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Catéchisme d’économie politique/1881/28

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Texte établi par Charles Comte, Joseph GarnierGuillaumin (p. 163-169).
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CHAPITRE XXVIII.

Des Propriétés publiques et des Impôts.


D’où viennent les valeurs qui se consomment pour l’avantage du public ?

Elles proviennent, soit des revenus que rendent les propriétés qui appartiennent au public, soit des impôts.

Les propriétés publiques sont-elles des propriétés appartenant à la nation tout entière ?

Quelquefois elles appartiennent à la nation tout entière ; d’autres fois à une partie de la nation, à une province, à une ville.

En quoi consistent, pour l’ordinaire, ces propriétés ?

Ce sont ou des capitaux ou des biens-fonds, mais le plus souvent des biens-fonds, terres, maisons, usines, que le gouvernement ou les communes donnent à bail, et dont ils consomment le revenu pour l’avantage du public. Quand ce sont des forêts, on en vend la coupe annuelle.

Qui est-ce qui paye les impôts ?

Ce sont les particuliers que, sous ce rapport, on nomme contribuables.

En quelles valeurs se paye l’impôt ?

Ordinairement en monnaie du pays ; mais quelquefois aussi en nature, c’est-à-dire en produits ou bien en corvées où le contribuable fournit son service personnel ou celui de ses gens et de ses bestiaux. De toutes manières, l’impôt se mesure sur ce qu’il coûte au contribuable et non sur ce qu’il rend au gouvernement.

Dites-m’en la raison.

Parce que la perte que le gouvernement peut faire sur les valeurs dont il impose le sacrifice au contribuable ne diminue pas l’étendue de ce sacrifice. Si un gouvernement force des cultivateurs à faire des corvées qui les obligent de négliger leurs récoltes, et qu’il en résulte pour eux, outre la perte de leurs journées évaluées à 50 francs, une autre perte de 50 francs pour le dommage qu’ils éprouvent, ils payent réellement une contribution de 100 francs. Et si, au moyen de cet impôt, le gouvernement exécute un travail qui aurait pu être exécuté par entreprise pour 30 francs, il est constant que le gouvernement, dans ce cas, a levé un impôt de 100 francs, et qu’il n’a reçu qu’une valeur de 30 francs. C’est comme s’il avait consommé, sans avantage pour le public, une valeur de 70 francs.

Sur quelles valeurs se prélèvent les valeurs payées par les contribuables ?

Sur les profits qu’ils tirent de leur industrie, de leurs capitaux et de leurs terres. C’est une portion de leurs revenus que les contribuables ne consomment pas, et qui est transportée au gouvernement, pour être consommée par lui dans l’intérêt du public. Ainsi, quand on parle des revenus d’une nation, si aux revenus gagnés par les particuliers on ajoutait le montant des impôts, on compterait cette dernière somme deux fois.

Avec quoi les particuliers payent-ils l’impôt quand leurs revenus ne suffisent pas à leurs dépenses et à cette charge ?

Avec une partie de leurs capitaux, ce qui attaque une des sources de la production. Ce malheur arrive surtout dans les pays où l’impôt est excessif ; et s’il n’entraîne pas le déclin total du pays, c’est parce que les accumulations faites par certains particuliers balancent ou surpassent la déperdition éprouvée par certains capitaux.

Comment est fixée la quote-part de chacun dans la contribution commune ?

Lorsqu’elle n’est pas fixée arbitrairement, on établit de certaines règles pour parvenir à faire contribuer chaque chef de famille proportionnellement à ses revenus.

Suffit-il, pour que l’impôt soit équitable, qu’il se trouve réparti dans une égale proportion sur chaque revenu ?

Non ; un impôt qui s’élèverait au cinquième des revenus, et qui ferait payer 60 francs à un revenu de 300 francs, serait une charge infiniment plus lourde pour ce revenu que les 6,000 francs que le même impôt ferait payer à un revenu de 30,000 francs.

Comment connaît-on les revenus des particuliers pour les imposer ?

Si l’intérêt personnel ne portait pas les hommes à déguiser la vérité, il suffirait de demander à chacun ce qu’il gagne annuellement par son industrie, ses capitaux et ses terres ; on aurait la meilleure base de l’impôt ; on lui demanderait une part quelconque de son revenu ; ce serait l’impôt le plus équitable, le moins lourd, et celui dont le recouvrement coûterait le moins.

À défaut de ce moyen, quels sont ceux que l’on emploie pour faire contribuer les particuliers, autant qu’on le peut, en proportion de leurs revenus ?

On juge des revenus des propriétaires fonciers d’après la valeur locative de leurs terres, c’est-à-dire d’après le prix qu’elles se louent ou qu’elles pourraient se louer ; de là la contribution foncière. On juge du revenu de ceux dont les revenus se fondent sur l’intérêt de leurs capitaux ou les profits de leur industrie, d’après la nature de leur commerce, l’importance de leur loyer, le nombre des portes et des fenêtres qui se trouvent à leur maison ; de là les patentes, la contribution personnelle et mobilière, l’impôt des portes et fenêtres.

C’est ce qu’on appelle en France les contributions directes, parce qu’on les demande directement et nominativement à chaque particulier.

N’impose-t-on pas d’autres charges sur les revenus ?

Oui ; l’on suppose que chacun fait des consommations proportionnées à ses revenus ; et l’on fait payer les producteurs de certaines marchandises, présumant que le prix de la marchandise augmentera d’autant, et que cette contribution retombera sur ses consommateurs.

Dans quelles occasions fait-on payer les producteurs de ces marchandises ?

Tantôt c’est au moment de leur première extraction, comme on fait en France pour l’impôt sur le sel, au Mexique et au Pérou, pour l’impôt sur l’or et l’argent ; tantôt c’est au moment où les marchandises viennent de l’étranger ; d’où résultent les droits de douane ; ou bien de la campagne dans les villes ; d’où résulte en France l’octroi ; tantôt c’est au moment où la marchandise est vendue au consommateur, comme lorsqu’on fait payer les droits sur les boissons, sur les billets de spectacles, sur les voitures publiques, sur les funérailles.

C’est ce qu’on nomme en France les contributions indirectes, parce qu’elles ne sont pas directement demandées à ceux sur qui l’on suppose qu’elles retombent.

N’y a-t-il pas d’autres manières d’atteindre les revenus des consommateurs ?

Le gouvernement se réserve quelquefois l’exercice exclusif d’une certaine industrie, et à l’aide du monopole en fait payer les produits beaucoup au delà de ce qu’ils lui coûtent de frais de production, comme quand il s’attribue la fabrication exclusive et la vente du tabac, ou bien le transport des lettres par la poste. Dans ce dernier cas, l’impôt n’est pas égal à la totalité des ports de lettres, mais seulement à la partie de ce port qui excède ce qu’il coûterait si ce service était abandonné à une libre concurrence.

Ne saisit-on pas d’autres occasions encore de lever des contributions sur les facultés des contribuables ?

Oui ; on lève des droits sur certaines transactions qui se répètent souvent dans une société industrieuse et riche. On fait payer un droit d’enregistrement sur les ventes, les baux, les successions, les contrats, les actes des procédures, un droit de timbre sur les effets de commerce, les quittances, etc.

Les gouvernements trouvent même des profits dans des loteries, des maisons de jeux, et d’autres lieux où il n’y a aucune valeur produite et où, par conséquent, l’impôt ne fait qu’aggraver les pertes qu’on y éprouve.

Qu’est-ce que les frais de recouvrement ?

Les frais de recouvrement ou de perception se composent de ce que l’on accorde aux receveurs, aux administrations, aux régies, aux fermiers-généraux, chargés de faire payer les contribuables. Ces frais sont une charge pour les nations, sans procurer aucun des avantages qui devraient être le dédommagement du sacrifice de l’impôt.