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Délicieuses voluptés/16

La bibliothèque libre.
(pseudo non identifié)
Éditions de Minuit, 8 rue de Tracy (p. 143-153).
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XVI

Roger de Huchetelles conserva le souvenir de cette voluptueuse scène. Il respirait toujours le parfum intime de la chair de Colette, et il avait hâte de retourner avec elle dans la bibliothèque solitaire.

Toute timidité vaincue, il entreprit dès le lendemain le siège de la jolie Colette. Avec mille ruses, il s’approchait d’elle pour lui laisser entendre qu’il lui serait agréable de renouveler avec elle les ébats de la veille.

Mais Colette, dans le but d’exciter davantage le jeune homme faisait semblant de ne pas remarquer son secret désir, et la journée se passa sans que s’accomplisse ce à quoi le pauvre Roger ne cessait de penser. Colette se consacra exclusivement à Jacqueline, et les deux jeunes filles sortirent dans le parc le matin et l’après-midi sans même inviter le jeune homme à les suivre.

Force fut à Roger de rester seul ! Il s’enferma dans la bibliothèque pour s’y livrer à une délicieuse délectation morose.

Mais, le lendemain, il n’hésita pas à entreprendre plus franchement la belle Colette pour l’amener à ses fins. Profitant d’un moment où elle flânait seule près des ifs de la cour, il lui dit :

— Colette, ne monterons-nous pas à la bibliothèque aujourd’hui ?…

La jeune femme le regarda tendrement ; puis doucement, d’une voix caressante, elle lui répondit :

— Oui, mon chéri, monte à la bibliothèque après déjeuner, j’irai ensuite t’y rejoindre.

— Oh ! Colette !…

Et calmement, le jeune homme prit la main de Mademoiselle de Verneuse, et il la porta à ses lèvres…

Le premier, Roger arriva dans la silencieuse cité des livres, où les bustes de sévères personnages le regardèrent de leurs yeux morts. Roger était joyeux, tout rempli de cette allégresse qui marque l’attente amoureuse. Avec un élan enfantin, il alla baiser le fauteuil sur lequel Colette s’était assise l’avant-veille, et aussi le divan où le merveilleux corps nu de Jacqueline reposa. Puis il marcha lentement de long en large, s’approchant de temps à autre de la porte pour écouter si Colette montait l’escalier.

Mais l’astucieuse jeune femme voulait le faire languir et exaspérer son désir. Aussi, le laissa-t-elle attendre plus de deux heures !

Enfin elle arriva souriante et saisit immédiatement son amoureux en l’attirant sur sa poitrine. Et pour la première fois, Roger la vit parée d’un joli corsage très décolleté qui laissait sortir plus de la moitié de ses seins. Il les couvrit de baisers, farouchement ; et à la sentir frissonner, il constata qu’elle ne restait pas insensible. Doucement, elle commença à gémir, puis sans dire un mot, elle releva le visage du jeune homme, l’approcha de ses lèvres et lui darda sa langue dans la bouche.

Ils s’enlacèrent étroitement, et échangèrent un long baiser ; puis, sans séparer leurs lèvres, ils se dirigèrent vers le grand fauteuil. Roger pressa Colette de s’y asseoir, mais elle, brusquement l’entraîna à l’autre extrémité de la bibliothèque, vers le divan sur lequel elle se laissa choir, en s’arrangeant très habilement pour que sa robe se défisse dans la chute.

Ah ! délicieuse ruse de la jolie Colette ! Elle se trouva soudain couchée, en chemise, sans même un pantalon, débarrassée du corsage cependant peu encombrant, bref dans un déshabillé voluptueux et propice aux jeux les plus libertins. Et d’un geste prompt et vif, elle fit sauter les boutons de la culotte de son compagnon, de telle sorte qu’il ne tarda pas à se trouver lui aussi, à peu près nu comme elle.

La délicieuse créature lui prodigua les plus tendres caresses, et lui reprenant la bouche dans la sienne, sa langue s’activa en un long baiser qui plongea le jeune homme dans une extase profonde.

Son émoi allait grandissant, et Colette écartant doucement les jambes, il alla progressivement, s’insinuant entre ses cuisses et sentant tout contre lui les douces frisettes de sa toison.

D’instinct, sa virilité juvénile et peu experte encore, trouvait quand même le chemin propice à son voluptueux office. Mais, il n’y serait pas arrivé aussi facilement sans l’aide de Colette, dont les doigts exquisement caressants le guidèrent vers le centre de son plaisir, là où l’avant-veille, il avait poussé de la langue une si douce exploration.

Il fit alors ce que la nature commande, et Colette à coups de reins, activa la cadence propice à l’accomplissement parfait de l’acte d’amour.

Roger gémissait, en proie à la plus grande volupté. Des sentiments inconnus jusqu’alors l’envahirent, et il eût en un éclair, la soudaine explication de bien des choses énigmatiques pour lui jusqu’à ce jour.

Tout en se laissant aller au doux mouvement de va et vient, facilité par l’amoureux manège de Colette, il poussait de petits cris plaintifs. Mais sa jolie compagne les étouffait immédiatement sous ses baisers passionnés.

Soudain, il arriva au plaisir suprême. En une seconde, il fut transporté dans un état absolument inconnu jusqu’à ce jour. Il eût la conscience du spasme, et sentit qu’il était parvenu au résultat cherché dans l’acte d’amour.

Il poussa un grand cri, Colette desserra son étreinte, et elle le poussa devant elle, en guidant son visage vers ses cuisses, cependant que langoureusement elle lui commandait :

— « Va, chéri, caresse-moi maintenant comme l’autre jour… »

Car l’amoureuse Colette n’était pas encore satisfaite.

Roger de Huchetelles la considéra un moment, en proie à l’admiration la plus vive. Elle avait un corps splendide, lequel ne le cédait en rien à celui de la douce Jacqueline.

Une poitrine admirablement bombée avec les seins aux mignonnes pointes dardées. Un ventre aux courbes harmonieuses, se perdant vers la mystérieuse toison brune, découverte par l’écartement des cuisses bien en chair. Et deux jambes merveilleuses terminées par de jolis petits pieds admirablement cambrés par les chaussures de daim au talon haut.

Ce gracieux spectacle raviva l’ardeur du jeune homme, et c’est avec une passion renouvelée qu’il s’insinua entre les jambes de son initiatrice.

Très longuement, il la baisa et la caressa. Colette ne cessait de lui dire de très douces choses qu’il pouvait entendre entre deux cris de plaisir. Puis, il la sentit frémir toute sous sa langue inlassable, et soudain, poussant un sourd gémissement, elle l’écarta et resta étendue, plongée dans une voluptueuse ivresse.

Roger continuait à doucement la baiser ça et là, attardant ses lèvres sur sa chair très douce. Elle ouvrit alors les yeux, et elle le regarda avec une expression indéfinissable.

Il se coucha près d’elle, et ils se baisèrent encore longuement sur la bouche, jusqu’au moment où se r’habillant, Colette le quitta après une dernière caresse.

Roger de Huchetelles s’attarda assez longtemps dans la bibliothèque, couché sur le divan, songeant à tout ce qui venait de se passer, conscient d’être désormais un homme.

Et soudain, pensant à la douce Jacqueline, il se dit qu’il fallait sans plus tarder profiter des leçons de Colette, et se livrer avec elle, aux mêmes ébats.