une étrange aversion ; de sorte que la haine qu’il lui portait était encore plus excessive que la passion qu’il avait eue pour elle auparavant. Il lui dit donc : Levez-vous, et allez-vous-en.

16 Thamar lui répondit : L’outrage que vous me faites maintenant en me chassant de la sorte, est encore plus grand que celui que vous venez de me faire. Amnon ne voulut point l’écouter ;

17 mais ayant appelé un de ses domestiques qui le servait, il lui dit : Mettez-la hors d’ici, et fermez la porte après elle.

18 Thamar était vêtue d’une robe qui traînait en bas ; les filles des rois qui étaient encore vierges ayant accoutumé de s’habiller de la sorte. L’officier d’Amnon la mit donc hors de la chambre, et ferma la porte après elle.

19 Alors Thamar ayant mis de la cendre sur sa tête, et déchiré sa robe, s’en alla en jetant de grands cris, et tenant sa tête couverte de ses deux mains.

20 Absalom, son frère, lui dit : Est-ce que votre frère Amnon a abusé de vous ? Mais, ma sœur, n’en dites rien à présent, car c’est votre frère ; et ne vous affligez point de ce qui vous est arrivé. Thamar demeura donc dans la maison d’Absalom, son frère, séchant d’ennui et de douleur.

21 Le roi David ayant appris ce qui s’était passé, s’en affligea fort ; mais il ne voulut point attrister Amnon, son fils, parce qu’il l’aimait, étant son aîné.

22 Absalom ne parla en aucune sorte de tout ceci à Amnon ; mais il conçut contre lui une grande haine, de ce qu’il avait violé sa sœur Thamar.

23 Deux ans après il arriva qu’Absalom fit tondre ses brebis à Baalhasor, qui est près de la tribu d’Ephraïm ; et il invita tous les enfants du roi à venir chez lui.

24 Il vint pour cela trouver le roi, et lui dit : Votre serviteur fait tondre ses brebis ; je supplie donc le roi de venir avec les princes chez son serviteur.

25 Le roi dit à Absalom : Non, mon fils, ne nous priez pas de venir tous pour vous incommoder. Et Absalom lui fit encore de grandes instances ; mais David refusa toujours d’y aller, et il lui souhaita toutes sortes de bénédictions.

26 Alors Absalom lui dit : Si vous ne voulez pas y venir, je vous supplie au moins que mon frère Amnon vienne avec nous. Le roi lui répondit : Il n’est point nécessaire qu’il y aille.

27 Néanmoins Absalom l’en conjura avec tant d’instances, qu’il laissa aller avec lui Amnon avec tous ses frères. Absalom avait fait préparer un festin de roi.

28 Et il avait donné cet ordre à ses officiers : Prenez garde quand Amnon commencera à être troublé par le vin, et que je vous ferai signe : frappez-le, et le tuez. Ne craignez point, car c’est moi qui vous le commande. Soyez résolus, et agissez en gens de cœur.

29 Les officiers d’Absalom exécutèrent donc à l’égard d’Amnon le commandement que leur maître leur avait fait ; et aussitôt tous les enfants du roi se levant de table, montèrent chacun sur leur mule, et s’enfuirent.

30 Ils étaient encore en chemin, lorsque le bruit vint jusqu’aux oreilles de David, qu’Absalom avait tué tous les enfants du roi, sans qu’il en fût resté un seul.

31 Le roi se leva aussitôt, déchira ses vêtements, se jeta par terre ; et tous ses officiers qui étaient près de lui, déchirèrent leurs vêtements.

32 Alors Jonadab, fils de Semmaa, frère de David, prenant la parole, dit au roi : Que le roi, mon seigneur, ne s’imagine pas que tous les enfants du roi aient été tués. Amnon seul est mort ; parce qu’Absalom avait résolu de le perdre, depuis le jour qu’il avait fait violence à sa sœur Thamar.

33 Que le roi, mon seigneur, ne se mette donc pas cela dans l’esprit, et qu’il ne croie pas que tous ses enfants aient été tués ; Amnon seul est mort.

34 Cependant Absalom s’enfuit ; et celui qui était en sentinelle levant les yeux, vit une grande troupe de monde qui venait par un chemin détourné à côté de la montagne.

35 Jonadab dit au roi : Voilà les enfants du roi qui viennent : ce qu’avait dit votre serviteur s’est trouve vrai.

36 Il n’eut pas plutôt dit ces mots, qu’on vit paraître les enfants du roi. Et lorsqu’ils furent arrivés, ils commencèrent a jeter des cris et à pleurer, et le roi et tous ses serviteurs fondirent aussi en larmes.

37 Absalom ayant pris la fuite, se retira chez Tholomaï, fils d’Ammiud, roi de Gessur ; et David pleurait son fils Amnon tous les jours.

38 Absalom demeura trois ans à Gessur, où il était venu se réfugier.

39 Et le roi David cessa de le poursuivre ; parce qu’il s’était enfin consolé de la mort d’Amnon.



JOAB, fils de Sarvia, ayant reconnu que le cœur du roi se rapprochait d’Absalom,

2 fit venir de Thécua une femme sage, et lui dit : Faites semblant d’être dans l’affliction : prenez un habit de deuil, et ne vous parfumez point, afin que vous paraissiez comme une femme qui pleure un mort depuis longtemps.

3 Ensuite vous vous présenterez au roi en cet état, et vous lui tiendrez tels et tels discours. Et Joab lui mit en la bouche toutes les paroles qu’elle devait dire.

4 Cette femme de Thécua s’étant donc présentée au roi, se jeta à terre devant lui ; et ainsi prosternée, elle lui dit : Seigneur, sauvez-moi.

5 Le roi lui dit : Quelle est votre affaire ? Elle lui répondit : Hélas ! je suis une femme veuve : car mon mari est mort.

6 Votre servante avait deux fils qui se sont querellés dans les champs, où il n’y avait personne qui pût les séparer ; et l’un d’eux a frappé l’autre, et l’a tué.

7 Et maintenant tous les parents se soulèvent contre votre servante, et me disent : Donnez-nous celui qui a tué son frère, afin que le sang de son frère qu’il a répandu soit vengé par sa mort, et que nous fassions périr l’héritier : ainsi ils veulent éteindre la seule étincelle qui m’est demeurée, afin qu’il ne reste plus personne sur la terre qui puisse faire revivre le nom de mon mari.

8 Le roi dit à cette femme : Retournez-vous-en chez vous, je donnerai ordre que vous soyez satisfaite.

9 Elle lui répondit : Mon seigneur et mon roi, s’il y a en ceci de l’injustice, qu’elle retombe sur moi et sur la maison de mon père ; mais que le roi et son trône soit innocent.

10 Le roi ajouta : Si quelqu’un vous dit un mot, amenez-le-moi, et assurez-vous qu’il ne vous troublera plus.

11 Elle dit encore : Je vous conjure par le Seigneur, votre Dieu, d’empêcher que les parents ne s’élèvent l’un après l’autre, pour venger par la mort de mon fils le sang de celui qui a été tué. Le roi lui répondit : Vive le Seigneur ! il ne tombera pas à terre un seul poil de la tête de votre fils.

12 Cette femme ajouta : Que mon seigneur et mon roi permette à sa servante de lui dire une parole. Parlez, dit le roi.

13 La femme lui dit : Pourquoi refusez-vous au peuple de Dieu la grâce que vous m’accordez ? et pourquoi le roi se résout-il de pécher, plutôt que de rappeler son fils qu’il a banni ?

14 Nous mourons tous, et nous nous écoulons sur la terre comme des eaux qui ne reviennent plus : et Dieu ne veut pas qu’une âme périsse ; mais il diffère l’exécution de son arrêt, de peur que celui qui a été rejeté ne se perde entièrement.

15 C’est pourquoi je suis venue pour dire cette parole au roi, mon seigneur, devant le peuple, et votre servante a dit : Je parlerai au roi, pour voir si je ne pourrai point obtenir de lui en quelque manière la grâce que je lui demande.

16 Le roi a déjà écouté sa servante, pour la délivrer, elle et son fils, de la main de tous ceux qui voulaient les exterminer de l’héritage du Seigneur.

17 Permettez donc à votre servante de vous supplier encore, que ce que le roi, mon seigneur, a ordonné, s’exécute comme un sacrifice promis à Dieu. Car le roi, mon seigneur, est comme un ange de Dieu qui n’est touché ni des bénédictions ni des malédictions. C’est pourquoi le Seigneur, votre Dieu, est avec vous.

18 Alors le roi dit à cette femme : Je vous demande une chose ; avouez-moi la vérité. La femme lui répondit : Mon seigneur et mon roi, dites ce qu’il vous plaira.

19 Le roi lui dit : N’est-il pas vrai que tout ce que vous venez de me dire est de l’invention de Joab ? Elle lui répondit : Mon seigneur et mon roi, je vous jure par votre vie, que Dieu conserve, que rien n’est plus véritable que ce que vous dites : car c’est en effet votre serviteur Joab qui m’a donné cet ordre de me présenter devant vous, et qui a mis dans la bouche de votre servante tout ce que je viens de vous dire.

20 C’est lui qui m’a commandé de vous parler ainsi en parabole. Mais vous, ô mon seigneur et mon roi ! vous êtes sage comme l’est un ange de Dieu, et vous pénétrez tout ce qui se fait sur la terre.

21 Le roi dit donc à Joab : Je vous accorde la grâce que vous me demandez : allez, et faites revenir mon fils Absalom.

22 Alors Joab se prosternant le visage contre terre, salua profondément le roi, lui souhaita les bénédictions du ciel, et lui dit : O mon seigneur et mon roi ! votre serviteur reconnaît aujourd’hui qu’il a trouvé grâce devant vous ; puisque vous avez fait ce qu’il vous avait supplié de faire.

23 Joab partit donc aussitôt, et s’en alla à Gessur : d’où il amena Absalom à Jérusalem.

24 Et le roi dit : Qu’il retourne en sa maison ; mais il ne me verra point. Absalom revint donc en sa maison, et il ne vit point le roi.

25 Or il n’y avait point d’homme dans tout Israël qui fût si bien fait ni si beau qu’était Absalom : depuis la plante des pieds jusqu’à la tête, il n’y avait pas en lui le moindre défaut.

26 Lorsqu’il se faisait faire les cheveux (ce qu’il faisait une fois tous les ans, parce qu’ils lui chargeaient trop la tête ), on trouvait que ses cheveux pesaient deux cents sicles selon le poids ordinaire.

27 Il avait trois fils, et une fille appelée Thamar, qui était fort belle.

28 Absalom demeura deux ans à Jérusalem sans voir le roi.

29 Et ensuite il manda Joab pour l’envoyer vers David. Mais Joab ne voulut pas venir le trouver. L’ayant mandé une seconde, fois, et Joab n’ayant pas encore voulu venir,

30 il dit à ses serviteurs : Vous savez que Joab a un champ qui est auprès du mien, où il y a de l’orge ; allez donc, et y mettez le feu. Ses gens aussitôt brûlèrent cet orge. Les serviteurs de Joab vinrent ensuite trouver leur maître, ayant déchiré leurs vêtements, et lui dirent : Les serviteurs d’Absalom ont brûlé une partie de votre champ.

31 Joab alla donc trouver Absalom dans sa maison, et lui dit : Pourquoi vos gens ont-ils mis le feu à mes orges ?

32 Absalom répondit à Joab : C’est que vous n’êtes pas venu lorsque je vous ai fait prier de venir me voir, afin de vous envoyer vers le roi pour lui dire de ma part : Pourquoi suis-je revenu de Gessur ? Il vaudrait mieux que j’y fusse encore. Je demande donc la grâce de voir le roi : s’il se souvient encore de ma faute, qu’il me fasse mourir.

33 Joab étant allé trouver le roi, lui représenta tout ce qu’Absalom lui avait dit : après quoi Absalom fut mandé : il se presenta devant le roi, et se prosterna en terre devant lui ; et le roi le baisa.



APRÈS cela Absalom se fit faire des chariots, prit avec lui des gens de cheval, et cinquante hommes qui marchaient devant lui.

2 Et se levant dès le matin, il se tenait à l’entrée du palais ; il appelait tous ceux qui avaient des affaires, et qui venaient demander justice au roi. Et il disait à chacun d’eux : D’où êtes-vous ? Cet homme lui répondait : Votre serviteur est d’une telle tribu d’Israël.

3 Et Absalom lui disait : Votre affaire me paraît bien juste. Mais il n’y a personne qui ait ordre du roi de vous écouter. Et il ajoutait :

4 Oh ! qui m’établira juge sur la terre, afin que tous ceux qui ont des affaires viennent à moi, et que je les juge selon la justice !

5 Et lorsque quelqu’un venait lui faire la révérence, il lui tendait la main, le prenait et le baisait.

6 Il traitait ainsi ceux qui venaient de toutes les villes d’Israël demander justice au roi ; et il s’insinuait par là dans l’affection des peuples.

7 (Quatre ans après, Absalom dit au roi David : Permettez-moi d’aller à Hébron, pour y accomplir les vœux que j’ai faits au Seigneur.

8 Car lorsque j’étais à Gessur en Syrie, j’ai fait ce vœu à Dieu : Si le Seigneur me ramène à Jérusalem, je lui offrirai un sacrifice.

9 Le roi David lui dit : Allez en paix. Et aussitôt il partit, et s’en alla à Hébron.

10 En même temps Absalom envoya dans toutes les tribus d’Israël des gens qu’il avait gagnés, avec cet ordre : Aussitôt que vous entendrez sonner la trompette, publiez qu’Absalom règne dans Hébron.

11 Absalom emmena avec lui deux cents hommes de Jérusalem, qui le suivirent simplement, sans savoir en aucune sorte le dessein de ce voyage.

12 Absalom fit venir aussi de la ville de Gilo Achitophel, conseiller de David, qui était de la même ville. Et lorsqu’on offrait des victimes, il se forma une puissante conspiration ; et la foule du peuple, qui accourait de toutes parts pour suivre Absalom, croissait de plus en plus.

13 Il vint aussitôt un courrier à David, qui lui dit : Tout Israël suit Absalom de tout son cœur.

14 David dit à ses officiers qui étaient avec lui à Jérusalem : Allons-nous-en, fuyons d’ici : car nous ne pourrions éviter de tomber entre les mains d’Absalom. Hâtons-nous de sortir, de peur qu’il ne nous prévienne, qu’il ne nous accable de maux, et qu’il ne fasse passer toute la ville au fil de l’épée.

15 Les officiers du roi lui dirent : Nous exécuterons toujours de tout notre cœur tout ce qu’il vous plaira de nous commander.

16 Le roi sortit donc à pied avec toute sa maison ; et laissa dix femmes de ses concubines pour garder son palais.

17 Etant sorti en cette manière avec tous les Israélites qui l’accompagnaient, il s’arrêta lorsqu’il était déjà loin de sa maison.

18 Tous ses officiers marchaient auprès de lui : les légions des Céréthiens et des Phéléthiens, et les six cents hommes de pied de la ville de Geth qui avaient suivi David, et qui étaient très-vaillants, marchaient tous devant lui.

19 Alors le roi dit à Ethaï, Gethéen : Pourquoi venez-vous avec nous ? Retournez, et allez avec le nouveau roi ; parce que vous êtes étranger, et que vous êtes sorti de votre pays.

20 Vous n’êtes que d’hier à Jérusalem, et vous en sortiriez aujourd’hui à cause de moi ? Pour moi, j’irai où je dois aller : mais pour vous, retournez, et remmenez vos gens avec vous ; et le Seigneur qui est plein de bonté et de justice, récompensera lui-même le zèle et la fidélité avec laquelle vous m’avez toujours servi.

21 Ethaï lui répondit : Vive le Seigneur, et vive le roi, mon maître ! en quelque état que vous puissiez être, mon seigneur et mon roi, votre serviteur y sera, soit à la mort ou à la vie.

22 David lui répondit : Venez donc, et passez. Ainsi Ethaï, Gethéen, passa le torrent avec tous les gens qui le suivaient, et tout le reste du peuple.

23 Tout le peuple pleurait dans ce passage, et on entendait partout retentir leurs cris. Le roi passa aussi le torrent de Cédron, et tout le peuple allait le long du chemin qui regarde le désert.

24 En même temps Sadoc, grand prêtre, vint accompagné de tous les Lévites, qui portaient l’arche de l’alliance de Dieu, et ils la posèrent sur un lieu élevé. Abiathar monta, en attendant que tout le peuple qui sortait de la ville, fût passé.

25 Alors le roi dit à Sadoc : Reportez à la ville l’arche de Dieu. Si je trouve grâce devant le Seigneur, il me ramènera, et il me fera revoir son arche et son tabernacle.

26 S’il me dit : Vous ne m’agréez point ; je suis tout prêt : qu’il fasse de moi ce qu’il lui plaira.

27 Le roi dit encore en parlant au grand prêtre Sadoc : O voyant ! retournez en paix à la ville avec Achimaas, votre fils, et Jonathas, fils d’Abiathar ; retournez l’un et l’autre avec vos deux fils.

28 Pour moi, je vais me cacher dans les plaines du désert, jusqu’à ce que vous m’envoyiez des nouvelles de l’état des choses.

29 Sadoc et Abiathar reportèrent donc à Jérusalem l’arche de Dieu, et y demeurèrent.

30 Cependant David montait la colline des Oliviers, et pleurait en montant. Il allait nu-pieds et la tête couverte ; et tout le peuple qui était avec lui montait la tête couverte et en pleurant.

31 Or David reçut nouvelles qu’Achitophel même était aussi dans la conjuration d’Absalom ; et il dit à Dieu : Seigneur ! renversez, je vous prie, les conseils d’Achitophel.

32 Et lorsque David arrivait au haut de la montagne où il devait adorer le Seigneur, Chusaï d’Arach vint au-devant de lui, ayant ses vêtements déchirés, et la tête couverte de terre.

33 David lui dit : Si vous venez avec moi, vous me serez à charge :

34 mais si vous retournez à la ville, et si vous dites à Absalom : Mon roi, je viens vous offrir mon service, je vous servirai comme j’ai servi votre père ; vous dissiperez le conseil d’Achitophel.

35 Vous avez avec vous les grands prêtres Sadoc et Abiathar, auxquels vous direz tout ce que vous aurez appris chez le roi.

36 Ils ont leurs deux fils, Achimaas, fils de Sadoc, et Jonathas, fils d’Abiathar. Vous m’enverrez dire par eux tout ce que vous aurez appris.

37 Chusaï, ami de David, retourna donc à Jérusalem ; et Absalom y entrait en même temps.



APRÈS que David eut passé un peu le haut de la montagne, Siba, serviteur de Miphiboseth, vint au-devant de lui avec deux ânes chargés de deux cents pains, de cent paquets de raisins secs, de cent cabas de figues, et d’un vaisseau plein de vin.

2 Le roi lui dit : Que voulez-vous faire de cela ? Siba lui répondit : Les ânes sont pour servir de monture aux officiers du roi ; les pains et les figues, pour donner à ceux qui vous suivent ; et le vin, afin que si quelqu’un se trouve faible dans le désert, il puisse en boire.

3 Le roi lui dit : Où est le fils de votre maître ? Il est demeuré, dit Siba, dans Jérusalem, en disant : La maison d’Israël me rendra aujourd’hui le royaume de mon père.

4 Le roi dit à Siba : Je vous donne tout ce qui était à Miphiboseth. Siba lui répondit : Ce que je souhaite, mon seigneur et mon roi, c’est d’avoir quelque part à vos bonnes grâces.

5 Le roi David étant venu jusqu’auprès de Bahurim, il en sortit un homme de la maison de Saül, appelé Seméi, fils de Géra, qui s’avançant dans son chemin maudissait David,

6 lui jetait des pierres et à tous ses gens, pendant que tout le peuple et tous les hommes de guerre marchaient à droite et à gauche, à côté du roi.

7 Et il maudissait le roi en ces termes : Sors, sors, homme de sang, homme de Bélial.

8 Le Seigneur a fait retomber sur toi tout le sang de la maison de Saül, parce que tu as usurpé le royaume, pour te mettre en sa place. Et maintenant le Seigneur fait passer le royaume entre les mains d’Absalom, ton fils ; et tu te vois accablé des maux que tu as faits, parce que tu es un homme de sang.

9 Alors Abisaï, fils de Sarvia, dit au roi : Faut-il que ce chien mort maudisse le roi, mon seigneur ? Je vais lui couper la tête.

10 Le roi dit à Abisaï : Qu’y a-t-il de commun entre vous et moi, enfants de Sarvia ? Laissez-le faire : car le Seigneur lui a ordonné de maudire David ; et qui osera lui demander pourquoi il l’a fait ?

11 Le roi dit encore à Abisaï, et à tous ses serviteurs : Vous voyez que mon fils, qui est sorti de moi, cherche à m’ôter la vie : combien plus un fils de Jémini me traitera-t-il de cette sorte ! Laissez-le faire ; laissez-le maudire, selon l’ordre qu’il en a reçu du Seigneur ;

12 et peut-être que le Seigneur regardera mon affliction, et qu’il me fera quelque bien pour ces malédictions que je reçois aujourd’hui.

13 David continuait donc son chemin accompagné de ses gens ; et Seméi qui le suivait marchant à côté sur le haut de la montagne, le maudissait, lui jetait des pierres, et faisait voler la poussière en l’air.

14 Le roi arriva enfin à Bahurim, et avec lui tout le peuple qui l’accompagnait, fort fatigué, et ils prirent là un peu de repos.

15 Cependant Absalom entra dans Jérusalem suivi de tous ceux de son parti, et accompagné d’Achitophel.

16 Chusaï d’Arach, ami de David, vint lui faire la révérence, et lui dit : Mon roi, Dieu vous conserve ! Dieu vous conserve, mon roi !

17 Absalom lui répondit : Est-ce donc là la reconnaissance que vous avez pour votre ami ? D’où vient que vous n’êtes pas allé avec votre ami ?

18 Dieu m’en garde ! dit Chusaï : car je serai à celui qui a été élu par le Seigneur, par tout ce peuple et par tout Israël, et je demeurerai avec lui.

19 Et de plus, qui est celui que je viens servir ? N’est-ce pas le fils du roi ? Je vous obéirai comme j’ai obéi à votre père.

20 Absalom dit alors à Achitophel : Consultez ensemble pour voir ce que nous avons à faire.

21 Achitophel dit à Absalom : Abusez des concubines de votre père, qu’il a laissées pour garder son palais : afin que lorsque tout Israël saura que vous avez déshonoré votre père, ils s’attachent plus fortement à votre parti.

22 On fit donc dresser une tente pour Absalom sur la terrasse du palais du roi ; et il abusa devant tout Israël des concubines de son père.

23 Or les conseils que donnait Achitophel étaient regardés alors comme des oracles de Dieu même : et on les considérait toujours en cette manière ; soit lorsqu’il était avec David, soit lorsqu’il était avec Absalom.



ACHITOPHEL dit donc à Absalom : Si vous l’agréez, je vais prendre douze mille hommes choisis ; j’irai poursuivre David cette même nuit ;

2 et fondant sur lui et sur ses gens, qui sont tous las et hors de défense, je les battrai sans peine. Tout le monde fuira, et le roi se trouvant seul, je m’en déferai.

3 Je ramènerai tout ce peuple comme si ce n’était qu’un seul homme : car vous ne cherchez qu’une personne ; et après cela tout sera en paix.

4 Cet avis plut à Absalom, et à tous les anciens d’Israël.

5 Néanmoins Absalom dit : Faites venir Chusaï d’Arach, afin que nous sachions aussi son avis.

6 Chusaï étant venu devant Absalom, Absalom lui dit : Voici le conseil qu’Achitophel vient de nous donner : devons-nous le suivre ? Que nous conseillez-vous ?

7 Chusaï répondit à Absalom : Le conseil qu’a donné Achitophel ne me paraît pas bon pour cette fois.

8 Vous n’ignorez pas, ajouta-t-il, quel est votre père ; que les gens qui sont avec lui sont très-vaillants ; et que maintenant ils ont le cœur outré comme une ourse qui est en furie dans un bois, de ce qu’on lui a ravi ses petits. Votre père aussi qui sait parfaitement la guerre, ne s’arrêtera point avec ses gens.

9 Il est peut-être maintenant caché dans une caverne, ou dans quelque autre lieu qu’il aura choisi. Si quelqu’un de vos gens est tué d’abord, on publiera aussitôt partout que le parti d’Absalom a été battu.

10 Et en même temps les plus hardis de ceux qui vous suivent, et qui ont des cœurs de lion, seront saisis d’effroi : car tout le peuple d’Israël sait que votre père et tous ceux qui sont avec lui sont très-vaillants.

11 Voici donc, ce me semble, le meilleur conseil que vous puissiez suivre : Faites assembler tout Israël depuis Dan jusqu’à Bersabée, comme le sable de la mer qui est innombrable, et vous serez au milieu d’eux.

12 Et en quelque lieu qu’il puisse être, nous irons nous jeter sur lui : nous l’accablerons par notre grand nombre, comme quand la rosée tombe sur la terre ; et nous ne laisserons pas un seul de tous les gens qui sont avec lui.

13 S’il se retire dans quelque ville, tout Israël en environnera les murailles de cordes, et nous l’entraînerons dans un torrent, sans qu’il en reste seulement une petite pierre.

14 Alors Absalom, et tous les principaux d’Israël, dirent : L’avis de Chusaï d’Arach est meilleur que celui d’Achitophel. Mais ce fut par la volonté du Seigneur, que le conseil d’Achitophel, qui était le plus utile, fut ainsi détruit ; afin que le Seigneur fît tomber Absalom dans le malheur dont il était digne.

15 Alors Chusaï dit aux grands prêtres Sadoc et Abiathar : Voici l’avis qu’Achitophel a donné à Absalom et aux anciens d’Israël ; et voici celui que j’ai donné.

16 Envoyez donc en diligence à David, pour lui en donner nouvelle : et faites-lui dire, qu’il ne demeure point cette nuit dans les plaines du désert ; mais qu’il passe au plus tôt le Jourdain, de peur qu’il ne périsse, lui et tous ses gens.

17 Jonathas et Achimaas étaient près de la fontaine de Rogel, n’osant se montrer, ni entrer dans la ville ; et une servante alla les avertir de tout ceci. Ils partirent en même temps pour en porter la nouvelle au roi David.

18 Il arriva néanmoins qu’un garçon les vit, et en donna avis à Absalom : mais ils entrèrent aussitôt chez un homme de Bahurim, qui avait un puits à l’entrée de sa maison, dans lequel ils descendirent.

19 Et la femme de cet homme étendit une couverture sur la bouche du puits, comme si elle eût fait sécher des grains pilès : ainsi la chose demeura cachée.

20 Les gens d’Absalom étant venus dans cette maison, dirent à la femme : Où sont Achimaas et Jonathas ? Elle leur répondit : Ils ont pris un peu d’eau, et s’en sont allés bien vite. Ainsi ceux qui les cherchaient ne les ayant point trouvés, revinrent à Jérusalem.

21 Après qu’ils s’en furent retournés, Achimaas et Jonathas sortirent du puits, continuèrent leur chemin, et vinrent dire à David : Décampez, et passez le fleuve au plus tôt ; parce qu’Achitophel a donné un tel conseil contre vous.

22 David marcha donc aussitôt avec tous ses gens, et passa le Jourdain avant la pointe du jour, sans qu’il en demeurât un seul au deçà du fleuve.

23 Achitophel voyant qu’on n’avait point suivi le conseil qu’il avait donné, fit seller son âne, s’en alla à la maison qu’il avait en sa ville de Gilo, et ayant disposé de toutes ses affaires, il se pendit, et fut enseveli dans le sépulcre de son père.

24 David vint ensuite au camp, et Absalom suivi de tout Israël passa aussi le Jourdain.

25 Absalom fit général de son armée au lieu de Joab, Amasa, fils d’un homme de Jezraël nommé Jétra, qui avait épousé Abigaïl, fille de Naas, et sœurde Sarvia, mère de Joab.

26 Israël se campa avec Absalom dans le pays de Galaad.

27 David étant venu au camp, Sobi, fils de Naas de Rabbath, ville des Ammonites, Machir, fils d’Ammihel de Lodabar, et Berzellaï de Rogelim en Galaad,

28 lui offrirent des lits, des tapis, des vaisseaux de terre, du blé, de l’orge, de la farine, de l’orge séché au feu, des fèves, des lentilles et des pois fricassés,

29 du miel, du beurre, des brebis et des veaux gras. Ils apportèrent tout ceci à David, et à ceux qui le suivaient ; parce qu’ils crurent bien que le peuple venant de passer par le désert, était abattu de faim, de soif et de lassitude.



DAVID ayant fait la revue de ses gens, établit sur eux des tribuns et des centeniers.

2 Il donna le tiers de ses troupes à commander à Joab, le tiers à Abisaï, fils de Sarvia et frère de Joab, et le tiers à Ethaï de Geth. Le roi dit ensuite à ses gens : Je veux me trouver au combat avec vous.

3 Mais ses gens lui répondirent : Vous ne viendrez point avec nous : car quand les ennemis nous auraient fait fuir, ils ne croiraient pas avoir fait grande chose ; et quand ils auraient taillé en pièces la moitié de nos troupes, ils n’en seraient pas fort satisfaits ; parce que vous êtes considéré vous seul comme dix mille hommes. Il vaut donc mieux que vous demeuriez dans la ville, afin que vous soyez en état de nous secourir.

4 Le roi leur dit : Je ferai ce que vous voudrez. Il se tint donc à la porte de la ville de Mahanaïm, pendant que toute l’armée en sortait en diverses troupes de cent hommes et de mille hommes.

5 En même temps il donna cet ordre à Joab, à Abisaï et à Ethaï : Conservez-moi mon fils Absalom. Et tout le peuple entendit le roi qui recommandait Absalom à tous ses généraux.

6 L’armée marcha donc en bataille contre Israël, et la bataille fut donnée dans la forêt d’Ephraïm.

7 L’armée de David tailla en pièces celle d’Israël. La défaite fut grande, et vingt mille hommes demeurèrent sur la place.

8 Les gens d’Absalom fuyant après le combat, furent dispersés de tous côtés : et il y en eut beaucoup plus qui périrent dans la forêt, qu’il n’y en eut qui moururent par l’épee en ce jour-là.

9 Absalom même fut rencontré par les gens de David : car lorsqu’il était sur son mulet, et qu’il passait sous un grand chêne fort touffu, sa tête s’embarrassa dans les branches du chêne ; et son mulet passant outre, il demeura suspendu entre le ciel et la terre.

10 Un soldat le vit en cet état, et vint dire à Joab : J’ai vu Absalom pendu à un chêne.

11 Joab dit à celui qui lui avait apporté cette nouvelle : Si tu l’as vu, pourquoi ne lui as-tu pas passé ton épée au travers du corps ? et je t’aurais donné dix sicles d’argent et un baudrier.

12 Il répondit à Joab : Quand vous me donneriez présentement mille pièces d’argent, je me garderais bien de porter la main sur la personne du fils du roi : car nous avons tous entendu l’ordre que le roi vous a donné, à vous, à Abisaï et à Ethaï, lorsqu’il vous a dit : Conservez-moi mon fils Absalom.

13 Et si je m’étais hasardé à faire une action si téméraire, elle n’aurait pu être cachée au roi ; et vous seriez-vous opposé à lui ?

14 Joab lui dit : Je ne m’en rapporterai pas à toi ; mais je l’attaquerai moi-même en ta présence. Il prit donc en sa main trois dards, dont il perça le cœur d’Absalom. Et lorsqu’il respirait encore, toujours pendu au chêne,

15 dix jeunes écuyers de Joab accoururent, le percèrent de coups, et l’achevèrent.

16 Aussitôt Joab fit sonner la retraite ; et voulant épargner le peuple, il empêcha ses gens de poursuivre davantage les Israélites qui fuyaient.

17 Ainsi les Israélites se retirèrent chacun chez soi. On emporta Absalom, et on le jeta dans une grande fosse qui était dans le bois, sur laquelle on éleva un grand monceau de pierres.

18 Or Absalom, lorsqu’il vivait encore, s’était fait dresser une colonne dans la vallée du Roi. Je n’ai point de fils, disait-il, et ce sera là un monument qui fera vivre mon nom. Il donna donc son nom à cette colonne, et on l’appelle encore aujourd’hui, la Main d’Absalom.

19 Après la mort d’Absalom, Achimaas, fils de Sadoc, dit à Joab : Je vais courir vers le roi, et lui dire que Dieu lui a fait justice, et l’a vengé de ses ennemis.

20 Joab lui dit : Vous porterez les nouvelles une autre fois, mais non aujourd’hui : je ne veux pas que ce soit vous présentement, parce que le fils du roi est mort.

21 Joab dit donc à Chusi : Allez-vous-en, vous, et annoncez au roi ce que vous avez vu. Chusi lui fit une profonde révérence, et se mit à courir.

22 Achimaas, fils de Sadoc, dit encore à Joab : Mais si je courais aussi après Chusi ? Mon fils, dit Joab, pourquoi voulez-vous courir ? Vous serez le porteur d’une méchante nouvelle.

23 Mais enfin si je courais ? ajouta Achimaas. Courez donc, répondit Joab. Ainsi Achimaas courant par un chemin plus court, passa Chusi.

24 Cependant David était assis entre les deux portes de la ville ; et la sentinelle qui était sur la muraille au haut de la porte, levant les yeux, vit un homme qui courait tout seul,

25 et jetant un grand cri, il en avertit le roi. Le roi lui dit : S’il est seul, il porte une bonne nouvelle. Lorsque ce premier s’avançait à grande hâte, et était déjà proche,

26 la sentinelle en vit un second qui courait aussi ; et criant d’en haut, il dit : Je vois courir encore un autre homme qui est seul. Le roi lui dit : Il apporte aussi une bonne nouvelle.

27 La sentinelle ajouta : A voir courir le premier, il me semble que c’est Achimaas, fils de Sadoc. Le roi lui dit : C’est un homme de bien, et il nous apporte de bonnes nouvelles.

28 Achimaas criant de loin, dit au roi : Seigneur, que Dieu vous conserve ! Et s’abaissant jusqu’en terre devant lui, il ajouta : Béni soit le Seigneur, votre Dieu, qui a livré entre vos mains ceux qui s’étaient soulevés contre le roi, mon seigneur !

29 Le roi lui dit : Mon fils Absalom est-il en vie ? Achimaas lui répondit : Lorsque Joab, votre serviteur, m’a envoyé vers vous, j’ai vu s’élever un grand tumulte : c’est tout ce que je sais.

30 Passez, lui dit le roi, et tenez-vous là. Lorsqu’il fut passé, et qu’il se tenait en sa place,

31 Chusi parut, et il dit en arrivant : Mon seigneur et mon roi, je vous apporte une bonne nouvelle : car le Seigneur a jugé aujourd’hui en votre faveur, et vous a délivré de la main de tous ceux qui s’étaient soulevés contre vous.

32 Le roi dit à Chusi : Mon fils Absalom est-il en vie ? Chusi lui répondit : Que les ennemis de mon roi, et tous ceux qui se soulèvent contre lui pour le perdre, soient traités comme il l’a été !

33 Le roi étant donc saisi de douleur, monta à la chambre qui était au-dessus de la porte, et se mit à pleurer. Et il disait en se promenant : Mon fils Absalom ! Absalom, mon fils ! que ne puis-je donner ma vie pour la tienne ! mon fils Absalom ! Absalom, mon fils !



EN même temps on avertit Joab que le roi était dans les larmes, et qu’il pleurait son fils ;

2 et la victoire fut changée en deuil dans toute l’armée, parce que tout le peuple sut que le roi était affligé de la mort d’Absalom.

3 Les troupes entrèrent dans la ville sans bruit, et sans oser presque se montrer, comme une armée qui aurait été défaite et mise en fuite dans une bataille.

4 Le roi cependant s’étant couvert la tête, criait à haute voix : Mon fils Absalom ! Absalom, mon fils ! mon fils !

5 Joab étant entré au lieu où était le roi, lui dit : Vous avez aujourd’hui couvert de confusion tous les serviteurs qui vous ont sauvé la vie, et qui l’ont sauvée à vos fils et à vos filles, a vos femmes et à vos concubines.

6 Vous aimez ceux qui vous haïssent, et vous haïssez ceux qui vous aiment. Vous avez fait voir aujourd’hui que vous ne vous mettez nullement en peine ni de vos officiers, ni de vos soldats ; et je vois fort bien que si Absalom vivait, et que nous eussions tous été tués, vous seriez content.

7 Venez donc présentement vous montrer à vos serviteurs : parlez-leur, et témoignez-leur la satisfaction que vous avez d’eux : car je vous jure par le Seigneur, que si vous ne le faites, vous n’aurez pas cette nuit un seul homme auprès de vous ; et vous vous trouverez dans un plus grand péril que vous n’avez jamais été depuis les premières années de votre vie jusqu’aujourd’hui.

8 Le roi alla donc s’asseoir à la porte de la ville ; et le peuple ayant été averti qu’il était là, tout le monde vint se présenter devant lui. Cependant, comme après la fuite des troupes d’Israël chacun s’était retiré chez soi,

9 le peuple dans toutes les tribus s’entre-disait à l’envi l’un de l’autre : Le roi nous a délivrés de nos ennemis, il nous a sauvés de la main des Philistins, et il a été contraint de fuir hors de son pays à cause du soulèvement d’Absalom.

10 Absalom que nous avions sacré pour roi, est mort dans le combat : qu’attendez-vous donc, et pourquoi ne faites-vous point revenir le roi ?

11 Le roi David ayant été averti de cette bonne volonté que tout Israël avait pour lui, envoya dire aux grands prêtres Sadoc et Abiathar : Parlez aux anciens de Juda, et dites-leur : Pourquoi êtes-vous les derniers à faire revenir le roi en sa maison ?

12 Vous êtes mes frères, vous êtes mes os et ma chair ; pourquoi êtes-vous les derniers à faire revenir le roi ?

13 Dites aussi à Amasa : N’êtes-vous pas mes os et ma chair ? Que Dieu me traite avec toute sa sévérité, si je ne vous fais pour toujours général de mon armée en la place de Joab.

14 Il gagna ainsi le cœur de tous ceux de Juda, qui tous unanimement lui envoyèrent dire : Revenez, vous, et tous ceux qui sont demeurés attachés à votre service.

15 Le roi retourna donc, et s’avança jusqu’au Jourdain ; et tout Juda vint au-devant de lui jusqu’à Galgala, pour lui faire passer le fleuve.

16 Or Seméi de Bahurim, fils de Géra, de la tribu de Benjamin, vint à grande hâte avec ceux de Juda au-devant du roi David,

17 suivi de mille hommes de Benjamin. Siba, serviteur de la maison de Saül, y vint aussi avec ses quinze fils, et vingt serviteurs. Ils se hâtèrent de passer le Jourdain pour aller trouver le roi.

18 Ils le passèrent à gué pour faire passer toute la maison du roi, et pour faire tout ce qu’il leur commanderait. Lorsque le roi eut passé le Jourdain, Seméi, fils de Géra, se prosternant devant lui,

19 lui dit : Ne me traitez point selon mon iniquité, mon seigneur : oubliez les injures que vous avez reçues de votre serviteur le jour que vous sortîtes de Jérusalem ; et que votre cœur, ô mon seigneur et mon roi ! n’en conserve point de ressentiment.

20 Car je reconnais le crime que j’ai commis : c’est pourquoi je suis venu le premier de toute la maison de Joseph au-devant de mon seigneur et de mon roi.

21 Abisaï, fils de Sarvia, dit alors : Ces paroles donc suffiront-elles pour sauver la vie à Seméi, après qu’il a maudit l’oint du Seigneur ?

22 Mais David répondit à Abisaï : Qu’y a-t-il entre vous et moi, enfants de Sarvia ? Pourquoi me devenez-vous aujourd’hui des tentateurs ? Est-ce ici un jour à faire mourir un Israélite ? Et puis-je ignorer que je deviens aujourd’hui roi d’Israël ?

23 Alors il dit à Seméi : Vous ne mourrez point. Et il le lui jura.

24 Miphiboseth, fils de Saül, vint aussi au-devant du roi. Depuis le jour que David était sorti de Jérusalem jusqu’à celui-ci qu’il retournait en paix, il n’avait ni lavé ses pieds, ni fait faire sa barbe, ni pris aucun soin de ses vêtements.

25 Etant donc venu faire la révérence au roi à Jérusalem, le roi lui dit : Miphiboseth, pourquoi n’êtes-vous point venu avec moi ?

26 Miphiboseth lui répondit : Mon seigneur et mon roi, mon serviteur n’a pas voulu m’obéir : car étant incommodé des jambes, comme je le suis, je lui avais dit de me préparer un âne pour vous suivre ;

27 et au lieu de le faire, il est venu m’accuser devant mon seigneur. Mais pour vous, ô mon seigneur et mon roi ! vous êtes comme un ange de Dieu ; faites de moi tout ce qu’il vous plaira.

28 Car au lieu que vous pouviez traiter toute la maison de mon père comme digne de mort, vous m’avez donné place à votre table. De quoi donc pourrais-je me plaindre avec quelque justice ? et quel sujet aurais-je de vous importuner encore ?

29 Le roi lui répondit : C’est assez, n’en dites pas davantage ; ce que j’ai ordonné subsistera. Vous et Siba, partagez le bien.

30 Miphiboseth répondit au roi : Je veux bien même qu’il ait tout ; puisque je vois mon seigneur et mon roi revenu heureusement en sa maison.

31 Berzellaï de Galaad, étant venu de Rogelim, accompagna aussi le roi à son passage du Jourdain ; et il était prêt à le conduire encore au delà du fleuve.

32 C’était un homme fort vieux, qui avait déjà quatre-vingts ans. Il avait fourni des vivres au roi lorsqu’il était au camp : car il était extrêmement riche.

33 Le roi lui dit donc : Venez avec moi, afin que vous viviez en repos auprès de moi dans Jérusalem.

34 Berzellaï dit au roi : Suis-je maintenant en âge d’aller avec le roi à Jérusalem ?

35 Ayant, comme j’ai, quatre-vingts ans, peut-il me rester quelque vigueur dans les sens, pour discerner ce qui est doux d’avec ce qui est amer ? Puis-je trouver quelque plaisir à boire et à manger, ou à entendre la voix des musiciens et des musiciennes ? Pourquoi votre serviteur serait-il à charge à mon seigneur et à mon roi ?

36 Je vous suivrai encore un peu après avoir passé le Jourdain ; mais je n’ai point mérité la grâce que vous voulez me faire.

37 Permettez-moi seulement de m’en retourner, afin que je meure dans mon pays, et que je sois enseveli auprès de mon père et de ma mère. Mais, mon seigneur et mon roi, voilà mon fils Chamaam, votre serviteur, que vous pouvez emmener avec vous, et faire de lui ce qu’il vous plaira.

38 Le roi dit à Berzellaï : Que Chamaam passe avec moi : je ferai pour lui tout ce que vous voudrez, et je vous accorderai tout ce que vous me demanderez.

39 Le roi passa ensuite le Jourdain avec tout le peuple : il baisa Berzellaï, et lui souhaita les bénédictions du ciel ; et Berzellaï retourna en sa maison.

40 Le roi passa à Galgala, et Chamaam avec lui. Lorsque le roi passa le Jourdain, il fut accompagné de toute la tribu de Juda ; et il ne s’y trouva que la moitié du peuple d’Israël.

41 Tous ceux d’Israël s’adressèrent donc en foule au roi, et lui dirent : Pourquoi nos frères de Juda nous ont-ils enlevé le roi sans nous attendre, avant de lui faire passer le Jourdain avec sa maison et toute sa suite ?

42 Tous ceux de Juda leur répondirent : C’est que le roi nous touche de plus près : quel sujet avez-vous de vous fâcher ? Avons-nous vécu aux dépens du roi ? ou nous a-t-on fait quelques présents ?

43 Ceux d’Israël leur répondirent : Le roi nous considère comme étant dix fois plus que vous ; et ainsi David nous appartient plus qu’à vous. Pourquoi nous avez-vous fait cette injure ? et pourquoi n’avons-nous pas été avertis les premiers pour ramener notre roi ? Mais ceux de Juda répondirent un peu durement à ceux d’Israël.



EN même temps il se trouva là un homme de Belial, nommé Séba, fils de Bochri, de la tribu de Benjamin, et il commença à sonner de la trompette, en disant : Nous n’avons que faire de David, et nous n’attendons rien du fils d’Isaï : Israël, retournez chacun dans votre maison.

2 Ainsi tout Israël se sépara de David, et suivit Séba, fils de Bochri. Mais ceux de Juda demeurèrent toujours auprès du roi, et l’accompagnèrent depuis le Jourdain jusqu’à Jérusalem.

3 Le roi étant revenu en son palais à Jérusalem, commanda que les dix concubines qu’il avait laissées pour le garder, fussent renfermées dans une maison, où il leur faisait donner ce qui leur était nécessaire ; et il ne s’approcha plus d’elles, mais elles demeurèrent ainsi enfermées, vivant comme veuves jusqu’au jour de leur mort.

4 Le roi dit alors à Amasa : Faites-moi venir dans trois jours tous ceux de Juda, et trouvez-vous-y avec eux.

5 Amasa partit aussitôt pour assembler ceux de Juda ; mais il ne vint pas dans le temps que le roi lui avait marqué.

6 David dit donc à Abisaï : Séba, fils de Bochri, va maintenant nous faire plus de mal que ne nous en a fait Absalom. C’est pourquoi prenez avec vous ce que j’ai ici de troupes, et poursuivez-le, de peur qu’il ne se rende maître de quelques places fortes, et qu’il ne nous échappe.

7 Il partit donc de Jérusalem accompagné des gens de Joab, des Céréthiens et des Phéléthiens, et de tous les plus vaillants hommes, afin de poursuivre Séba, fils de Bochri.

8 Lorsqu’ils furent près de la grande pierre qui est à Gabaon, ils rencontrèrent Amasa qui venait trouver le roi. Joab était revêtu d’un habillement étroit qui lui était juste sur le corps, et par-dessus il avait son épée pendue au côté dans un fourreau fait de telle sorte, qu’on pouvait la tirer et en frapper en un moment.

9 Joab dit donc à Amasa : Bonjour, mon frère. Et il prit de sa main droite le menton d’Amasa comme pour le baiser.

10 Et comme Amasa ne prenait pas garde à l’épée qu’avait Joab, Joab l’en frappa dans le côté : les entrailles aussitôt lui sortirent hors du corps ; et sans qu’il fût besoin d’un second coup, il tomba mort. Joab et Abisaï, son frère, continuèrent à poursuivre Séba, fils de Bochri.

11 Quelques-uns des gens de Joab s’étant arrêtés près du corps d’Amasa, disaient : Voilà celui qui voulait être général de David au lieu de Joab.

12 Cependant Amasa tout couvert de son sang était étendu au milieu du chemin. Mais quelqu’un voyant que tout le peuple s’arrêtait pour le voir, le tira hors du chemin dans le champ le plus proche, et le couvrit d’un manteau, afin que ceux qui passaient ne s’arrêtassent plus à cause de lui.

13 Lors donc qu’on l’eut ôté du chemin, tout le monde marcha après Joab, et poursuivit Séba, fils de Bochri.

14 Séba ayant passé au travers de toutes les tribus d’Israël, était allé à Abéla-Beth-Maacha ; et tous les hommes choisis d’Israël s’étaient ralliés auprès de lui.

15 Joab et ses gens vinrent donc l’assiéger à Abéla-Beth-Maacha : ils élevèrent des terrasses autour de la ville, et l’investirent ; et tous les gens de Joab travaillaient à saper la muraille.

16 Alors une femme de la ville, qui était fort sage, s’écria : Ecoutez, écoutez : dites à Joab qu’il s’approche, et que je veux lui parler.

17 Joab s’étant approché, elle lui dit : Etes-vous Joab ? Il lui répondit : Oui, je le suis. Ecoutez, lui dit-elle, les paroles de votre servante. Il lui répondit : Je vous écoute.

18 Elle ajouta : Autrefois on disait d’ordinaire : Que ceux qui demandent conseil, le demandent à Abéla ; et ils terminaient ainsi leurs affaires.

19 N’est-ce pas moi qui dis la vérité : dans Israël à ceux qui me la demandent ? Et cependant vous voulez ruiner cette ville si célèbre, et renverser une ville mère de tant d’autres ? Pourquoi détruisez-vous l’héritage du Seigneur ?

20 Joab lui répondit : A Dieu ne plaise ! je ne viens point pour ruiner, ni pour détruire.

21 Ce n’est point là mon intention ; mais je cherche un Séba, fils de Bochri, de la montagne d’Ephraïm, qui s’est soulevé contre le roi David. Rendez-nous seulement cet homme, et nous nous retirerons aussitôt. Cette femme dit à Joab : On va vous jeter sa tête par-dessus la muraille.

22 Elle alla ensuite trouver tout le peuple, et leur parla si sagement, qu’en même temps on coupa la tête à Séba, fils de Bochri, et on la jeta à Joab. Il fit aussitôt sonner la retraite, l’armée leva le siège de devant la ville, et chacun s’en retourna chez soi. Joab revint trouver le roi à Jérusalem.

23 Joab était donc général de toute l’armée d’Israël. Banaïas, fils de Joïada, commandait les Céréthiens et les Phéléthiens.

24 Aduram était surintendant des tributs. Josaphat, fils d’Ahilud, avait la garde des requêtes.

25 Siva était secrétaire ; Sadoc et Abiathar, grands prêtres ;

26 et Ira, de Jaïr en Galaad, était prêtre de David.



DU temps de David il y eut une famine qui dura trois ans. David consulta l’oracle du Seigneur ; et le Seigneur lui répondit, que cette famine était arrivée à cause de Saül et de sa maison, qui était une maison de sang ; parce qu’il avait tué les Gabaonites.

2 Or les Gabaonites n’étaient point des enfants d’Israël, mais un reste des Amorrhéens. Les Israélites leur avaient promis avec serment, qu’ils ne les feraient point mourir : cependant Saül avait entrepris de les perdre par un faux zèle pour les enfants d’Israël et de Juda.

3 David fit donc venir les Gabaonites, et leur dit : Que puis-je vous faire pour réparer l’injure que vous avez reçue, afin que vous bénissiez l’héritage du Seigneur ?

4 Les Gabaonites répondirent : Nous ne voulons pour satisfaction ni or, ni argent. Nous demandons justice contre Saül et contre sa maison ; et hors cela nous ne voulons point qu’on fasse mourir aucun homme d’Israël. Que voulez-vous donc, dit David, que je fasse pour vous ?

5 Ils lui répondirent : Nous devons tellement exterminer la race de celui qui nous a tourmentés et opprimés si injustement, qu’il n’en reste pas un seul dans toutes les terres d’Israël.

6 Qu’on nous donne au moins sept de ses enfants, afin que nous les mettions en croix, pour satisfaire le Seigneur à Gabaa d’où était Saül, qui fut autrefois l’élu du Seigneur. Le roi leur dit : Je vous les donnerai.

7 Il épargna Miphiboseth, fils de Jonathas, fils de Saül, à cause de l’alliance que Jonathas et lui s’étaient jurée au nom du Seigneur.

8 Mais il prit les deux fils de Respha, fille d’Aïa, Armoni et Miphiboseth, qu’elle avait eus de Saül ; et cinq fils que Mérob, fille de Saül, avait eus d’Hadriel, fils de Berzellaï, qui était de Molathi ;

9 et il les mit entre les mains des Gabaonites, qui les crucifièrent sur une montagne devant le Seigneur. Ainsi moururent ces sept hommes, ayant été exécutés tous ensemble dans les premiers jours de la moisson, lorsque l’on commençait à couper les orges.

10 Respha, fille d’Aïa, prenant un cilice, l’étendit sur une pierre, et demeura là depuis le commencement de la moisson jusqu’à ce que l’eau du ciel tombât sur eux ; et elle empêcha les oiseaux de déchirer leurs corps pendant le jour, et les bêtes de les manger pendant la nuit.

11 Et cette action de Respha, fille d’Aïa, concubine de Saül, fut rapportée à David.

12 Alors David alla prendre les os de Saül et de Jonathas, son fils, à Jabès en Galaad ; ceux de cette ville les ayant enlevés de la place de Bethsan, où les Philistins les avaient pendus après que Saül eut été tué à Gelboé.

13 David transporta donc de là les os de Saül et de Jonathas, son fils ; et ayant fait recueillir les os de ceux qui avaient été crucifiés à Gabaon,

14 il les fit ensevelir avec ceux de Saül et de Jonathas, son fils, dans le sépulcre de Cis, père de Saül, à Séla, au pays de Benjamin. Les ordres que le roi avait donnés sur ce sujet, furent exactement exécutés ; et après cela Dieu se rendit propice à la terre comme auparavant.

15 Les Philistins firent encore une guerre contre Israël. David marcha contre eux avec son armée, leur donna bataille, et s’étant trouvé las dans le combat,

16 Jesbibénob, de la race d’Arapha, qui avait une lance dont le fer pesait trois cents sicles, et une épée qui n’avait point encore servi, était près de le tuer :

17 mais Abisaï, fils de Sarvia, prévint le Philistin, le tua, et sauva David. Alors les gens de David lui firent cette protestation avec serment : Nous ne souffrirons plus que vous veniez à la guerre avec nous, de peur que vous n’éteigniez la lampe d’Israël.

18 Il y eut une seconde guerre à Gob, ou Gazer, contre les Philistins : où Sobochaï de Husathi tua Saph, descendu d’Arapha, de la race des géants.

19 Il y eut aussi une troisième guerre à Gob, contre les Philistins ; en laquelle Elehanan, fils de Jaaré, surnommé Orgim, de Bethléhem, tua le frère de Goliath de Geth, qui avait une lance dont la hampe était comme le grand bois dont se servent les tisserands.

20 Il se fit une quatrième guerre à Geth ; où il se trouva un grand homme qui avait six doigts aux pieds et aux mains, c’est-à-dire, vingt-quatre doigts ; et qui était de la race d’Arapha.

21 Il vint outrager insolemment Israël : mais Jonathan, fils de Samaa, frère de David, le tua.

22 Ces quatre hommes étaient de Geth, de la race d’Arapha ; et ils furent tués par David, ou par ses gens.



DAVID prononça ce cantique à la louange du seigneur, après que le Seigneur l’eut délivré de la main de tous ses ennemis, ainsi que de la main de Saül ;

2 et il dit : Je vous aimerai, Seigneur ! qui êtes ma force : le Seigneur est mon rocher, il est ma force, il est mon Sauveur.

3 Mon Dieu est mon soutien, j’espérerai en lui : il est mon bouclier, il est l’appui de mon salut : c’est lui qui m’élève au-dessus de mes ennemis, il est mon refuge : mon Sauveur ! vous me délivrerez de l’iniquité.

4 J’invoquerai le Seigneur qui est digne de toute louange, et il me délivrera de mes ennemis.

5 Car les flots de la mort m’ont assiégé ; les torrents de Bélial m’ont épouvanté.

6 Les liens de l’enfer m’ont environné ; les filets de la mort m’ont enveloppé.

7 J’invoquerai le Seigneur dans mon affliction, et je crierai vers mon Dieu ; et il entendra ma voix de son temple, et mes cris viendront jusqu’à ses oreilles.

8 La terre s’est émue, et a tremblé ; les fondements des montagnes ont été agités et ébranlés ; parce que le Seigneur était en colère contre eux.

9 La fumée de ses narines s’est élevée en haut ; un feu dévorant est sorti de sa bouche ; et des charbons en ont été allumés.

10 Il a abaissé les cieux, et il est descendu ; un nuage sombre était sous ses pieds.

11 Il a monté sur les chérubins, et il a pris son vol ; il a volé sur les ailes des vents.

12 Il s’est caché dans les ténèbres qui l’environnaient ; il a fait distiller les eaux des nuées du ciel.

13 Devant lui brille une lumière qui allume des charbons de feu.

14 Le Seigneur a tonné du ciel ; le Très-Haut a fait retentir sa voix.

15 Il a tiré ses flèches, et les a dispersés ; il a lancé ses foudres, et les a consumés.

16 La mer s’est ouverte jusqu’au fond des abîmes, et les fondements du monde ont été découverts par les menaces du Seigneur, et par le souffle impétueux de sa colère.

17 Il a étendu sa main du haut du ciel ; il m’a pris, et m’a retiré du milieu des eaux.

18 Il m’a délivré d’un ennemi très-puissant, et de ceux qui me haïssaient, et qui étaient plus forts que moi.

19 Il m’a prévenu au jour de mon affliction, et le Seigneur a été mon ferme appui.

20 Il m’a mis au large ; il m’a délivré, parce que je lui ai plu.

21 Le Seigneur me rendra selon ma justice ; et il me traitera selon la pureté de mes mains.

22 Car j’ai gardé les voies du Seigneur, et je n’ai point commis d’infidélité contre mon Dieu.

23 J’ai eu toutes ses ordonnances devant mes yeux, et je ne me suis point détourné de ses préceptes.

24 Je serai parfait en demeurant avec lui ; je me tiendrai sur mes gardes contre mon iniquité.

25 Et le Seigneur me rendra selon ma justice, et selon que mes mains seront pures à ses yeux.

26 Vous serez saint avec les saints, et parfait avec les forts.

27 Vous serez pur avec les purs, et vous paraîtrez méchant avec les méchants.

28 Vous sauverez le peuple pauvre ; et d’un clin d’œil vous humilierez les superbes.

29 Seigneur ! vous êtes ma lampe : c’est vous, Seigneur ! qui éclairez mes ténèbres.

30 Je cours avec vous tout prêt a combattre ; le secours de mon Dieu me fait franchir la muraille.

31 La voie de Dieu est irrépréhensible ; la parole du Seigneur est pure comme l’or qui a passé par le feu. Il est le bouclier de tous ceux qui espèrent en lui.

32 Y a-t-il un autre Dieu que le Seigneur ? v a-t-il un autre fort que notre Dieu ?

33 ce Dieu qui m’a revêtu de force, et qui a aplani la voie parfaite où je marche ;

34 qui a rendu mes pieds aussi vites que ceux des biches, et qui m’a établi dans les lieux hauts où je suis ;

35 qui instruit mes mains à combattre, et qui rend mes bras fermes comme un arc d’airain.

36 Vous m’avez couvert de votre protection, comme d’un bouclier ; votre droite m’a soutenu, et vous m’avez fait grand par votre bonté.

37 Vous avez élargi le chemin sous mes pas, et mes pieds n’ont point chancelé.

38 Je poursuivrai mes ennemis, et je les réduirai en poudre ; je ne retournerai point que je ne les aie détruits.

39 Je les détruirai, et je les briserai, sans qu’ils puissent se relever ; ils tomberont sous mes pieds.

40 Vous m’avez revêtu de force pour combattre ; vous avez fait plier sous moi ceux qui s’opposaient à moi.

41 Vous avez fait tourner le dos à mes ennemis, à ceux qui me haïssaient ; et je les exterminerai.

42 Ils crieront, et nul ne viendra à leur secours ; ils crieront au Seigneur, et il ne les exaucera point.

43 Je les dissiperai comme la poussière de la terre ; je les écraserai, et je les foulerai aux pieds comme la boue des rues.

44 Vous me délivrerez des contradictions de mon peuple ; vous me conserverez pour être le chef des nations : un peuple que j’ignore me servira.

45 Des enfants étrangers me résisteront ; mais ils m’obéiront quand ils entendront ma voix.

46 Les enfants étrangers se fondront comme la cire, et ils trembleront de peur dans les lieux où ils se seront cachés.

47 Vive le Seigneur, et que mon Dieu soit béni ! que le Dieu fort, le Dieu qui me sauve, soit glorifié !

48 vous, ô Dieu ! qui me vengez, et qui abattez les peuples sous moi ;

49 qui me délivrez de mes ennemis, qui me mettez au-dessus de ceux qui me résistent, et qui me sauverez de l’homme injuste.

50 Je vous en rendrai, Seigneur ! des actions de grâces au milieu des nations, et je chanterai des cantiques en l'honneur de votre nom ;

51 vous qui signalez votre grandeur en sauvant le roi que vous avez choisi, qui faites miséricorde à David, votre oint, et qui la ferez à sa race éternellement.



VOICI les dernières paroles que David a dites : David, fils d’Isaï, cet homme établi pour être l’oint du Dieu de Jacob, ce chantre célèbre d’Israël :

2 L’Esprit du Seigneur s’est fait entendre par moi : sa parole a été sur ma langue.

3 Le Dieu d’Israël m’a parlé ; le Fort d’Israël m’a dit : Que celui qui est le dominateur des hommes soit juste, et qu’il règne dans la crainte de Dieu.

4 C’est ainsi qu’il deviendra comme la lumière de l’aurore, lorsque le soleil se levant au matin brille sans aucun nuage, et comme l’herbe qui germe de la terre, étant arrosée par l’eau de la pluie.

5 Ma maison sans doute n’était point telle devant Dieu, qu’il dût faire avec moi une alliance éternelle, une alliance ferme et entièrement inébranlable. Car il m’a sauvé de tous les périls, il a exécuté tout ce que je voulais, et je n’ai rien désiré qui n’ait réussi.

6 Mais les violateurs de la loi seront tous exterminés comme des épines que l’on arrache, auxquelles on ne touche point avec la main :

7 mais on s’arme pour cela du fer, ou du bois d’une lance ; ou on y met le feu pour les consumer, jusqu’à ce qu’elles soient réduites à rien.

8 Voici le nom des plus vaillants hommes de David : Adino, Hesnite, fut le premier d’entre les trois les plus signalés. Il s’assit dans la chaire comme très-sage ; et il tua huit cents hommes sans se reposer.

9 Eléazar, Ahohite, fils de Dodo, était le second entre les trois plus vaillants, qui se trouvèrent avec David lorsqu’on insulta aux Philistins, et qu’ils s’assemblèrent en un certain lieu pour donner bataille.

10 Les Israélites ayant fui, Eléazar seul fit ferme, et battit les Philistins, jusqu’à ce que sa main se lassât de tuer, et qu’elle demeurât attachée à son épée. Le Seigneur donna en cette journée une grande victoire à Israël ; et ceux qui avaient fui, retournèrent pour prendre les dépouilles des morts.

11 Le plus estimé après lui était Semma, fils d’Agé d’Arari. Les Philistins s’étant un jour assemblés près d’un château, où il y avait un champ plein de lentilles, et ayant fait fuir le peuple devant eux,

12 il demeura ferme au milieu du champ, le défendit contre eux, et en tua un grand nombre ; et Dieu lui fit remporter une victoire signalée.

13 Longtemps auparavant, les trois qui étaient les premiers entre les trente, étaient venus trouver David dans la caverne d’Odollam : c’était au temps de la moisson ; et les Philistins étaient campés dans la Vallée des géants,

14 et avaient mis des gens dans Bethléhem. David étant donc dans son fort,

15 dit comme étant pressé de la soif : Oh ! si quelqu’un me donnait à boire de l’eau de la citerne qui est à Bethléhem, auprès de la porte !

16 Aussitôt ces trois vaillants hommes passèrent au travers du camp des Philistins, et allèrent puiser de l’eau dans la citerne de Bethléhem, qui est auprès de la porte, et l’apportèrent à David ; mais David ne voulut point en boire, et il l’offrit au Seigneur,

17 en disant : Dieu me garde de faire cette faute ! boirais-je le sang de ces hommes, et ce qu’ils ont acheté au péril de leur vie ? Ainsi il ne voulut point boire de cette eau. Voilà ce que firent ces trois vaillants hommes.

18 Abisaï, frère de Joab, fils de Sarvia, était le premier de ces trois. C’est lui qui s’éleva seul contre trois cents hommes, qu’il tua de sa lance. Il s’était acquis un grand nom parmi les trois seconds.

19 C’était le plus estimé d’entre eux, et il en était le chef ; mais il n’égalait pas néanmoins les trois premiers.

20 Banaïas de Cabséel, fils de Joïada, qui fut un homme très-vaillant, fit aussi de très-grandes actions : il tua les deux lions de Moab ; et lorsque la terre était couverte de neige, il descendit dans une citerne où il tua un lion.

21 C’est lui aussi qui tua un Egyptien d’une grandeur extraordinaire. L’Egyptien parut la lance à la main, et Banaïas la lui arracha, n’ayant qu’une baguette seulement, et le tua de sa propre lance.

22 Voilà ce que fit Banaïas, fils de Joïada.

23 Il était illustre entre les trois qui étaient les plus estimés des trente ; mais néanmoins il n’égalait pas les trois premiers. David le prit auprès de sa personne pour exécuter ses commandements.

24 Entre les trente étaient encore Asaël, frère de Joab ; Eléhanan de Bethléhem, fils de l’oncle paternel d’Asaël ;

25 Semma de Harodi ; Elica de Harodi ;

26 Hélès de Phalti ; Hira de Thécua, fils d’Accès ;

27 Abiézer d’Anathoth ; Mobonnaï de Husati ;

28 Selmon d’Ahoh ; Maharaï de Nétophath ;

29 Héled, fils de Baana, qui était aussi de Nétophath ; Ithaï, fils de Ribaï, de Gabaath dans la tribu de Benjamin ;

30 Banaïa de Pharathon ; Heddaï du torrent de Gaas ;

31 Abialbon d’Arbath ; Azmaveth de Béromi ;

32 Eliaba de Salaboni ; Jonathan des enfants de Jassen ;

33 Semma de Orori ; Aïam d’Aror, fils de Sarar ;

34 Eliphélet, fils d’Aasbaï, qui était fils de Machati ; Eliam de Gélo, fils d’Achitophel ;

35 Hesraï du Carmel ; Pharaï d’Arbi ;

36 Igaal de Soba, fils de Nathan ; Bonni de Gadi ;

37 Sélec d’Ammoni ; Naharaï de Béroth, écuyer de Joab, fils de Sarvia ;

38 Ira de Jethrit ; Gareb, qui était aussi de Jethrit ;

39 Urie, Héthéen : qui font trente-sept en tout.



LA colère du Seigneur s’alluma encore contre Israël ; et de là vint que pour les punir, il permit que David donna ordre que l’on comptât tout ce qu’il y avait d’hommes dans Israël et dans Juda.

2 Ce prince dit donc à Joab, général de son armée : Allez dans toutes les tribus d’Israël, depuis Dan jusqu’à Bersabée ; et faites le dénombrement du peuple, afin que je sache combien il y a d’hommes.

3 Joab répondit au roi : Que le Seigneur, votre Dieu, veuille multiplier votre peuple, et même le faire croître au centuple de ce qu’il est aux yeux du roi, mon seigneur ! mais que prétend faire mon seigneur par ce nouvel ordre ?

4 Néanmoins la volonté du roi l’emporta sur les remontrances de Joab et des principaux officiers de l’armée. Joab partit donc avec eux d’auprès du roi, pour faire le dénombrement du peuple d’Israël.

5 Ayant passé d’abord le Jourdain, ils vinrent à Aroër, au côté droit de la ville qui est dans la vallée de Gad,

6 et à Jazer. Ils allèrent de là en Galaad, et au bas pays d’Hodsi. Ils vinrent au bois de Dan, ils tournèrent autour de Sidon.

7 Ils passèrent près des murailles de Tyr, traversèrent tout le pays des Hévéens et des Chananéens, et vinrent à Bersabée, qui est au midi de la tribu de Juda.

8 Ainsi ayant parcouru toutes les terres d’Israël, ils se rendirent à Jérusalem après neuf mois et vingt jours.

9 Joab donna au roi le dénombrement qu’il avait fait du peuple ; et il se trouva d’Israël huit cent mille hommes forts et propres à porter les armes ; et de Juda cinq cent mille.

10 Après ce dénombrement du peuple, David sentit un remords en son cœur ; et il dit au Seigneur : J’ai commis un grand péché dans cette action ; mais je vous prie, Seigneur ! de détourner de devant vos yeux l’iniquité de votre serviteur : car j’ai fait une très-grande folie.

11 Le lendemain matin lorsque David se fut levé, le Seigneur adressa sa parole à Gad, prophète, et voyant de David, et lui dit :

12 Allez dire à David : Voici ce que dit le Seigneur : Je vous donne le choix de trois fléaux ; choisissez celui que vous voudrez que je vous envoie.

13 Gad étant donc venu vers David, lui dit de la part du Seigneur : Ou votre pays sera affligé de la famine pendant trois ans ; ou vous fuirez durant trois mois devant vos ennemis qui vous poursuivront ; ou la peste sera dans vos États pendant trois jours. Délibérez donc maintenant, et voyez ce que vous voulez que je réponde à celui qui m’a envoyé.

14 David répondit à Gad : Je me trouve dans une étrange perplexité ; mais il vaut mieux que je tombe entre les mains du Seigneur, puisqu’il est plein de miséricorde, que dans les mains des hommes.

15 Le Seigneur envoya donc la peste dans Israël depuis le matin de ce jour-là jusqu’au temps arrêté : et depuis Dan jusqu’à Bersabée il mourut du peuple soixante et dix mille personnes.

16 L’ange du Seigneur étendait déjà sa main sur Jérusalem pour la ravager, lorsque Dieu eut compassion de tant de maux, et dit à l’ange exterminateur : C’est assez, retenez votre main. L’ange du Seigneur était alors près de l’aire d’Aréuna, ou Ornan, Jébuséen.

17 Et David le voyant qui frappait le peuple, dit au Seigneur : C’est moi qui ai péché ; c’est moi qui suis le coupable : qu’ont fait ceux-ci qui ne sont que des brebis ? Que votre main, je vous prie, se tourne contre moi et contre la maison de mon père.

18 Alors Gad vint dire à David : Allez dresser un autel au Seigneur dans l’aire d’Aréuna, Jébuséen.

19 David, suivant cet ordre que Gad lui donnait de la part de Dieu, s’y en alla aussitôt.

20 Aréuna levant les yeux, aperçut le roi et ses officiers qui venaient à lui.

21 Il alla au-devant du roi ; il lui fit une profonde révérence en se baissant jusqu’en terre, et il lui dit : D’où vient que mon seigneur et mon roi vient trouver son serviteur ? David lui répondit : C’est pour acheter votre aire, et y dresser un autel au Seigneur ; afin qu’il fasse cesser cette peste qui tue tant de peuple.

22 Aréuna dit à David : Le roi, mon seigneur, peut prendre tout ce qu’il lui plaira pour offrir à Dieu. Voilà des bœufs pour l’holocauste, un chariot et des jougs de bœufs pour le bois.

23 Le roi Aréuna supplia le roi d’accepter toutes ces choses ; et il ajouta : Je prie le Seigneur, votre Dieu, d’agréer le vœu que vous lui faites.

24 Le roi lui répondit : Je ne puis recevoir ce que vous m’offrez : mais je l’achèterai de vous ; et je n’offrirai point en holocauste au Seigneur, mon Dieu, ce qui ne m’appartient pas. David acheta donc l’aire six cents sicles d’or ; et les bœufs, cinquante sicles d’argent ;

25 et il dressa là au Seigneur un autel, sur lequel il offrit des holocaustes et des hosties pacifiques. Ainsi le Seigneur se réconcilia avec Israël, et fit cesser la plaie dont il avait frappé son peuple.


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