Aller au contenu

Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 4883

La bibliothèque libre.
Correspondance : année 1762GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 89-90).

4883. — À M. SAURIN.
À Ferney, 17 avril.

J’ai cru, monsieur, que vous ne seriez pas fâché d’apprendre que Mlle Corneille vient de jouer votre rôle de Julie[1] avec un applaudissement unanime. Vous n’aurez jamais d’actrice d’un si beau nom. Je ne peux lui donner une meilleure éducation qu’en lui faisant connaître le monde comme vous l’avez peint.

Votre pièce, d’ailleurs, a été très-bien jouée, et Lekain, qui était au nombre des spectateurs, en a été extrêmement content.

Je vous prie de dire à M. Duclos que j’ai cessé l’envoi des Commentaires sur Corneille, parce que je me suis remis à l’espagnol. J’ai voulu donner une traduction de l’Hèraclius de Calderon ; elle est d’un bizarre, d’un sauvage, d’un comique, et, en certains endroits, d’un sublime, qui méritent d’être connus : c’est la nature pure ; rien ne ressemble plus à Shakespeare.

Si vous écrivez à frère Helvétius, je vous supplie de ne lui pas laisser ignorer ma tendre amitié pour lui. Je n’écris guère, parce que je n’en ai pas le temps ; et si je ne vous écris pas de ma main, c’est que j’ai la fièvre. Adieu, mon très-cher confrère.

  1. Personnage des Mœurs du temps ; voyez la note, tome XLI, page 191.