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Bigot et sa bande/78

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Paschal Pillet


Le sieur de C. fait un portrait peu flatteur d’un sieur Pillet, commis du munitionnaire Cadet à Lachine. Il ne le place pas dans la liste des millionnaires fait par la guerre. Tout de même, si on peut ajouter foi à son Mémoire du Canada, quand Cadet régla ses comptes avec Pillet, le munitionnaire lui était redevable de 600,000 livres.

Nous reproduisons ici les lignes aimables que le sieur de C. consacre au sieur Pillet :

« On régla les comptes du Munitionnaire qui avoit eu avis que ses fonds avoient été arrêtés en France, et ce fut toujours le S. de Villers qui arrangea ces comptes ; le nommé Pillet, à la Chine, son commis, régla aussi les siens, et il eut de transport pour cette année seulement près de 600,000 livres. Martel, pour les signer eut un présent considérable ; cet homme étoit un habitant, qui n’étoit pas même aisé peu d’années auparavant ; sa maison et la position de sa terre, situées convenablement pour l’embarquement et le débarquement des effets, firent sa fortune ; il sous-traita les vivres : lorsque les convois partoient pour Frontenac, il donnoit des pochetées de biscuit pourri ou gâté, que les hommes ne pouvoient manger ; à la fin du voyage on lui remettoit ces biscuit qui servoit pour une autre fois, et il gagnoit ainsi une quantité prodigieuse de rations ; il faisoit encore des profits considérables sur le paiement des voyages. Le Munitionnaire ayant le crédit de faire commander le monde pour monter les bateaux, il arrivoit quelquefois que les hommes qui étoient de loin n’avoient pas le temps à leur retour d’attendre la commodité de ce Pillet pour être payés — le temps leur étoit trop précieux pour leurs récoltes ou leurs labours. Pillet les faisoient attendre sous prétexte qu’il n’avoit point d’argent, et si longtemps qu’ils perdoient patience et s’en alloient ; alors la paye lui restoit toute entière. Ces actions, et quelques autres semblables, lui attirèrent des reproches ; le crédit du Munitionnaire le soutint, mais il fut en exécration à tous les honnêtes gens. Il s’en consola par ses richesses. »[1]

Le sieur Pillet dont parle le sieur de C. était Paschal Pillet ou Pilet qui habita d’abord le Bout de l’Île puis, après la Conquête s’établit à Montréal où il fit le commerce à son propre compte.

Pour un homme qui avait reçu 600,000 livres de Cadet nous constatons qu’en 1763 il ne possédait que pour quelques centaines de livres.

Paschal Pillet décéda à Montréal le 23 octobre 1780.

  1. Mémoire du Canada.