Aller au contenu

Correspondance de Voltaire/1760/Lettre 4354

La bibliothèque libre.
Correspondance : année 1760
Garnier (Œuvres complètes de Voltaire, tome 41p. 81-82).

4354. — À M. SÉNAC DE MEILHAN[1].
30 novembre.

Je sens bien vivement vos bontés, monsieur ; je vous supplie de ne me pas oublier auprès de monsieur votre père. Je suis bien flatté de son ressouvenir, et je serai reconnaissant toute ma vie de son digne et noble procédé. J’aurai à lui écrire dans quelques jours pour une affaire de son ministère, et qui mérite son attention. Il y a presque sous les fenêtres de mon château, au pays de Gex, un marais qui infecte le pays. Le village où ce marais prend naissance est désert ; il n’y reste plus qu’un habitant. Le reste est mort de la contagion, ou s’est réfugié ailleurs. Les bestiaux qui paissent auprès du marais meurent. La négligence amènera la peste. J’ai présenté des regrets au conseil, j’ai proposé de dessécher le marais à mes frais ; on a envoyé un commissaire sur les lieux. Rien ne s’est pu faire. J’enverrai à monsieur votre père les certificats des magistrats de la province. Il s’agit du bien public. Il faudra bien qu’il s’en mêle, et que la chose réussisse. Les faux dévots ne me trouveront-ils pas bien impie de vouloir changer le cours de la nature et de prévenir la peste ?

Le solitaire est tendrement attaché au pèlerin, V.

  1. Les Autographes…, par M. de Lescure. Paris, Gay, 1865.