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De l’affection calculeuse des voies urinaires du bœuf

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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE DE TOULOUSE


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DE


L’AFFECTION CALCULEUSE


DES


VOIES URINAIRES DU BŒUF


PAR


Paul-Émile FAURIE


De Monségur (Gironde)


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TOULOUSE


IMPRIMERIE DES ORPHELINS JULES PAILHÈS


43, rue des Balances, 43


――


1877




ÉCOLES NATIONALES VÉTÉRINAIRES




inspecteur-général :


M.H.BOULEY O. ❄, membre de l’Institut, président de l’Académie de Médecine, etc.




ÉCOLE DE TOULOUSE


directeur


M. LAVOCAT ❄ membre de l’Académie des Sciences de Toulouse, etc.


professeurs :


MM. LAVOCAT ❄, Tératologie.
Anatomie des régions chirurgicales.
LAFOSSE ❄, Pathologie spéciale.
Police sanitaire et Jurisprudence.
Clinique et consultations.
BIDAUD, Physique
Chimie.
Pharmacie et Matière médicale.
Toxicologie et Médecine légale.
N***, Hygiène générale et Agriculture.
Hygiène appliquée ou Zootechnie.
Botanique.
Extérieur des animaux domestiques.
N***, Pathologie et Thérapeutique générales.
Pathologie chirurgicale et obstétrique.
Manuel opératoire et Maréchalerie.
Direction des Exercices pratiques.
TOUSSAINT, Anatomie générale et Histologie
Anatomie descriptive.
Physiologie.


CHEFS DE SERVICE :


MM. MAURI, Clinique, Pathologie spéciale, Police sanitaire et Jurisprudence.
LAULANIÉ, Anatomie générale et descriptive, Histologie, Physiologie.
LABAT, Clinique, Thérapeutique, Extérieur et Zootechnie.
LIGNON, Clinique chirurgicale et Chirurgie, Pathologie générale, Histologie pathologique.
N…, Physique, Chimie et Pharmacie.


JURY D’EXAMEN

MM. BOULEY O. ❄, Inspecteur-général.
LAVOCAT ❄, Directeur.
LAFOSSE ❄, Professeurs.
TOUSSAINT,
BIDAUD,
MAURI, Chefs de Service.
LAULANIÉ,
LABAT,
LIGNON,


――✾oo✾――


PROGRAMME D’EXAMEN
Instruction ministérielle du 12 octobre 1866.


THÉORIE Épreuves
écrites
Dissertation sur une question de Pathologie spéciale dans ses rapports avec la Jurisprudence et la Police sanitaire, en la forme soit d’un procès-verbal, soit d’un rapport judiciaire, ou à l’autorité administrative ;
Dissertation sur une question complexe d’Anatomie, de Physiologie et d’Histologie.
Épreuves
orales
Pathologie spéciale ;
Pathologie générale ;
Pathologie chirurgicale ;
Maréchalerie, Chirurgie ;
Thérapeutique, Posologie, Toxicologie, Médecine légale ;
Police sanitaire et Jurisprudence ;
Agriculture, Hygiène, Zootechnie.
Histologie pathologique.
PRATIQUE Épreuves
pratiques
Opérations chirurgicales et Ferrure ;
Examen clinique d’un animal malade ;
Examen extérieur de l’animal en vente ;
Analyses chimiques ;
Pharmacie pratique ;
Examen pratique de Botanique médicale et fourragère.
À MON PÈRE — À MA MÈRE
Recevez, comme gage de mon affection et de ma gratitude, ce modeste travail, fruit de vos bontés et de votre amour pour moi.
À MA SŒUR & À MON BEAU-FRÈRE
Attachement sincère.
À TOUS MES PARENTS
Gage d’affection.
À MES PROFESSEURS
En souvenir de leurs précieuses leçons.
À tous ceux à qui je dois
le Respect et la Reconnaissance.

AVANT-PROPOS

Appelé à exercer la Médecine vétérinaire dans une contrée où les animaux de l’espèce bovine sont à peu près exclusivement employés pour les besoins de l’agriculture, j’ai dû, pendant le cours de mes études, m’occuper, d’une manière spéciale, des nombreuses maladies qui attaquent ces précieux auxiliaires du cultivateur.

Parmi ces maladies, une des plus fréquentes et des plus graves est l’affection calculeuse des voies urinaires ; — insidieuse dans son mode de manifestation, assez irrégulière dans sa marche, elle mérite, à tous égards, une attention toute particulière de la part des praticiens, aussi n’ai-je pas hésité un seul instant à choisir cette affection comme sujet de ma thèse.

En entreprenant ici son étude, je me suis proposé de rassembler, en exposant avec autant de méthode et de précision que possible, les diverses données que la Médecine vétérinaire possède aujourd’hui sur cette question, dans le but d’éclairer le diagnostic de cette maladie et partant d’arriver à l’application méthodique du traitement que son existence réclame.

Pour remplir ma tâche, j’ai dû naturellement m’inspirer des nombreuses observations, faites par les plus habiles vétérinaires de notre époque, et mettre à profit les savantes leçons de mes honorés maîtres.

Si malgré mes efforts j’ai laissé subsister quelque imperfection dans la rédaction de cet opuscule, je réclame, de la part du lecteur, l’indulgence que mérite tout premier essai.

E.F.

DE L’AFFECTION CALCULEUSE
DES VOIES URINAIRES D’UN BŒUF


§ 1. — Définition. — Division.

L’affection calculeuse des voies urinaires, connue encore sous le nom de sable, gravelle, gravier, pierre, lithiase, est une maladie déterminée par des concrétions d’apparence pierreuse qui se forment dans les voies urinaires, par la précipitation des éléments inorganiques que l’urine tient en solution.

Elle est caractérisée le plus ordinairement par une gêne plus ou moins manifeste dans le rejet de l’urine et par l’apparition de coliques dont l’intensité est en rapport avec le degré de dysurie. Elle est rarement curable et peut faire succomber les animaux si la main de l’homme n’intervient pas quand les symptômes sont à leur summum d’intensité.

Les calculs urinaires peuvent se former dans les différentes régions de l’appareil excréteur de l’urine, y séjourner, et produire des accidents variables suivant le siége qu’ils occupent. On les distingue d’après l’organe dans lequel ils séjournent ; ceux des reins sont désignés sous le nom de calculs rénaux ; ceux des uretères, calculs urétéraux ; ceux de la vessie, calculs vésicaux ; ceux de l’urèthre, calculs uréthraux ; et enfin ceux du prépuce, calculs prépuciaux.

Avant de donner une description sommaire de ces différentes sortes de calculs, nous allons dire quelques mots sur l’historique de ces productions morbides.

§ 2. — Historique.

Dans l’espèce humaine, l’affection calculeuse des voies urinaires est connue depuis les premiers âges de la médecine, mais chez nos animaux domestiques cette maladie est restée longtemps inconnue. En effet, la médecine de nos animaux, réduite pendant des siècles à quelques pratiques grossières, confiée à des hommes peu expérimentés, à des mains inhabiles, resta bien en arrière de la médecine humaine quoique ces deux sœurs aient pris naissance dans le même berceau.

Ce ne fut qu’après un grand nombre de siècles et à la suite d’observations minutieuses, faites par des hommes intelligents, que les ténèbres de l’ignorance se dissipèrent peu à peu devant la marche envahissante du flambeau de la science réelle. Les maladies de nos animaux furent alors étudiées avec un soin tout particulier ; des autopsies furent faites en nombre considérable et on vit alors qu’on avait vécu dans un monde d’erreurs et qu’on s’était basé sur une foule d’hypothèses plus absurdes les unes que les autres.

Aristote fit de nombreuses recherches sur l’histoire naturelle, il possédait des notions étendues sur les maladies des animaux, mais il croyait que l’espèce humaine seule était atteinte de concrétions calculeuses ; — il a commis une grande erreur.

Ce n’est que plus tard, lorsqu’ils eurent trouvé, dans les différents organes des animaux, des concrétions plus ou moins nombreuses que les hippiâtres commencèrent à avoir une idée assez précise sur cette maladie. Tous nos animaux domestiques fournirent des spécimens à cette étude, et dès lors il ne fut plus permis de partager l’idée du célèbre précepteur d’Alexandre.

Liebknecht est le premier hippiâtre qui trouva dans l’abdomen d’une vache, sacrifiée pour la boucherie, une grande quantité de pierres de grandeur et de formes différentes, les unes rondes, les autres sphériques, d’autres cubiques, etc. Cette vache avait toujours fourni un très bon lait et aucun symptôme alarmant ne s’était manifesté.

Plus tard, Vagnerus fit connaître une pierre de forme sphérique, d’un jaune foncé, d’une substance très-dure et du poids de treize onces, huit dragmes (437 gr. 45) qu’il découvrit dans le réseau ou second estomac d’une vache. Quelque temps après, il découvrit une autre pierre ovalaire d’une couleur cendrée et du poids d’une once et une dragme (35 gr. 15) dans les intestins d’un bœuf.

Libovius trouva, dans le rein d’un bœuf, un calcul brillant, argenté. Borelli en trouva un nombre considérale dans la vessie et un seul, mais d’un volume considérable, dans le canal de l’urètre d’un bœuf.

Enfin Voltaire, en 1771, envoya à l’École de Lyon, une grande quantité de concrétions calculeuses qui furent trouvées dans la vessie d’un bœuf mort à Ferney ; ces concrétions devinrent pour Bourgelat, l’occasion de recherches sur les pierres qui se forment dans le corps des grands animaux et d’expériences directes pour en étudier la symptomatologie.

Jusqu’ici on avait seulement constaté la présence des calculs dans l’organisme animal, mais personne encore n’avait essayé d’expliquer leur mode de formation ; ce n’est que quand les recueils scientifiques eurent inséré de nombreuses observations que quelques vétérinaires tentèrent de généraliser les connaissances acquises sur ces produits morbides. Ehrmann, en 1778, ouvrit la voie ; il émit, sur leur origine et leur mode de formation, des idées plus rationnelles que ses prédécesseurs ; il fut suivi dans cette voie par des hommes d’un grand mérite tels que Fromage de Feugré en 1810, Girard en 1823, Gurlt en 1834-1849, Gellé en 1839, Morton en 1844.

L’impulsion étant donnée, plusieurs vétérinaires, français et étrangers, continuèrent l’étude de leurs devanciers sur cette importante question. Parmi les auteurs modernes qui s’en sont occupés, nous pouvons citer Fuerstenberg, Hertwig, Fuchs, en Allemagne ; Verheyen en Belgique ; Serres, Caussé, Cruzel, Beale, H. Bouley, Lafosse, en France, et enfin, Bruckmüller, Roell en Autriche.

Il n’est donc plus permis, comme du temps d’Aristote, de douter de l’existence des calculs dans le corps des animaux ; les publications périodiques font connaître de temps à autre quelques faits observés et aujourd’hui les calculs forment un chapitre important de la Pathologie vétérinaire.

§ III. — Des calculs urinaires.

Nous savons que les concrétions inorganiques peuvent se rencontrer dans chaque division de l’appareil urinaire, soit qu’elles prennent leur point de départ dans une division supérieure et qu’elles arrivent toutes formées au point où on les trouve, soit qu’elles se forment à ce même point. Nous avons donc à étudier les calculs dans chacune des divisions qui composent l’appareil urinaire, mais avant d’étudier d’une manière spéciale chacun de ces groupes, nous croyons devoir exposer quelques caractères généraux se rapportant à toutes les variétés que nous devons faire connaître.

A. — Caractères Généraux.

Les calculs urinaires, étudiés d’une manière générale, doivent être envisagés au point de vue de leur dimension, de leur forme, de leur odeur, de leur saveur, de leur couleur, de leur consistance, de leur structure, de leur composition chimique et de leur degré de solubilité.

Les dimensions des calculs urinaires varient du volume d’un grain de sable à celui d’une grosse noisette ; entre ces deux extrêmes on trouve toutes les dimensions intermédiaires, mais ils ne donnent naissance à des symptômes alarmants que lorsqu’ils ont acquis un volume suffisant pour empêcher le libre écoulement de l’urine au dehors. Les plus petits portent le nom de graviers, de sédiments ; les plus gros portent le nom de pierre, de calculs.

Leur forme varie suivant les organes et les conduits où ils ont pris naissance ; ils sont le plus ordinairement sphériques, ovoïdes, mais souvent aussi ils sont aplatis, cylindriques, etc. Lorsqu’ils existent en nombre dans un organe quelconque, ils frottent les uns contre les autres, s’aplatissent par leur surface de contact et il s’y forme des facettes planes, plus ou moins concaves ou convexes. Dans les bassinets des reins, les facettes planes qui les limitent, sont ordinairement réunies par des lignesdroites et leur donnent des formes prismatiques qui les feraient assez facilement confondre avec le gravier, provenant de la brisure ou de la désagrégation des roches. Leur surface est tantôt lisse, polie ; d’autres fois elle présente des dépressions, des trous, des rugosités, des aspérités rappelant la noix de galle ; d’autres fois enfin elle est irrégulièrement mamelonnée et les calculs prennent alors le nom de calculs mûraux ; cette variété est plus rare chez le bœuf que chez le cheval, néanmoins on la constate quelquefois.

Leur odeur et leur saveur sont le plus souvent nulles ; leur couleur est variable, c’est ainsi qu’on a trouvé des calculs blancs, gris, bruns, verts, jaunes, avec diverses nuances, tigrés, d’autres ont un reflet nacré ou métallique.

Leur consistance est aussi variable et dépend de leur composition chimique ; ceux qui ont pour base l’acide silicique ont la dureté du caillou ; ceux au contraire qui sont formés par une grande quantité de carbonate de chaux, sont mous, friables, se laissent facilement écraser et portent le nom de magma. Entre ces deux extrêmes, on peut rencontrer tous les degrés intermédiaires de consistance.

Leur structure est variable ; quelquefois le précipité s’est fait subitement et il en est résulté un agglomérat amorphe, mais le plus souvent il est formé de deux parties : une partie centrale portant le nom de noyau, et une partie périphérique, beaucoup plus considérable que la première, formée par la réunion d’un nombre plus ou moins considérable de couches concentriques.

Le noyau, constituant la partie centrale du calcul, est le plus souvent un corps étranger venu du dehors, tel qu’un brin de fourrage arrêté sur une muqueuse, un criptogame, un morceau de bois. En 1758, Hérissant présenta, à l’Académie des sciences, un calcul qui avait pour noyau un morceau de bois de la grosseur du petit doigt. Souvent aussi le noyau est formé par une matière de l’organisme qui s’est déposée, une molécule saline qui s’est solidifiée ; quelquefois aussi par du mucus, du sang, des caillots de fibrine, du pigment, des cellules épithéliales qui se sont pour ainsi dire incrustés de matières minérales ; plus souvent encore c’est une masse demi-organique, demi-minérale, une matière saline qui dépose, dans un liquide visqueux, du phosphate ammoniac-magnésien, produit par la réaction mutuelle des sels des humeurs organiques de l’économie.

Les noyaux sont quelquefois plus consistants que les couches, d’autres fois, ils ont une consistance beaucoup moindre, on en trouve même qui sont tout, à fait creux ; cette dernière variété dépend de ce que la matière organique, qui formait la base du noyau, s’est desséchée, retrécie et occupe une espace moindre au sein de la matière inorganique.

La partie périphérique est formée de couches concentriques disposées avec plus ou moins de régularité autour du noyau central ; ces couches sont régulières ou d’inégale épaisseur, diversement colorées, pleines ou parsemées d’aréoles vides ou remplies d’un sédiment amorphe, dures, friables. On peut établir comme règle que plus les couches sont minces, plus aussi le calcul a de dureté et plus il s’est formé lentement.

La composition chimique des calculs urinaires est variable, mais, quel que soit leur siége, ils ne peuvent être composés que de matières empruntées à l’urine ; or, comme celle-ci est sujette à de nombreuses variations suivant le régime, les âges, il s’ensuit que les dépôts qu’elle forme varient aussi dans leur composition. Plusieurs chimistes ont fait l’analyse des calculs urinaires, c’est grâce aux travaux de Schéele, de Fourcroy, de Vauquelin, de Wollaston, de Proust, etc., que l’on est parvenu à connaître tous les éléments qui composent les calculs urinaires de l’espèce humaine, mais c’est grâce aux recherches nombreuses et importantes de Morton en Angleterre et plus tard de Fuerstenberg en Allemagne, que nous connaissons la composition chimique des calculs que nous rencontrons dans les différents organes de nos animaux domestiques. Chez les animaux de l’espèce bovine, les calculs urinaires ont donné à l’analyse les substances suivantes : carbonate de chaux, de magnésie, phosphate ammoniaco-magnésien, de chaux, de magnésie ; oxalate de chaux ; acide silicique, constituant parfois seul, avec la matière organique, les calculs de l’urètre ; traces de carbonate de fer et de matière organique.

La solubilité des calculs est variable suivant leur composition chimique, tous sont insolubles dans l’eau, mais les magmas terreux se dissolvent assez facilement dans un acide étendu, l’acide chlorhydrique par exemple ; ceux de phosphate ammoniaco-magnésien sont tout à

B. — Caractères spéciaux.

I. Calculs rénaux. — Les calculs rénaux prennent ordinairement la forme du bassinet ; ils se composent d’un corps allongé, cylindrique, dont les deux extrémités se courbent et représentent un croissant plus ou moins régulier ; souvent ils sont irréguliers avec un nombre variable de prolongements ; souvent aussi ils sont sphériques, lisses, irréguliers ou à surface mamelonnée.

M. Verheyen, qui a fait une étude très approfondie sur les calculs, divise les calculs rénaux en cinq variétés : les corallins, les nacrés, les métalliques, les blancs et les gris.

1o Calculs corallins. — Les calculs corallins sont les plus volumineux, mais aussi les plus rares ; ils ont une surface rugueuse d’un blanc sale avec trois ou cinq prolongements qui se logent chacun dans un calice rénal ; leur consistance est moyenne, les couches qui les forment sont assez régulières et au centre existe un noyau sédimenteux. Leur poids ne dépasse guère 65 gr. ; ils sont formés de carbonate de chaux (74 %), de carbonate de magnésie, de matière organique et des traces de carbonate de fer.

Calculs nacrés. — Au point de vue de leur forme et de leur volume, ils ressemblent beaucoup aux calculs corallins. Comme eux ils sont composés d’un corps à deux, trois ou cinq prolongements se terminant en pointe plus ou moins aiguë. Leur surface est ordinairement lisse, d’un reflet de nacre et surmontée d’aspérités très clair-semées. Ils sont plus fréquents que la variété coralline et leur consistance est aussi beaucoup plus grande. Les couches sont formées de lamelles très minces qui, par leur transparence, rendent ces concrétions chatoyantes ; ces couches sont disposées autour d’un noyau ayant la même composition que le corps du calcul. Leur poids ne dépasse guère 40 gr. ; ils renferment les mêmes éléments que les corallins, mais avec des proportions un peu différentes.

Calculs métalliques. — Réunis en grand nombre, ils sont aussi les plus communs ; leur surface est lisse et polie, à reflet verdâtre, brillant, métallique, leur diamètre varie du volume d’une graine de pavot à celui d’un pois ; les couches sont minces et transparentes, le noyau granuleux. Leur composition est à peu près la même que celle des deux variétés précédentes.

Calculs blancs. — Cette variété est très-rare ; quand ils existent ils sont réunis au nombre de 60 et même plus ; leur surface est lisse, d’un blanc pur et brillante ou bien légèrement irrégulière et pourvue de facettes ; leur volume varie entre celui d’un pois et d’une petite noisette ; les couches sont nombreuses, minces et très-consistantes, le noyau est petit, dur et de même composition que les couches. Cette variété est formée de carbonate de chaux (92 %), de carbonate de magnésie et de matière organique.

Calculs gris. — Cette variété, aussi rare que la précédente, a un volume variable entre celui d’une graine de moutarde à celle d’une noisette. Réunis en nombre assez considérable, les plus volumineux de ces calculs occupent le bassinet rénal, les plus petits logent dans les tubes urinifères ; leur surface est cristalline et rugueuse, on n’y découvre point une disposition stratifiée. Leur composition chimique n’est pas la même que celle des autres variétés, outre le carbonate de chaux et de magnésie qui s’y trouvent en bien moindre quantité, ils se composent de phosphate ammoniaco-magnésien, de phosphate, d’oxalate de chaux et de matière organique.

II. Calculs uretéraux. — Les calculs des uretères sont très-rares et ne se forment jamais dans ces canaux ; lorsqu’ils y existent, ils se sont formés dans les reins et ont été entraînés par l’urine. Ils ne possèdent donc pas de caractères spéciaux.

III. Calculs vésicaux. — Les calculs vésicaux peuvent descendre des reins et des uretères, mais le plus souvent ils se forment dans la vessie. Rarement solitaires, ils sont au contraire presque toujours assez nombreux, le plus souvent arrondis, rugueux ou hérissés de granulations quand ils descendent des reins, quelquefois pourvus de facettes par suite du frottement avec les autres calculs. Ces calculs sont ordinairement blancs ou bruns ; cette dernière couleur leur est donnée par une enveloppe brune, mince qui recouvre la couche périphérique blanche. Le noyau se compose d’un gravier de carbonate calcaire auquel viennent d’accoler quatre à six autres graviers que le mucus agglutine au premier. Blancs sur la coupe, quelques couches brunes les traversent. Ils sont constitués par de l’acide silicique (57 %) du carbonate de chaux et de magnésie, de la matière organique et des traces de fer.

Taylor, vétérinaire anglais, a fait connaître, en 1849, une variété de calculs vésicaux du bœuf qu’il désigne sous le nom de calculs perlés. Ils étaient réunis au nombre de 150 dans la vessie d’un bœuf ; les plus gros pesaient 7 grains et avaient la plus grande ressemblance avec les perles de l’huître. Leur surface était polie et brillante, les couches concentriques très-minces reflétaient le brillant de la perle ; on n’y découvrit pas de noyaux. Par l’analyse, on reconnut que ces concrétions étaient formées de carbonate de chaux avec une petite quantité de matière organique interposée. Le docteur Brid leur a trouvé une grande ressemblance avec les perles de l’huître, aussi les considère-t-il comme des perles urinaires, cette ressemblance n’est pas seulement extérieure, mais leur structure physique et leur composition chimique sont identiques.

M. Caussé a trouvé, en 1861, dans la vessie d’un bœuf, 250 petits calculs qui avaient pour noyau central une cinquantaine de petits poils de même couleur que la robe de l’animal.

Quelquefois on rencontre des calculs sans noyaux, ni couches, constitués seulement par un agglomérat de matière crayeuse ou de sédiment calcaire qui se moule sur les parois de la vessie. M. Ringuet, en 1857, a fait connaître un cas de ce genre.

Il n’est pas rare de rencontrer dans la vessie ce qu’on appelle les graviers ou le sable vésical ou plutôt la gravelle, c’est-à-dire la matière sédimenteuse non agglomérée. Chez les bêtes bovines la gravelle est ordinairement constituée par de petites perles nacrées.

Les concrétions vésicales peuvent être libres ou adhérentes ; leur volume est très-variable, souvent elles n’ont que les dimensions d’une pointe d’épingle, d’un grain de millet, d’autrefois au contraire elles ont la dimension d’un gros pois.

IV. Calculs uréthraux. — Il n’est pas impossible que des calculs se forment dans le canal de l’urèthre du bœuf, mais, dans la grande majorité des cas, ils proviennent des reins ou de la vessie. Ils s’échappent à un degré de formation déjà avancé, du réservoir urinaire, s’engagent dans le canal de l’urèthre et peuvent s’arrêter dans toute l’étendue de ce canal ; mais ordinairement c’est à l’S pénienne qu’ils s’arrêtent, car, parvenus à cet endroit, ils éprouvent de la difficulté pour remonter la branche ascendante de cette anse. Ainsi fixés, ils grossissent progressivement en empruntant chaque jour leurs éléments aux matières que l’urine tient en solution.

Plusieurs calculs peuvent s’engager dans le canal de l’urèthre ; quand ils sont isolés ils sont presque toujours sphériques, mais s’ils sont multiples ils sont aplatis par leur face en regard de telle sorte que la pile qu’ils forment, par leur réunion, est arrondie à ses deux extrémités et que les calculs qui en forment le centre sont aplatis et ont la forme d’un disque plus ou moins épais.

Les calculs uréthraux sont très-fréquents chez le bœuf, rares chez la vache ; cette différence s’explique par la longueur et la courbure du canal chez le mâle et la brièveté du même conduit chez la femelle.

On a divisé les calculs uréthraux, d’après leur forme et leur couleur, en six variétés : les verts brillants, les blancs arrondis, les réticulés, les blancs jaunâtres, les bruns-jaunes et les blancs sales.

Calculs verts brillants. — Ces calculs sont cylindriques, verdâtres, à reflet brillant et surmoulés d’élevures ; ils peuvent être considérés comme des concrétions composées, car, outre les couches très-minces et le noyau, on distingue vers la périphérie d’autres petits calculs implantés dans le premier et recouverts de quelques couches communes. Constamment multiples, leur volume ne dépasse pas celui d’un gros pois. Ils sont composés de carbonate de chaux (79 à 85 %), de carbonate de magnésie et de fer, d’acide silicique et de matière organique.

Calculs blancs arrondis. — Cette variété est la plus commune ; leur surface est blanche, aplatie ; ils doivent leur forme arrondie à du carbonate de chaux qui se dépose dans les dépressions et entre les corpuscules saillants du volume d’un grain de millet. Ils sont constitués par une masse sédimenteuse ou par un noyau qui est un corpuscule semblable à ceux de la surface ; quatre à six granules entourent ce noyau central, et le tout se couvre de couches. Cette variété a le diamètre d’un pois. On y trouve l’acide silicique (46 %), le carbonate de chaux, de la matière organique et des traces de fer.

Calculs réticulés. — Les calculs réticulés sont excessivement rares. Ils consistent en une table quadrangulaire, mince, blanche, sur les deux faces de laquelle se dépose une couche cristalline réticulée, faisant une saillie de quelques millimètres d’un côté et à peine tracée de l’autre. Cette table forme une plaque de 60 millimètres carrés, formée de stries cristallines d’oxalate de chaux. Leur poids est d’environ 250 grammes. Leurs parties constituantes sont l’oxalate de chaux (81 %), le carbonate de chaux, de magnésie et de la matière organique.

Calculs blancs-jaunâtres. — Ces calculs sont aussi fréquents que ceux de la deuxième variété. Ils sont allongés et pourvus de prolongements à leurs extrémités ; leur surface est aussi incrustée de petites concrétions verdâtres. Leur poids est ordinairement de 5 centigrammes à 1 gramme ; quelques-uns pèsent même 2 grammes. Les couches sont formées d’acide silicique (74 %), le noyau est aussi formé d’acide silicique ou de carbonate de chaux ; ils contiennent, en outre, de la matière organique et du fer. Quelques-uns sont exclusivement composés d’acide silicique et de matière organique.

Calculs bruns-jaunes. — Ils sont rares, de forme sphérique ou anguleuse, leur surface est lisse et garnie de pores, ils ont une grande ressemblance avec le silex. Les couches sont minces ; ils pèsent de 1 à 2 grammes. On y trouve du carbonate de chaux, de magnésie, une trace de phosphate de chaux, de la matière organique et des traces de fer.

Calculs blancs sales. — Ces calculs ont ordinairement un diamètre plus considérable qu’aucune des variétés précédentes ; leur surface est d’un blanc sale et parsemée de proéminences papillaires et rugueuses. Très-durs et très-consistants, ils pèsent environ 32 grammes. La coupe met à découvert des couches régulières, d’un blanc pur. Ils ont la même composition que la variété précédente, mais le phosphate de chaux y existe en plus grande quantité.

V. Calculs prépuciaux. — Ces calculs ressemblent à des perles enfilées du volume d’une tête d’épingle ou à une couche de mortier recouvrant les poils ; ils sont assez consistants et d’une couleur jaune-brunâtre. Ils sont composés de phosphate ammoniaco-magnésien, d’oxalate de chaux, de carbonate de chaux, de poils et de matière organique.

§ IV. — Étiologie.

L’appareil urinaire doit être considéré comme l’émonctoire de l’économie ; il est, en effet, chargé de séparer du sang et de rejeter à l’état liquide une forte proportion d’eau associée à la majeure partie des matières minérales ou organiques ingérées et qui n’ont pu être assimilées, ainsi que celles qui, fixées dans les tissus, en ont été séparées par l’action désassimilatrice ; ces dernières substances sont l’urée, l’acide urique, la matière colorante, la créatine et la créatinine. Des substances accidentelles, indifférentes, perturbatrices pénètrent dans le sang et sont obligées, pour abandonner l’économie, de suivre la même voie. Ce rôle si important dévolu à l’appareil urinaire est sans doute la cause essentielle et à la formation des calculs dans son intérieur.

La mode d’après lequel s’effectue l’excrétion de l’urine joue aussi un certain rôle dans la formation des calculs urinaires. L’urine, en effet, une fois séparée du sang par l’appareil glandulaire des reins, coule et séjourne pendant un temps plus ou moins long, dans les différentes parties de l’appareil urinaire avant d’être rejetée au dehors ; or, dans ce trajet, elle est presque entièrement en dehors du cycle vital et elle subit les lois communes des affinités et des attractions qui régissent les corps inorganiques. Comme toute solution aqueuse de matières salines, elle laisse déposer sur les parois des réservoirs, des dépôts, des incrustations, des matières solides qu’elle tient en solution lorsque celles-ci existent en trop grande quantité.

Mais quelle est la source de cette surabondance de matériaux dans l’urine ?

La source la plus palpable se trouve dans l’ingestion des aliments et des boissons.

Depuis longtemps, en effet, on a remarqué que les animaux, dont le régime alimentaire se compose principalement de pailles, de fourrages secs dans lesquels entre une grande proportion de sels calcaires (carbonates de chaux, phosphates siliceux, etc.), sont ceux qui sont le plus souvent atteints de l’affection calculeuse. Aussi cette maladie apparaît-elle le plus souvent en hiver alors que les animaux sont nourris avec des aliments secs, vu l’impossibilité de les envoyer au pâturage.

Les fourrages récoltés dans les localités élevées, sèches et arides, renferment peu d’eau de végétation, mais ils renferment une grande quantité d’acide silicique et autres sels inorganiques ; aussi on observe de nombreux cas de calculs sur les animaux qui vivent dans ces localités. Ce qui semble le prouver, c’est que l’affection calculeuse est très-rare au contraire dans les pays humides, marécageux, comme dans la partie bocage use du Poitou et les vastes pâturages de la Normandie, où les bestiaux reçoivent en hiver des choux, des navets, des betteraves, alternés avec des fourrages secs.

Les fourrages vasés, sablés, sont aussi des causes certaines des calculs urinaires ; plusieurs praticiens ont eu l’occasion d’en observer plusieurs cas sur des animaux nourris avec des fourrages récoltés après les grandes inondations.

D’après ce que nous venons de dire, il résulte que lorsque les aliments ingérés contiennent une trop grande proportion de silice, de carbonate de chaux, de magnésie, etc., relativement aux besoins de l’organisme, et que celui-ci est saturé de ces sels introduits dans le système circulatoire, l’absorption ne peut pas se faire, et ces sels, éliminés par les reins, traversent l’appareil excréteur et y forment les concrétions que nous avons étudiées dans la description des calculs. Il est donc évident qu’il existe une relation directe entre la formation des calculs urinaires et le mode d’alimentation auquel sont soumis les animaux.

En outre, il existe une autre cause qui vient agir sur l’économie en poussant des calculs, déjà formés à l’intérieur de la vessie, dans le canal de l’urètre, et, par suite, donner lieu à la manifestation de la maladie. Cette cause, d’après une remarque de M. Serres, est l’administration d’une grande quantité de maïs-fourrage que l’on donne aux animaux ; dans le Midi, vers la fin d’août et le courant de septembre. Cette nourriture augmente considérablement la sécrétion de l’urine (trois fois plus que lorsque les animaux sont nourris au sec) ; condition favorable pour la pénétration des calculs dans le canal de l’urètre.

Les boissons prennent une grande part dans les causes qui provoquent les calculs des voies urinaires. En effet, de quelque provenance que soient les sels introduits dans l’économie, de leur présence constatée résulte la maladie. Supposons une contrée à sous-sol calcaire, argilo-calcaire, siliceux, les eaux qui servent à abreuver les animaux se trouveront nécessairement saturés de principes salins qui, introduits dans l’organisme, feront développer l’affection que nous avons en vue, surtout si à leur action s’unit celle des aliments. C’est ainsi que Évison annonce qu’à Maltock, lieu de sa résidence, il existe une source d’eaux calcaires et que les calculs y sont plus fréquents que dans d’autres localités. Huers rapporte également qu’il a vu régner l’affection calculeuse dans une ferme où le gros bétail était abreuvé dans une mare, recevant les eaux d’une fosse à purin. D’après Doseretzkowsky, on observe les mêmes effets produits par les mauvaises eaux de la mer Caspienne, aussi bien sur l’homme que sur les animaux. Dans la plaine de Castelnaudary, à part l’eau du canal qui dissout bien le savon et cuit parfaitement les légumes, toutes les autres, n’importe leur source, sont, en grande partie, extrêmement séléniteuses. L’eau qui sert à abreuver les bœufs de la campagne, a donné, sur 100 parties, d’après l’analyse de M. Viala, pharmacien-chimiste à Castelnaudary, la composition suivante :

Carbonate de chaux · · · · · · · · · · · · · · · · · · · 1.50
Sulfate de chaux · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · 1.20
Chlorure de potassium · · · · · · · · · · · · · · · ·     3
Id. de sodium · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
Id. de magnésium · · · · · · · · · · · · · · ·
Air (volume) · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · 2
Acide carbonique · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · 1.5

Aussi, d’après M. Caussé, l’affection calculeuse ne sévit point avec la même intensité sur tous les points de la plaine. Ce vétérinaire a remarqué que les bœufs qui sont abreuvés avec l’eau du canal y sont très-peu sujets, tandis que ceux qui sont abreuvés avec les eaux séléniteuses en sont atteints fréquemment.

M. Lafosse, professeur à l’École vétérinaire de Toulouse, a aussi « observé que dans le pays toulousain il existe une corrélation entre la fréquence des calculs du boeuf, formés de phosphate, de carbonate de chaux et de magnésie, avec la constitution des terrains recélant la plus forte proportion de ces sels qui, par suite, doivent se trouver plus abondants dans les aliments et dans les eaux des puits et des réservoirs. »

Les aliments et les boissons jouent donc un grand rôle, comme nous venons de le voir, dans la formation des calculs urinaires, mais il est une autre cause non moins importante, c’est, d’après M. Lafosse, le « mode suivant lequel s’effectue la nutrition. »

En effet, la nutrition est variable suivant les âges ; — dans le jeune âge, c’est-à-dire pendant la période de croissance, l’organisme a besoin d’une grande quantité de matériaux, et il emprunte, aux aliments et aux boissons, une forte proportion de phosphate, de carbonate de chaux et de magnésie, d’acide silicique, etc. ; aussi ces matières se trouvent-elles en petite quantité dans l’urine de ces animaux ; — dans l’âge adulte et dans la vieillesse ; alors que l’organisme a acquis son parfait développement, les diverses matières minérales, que nous avons cité plus haut, doivent se trouver en moins grande quantité pour la nutrition des tissus, et par suite elles se trouveront en plus grande quantité dans l’urine. D’où la plus grande facilité de formation des calculs dans un âge avancé que dans la jeunesse. Ces visées théoriques sont parfaitement justifiées par l’observation, car on a remarqué que l’affection calculeuse est excessivement rare chez les jeunes animaux, tandis qu’elle est beaucoup plus fréquente sur ceux qui sont arrivés à un âge avancé.

À côté de ces causes principales, il s’en trouve d’autres, accessoires il est vrai, mais ne jouissant pas moins d’une certaine importance.

Le séjour trop prolongé de l’urine dans la vessie peut devenir une cause de formation de calculs ; en effet, quand l’urine séjourne trop longtemps dans son réservoir, la partie aqueuse est absorbée par la muqueuse vésicale, l’urine prend une couleur plus foncée, les matières solides prédominent et les calculs pemivent se former plus facilement, surtout quand les animaux y sont prédisposés par le régime. L’urine séjourne dans son réservoir quand les animaux sont soumis à un travail pénible, pendant les longues attelées, surtout si le conducteur ne prend pas la précaution d’arrêter ses animaux pour leur laisser satisfaire le besoin d’évacuation qui les tourmente. Elle y séjourne encore chez les animaux qui avancent en âge, car alors la contraction musculaire étant affaiblie, l’urine s’accumule et la vessie se distend avant de pouvoir expulser le liquide.

Certaines maladies des organes urinaires contribuent aussi à la formation des calculs, telles sont la paralysie de la vessie, l’altération de la sécrétion urinaire et l’inflammation vive des reins.

La position horizontale des animaux, d’après M. Verheyen, favorise le dépôt d’éléments inorganiques dans le fond de la vessie ; l’urètre allongé des mâles empêche l’évacuation des matières précipitées, surtout chez le bœuf, où la forme pyramidale du canal et son inflexion en S retardent l’écoulement des urines.

Mais pour que les causes que nous venons d’énumérer agissent avec beaucoup de facilité, il faut qu’il existe dans l’appareil urinaire un centre d’attraction autour duquel se groupent les molécules solides. Ce centre d’attraction, qui doit être plus tard le noyau du calcul, est souvent du mucus associé à des cellules épithéliales, des microphytes, souvent aussi c’est un corps étranger, provenant du dehors. On s’explique difficilement comment ces corps étrangers peuvent pénétrer dans la vessie ; les épillets des graminées peuvent s’introduire dans le canal de l’urètre, mais les grains d’avoine, les aiguilles, les fragments de bois, etc., doivent prendre une autre voie. D’après Gurlt, ces corps étrangers seraient arrêtés par un repli du rectum, ils y détermineraient à la longue une ulcération circonscrite et progressive, et ils traverseraient de cette manière les parois du rectum et de la vessie.

Bœrhaave a démontré expérimentalement que les corps étrangers introduits dans la vessie étaient des causes certaines de calculs. Pour cela, il introduisit un petit caillou rond dans la vessie d’un chien, à l’aide d’une petite incision. Ce chien, dont la plaie guérit parfaitement, fut tué quelque temps après, et l’on trouva un calcul, d’un volume assez considérable, ayant pour noyau le petit caillou qu’on avait introduit quelques mois auparavant.

L’affection calculeuse, fréquente chez les mâles, est au contraire très rare chez les femelles ; si on la constate si rarement chez elles, cela dépend, sans aucun doute, de la disposition du méat urinaire et du peu de longueur du canal de l’urètre ; les graviers qui se forment dans la poche urinaire sont, grâce à la disposition que nous venons d’indiquer, facilement rejetés avec les urines, et ne donnent lieu à aucune manifestation morbide.

§ 5. — Symptômes.

Les divisions de l’appareil urinaire où séjournent les calculs, ne présentent pas la même expression morbide ; aussi nous avons à examiner séparément les signes qui peuvent conduire au diagnostic de leur présence dans chacune d’elles.

I. calculs rénaux.

Les calculs rénaux peuvent rester occultes pendant de longues périodes ; ils désorganisent même lentement les reins sans provoquer de symptômes appréciables, et ce n’est qu’après la mort violente occasionnée par une maladie quelconque, que les calculs sont trouvés dans les reins. Plusieurs cas de ce genre ont été constatés sur les animaux. M. Lafosse l’a constaté plusieurs fois sur les animaux de l’espèce bovine.

Quand la maladie provoque quelques symptômes, ceux-ci sont le plus souvent obscurs, peu marqués, et le diagnostic est excessivement difficile. D’autres fois, au contraire, les symptômes sont très violents, ils acquièrent une haute intensité, l’animal est en proie à de vives coliques, il tord la queue, les reins, se campe fréquemment pour expulser une petite quantité d’urine, la région lombaire est douloureuse.

Les symptômes fournis par les calculs rénaux, apparaissent le plus souvent par accès, ces accès durent plus ou moins longtemps, à la suite desquels l’animal reprend ses habitudes ; ces soulagements subits résultent probablement de ce que le calcul, qui provoquait la douleur, s’est déplacé ou a été entraîné par l’urine dans l’intérieur de la vessie.

Lorsque la maladie est ancienne, que les reins sont en partie désorganisés, et que les calculs ont acquis un volume considérable, il ne serait pas impossible, par l’exploration ou la palpation des reins, de constater dans ceux-ci la présence des calculs ou au moins d’avoir de fortes présomptions sur leur existence. Un signe très important et d’un grand secours pour éclairer la nature de la maladie, est la présence à l’entrée du fourreau, ou sur les poils qui garnissent son entrée, de petits graviers plus ou moins volumineux. Ce signe n’est malheureusement pas toujours constant, mais quand il existe on est à peu près sûr qu’il existe des calculs dans une ou plusieurs des divisions de l’appareil urinaire. Quelquefois aussi les urines sont modifiées, fortement chargées, sédimenteuses, ou bien elles renferment des débris calculeux.

II. calculs uretéraux.

Les calculs des uretères, très rares chez les animaux, proviennent constamment des reins, ils produisent des effets variés selon leur volume, leurs aspérités et les obstacles qu’ils apportent au cours de l’urine. Quand ils existent, ils existent ordinairement d’un seul côté. S’ils sont d’un petit volume, ils ne séjournent pas longtemps dans l’uretère, ils sont entraînés dans la vessie par le courant de l’urine ; mais s’ils sont volumineux, ils gênent le passage de l’urine et provoquent des symptômes qui sont très analogues à ceux des calculs rénaux.

La rétention d’urine est complète ou incomplète suivant que les deux uretères ou un seul sont obstrués. Si on pratique la fouille rectale, et qu’on ait assez de tact, et d’habileté, on peut s’apercevoir qu’il y a dilatation de l’uretère entre le calcul et le rein, douleur et dureté au point où le calcul est arrêté.

III. calculs vésicaux.

Les symptômes des calculs vésicaux ne sont réellement bien apparents que lorsque ces derniers se sont engagés dans le col de la vessie, de manière à empêcher le libre écoulement de l’urine. Tant qu’ils restent dans l’intérieur de la vessie ou que leur diamètre est assez petit pour leur permettre de franchir, sans difficulté, les flatuosités du canal de l’uretère, et être entraînés au dehors par le courant urinaire, ils ne donnent lieu à aucune manifestation morbide ; les sensations qui résultent de leur présence n’étant pas douloureuses.

Mais lorsque les calculs vésicaux sont nombreux et ont acquis un certain volume, ils peuvent obstruer, plus ou moins complètement, le passage de l’urine, et provoquer par conséquent des symptômes plus ou moins graves. Lorsque le passage de l’urine n’est pas entièrement interrompu, les seuls phénomènes appréciables que l’on observe sont parfois le rétrécissement du filet de l’urine, ou bien encore son interruption avant que la miction soit achevée, une plus grande fréquence de cet acte, des coliques peu intenses, se manifestant de temps à autre ; phénomènes importants mais qui restent souvent inaperçus pour le bouvier. À part cela, l’animal ne paraît point malade, il mange comme d’habitude, rumine de même et suffit à son travail.

Si l’obstacle est très prononcé, et à plus forte raison s’il est absolu, les symptômes apparaissent avec une haute intensité, les coliques sont très intenses, le regard est tourné vers le flanc, le facies exprime la souffrance, l’animal trépigne, lève souvent la queue, fait des efforts pour uriner, mais il ne peut y parvenir ; ses efforts sont accompagnés de vives convulsions des muscles accélérateurs ; ces convulsions portent le nom de bond uréthral (on dit vulgairement qu’il bat du nerf). Les douleurs continuant, l’animal se couche, s’étend sur la litière, agite ses membres, tourne la tête vers le flanc, la rejette violemment à terre, se relève avec fureur, se replace de nouveau pour uriner, mais ces vains efforts sont inutiles, il ne peut y parvenir, il y a ischurie.

La respiration et la circulation s’accélèrent, la rumination est interrompue, la sueur mouille la peau. En explorant la vessie par la fouille rectale, on la sent fortement distendue et elle tend à gagner l’abdomen.

Il arrive quelquefois que, pendant que l’animal se livre à ces mouvements désordonnés, les symptômes disparaissent tout à coup, l’animal urine à petit jet d’abord, abondamment ensuite, et au même instant il se trouve soulagé, il cherche à manger rumine même, et il y a apparence de guérison. Ceci est produit par le déplacement du calcul ; celui-ci, sous l’influence des efforts de l’animal, retombe dans la vessie ou est expulsé au dehors par le canal de l’urètre ; ce dernier cas est le plus rare, mais il peut être constaté.

Si les symptômes que nous venons de faire connaître durent longtemps, la vessie se distend considérablement par l’accumulation incessante de l’urine, et finit par se rupturer au bout de vingt-quatre ou quarante-huit heures. L’urine s’écoule alors dans le péritoine, l’animal paraît soulagé, mais sa mort est certaine. Nous reviendrons sur les phénomènes qui suivent la rupture de la vessie à propos des calculs du canal de l’urèthre que nous allons maintenant envisager.

IV. — Calculs uréthraux.

Ces calculs, nous l’avons déjà dit, peuvent s’arrêter dans toute l’étendue du canal, c’est-à-dire depuis le col de la vessie jusqu’à l’extrémité inférieure, mais le plus souvent c’est à l’S pénienne, parce qu’arrivés à cette inflexion ils ne peuvent pas remonter la courbure ascendante de l’anse.

Les calculs engagés dans le canal de l’urèthre, occasionnent des symptômes excessivement graves, aussi il est de la haute importance de faire ressortir, avec quelques détails, les bases sur lesquelles on doit s’appuyer pour arriver à un diagnostic certain.

Les symptômes que l’on constate dans le cas de calcul uréthral, varient d’intensité suivant que l’obstruction du canal est incomplète ou complète.

Dans le premier cas, c’est-à-dire quand le calcul ne détermine qu’une obstruction incomplète, la dysurie est le principal symptôme que l’on constate, l’urine coule en un mince filet ou goutte à goutte, et l’animal éprouve parfois de légères coliques.

Dans le deuxième cas, c’est-à-dire quand le calcul détermine une obstruction complète du canal de l’urèthre ; l’urine, qui est sécrétée d’une façon continue par les reins, s’accumule dans le réservoir urinaire, distend ses parois outre mesure et la miction ne pouvant s’effectuer, malgré l’énergie des efforts expulsifs, tous les symptômes déjà indiqués à propos de la rétention urinaire produite par les calculs vésicaux, se manifestent avec une haute intensité ; le bond uréthral est même plus prononcé et il existe en plus un gonflement du pénis dû à la dilatation du canal de l’urèthre, gonflement bientôt suivi d’une infiltration légère du périnée.

Mais ces symptômes sont-ils suffisants pour pouvoir porter un diagnostic certain ? On peut, d’une manière générale, répondre par l’affirmative, mais il y aurait toutefois de l’imprudence à se prononcer pour l’existence d’un calcul avant de se livrer à un examen plus approfondi de l’appareil urinaire. La vessie et le canal de l’urèthre doivent être explorés avec soin, car plusieurs lésions de ces organes peuvent, en s’opposant à l’écoulement de l’urine, provoquer les symptômes que nous avons fait connaître plus haut.

Exploration de la vessie. — La vessie, reposant par en bas sur le plancher du bassin, est fixée dans la cavité pelvienne par des ligaments courts, par la séreuse qui recouvre l’organe jusqu’au niveau de son col, et par sa partie postérieure, avec le canal de l’urèthre. En avant, lorsqu’elle est un peu distendue, elle est retenue par l’extrémité postérieure du sac gauche du rumen, aussi, dans le cas d’accumulation considérable d’urine dans son intérieur, elle augmente seulement en hauteur, mais elle ne s’allonge pas. Cette disposition permet au vétérinaire de s’assurer assez exactement de son état de plénitude ou de vacuité.

La fouille rectale est le moyen que l’on emploie pour s’assurer de l’état de la vessie. Lorsque celle-ci est distendue par l’urine, on trouve qu’elle forme, à l’entrée de la cavité pelvienne, une tumeur dure, sphéroïdale et douloureuse à la pression, surtout lorsque les parois de la poche sont distendues outre mesure ; en outre, l’animal cherche à se défendre comme pour se débarrasser du corps qui lui occasionne ces souffrances. Si la vessie n’est pas complètement distendue, elle peut être dépressible et s’affaisser encore sous la pression des doigts.

Lorsque par l’exploration de la vessie on constate qu’elle n’est pas très distendue, il est bon de placer un linge sous l’abdomen et, si après quelques heures d’attente, on constate une augmentation de volume du réservoir urinaire, sans rejet d’urine et avec aggravation dans l’intensité des symptômes, le diagnostic devient alors certain et le praticien peut dès lors agir en conséquence.

Ces moyens peuvent être d’un grand secours surtout pour le jeune débutant, mais ils peuvent aussi être employés avec de grands avantages, par tous les vieux praticiens, dans les cas embarrassants.

Palpation urèthrale. — La palpation urèthrale peut fournir des signes d’une grande importance lorsqu’il s’agit de faire le diagnostic précis de l’affection calculeuse, car ce mode d’investigation permet au praticien de trouver la cause même de la rétention d’urine.

Les calculs engagés dans le canal de l’urèthre peuvent être situés dans la région pelvienne ou bien dans la région des bourses ou S du pénis ; lorsqu’on explore le canal, il faut donc porter les manipulations sur ces deux régions.

a). Lorsque le calcul s’est arrêté dans la région pelvienne, la fouille rectale permet facilement de le reconnaître, il donne au doigt la sensation d’un corps dur arrondi ou à facettes ; si l’on vient à exercer une certaine pression sur ce corps avec les doigts, l’animal manifeste aussitôt une violente douleur.

Bien que le calcul se trouve arrêté dans la région pelvienne et qu’il y ait obstruction complète du conduit, on peut néanmoins constater le bond urèthral par suite des contractions énergiques des muscles rétracteurs et accélérateurs qui font opérer un mouvement de va-et-vient à la verge, mais on ne voit pas, on ne sent pas, vers le contour ischiatique, le canal de l’urèthre se gonfler comme cela arrive lorsque le calcul est arrêté au-dessous de cette région.

b). Lorsque le calcul s’est arrêté dans la région des bourses, la palpation urèthrale peut être aussi d’un grand secours malgré l’opinion contraire de quelques praticiens. Plusieurs vétérinaires, tels que Cruzel, MM. Serres, Caussé, Dupont, Lafosse, sont parvenus, par la palpation de l’urèthre, à sentir le calcul arrêté dans l’un de ses points. La présence d’un calcul dans le canal de l’urèthre est plus facile à constater sur un animal maigre que sur un animal qui se présente avec un embonpoint satisfaisant ; chez ce dernier il est plus difficile de saisir le calcul par le toucher dans la région des bourses, parce que, dans cette région, il existe toujours une certaine quantité de graisse qui vient s’interposer entre les doigts et le calcul. Mais dans ce cas, lorsque les doutes existent, on peut arriver facilement à diagnostiquer le siége précis du calcul en ayant recours au procédé suivant dû à M. Caussé. Ce procédé consiste à déterminer si le canal de l’urèthre est vide ou s’il est rempli par l’urine. Pour cela, avec les doigts de l’une et de l’autre main, on exerce une pression sur le canal de l’urèthre au-dessous de l’arcade ischiale, puis avec les doigts d’une main, on remonte en pressant toujours jusqu’au-dessus de l’arcade dans l’intention d’évacuer l’urèthre du liquide qu’il peut contenir, les doigts de l’autre main restant toujours à leur première place, c’est-à-dire au-dessous de l’arcade ischiale. Si au même instant on cesse de comprimer au-dessous de l’arcade ischiale, les doigts de l’autre main, situés au-dessus, ressentent le frémissement du liquide qui rentre dans la partie du canal, d’où il vient d’être expulsé, de là il s’ensuit que le calcul est situé à l’S du pénis. Dans le cas contraire, c’est-à-dire si on ne ressent aucun frémissement, le canal est vide et le calcul est arrêté au col de la vessie.

Ces moyens d’investigation ne sont pas toujours indispensables pour le praticien qui a l’occasion d’observer un grand nombre d’animaux calculeux, mais il n’en est plus de même pour le jeune débutant ; celui-ci, en effet, a besoin de mettre en jeu tous les moyens dont il peut disposer pour éviter une erreur de diagnostic très-préjudiciable, non seulement pour l’intérêt de son client, mais encore pour sa réputation propre, surtout dans le cas d’affection calculeuse, car, après la mort de l’animal, chacun peut s’assurer de la véracité du diagnostic.

Quand on a observé les symptômes que nous venons d’exposer, si on ne donne pas écoulement à l’urine, en pratiquant l’uréthrotomie, la maladie continue ses rapides progrès : les coliques deviennent de plus en plus violentes, l’animal se tord sur lui-même, il se couche, étend fortement les membres postérieurs, frappe le sol avec force, puis se relève avec furie, le bond uréthral est très-fort, les excréments se ramollissent, les défécations sont fréquentes. La chaleur de la peau est augmentée, parfois il y a d’abondantes sueurs, le pouls est fréquent et les muqueuses sont injectées. Ces souffrances, de plus en plus violentes, peuvent durer, d’après M. Serres, de 16 à 24 heures. Au bout de ce temps, l’animal, brisé de fatigue, se couche, mais le plus souvent il se laisse tomber comme une masse inerte, à se relève avec peine, les coliques cessent, et le bond uréthral est très-peu marqué. Cet état de souffrance extraordinaire ne peut pas durer longtemps sans que la vessie se rupture ; cependant M. Serres a eu pratiqué l’uréthrotomie avec succès, après cinq ou six heures, chez un sujet présentant tous ces symptômes.

La rupture de la vessie peut avoir lieu avant l’apparition de ces symptômes, surtout lorsque l’animal se laisse tomber lourdement sur le sol. Dès que la vessie est rupturée, tout change de face, les douleurs si violentes, produites par sa distension, cesent dès que l’urine trouve une voie d’échappement par les parois déchirées, l’animal éprouve un soulagement immédiat qui se traduit par l’expression changée de sa physionomie, par l’état de calme dans lequel il reste et qui contraste d’une manière si frappante avec son anxiété, son agitation, et le désordre de ses mouvements de tout à l’heure. Chez un grand nombre de malades, l’appétit se réveille, quelques-uns même se mettent à ruminer, et tout ces signes paraissent de si favorable augure qu’ils font souvent illusion en donnant lieu à des espérances sans fondement.

L’état de calme et de bien-être réel qui succède aux coliques vésicales très-intenses, n’a réellement une signification favorable que dans le cas où il a été précédé d’une évacuation de l’urine par la voie naturelle ou tout au moins par une voie artificielle ouverte à propos.

Mais lorsque le calme se manifeste sans que cette évacuation ait eu lieu suivant l’un ou l’autre de ces modes, alors on peut en inférer, d’une manière absolue, qu’il dépend de la rupture de la vessie et que, conséquemment, le bien-être actuel n’est qu’un fait très provisoire, auquel on doit faire suite, à très-court délai, une inflammation péritonéale nécessairement mortelle.

La rupture de la vessie doit être constatée le plus promptement possible afin de tirer immédiatement un bon parti de l’animal, aussi le praticien, qui se trouve en présence d’un pareil sujet, doit avoir recours, pour s’en assurer, à plusieurs moyens d’investigation.

Lorsque la vessie se crève, nous avons dit que les souffrances diminuent ; dans ce cas, si on explore la vessie par le rectum, elle ne donne plus la sensation d’une tumeur sphéroïdale, dure, que l’on constatait sur le plancher du bassin, au contraire elle est revenue sur elle-même, elle est flasque et s’affaisse sous la pression sans que la miction se soit effectuée.

La vacuité de la vessie n’a pas cependant une bien grande valeur diagnostique, dans le cas où l’on n’a pu assister à tous les phénomènes qui ont précédé la rupture de cette poche. Pour se convaincre de ce dernier phénomène, on doit alors placer un linge sous l’abdomen (un sac remplit parfaitement cet office) et on fait surveiller l’animal pendant 12 ou 24 heures au plus. Si, au bout de ce temps, il n’y a pas eu rejet d’urine et que la vessie ne se soit pas distendue, il existe de très-fortes présomptions de rupture.

On a encore parlé, comme signes caractéristiques de la rupture de la vessie, de la cessation du bond uréthral, de la découverte du calcul que contient l’urèthre, de l’odeur urineuse de la transpiration cutanée ou pulmonaire, mais aucun de ces signes n’est constant.

En ce qui concerne le bond uréthral, MM. Lafosse et Serres l’ont plusieurs fois observé après la rupture de la poche urinaire, mais il est moins fort, plus affaibli qu’avant la rupture. M. Lafosse explique ce fait de la manière suivante : « La rupture souvent est très étroite, parfois placée à la face supérieure de la vessie, les déchirures des différentes membranes ne se correspondent pas toujours ; il en résulte que l’urine ne trouve pas constamment à passer, en vertu de son seul poids, dans le péritoine ; la vessie, alors, se distend à un certain degré et ne se vide que sous l’influence de ses contractions ordinaires, aidées de celles des muscles abdominaux. Donc le bond uréthral doit se produire et, si une ouverture est pratiquée à l’urèthre, l’urine doit sortir en partie par cette ouverture.

Mais ne se pourrait-il pas aussi que le bond uréthral fût sous la dépendance de l’action reflexe de la moëlle épinière par l’intermédiaire des filets du sympathique et du nerf honteux interne (4e paire sacrée) qui vont s’épuiser dans le corps caverneux, dans la muqueuse du canal de l’urèthre et dans les muscles accélérateurs ?

Quant à la constatation du calcul par la palpation uréthrale, nous avons déjà dit qu’elle n’était pas toujours possible, surtout quand le calcul est à l’S pénienne et que l’animal est dans un embonpoint satisfaisant.

Enfin, l’odeur urineuse est loin d’être toujours prononcée au point d’être un signe de quelque valeur. En effet, les bœufs mal tenus, mal pansés, laissent souvent échapper une odeur d’urine ; d’un autre côté, l’urine de cet animal est très-peu odorante avant d’avoir subi le contact de l’air. C’est donc là un signe relatif à la finesse plus ou moins prononcée de l’odorat et qui ne peut avoir une bien grande valeur surtout quand la vessie est rupturée depuis peu de temps.

Comme on le voit, il n’y a guère que l’exploration de la vessie qui peut donner quelques signes d’une certaine importance sur la rupture de cette poche, les autres signes que nous avons mentionnés n’étant pas toujours constants.

Mais bientôt apparaissent des complications qui ne laissent plus exister de doute sur la période de la maladie et par conséquent sur l’état du sujet.

En effet, à peine quelques heures se sont-elles écoulées, que de nouveaux symptômes apparaissent ; ils dénoncent d’autres douleurs abdominales moins intenses, il est vrai, que celles par lesquelles s’exprime la rétention d’urine, mais plus profondes, plus oppressives et surtout plus irrémédiables. Ces symptômes sont ceux de la péritonite, déterminée par le débordement de l’urine dans la cavité abdominale après la rupture de la vessie. On voit alors que les animaux deviennent tristes, s’éloignent de leur crèche, portent la tête basse et restent comme concentrés en eux-mêmes, insensibles à toutes les excitations extérieures ; leur facies exprime un profond accablement. Puis, lorsqu’ils ressentent les premières atteintes des douleurs causées par l’action irritante de l’urine sur le péritoine, ils se livrent à des efforts expulsifs qui donnent lieu à la réjection des matières excrémentitielles et qui peuvent même faire renverser la muqueuse rectale si ces efforts persistent pendant quelque temps.

L’urine épanchée dans le péritoine augmente incessamment de quantité par l’afflux continuel de celle que sécrètent les reins et que la vessie ne peut plus contenir ; d’un autre côté, le péritoine irrité étant devenu le siége d’une exhalation séreuse abondante, le ventre ne tarde pas à être distendu dans ses parties déclives par le liquide provenant de cette double source. L’on peut reconnaître sa présence à une fluctuation manifeste dans la plupart des cas, par la pression des parois abdominales ou par la succussion ; ce dernier signe est très saisissable pendant le décubitus, et il l’est surtout pendant la fouille rectale.

L’animal est quelquefois en proie à une soif très vive, l’appétit, la rumination sont capricieux ; l’exhalation cutanée et pulmonaire ne fournissent pas encore l’odeur urineuse. Tels sont les signes saisissables durant les vingt-quatre ou quarante-huit heures qui suivent la rupture de la vessie.

L’affection continuant sa marche funeste, les symptômes déjà existants s’aggravent, l’abdomen prend un volume considérable, l’air expiré à une odeur urineuse, l’exhalation cutanée la fournit aussi mais un peu plus tard et elle est moins marquée, il y a de légères coliques, la pression de l’abdomen détermine de la douleur, les yeux s’enfoncent dans les orbites, le décubitus est presque permanent, l’appétit, la rumination disparaissent, enfin les forces s’affaissent, la maigreur se prononce, la respiration devient laborieuse, le pouls se déprime, il est fréquent et irrégulier, la diarrhée survient, la température du corps baisse et l’animal succombe huit, quinze, vingt jours et quelquefois plus après la rupture de la vessie. Cruzel a vu un bœuf qui vécut trente jours après la rupture de la vessie causée par un calcul uréthral, mais ces cas sont excessivement rares.

Telle est la physionomie ordinaire de la maladie, lorsqu’on laisse à celle-ci le temps de se manifester dans toutes ses phases.

Il peut y avoir cependant des cas particuliers qui diffèrent beaucoup des cas ordinaires. Ainsi MM. Serres et Lafosse ont observé, à l’École de Toulouse, deux cas d’affection calculeuse se caractérisant par la dysurie très prononcée et par des signes annonçant l’accumulation d’un liquide dans la cavité abdominale. Le diagnostic, dans ce cas, paraît tout d’abord difficile, car l’on peut croire que les signes observés peuvent être dus à tout autre cause qu’à un calcul, ainsi, par exemple, une irritation des voies urinaires peut être la cause de la dysurie et une hypersécrétion du péritoine peut être la cause de l’augmentation de l’abdomen.

Mais il est un moyen bien simple de lever le doute, c’est la ponction de l’abdomen. Cette opération, non dangereuse chez les ruminants, permet de déterminer aisément la nature du liquide épanché ; elle a été pratiquée par M. Lafosse dans l’un des cas observés.

V. — Calculs prépuciaux.

Pour suivre l’ordre que nous avons adopté, nous dirons que les perles calculeuses, attachées en chapelet sur les poils du fourreau ou le prépuce des bœufs, ne sont pas nuisibles, tout au plus ceux du fourreau peuvent-ils provoquer un certain degré d’irritation de cette gaine membraneuse. Mais ils sont un indice de calculs des autres parties de l’appareil urinaire, et, sous ce rapport, il devient très important de constater leur présence pour en tirer un signe de diagnostic d’une grande valeur.

§ 6. — Diagnostic différentiel.

La lithiase n’est pas la seule affection qui donne naissance aux symptômes si variés que nous venons de faire connaître. Plusieurs autres maladies, appartenant à l’appareil digestif ou à l’appareil génito-urinaire, présentent des symptômes communs avec ceux de l’affection calculeuse ; aussi, je crois qu’il est utile d’indiquer sommairement les divers signes sur lesquels le praticien doit se baser pour éviter une erreur de diagnostic.

a). Entérite sur-aiguë avec ou sans complication. — Cette entérite, appelée encore congestion intestinale, se caractérise, chez le bœuf, par des coliques très violentes qui ont une grande analogie avec celles qui se manifestent pendant les premiers moments de la rétention urinaire. En outre, comme dans cette maladie, les animaux ne rejettent pas d’urine ou ne le font qu’à des intervalles très éloignés.

Néanmoins il est impossible de confondre les deux affections, car dans l’entérite la rougeur des muqueuses est très-prononcée, le pouls est accéléré et l’artère tendue, ce qui n’a pas lieu dans l’affection calculeuse, surtout au début. D’un autre côté certains symptômes qui appartiennent à cette dernière affection font complètement défaut dans la congestion intestinale, on peut citer à cet effet la dilatation de la vessie, le bond uréthral et la présence du calcul que l’on peut constater par la palpation uréthrale.

B. Néphrite. — La néphrite provoque quelques uns des signes de l’affection calculeuse mais elle s’en distingue par la douleur de la région lombaire, de l’un ou des deux côtés ; la possibilité le plus souvent d’explorer les reins par la fouille rectale et de s’assurer de la douleur provoquée par la pression de ces organes ; la continuation de l’écoulement de l’urine, la nature de ce liquide qui peut être plus ou moins rougeâtre (quelquefois il renferme des caillots de sang), l’intensité de la fièvre de réaction.

La marche présente aussi quelques différences : les accès de néphrite calculeuse se dissipent parfois tout à coup au milieu de leur plus grande violence, tandis que la néphrite par inflammation des reins disparaît graduellement quand elle se résout.

C. Cystite. — Quant à la cystite, il est rare qu’elle provoque des symptômes aussi intenses que ceux provoqués par les calculs ; le bond uréthral est faible et le plus souvent il n’apparaît pas. D’ailleurs, la palpation de la vessie, par l’exploration rectale, provoque de la douleur, ce qui n’a pas lieu dans le cas de calcul, il y a presque toujours expulsion d’une petite quantité d’urine à la fois, mais souvent réitérée, cette urine est fortement colorée, souvent elle est sanguinolente si la cystite est très-intense. Il y a en outre de la fièvre qui n’existe pas dans l’affection calculeuse.

D. Kystes, polypes, tumeurs cancéreuses de la vessie. — Ces lésions peuvent provoquer des simptômes analogues à ceux des calculs vésicaux ; mais à l’aide de l’exploration de la vessie on peut en faire le diagnostic différentiel. M. Lafosse, dans ces cas, recommande de mettre l’animal sur un plan fortement incliné d’avant en arrière afin qu’il se rapproche de l’attitude du cabrer, alors la vessie se rapproche du périnée et la main, engagée dans le rectum, a beaucoup plus de facilité pour palper la lésion qu’il s’agit de déterminer.

Lorsqu’il existe des polypes, des tumeurs cancéreuses dans la vessie, la palpation, la pression de cette poche donnent des éléments importants de diagnostic différentiel, les polypes en effet ont généralement la consistance des caillots sanguins, ils sont adhérents ; les cancers sont ordinairement plus durs que les polypes, en outre ils changent les contours extérieurs de la vessie, ils la rendent bosselée en dehors, les polypes au contraire, font saillie de préférence dans l’intérieur de cette poche.

Les calculs, quand ils sont volumineux, sont ordinairement mobiles dans la vessie, ce qui n’a pas lieu pour les tumeurs cancéreuses, les kystes, les polypes, à moins que ces lésions soient longuement pédonculées, ce qui n’a pas encore été observé, que nous sachions du moins.

L’examen attentif de l’urine donne des indices importants. Aucune des maladies précédentes, non compliquée de calculs, ne s’accompagne d’urine contenant du sable, des graviers, ou des cristaux des différents sels composant ces concrétions. Toutefois si leur présence dans l’urine, est un signe certain des calculs, leur absence n’infirme pas nécessairement l’existence de ces derniers.

E. Prostatite. Abcès du bassin placés sur la portion pelvienne de l’urèthre. Ces maladies, surtout au début, présentent aussi quelques symptômes qui sont communs avec ceux d’un calcul arrêté dans la portion pelvienne du canal de l’urèthre, mais à l’aide d’une exploration attentive, on peut arriver au diagnostic différentiel. Par la fouille rectale on peut constater la chaleur du rectum, la tuméfaction et la douleur des prostates, ce qui n’existe pas quand il y a présence de calcul. Dans le cas de calcul, l’examen de l’urine peut y faire reconnaître le magma ou les graviers caractéristiques, ce qui n’a pas lieu dans le cas de prostatite ou d’abcès du bassin. De plus, l’introduction d’une sonde métallique dans le canal de l’urèthre, fait sentir une résistance dure et donne naissance à un bruit sec et métallique dans le cas de calcul, ce qui fait complètement défaut dans la prostatite ou les abcès du bassin.

Si la prostatite ou les abcès sont arrivés à la période de suppuration, une erreur de diagnostic est moins à craindre que quand la maladie est encore au début. En effet, le pus étant formé, il doit être éliminé au dehors et pour cela il peut suivre différentes voies, telles que le canal de l’urèthre, le rectum ou le périnée. Dans le premier cas, on le trouvera mélangé aux urines ; dans le second, aux excréments ; et enfin dans le troisième, il s’annoncera par de la fluctuation dans la région périnéale, le plus ordinairement entre l’anus et le contour ischiatique de l’urèthre, avant de se frayer une voie à travers la peau. Dans ce cas, le diagnostic ne peut donc pas être erroné.

F. Acrobustite adhésive, couenneuse ou pseudo-membraneuse. Cette maladie, dont la première description est due à M. Lafosse, se caractérise par des symptômes qui ont la plus grande analogie avec ceux d’un calcul arrêté à l’S pénienne. Aussi, comme il importe beaucoup de ne pas confondre ces deux maladies, nous allons faire connaître les signes diagnostics différentiels qui ont été décrits par M. Lafosse dans son Traité de pathologie vétérinaire, tome III, 2e partie, page 1078. Cet auteur s’exprime ainsi : « Généralement, dans la lithiase, le calcul est arrèté à l’S du pénis ; en portant la main dans cette région, on sent une légère saillie ; si on la presse, l’animal éprouve de la douleur ; il se remue et cherche même à frapper du pied ; rien de pareil ne s’observe dans le cas d’obstruction du fourreau. Dans la lithiase, le bouquet de poils qui borde l’ouverture du fourreau est sec ; dans l’inflammation adhésive du fourreau, il est légèrement humecté par des matières onctueuses, espèce de mélange de mucus et de pus ; enfin, deux symptômes, qui n’existent pas dans l’affection calculeuse et qui caractérisent l’adhésion du fourreau, sont : une tuméfaction plus ou moins considérable de cet organe, et l’impossibilité qu’éprouve une sonde à pénétrer jusqu’à son cul-de-sac ; ce signe est quelquefois fort peu évident, parce que l’adhésion a lieu près du cul-de-sac même ; mais, dans ce cas, comme dans ceux l’adhérence se rapproche plus ou moins de l’orifice du fourreau, la sonde retirée de cette gaine est salie par un mucus purulent, quelquefois sanieux. Il peut arriver, chose assez rare pourtant, que le calcul soit arrêté dans la gaine du pénis ; alors aussi, la sonde ne peut pénétrer jusqu’au fond de ce conduit ; mais, en y enfonçant une sonde en fer, cet instrument, en frappant sur le calcul, produit un son aigu ; et, si l’on presse le fourreau au niveau de l’extrémité de la sonde, on sent sous les doigts un corps dur et résistant. Du reste, les calculs sont presque toujours arrêtés à l’extrémité antérieure du fourreau, tandis que l’adhésion s’effectue ordinairement près de son cul-de-sac. De cet exposé, il résulte donc évidemment qu’avec un peu de soin, il est impossible de confondre les maladies dont les signes différentiels viennent d’être mis en parallèle. »

D’après ce que nous venons de dire, on voit qu’il est facile, si l’on apporte à l’exploration du malade, toute l’attention désirable, d’arriver à un diagnostic précis, même au début de la maladie.

§ 7. — Lésions.

Les lésions que l’on trouve à l’autopsie des animaux morts de l’affection calculeuse des voies urinaires, sont nombreuses. La principale est la présence des calculs ; ceux-ci peuvent être exclusivement placés dans les reins, dans les uretères, la vessie ou le canal de l’urèthre, mais il arrive souvent qu’ils existent en nombre considérable, alors ils peuvent se trouver dans plusieurs divisions de l’appareil urinaire, la vessie et le canal de l’urèthre par exemple. Il est même bien rare qu’il n’y en ait pas dans la vessie quand le canal de l’urèthre en renferme.

Les lésions que nous allons faire connaître, n’existent pas toutes à la fois, elles sont généralement subordonnées au siége occupé par les calculs. Sont-ils placés dans les reins, ceux-ci s’enflamment se gorgent de sang, se ramollissent, les capillaires se dilacèrent et des hémorragies se produisent, le sang arrive dans la vessie et se mêle à l’urine, ou bien il reste dans les bassinets des reins et s’y coagule. Si ces calculs ont produit des symptômes un peu graves, la suppuration peut se former dans les reins, pénétrer dans la cavité abdominale et causer une péritonite mortelle. Si la maladie reste latente pendant longtemps, les calculs deviennent volumineux, le rein s’atrophie peu à peu, disparaît presque entièrement sans que les animaux en paraissent incommodés. Dans ce cas le calcul est enveloppé par la capsule fibreuse.

M. Caussé a rencontré un bœuf chez lequel le bassinet du rein droit contenait deux calculs, le gauche en contenait deux cent trente-cinq, pesant ensemble 112 grammes. Ce rein avait acquis un volume deux fois plus grand que son volume ordinaire. Les tissus conjonctif et adipeux de cette glande étaient transformés en une espèce de substance fibreuse de 3 à 4 centimètres d’épaisseur, criant sous l’instrument tranchant ; le bassinet, de la grosseur du poing et à surface bosselée, irrégulière, contenait presque la totalité des calculs. Cette glande, coupée en deux, avait l’aspect suivant : la substance corticale, d’une épaisseur de 11 centimètres à sa grande courbure et de 5 près du bassinet, d’une couleur jaune orangé, présentait ça et là des petits corps rougeâtres, durs, ressemblant à de petits tubercules dont quelques uns étaient ramollis à leur centre et quelques autres sur le point de s’abcéder. Les tubes urinifères étaient isolés les uns des autres par un tissu lardacé, fibreux ou cartilagineux, chaque tube recélait un petit calcul conique hérissé de petites pointes, d’autres étaient contenus dans le bassinet et avaient la plus grande ressemblance avec le fruit du mûrier.

Eberhardt, en 1851, rencontra, sur le rein droit d’une vache, une cavité elliptique creusée dans sa substance et où il découvrit quelques calculs du volume d’un grain de millet à celui d’un pois. La membrane tapissant la cavité n’était qu’un canalicule urinifère énormément dilaté.

L’arrêt des calculs dans les uretères, produit souvent une grande dilatation de ces conduits. Gattoin en a observé un cas sur une vache et les concrétions étaient restées fixées dans l’uretère gauche. M. Lafosse a vu l’uretère droit d’un baudet rempli d’un magma calculeux qui occupait la vessie et qui s’étendait jusque dans le bassinet du rein. Cet uretère s’était distendu au point de pouvoir loger le bras.

Quand les calculs ont été entraînés dans le canal de l’urèthre, et qu’ils ont séjourné pendant quelques temps dans un point déterminé, des lésions graves existent dans les parties de la muqueuse que les calculs occupent ou qu’ils ont parcourues ; la muqueuse, en effet, est tantôt épaissie, ramollie d’autres fois elle est amincie, et dans l’un et l’autre cas, son calibre peut être fortement agrandi ; elle peut même être éraillée détachée en quelques points et transformée en pelotons ou grumeaux assez gros parfois pour empêcher l’écoulement de l’urine, même après l’extraction du calcul par l’uréthrotomie.

Mais la lésion la plus commune que l’on observe, quand les animaux ont succombé à la suite de l’arrêt d’un calcul dans le canal de l’urèthre ou dans la vessie, c’est la rupture de cette poche. La déchirure varie de siége et de forme. Le plus souvent, elle occupe le fond de la vessie, mais il n’est pas rare non plus qu’elle existe à la paroi supérieure ou bien sur les côtés, soit à droite, soit à gauche. Cette déchirure a tantôt une forme allongée, d’autres fois circulaire, elle traverse directement les trois membranes ou fait, dans chacune d’elles, une ouverture distincte, ne correspondant pas à ses voisines et se trouvant fermée par la membrane qui enveloppe celle où elle est pratiquée, ce qui explique pourquoi, d’après M. Lafosse, après la rupture et la délétion subite de la poche, celle-ci peut de nouveau se remplir d’urine, qui, l’urèthre étant ouvert, s’échappe, en partie par ce conduit, en partie dans le péritoine pendant les efforts de miction. Les bords de la déchirure sont presque toujours filandreux, ecchymosés, si l’ouverture du cadavre est faite peu de temps après la rupture de la poche urinaire et une certaine quantité de sang est épanchée dans le tissu conjonctif des membranes superposées. Si l’animal meurt quinze ou vingt jours après la rupture de la vessie, les bords de la déchirure sont épaissis, grumeleux et la cicatrisation commence à se faire. Plusieurs cas de cette nature ont été observés par des praticiens distingués.

Outre ces lésions on trouve une grande quantité d’urine épanchée dans la cavité abdominale, cette dernière en renferme parfois plus de cent cinquante litres ; le tissu conjonctif de la région abdominale est infiltré d’urine, les muscles, les intestins, ont perdu leur couleur, ils sont devenus pâles, flasques, sans ténacité et répandent une odeur d’urine très-prononcée. Le péritoine varie de nuance : tantôt il présente çà et là de légères plaques noirâtres, à bord circonscrit, se déchirant par la moindre pression ; tantôt, l’inflammation n’ayant pas fait autant de progrès, il n’a acquis qu’une couleur plombée.

Quand le rein a suppuré et s’est perforé, la matière purulente, mélangée à l’urine secrétée, se répand aussi dans le péritoine et enflamme cette membrane, mais, dans ce cas, l’urine épanchée est en moins grande quantité que celle que l’on trouve à la suite de la rupture de la vessie. Il peut aussi arriver, dans le cas de rupture de cette poche ou la perforation du rein, que les petits graviers, qui existent dans leur intérieur, soient entraînés par l’urine ou le pus dans la cavité péritonéale.

§ VIII — Traitement.

Le traitement de l’affection calculeuse est une question de la plus haute importance, car si on laissait la maladie suivre son cours, l’animal succomberait infailliblement et causerait une grave perte à son propriétaire. Prolonger la vie de l’animal, afin d’en tirer plus tard le meilleur parti possible, est donc un point très-important, mais prévenir la maladie, c’est-à-dire éviter la formation des calculs, est plus important encore. Nous avons donc à examiner le traitement préservatif et le traitement curatif de l’affection dont il s’agit.

I

Traitement préservatif.

Éviter la formation des calculs est une question de la plus faute importance, mais elle est à la fois embarrassante et difficile à résoudre pour le praticien vétérinaire.

Comment, en effet, faire disparaître les causes qui tiennent à la nature des terrains et par conséquent à la composition des aliments et des boissons ? En supposant, pour un instant, que ces causes puissent être éloignées, ce qui est impossible, est-ce que nous savons ce qui se passe de particulier dans les organes ? Savons-nous, en effet, pourquoi parmi les bœufs d’une même ferme quelques-uns seulement sont atteints par la maladie tandis que d’autres parcourent toutes les périodes de la vie sans en être atteints, bien qu’ils soient soumis au même régime alimentaire, qu’ils s’abreuvent avec la même eau et qu’ils fassent le même travail ? A-t-on cherché à se rendre compte de l’état physiologique des voies urinaires ? Ne peut-il pas y avoir vice dans la nutrition générale et surtout dans celle des os ? La même quantité de carbonate de chaux, introduite dans l’économie par les aliments et les boissons, est-elle déposée en partie ou en totalité dans ces derniers organes ? Quant au carbonate de chaux que l’on trouve dans l’urine, ne se pourrait-il pas qu’il provînt des os par suite du mouvement de décomposition qui a lieu dans la machine animale et que la nature se servit des voies urinaires pour le chasser au dehors ? Voilà bien des questions, comme le dit M. Caussé, que l’on devrait résoudre avant de tracer les moyens prophylactiques.

Mais laissons de côté ces questions et examinons un peu les choses qui préparent ou favorisent le développement de la maladie, afin de pouvoir mieux en combattre les fâcheux effets.

Parmi les causes qui prédisposent et déterminent la formation des calculs, on s’accorde à reconnaître le défaut d’exercice et un séjour trop prolongé dans les écuries ou dans les étables, séjour qui ralentit la circulation ainsi que les secrétions, favorise le dépôt et l’agrégation des particules salines des liquides. On devra donc gouverner les animaux de telle sorte que l’urine ne s’accumule pas en trop grande quantité dans la vessie et que son évacuation puisse s’effectuer toutes les fois que les animaux en éprouvent le besoin. On y arrivera par des exercices modérés qui, en agitant l’urine, tiennent en suspension ses parties insolubles jusqu’au moment de sa complète évacuation.

L’usage de l’eau séléniteuse ou chargée de sulfate, de carbonate de chaux, doit être également évité ; si on est obligé d’en faire usage, il faudra la puiser quelques heures avant d’abreuver le bétail, la mettre dans de grandes auges en ayant soin de rendre les sels calcaires solubles, soit par l’addition de vinaigre ou d’acide chlorhydrique. On pourra encore employer le carbonate de potasse (potasse du commerce) à la quantité de huit à dix grammes par seau d’eau ou tout simplement un verre d’eau de lessive. Il résulte de ce mélange un carbonate de chaux insoluble qui, se précipitant au fond du vase, ne peut nuire aux bestiaux.

Il faudra bien se garder également d’abreuver les animaux dans des mares, surtout lorsque ces eaux croupissantes sont salies par le jus du fumier qui s’y rend, cas que l’on observe assez souvent dans certains pays.

Lorsque des conditions quelconques s’opposent à l’application de ces principes et que des signes annoncent néanmoins l’invasion des calculs, certaines pratiques peuvent favoriser leur évacuation avant qu’ils aient acquis assez de volume pour obstruer les voies urinaires : tels sont l’usage du vert et l’emploi des diurétiques parmi lesquels les bicarbonates de potasse et de soude se trouvent au premier rang. Le vert fournit au sang un véhicule abondant qui rend l’urine plus aqueuse et plus abondante ; celle-ci, en passant en plus grande quantité dans l’appareil urinaire, entraîne les calculs déjà formés à travers les conduits excréteurs et les expulse au dehors si leur volume n’est pas trop considérable. Tout propriétaire prévoyant devra donc cultiver les plantes et les racines fourragères pour composer une partie de l’alimentation des bestiaux pendant la saison rigoureuse. Ces aliments devront être coupés et mélangés avec des aliments secs.

Enfin, puisque la vieillesse devient une condition favorable à la formation des calculs, on aura le soin d’adopter comme règle le sacrifice des animaux de boucherie avant que ceux-ci soient arrivés à un âge trop avancé.

II.

Traitement curatif.

Le traitement curatif, celui qui est le plus souvent mis en usage, comprend la dissolution des calculs par des agents chimiques et leur extraction, soit par des moyens mécaniques, soit par des moyens chirurgicaux.

A. — Dissolution des calculs. — La dissolution des calculs, ou lithontriptie, ne peut guère être appliquée que dans les cas où les calculs siègent dans les reins ou la vessie ; quand ils siègent dans le canal de l’urèthre, le meilleur moyen est d’en faire immédiatement l’extraction.

La dissolution des calculs est généralement abandonnée, parce qu’il est admis qu’aucun des agents chimiques ne peut dissoudre les calculs sans produire une inflammation grave des organes qui recèlent les concrétions à dissoudre. De plus, les expériences et les résultats, que l’on a obtenus à l’aide de ce moyen, doivent le faire bannir de la pratique ordinaire ; en effet, Girard, à l’École d’Alfort, a tenté de dissoudre les calculs, hors de la vessie, avec de l’eau vinaigrée, mais ses expériences sont restées sans succès ; il en a conclu que les injections dans la vessie seraient encore inefficaces. Spooner a traité des animaux à l’aide de l’acide chlorhydrique dilué, mais, malgré un traitement de six semaines, on fut obligé d’avoir recours à l’opération. Un cheval, traité par le même moyen, pendant quelque temps, à l’École de Toulouse, en 1876, fut renvoyé à son propriétaire sans qu’on eût obtenu de résultats. Il fut ramené quelque temps après pour subir l’opération.

D’un autre côté, M. Mauri, chef de service à l’École de Toulouse, a fait plusieurs essais pour dissoudre les calculs l’aide de l’acide chlorhydrique étendu ; il a vu que cet acide dilué au 1/100, au 1/50, n’avait aucune action dissolvante sur les calculs, et que ceux-ci étaient dissous seulement à l’aide de l’acide dilué au 1/20. Mais l’acide chlorhydrique, dilué dams cette dernière proportion, conserve encore ses propriétés caustiques, et, par conséquent, ne peut être employé en injection dans la vessie, ni être introduit dans l’économie par une voie quelconque.

En supposant qu’on puisse l’injecter dans la vessie et que la dissolution des calculs puisse se faire, ne se pourrait-il pas que l’acide carbonique, qui en résulterait, se dégageant dans la vessie, la distendit au point d’occasionner de graves accidents ?

Cependant les amas de sable fin, formés de carbonate de chaux, n’occasionnant encore que la dysurie, minaient être dissous à la longue par l’emploi persévérant de boissons légèrement acidulées par l’acide chlorhydrique et par des injections, à des intervalles de cinq ou six jours, de solutions étendues de cette même substance au 1/50 et au 1/100.

B. — Extraction des calculs. — L’extraction des calculs, comme nous l’avons dit plus haut, comprend les moyens mécaniques et les moyens chirurgicaux.

a) Moyens mécaniques. — Ces moyens sont assez variables ; on peut ranger dans cette classe l’administration des boissons abondantes, des aliments aqueux, afin d’entretenir, dans l’appareil urinaire, un courant de liquide tellement actif que les calculs soient entraînés au dehors.

Mais les moyens mécaniques qui, jusqu’ici, ont produit les meilleurs résultats, sont, d’après M. Lafosse, « les mouvements de l’animal combinés avec les efforts évacuatoires. Cet auteur compte, en effet, plus de dix cas de guérison sur des bœufs qui, étant amenés à l’École pour y être traités de coliques avec rétention d’urine, se sont mis à uriner en route ou dès leur arrivée et ont été immédiatement soulagés. Il peut aussi arriver, d’après les observations du même auteur, que, pendant l’opération de l’uréthrotomie, les animaux s’agitent violemment, se couchent, se relèvent, et que le calcul, arrêté dans le col de la vessie ou dans le canal de l’urèthre, est expulsé au dehors, et l’animal se trouve immédiatement soulagé. Celui-ci rend d’abord un mince filet d’urine qui devient tout à fait normal au bout de quelques jours. Dans ce cas, le calcul a été expulsé au dehors, ou bien il a changé de place de manière à ne pas empêcher la sortie de l’urine. De ces observations il ressort l’indication de faire marcher et même de faire trotter, pendant quelques instants, les bœufs tourmentés par des coliques urinaires au début.

b) Moyens chirurgicaux. — Ces moyens sont applicables seulement pour les calculs qui ont leur siége dans la vessie ou le canal de l’urèthre ; ceux qui sont situés dans les reins ou les uretères ne peuvent être extraits sans accidents graves. Cependant nous allons faire connaître les moyens qui ont été conseillés et auxquels on doit recourir quand les calculs siègent dans les deux premières divisions de l’appareil urinaire.

I. — Calculs rénaux — À l’époque actuelle de la science, on ne possède aucun moyen chirurgical applicable aux calculs rénaux, on ne peut qu’apaiser les douleurs, lorsqu’elles existent, par des boissons rafraîchissantes, des lavements émollients, des cataplasmes de farine de graine de lin sur les lombes, etc.

II. — Calculs uretéraux. — Chabert a assuré que l’on pouvait faire l’extraction de ces calculs au moyen d’une incision faite à l’intestin et à l’uretère, mais ce moyen est tout à fait à rejeter, car, après l’opération, l’urine s’infiltrerait dans le péritoine et produirait une péritonite mortelle. De plus, l’incision faite à l’intestin laisserait passer les excréments dans la cavité abdominale et le même accident se produirait. On ne possède donc pas encore aujourd’hui des moyens propres pour remédier à ces calculs.

III. — Calculs vésicaux. — IV. — Calculs uréthraux. — Les calculs de la vessie et du canal de l’urèthre obstruent plus ou moins, nous l’avons déjà dit, le libre écoulement de l’urine, et amènent, au bout d’un certain temps, la rupture de la vessie. Aussi, si l’obstruction du canal de l’uretère ou du col de la vessie est incomplète, qu’un petit filet d’urine s’échappe encore au dehors, le vétérinaire doit conseiller au propriétaire de livrer immédiatement l’animal à la boucherie, car le moindre retard deviendrait préjudiciable.

Si l’animal ne pouvait être vendu qu’à de mauvaises conditions, l’opération de l’uréthrotomie devient indispensable pour prolonger la vie du malade. Par l’uréthrotomie on obtient deux buts différents : 1° on empêche la rupture de la vessie en faisant évacuer la grande quantité d’urine qu’elle renferme ; 2° on désobstrue le canal de l’urèthre par l’extraction du calcul qui l’oblitère, et par suite on donne écoulement à l’urine par les voies naturelles.

Quand l’opération devient indispensable, le lieu où l’on doit la pratiquer est déterminé par la position du calcul. Si celui-ci existe dans la vessie, au col de ce réservoir, ou dans la région pelvienne du canal de l’urèthre, on fait l’uréthrotomie ischiale, c’est-à-dire au contour ischiatique ; si, au contraire, le calcul est arrêté à l’S pénienne, ce qui arrive le plus souvent, on fait l’uréthrotomie scrotale. Cette dernière, ne pouvant être pratiquée que sur l’animal couché, il est nécessaire de la faire précéder de la ponction ischiale, surtout lorsque la vessie est très-distendue par l’urine ; sans cette précaution, la poche urinaire se rupturerait pendant les manœuvres de l’abattage ou pendant les efforts que ferait l’animal pour se dégager des liens qui le tiennent dans la position décubitale.

Cela étant dit, nous allons faire connaître, aussi succinctement que possible, le manuel opératoire de l’uréthrotomie, soit ischiale, soit scrotale.

1° De l’uréthrotomie ischiale. — On doit recourir à cette opération toutes les fois que la rétention d’urine est arrivée à sa dernière limite et qu’il n’y a pas de temps à perdre si l’on veut éviter la déchirure de la poche urinaire.

L’uréthrotomie ischiale se pratique, comme l’indique son nom, à la région ischiale, sur le bulbe même de l’urèthre : là, le canal est plus superficiel que dans les autres parties, et si l’on veut introduire une sonde dans la vessie, la difficulté est moins grande que si l’on faisait l’opération trop en dessous du contour ischiatique.

Deux modes peuvent être suivis pour exécuter cette opération ; le premier consiste à faire la ponction d’un seul coup, de dehors en dedans, en intéressant à la fois toutes les couches de tissus superposés, depuis la peau jusqu’aux parois du canal ; le deuxième consiste à traverser, par des incisions successives, ces mêmes couches de tissus. Quel que soit le mode que l’on a adopté, c’est dans l’attitude debout que la ponction de l’urèthre doit être pratiquée, afin d’éviter la rupture de la vessie par l’abattage du sujet.

Pour faire la ponction d’un seul coup, l’opération est simple, surtout quand le bulbe de l’urèthre est fortement distendu par l’urine ; pour cela, l’opérateur arme sa main droite d’un bistouri droit, le dos tourné à gauche et le tranchant inversement, puis il le plonge d’emblée dans la profondeur du bulbe, aussi près que possible de l’arcade ischiale ; après cette ponction, il opère le débridement transversal du canal, de gauche à droite, coupant ainsi en même temps et la peau et les couches musculaires qui revêtent le bulbe et les parois propres de ce renflement uréthral. Le flot de liquide, qui suit immédiatement ce débridement, indique que l’opérateur a atteint son but et qu’une voie est largement ouverte par laquelle l’urine retenue peut maintenant s’échapper. Il faut avoir la grande précaution, en pratiquant ce débridement, de ne pas plonger le bistouri à une trop grande profondeur, afin d’éviter d’atteindre le corps caverneux et surtout de le couper transversalement dans toute son épaisseur, accident possible, dont Maillet rapporte un exemple et qui fut suivi de la gangrène et de la chute de la totalité du pénis tronqué à sa base.

L’opération devient plus difficile quand la rétention d’urine est causée par un calcul arrêté au col de la vessie ou dans la portion pelvienne du canal de l’urèthre ; dans ce cas, le bulbe de l’urèthre est complètement effacé, tandis qu’il est tendu et rebondissant quand le calcul est arrêté à l’S du pénis. Mais l’opération, par le même procédé, peut néanmoins être encore pratiquée en plongeant le bistouri à une plus grande profondeur.

L’opération par le débridement transversal, pratiquée par Cruzel et autres praticiens, a été vivement critiquée par M. Serres dans le Journal des vétérinaires du Midi (1858), aussi cet auteur conseille de faire l’incision parallèle au canal de l’urèthre. C’est aussi de cette manière qu’opérait Santin.

Ce procédé consiste à inciser d’abord la peau, au niveau du bulbe, sur un pli transversal, à dépouiller les muscles uréthraux de la couche de tissu conjonctif qui les revêt, à plonger un bistouri droit à travers l’épaisseur des parois du bulbe, faire glisser une sonde cannelée dans l’ouverture ainsi pratiquée et se servir de la cannelure de la sonde pour débrider le canal longitudinalement et de bas en haut. Quoi qu’en aient pu dire certains auteurs recommandables, ce mode opératoire présente des difficultés d’exécution bien plus grandes que celles du débridement transversal, surtout quand l’animal est continuellement agité par des coliques d’une haute intensité. Par le débridement transversal, on agit avec plus de rapidité, et on satisfait bien mieux aux indications urgentes de la situation présente.

La ponction de l’urèthre étant faite par l’une ou l’autre méthode, doit-on faire l’extraction du calcul ou doit-on le refouler dans l’intérieur de la vessie ? D’après M. Serres, il est plus chirurgical de l’extraire, et c’est toujours à l’extraction que l’on doit avoir recours lorsque le calcul est très rapproché de l’incision ; mais s’il est éloigné, s’il est dans le col de la vessie ou dans ce réservoir lui-même, la difficulté est grande, les manipulations parfois fort longues, que l’on doit effectuer, peuvent être suivies de contusions, de déchirure de la muqueuse, d’une inflammation vive de la vessie, conséquences qui peuvent quelquefois causer, mais à un degré moindre, les mêmes symptômes que nous avons constatés au début d’un calcul arrêté dans la vessie. Ce sont là des motifs qui doivent être pris en considération avant d’entreprendre l’extraction du calcul.

Admettant que l’on se soit décidé pour l’extraction, c’est à l’aide de tenettes, d’une dimension en rapport avec le canal de l’urèthe, que l’on doit saisir les calculs pour les entraîner au dehors, surtout si les calculs ont un volume qui dépasse le calibre du canal de l’urèthre ; mais si les calculs sont des perles vésicales ou un magma sédimenteux, on les entraînera au dehors à l’aide d’injections, par poussées successives, de liquides tièdes dans l’intérieur de la vessie. Pour obtenir ce courant liquide, plus ou moins continu, on place l’animal dans la position dorsale et on dilate le col de la vessie à l’aide d’un spéculum bivalve.

Ces manipulations, comme nous l’avons dit plus haut, sont assez délicates et demandent une main sûre et exercée, aussi, ne pourrait-on pas, à l’aide de la main introduite dans le rectum, faire cheminer le calcul d’avant en arrière et le conduire ainsi jusqu’à l’incision ? Ce procédé a été suivi de succès entre les mains de quelques praticiens.

Dans le cas où le calcul est situé dans la région pelvienne du canal de l’urèthre et que les diverses manipulations que l’on a faites, pour en faire l’extraction, sont restées sans résultat, on doit le refouler dans l’intérieur de la vessie. Pour cela, une sonde en plomb, boutonnée, remplit toutes les conditions désirables ; à son défaut, une petite baleine, un osier, entouré d’un linge très fin et formant un petit bouton à l’extrémité qui doit agir sur le calcul peuvent être utilisés. Ces instruments, avant d’être introduits dans le canal de l’urèthre, doivent être enduits d’huile d’olive, on peut même en injecter un peu dans le canal de l’urèthre.

L’un ou l’autre de ces résultats obtenus, soit l’extraction, soit le refoulement du calcul, l’urine a sa voie ouverte et peut s’échapper. Cependant il arrive quelquefois que le col de la vessie est dans un état spasmodique tel que l’urine ne peut s’échapper au dehors. Dans ce cas il faut alors surmonter la résistance du col en introduisant dans celui-ci une sonde creuse, en caoutchouc, bien huilée, qui laissera échapper l’urine par son ouverture extérieure. Si la constriction du col est trop énergique pour empêcher l’introduction de la sonde, il faut recourir aux préparations belladonées dont l’influence immédiate et directe sur les sphincters est très rapide.

2° De l’uréthrotomie scrotale. — L’uréthrotomie scrotale a pour but d’extraire le calcul arrêté à l’S du pénis ou en avant des bourses, et par conséquent de rétablir le courant des urines par leur voie normale. Cette opération ne doit être entreprise que lorsqu’on s’est assuré, par la palpation uréthrale ou tout autre moyen, que le calcul à extraire se trouve bien arrêté, à l’S du pénis ou dans la portion de cet organe située en avant des bourses.

Mais faut-il pratiquer l’uréthrotomie scrotale en avant des bourses, ou bien, à l’exemple de quelques vétérinaires, en arrière de ces organes ? Nous croyons, avec Santin et M. H. Bouley, que l’opération en avant des bourses est préférable, parce que, en arrière de ces organes la peau est très lâche, le tissu cellulaire graisseux très abondant et l’urèthre profondément situé, ce qui nécessiterait une incision très étendue et très profonde pour arriver sur le siége du calcul.

Lorsque celui-ci est arrêté à l’S pénienne, il faut avoir soin, avant de commencer l’opération, d’extraire le pénis de sa gaine prépuciale et de déplisser l’S qu’il décrit, par des tractions modérées ; on arrive ainsi à déplacer le calcul avec la partie du canal dans laquelle il est arrêté et à le mettre, par ce déplacement, plus à la portée de l’action opératoire. Ce n’est qu’en agissant ainsi, que l’uréthrotomie scrotale, pratiquée en avant des bourses, peut être suivie de succès.

L’animal, qui doit subir l’opération, est abattu sur le côté gauche et son membre postérieur droit, relevé vers l’épaule, est assujetti de la même manière que pour la castration.

Cela fait, l’opérateur déplisse l’S du pénis en tirant celui-ci hors du fourreau, de manière à ce que le calcul se trouve en avant des bourses comme nous l’avons dit plus haut. Si le calcul avait franchi l’S et s’était arrêté de lui-même dans la partie du canal située en avant des bourses, on pourrait, à l’aide de tractions sur le pénis, amener le calcul hors de la cavité du fourreau et agir directement sur le canal de l’urèthre sans faire une incision au fourreau. On pourrait même, dans quelques cas, repousser le fourreau en arrière le plus loin possible, afin de mettre à nu la partie du canal où le calcul est arrêté. À supposer même que celui-ci ne fût pas très en arrière de l’ouverture prépuciale, ou pourrait débrider cette ouverture par en bas, dans une certaine limite, et faciliter, par cette simple incision, l’opération qu’il est nécessaire de pratiquer sur le canal pour en extraire la concrétion obturatrice.

Mais le plus souvent le calcul est arrêté au niveau de la première courbure pénienne, et, par la traction du pénis, on parvient seulement à amener le calcul en avant des bourses, de sorte qu’il est encore recouvert par la peau du fourreau ; l’opération consiste alors, après avoir coupé les poils en avant des bourses, à faire à la peau une incision sur un pli transversal que l’on coupe de son sommet à sa base, de manière à pénétrer dans la cavité prépuciale elle-même ; cette incision, parallèle à la direction du pénis, doit avoir une longueur de 10 à 12 centimètres. L’incision faite, on peut, avec le doigt en crochet, extraire de la cavité prépuciale, la partie de la verge où le calcul est arrêté, inciser le canal sur ce point et en faire sortir le calcul. Si celui-ci est lisse, il peut être extrait facilement par la pression, mais s’il est pourvu de rugosités à sa surface, on est quelquefois obligé d’avoir recours à des pinces anatomiques.

Le calcul étant extrait, on abandonne le pénis à lui-même, ses muscles rétracteurs le font immédiatement rentrer dans le fourreau, et sa double courbure se réforme. On lave alors, avec de l’eau fraîche, les environs de la plaie, soit pour la débarrasser du sang qui a pu couler pendant l’opération, soit pour éviter l’inflammation qui pourrait survenir. L’opération étant terminée, on donne la liberté au malade.

Tout ce que nous venons de dire ne peut être applicable que dans les cas où la vessie n’est pas encore rupturée ; mais, si la rupture a eu lieu avant l’arrivée du vétérinaire, la science est impuissante, car la présence de l’urine dans la cavité abdominale détermine des lésions mortelles. Il faut alors se hâter de livrer l’animal à la consommation, car la viande n’a encore subi aucune altération ; ce n’est guère qu’au bout de vingt-quatre heures, quelquefois davantage, que la viande commence à s’altérer et à devenir impropre comme aliment.

En présence des cas où il y a eu rupture de la vessie, accumulation de l’urine dans l’abdomen et continuation du jet d’urine, tout espoir de sauver le malade est perdu, on doit, le plus tôt possible, ordonner l’abattage.

V. — Calculs prépuciaux. Les calculs prépuciaux doivent être détachés avec le doigt huilé que l’on introduit dans l’intérieur du fourreau. S’ils adhèrent trop fortement et qu’on ne puisse les détacher avec le doigt, on incise le bord du fourreau pour faciliter leur décollement. Les bords de la plaie se cicatrisent facilement, il n’y a pas besoin de les réunir par une suture, à moins que l’incision soit très longue.

III

Traitement consécutif.

Les soins que l’on doit donner à l’animal atteint de l’affection calculeuse ne sont pas encore terminés quand on a extrait le calcul et que l’urine s’est écoulée au dehors ; il faut encore s’occuper des complications qui peuvent survenir après les manipulations nécessitées pour l’extraction des calculs, complications qui sont aussi quelquefois consécutives de lta maladie elle-même. Les plaies uréhtrales résultant de l’uréthrotomie, doivent aussi être soumises à un traitement particulier.

Hémorrhagie. L’opération de l’uréthrotomie, soit ischiale, soit scrotale, est toujours suivie, surtout la première, d’une hémorragie assez abondante d’abord, qui résulte de la section des branches anostoniotiques des artères bulbeuses, à la surface et dans les parois du bulbe uréthral, mais cette hémorrhagie est peu grave, elle s’arrête le plus souvent d’elle-même en raison de la plasticité du sang du bœuf, à moins que celui-ci se trouve dans un état profond de débilité. Si l’hémorrhagie ne s’arrêtait pas, il faudrait y mettre fin à l’aide de quelques agents hémostatiques simples, tels que les douches d’eau fraîche, le linge brûlé, l’amadou ; si ces agents étaient insuffisants, on pourrait recourir à l’emploi des topiques astringents et même au perchlorure de fer.

Cystite ou inflammation de la vessie. La distension outrée de la vessie par une trop grande quantité d’urine accumulée dans son intérieur, provoque l’inflammation de la membrane muqueuse et une infiltration sanguine générale de cette poche. Lorsque cet état survient, l’animal est triste, ne rumine pas, urine difficilement, les urines sont quelquefois sanguinolentes, la vessie est douloureuse à la pression. Ces troubles peuvent aussi provenir des manipulations qu’on a faites pour extraire un calcul situé dans la vessie ou engagé dans le col de cet organe. On oppose à ce trouble morbide, une saignée à la jugulaire, aux sous-cutanées abdominales ou à l’artère coccygienne, l’administration de lavements adoucissants, légèrement acidulés par du vinaigre, des boissons mucilagineuses, camphrées ou nitrées, des bouchonnements fréquents et l’application sur le corps d’une ample couverture de laine.

Si les symptômes ne disparaissent pas bientôt, il serait prudent de livrer l’animal à la boucherie.

Abcès urinaires ou infiltration de l’urine dans le tissu conjonctif. Le défaut de parallélisme des deux incisions faites, l’une à la peau, l’autre au canal de l’urèthre, dans le cas d’uréthrotomie scrotale, la présence du tissu conjonctif qui environne les incisions, soit à la région ischiale, soit à la région scrotale, sont les causes de l’infiltration de l’urine dans le tissu conjonctif et par conséquent de la présence des tumeurs, plus ou moins volumineuses, auxquelles on donne le nom d’abcès urinaires. Il est extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, d’éviter ces causes, aussi il est bon d’inciser tout le tissu conjonctif qui environne l’incision, et de pratiquer la suture du canal pour que l’urine suive autant que possible sa voie naturelle.

Mais, malgré ces précautions, il arrive souvent que l’urine coule en partie par la voie artificielle faite à travers les tissus et il se forme tout le long du pénis, une tumeur qui vient se terminer au fourreau. Au début de sa formation, cette tumeur est de nature œdémateuse, mais plus tard elle devient dure, résistante ; le peau, détachée des tissus sous-jacents, tombe par plaques ou d’une seule pièce en entraînant avec elle tout le tissu conjonctif qui existe entre elle et les parois abdominales. Quelquefois, la gaine du pénis est respectée, dans d’autres cas, elle est détruite, circonstance qui nécessite l’amputation de la partie libre du pénis. Ces cas graves peuvent se présenter surtout quand on a pratiqué l’uréthrotomie ischiale, mais si, en même temps, on a pratiqué l’uréthrotomie scrotale, l’urine, épanchée dans le tissu cellulaire, s’infiltre jusqu’à l’incision de la peau pratiquée en avant des bourses et coule au dehors. En même temps, les plaies se cicatrisent et