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Dans la rue (Bruant)/Conasse

La bibliothèque libre.
Aristide Bruant (Volume IIp. 113-119).


CONASSE


T’es pas dessalé’ que j’te dis.
T’as trimardé tout’ la soirée
Et te v’là ’cor’ sans un radis.
C’est toujours el’ dix ed’ purée.

Vrai, j’en ai les trip’ à l’envers !
Ça m’fait flasquer d’voir eun’ pétasse
Qui pass’ tous les soirs à travers !
Bon Dieu ! faut-i’ qu’tu soy’s conasse !


Tiens, j’te vas dir’ comment qu’on fait :
C’est pas malin… Tu vas au gonce,
Tu y dis : « T’as eun’ gueul’ qui m’plaît,
Viens-tu chez moi, mon p’tit Alphonse ? »
— I’ dit : « Non. » — Mais c’est du chiquet.
Tu y r’dis : « Viens, mon p’tit Narcisse,
Viens, pour toi ça s’ra qu’larant’quet. »
Et tu l’emmèn’ à la condisse.


Et pis là, tu tap’ au pognon.
Ceux qui s’laiss’ empiler sans s’cousse,
On les appell’ mon p’tit mignon,
On les dégringole à la douce.
Mais les lapins, mais les bécants,
Ceux avec qui qu’ya pas d’affure,
Les emmerdeurs et les croquants,
On les dégringole à la dure :


On leur fait l’coup du culbutant,
On leur fait l’artiche et les poches,
Et quand i’s rouspèt’nt en partant,
Quand i’s font du pet… gare aux broches !
Nous somm’s là !… Et si les bochons
Suffis’nt pas… on a des eustaches
Pour les saigner comm’ des cochons !
À bas les pant’ et mort aux vaches !