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Cours d’agriculture (Rozier)/SOUCI

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Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 264-266).


SOUCI. Tournefort le place dans la quatrième section de la quatorzième classe des herbes à fleur radiée, dont les semences sont renfermées dans des capsules, & il l’appele Cultha vulgaris. Von-Linnè le nomme Calendula officinalis, & le classe dans la singénésie polygamie nécessaire.

Fleur, Radiée, composée de plusieurs fleurons de couleur jaune, hermaphrodites dans le disque, & femelles à la circonférence. Les fleurons hermaphrodites sont de la longueur du calice ; les femelles très longs & à trois dentelures. Le calice commun, de plusieurs pièces, divisé en quatorze ou vingt segmens linéaires, en forme de lance & presqu’égaux.

Fruit. Les fleurons hermaphrodites dans le centre du disque, n’en ont point. Ceux du disque produisent quelques semences membraneuses, oblongues & à deux cornes. Les fleurons femelles en produisent de plus grandes, qui sont recourbées, triangulaires, de la forme d’un bateau, hérissées de pointes ; les unes & les autres renfermées dans des espèces de capsules, contenues par le calice applati, sur un réceptacle nu & plane.

Feuilles. Simples, entières, ovales, plus étroites à la base qu’au sommet, velues, sans queue & embrassant presque la tige par leur base.

Racine. En forme de fuseau, fibreuse, blancheâtre.

Port. Tige herbacée, grêle, cylindrique, rameuse ; les fleurs naissent au sommet, portées sur des pédicules, Les fleurs sont placées alternativement. Elles fleurissent pendant toute l’année, excepté pendant qu’il gèle.

Lieu. Les champs, les vignes,

Propriétés. La plante est amère au goût, emménagogue, fondante, céphalique, anti-spasmodique, hépatique. Les fleurs provoquent légèrement le flux menstruel, les fleurs blanches, les lochies, lorsqu’il n’existe ni inflammation, ni éréthisme, ni pléthore considérable, & que les écoulemens tardent à reparoître. En conséquence elles sont indiquées dans la suppression du flux menstruel par excès de graisse ; la suppression des règles par impression des corps froids ; la suppression des règles par de violens exercices. Elles échauffent médiocrement, & elles ne fatiguent ni l’estomac ni les intestins.

Usages. Fleurs séchées & pulvérisées, depuis quinze grains jusqu’à une drachme, incorporées avec suffisante quantité de sirop. Fleurs récentes depuis une drachme jusqu’à une once en macération au bain-marie dans huit onces d’eau. Fleurs sèches depuis demi-drachme jusqu’à demi-once en macération dans la même quantité d’eau.

Culture. Cette plante, si maigre dans nos champs, si multipliée dans les vignobles de quelques cantons de France, où sa fleur communique aux raisins & au vin qu’on en retire, son odeur forte & désagréable, est cependant le type de ces beaux soucis plus larges que des écus de six livres, qui font l’ornement de nos parterres & de nos jardins. La couleur de la fleur bien prononcée, bien tranchante, produit un grand effet lorsque plusieurs plantes réunies sont en fleur à la même époque ; d’ailleurs, le souci mérite quelque considération, parce qu’il est en fleur pendant plus de neuf mois de l’année, si la rigueur du froid ne suspend pas sa végétation. Il exige peu de soins, brave les sécheresses, les chaleurs, & il dédommage en automne de l’état de Langueur où elles l’ont mis pendant l’été ; mais pour peu que le terrain dans lequel il est planté, soit substantiel, peur peu qu’on lui donne les arrosemens nécessaires, ses fleurs larges & éclatantes dédommagent de la peine que l’on prend.

On sème sa graine dans une bonne terre de jardin, aussitôt qu’on ne craint plus l’effet des gelées tardives (chacun suivant son climat). La graine germe & lève facilement ; & dès que les quatre premières feuilles sont bien développées, la plante est susceptible de transplantation.

Le souci des jardins a produit une singulière variété. La fleur en est moins grande, moins colorée & d’un jaune plus pâle. À mesure que les fleurs se fannent, il sort de leur calice cinq à sept pédicules longs de deux à trois pouces, garnis à leur sommet d’un vrai souci, mais en miniature, qui fleurit & produit sa graine. Je l’ai semée avec soin, & elle n’a jamais levé. Peut-être d’autres fleuristes ont-ils été plus heureux que moi. L’odeur de la mère fleur & de ses enfans est moins forte & moins désagréable que celle des beaux soucis des jardins. Il faut cueillir la graine de la mère fleur pour avoir de bonnes semences.

Parmi les huit ou dix espèces botaniques de soucis, il en est une qui, malgré son peu de beauté pour sa fleur, mérite l’attention des curieux ; c’est le souci d’Éthiopie, qu’on pourroit appeler souci baromètre. Linné le désigne sous la dénomination de calendula pluvialis. Sa fleur est blanche en-dedans, d’un violet ferrugineux en dehors, portée sur un pédicule en forme de fil. Ses feuilles sont en forme de fer de lance, sinuées, légèrement dentelées. Lorsque sa fleur n’est pas ouverte à six heures du matin, on est assuré qu’il pleuvra dans la journée, quand même à cette heure les baromètres n’annonceroient aucun changement de temps.