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De la fréquente Communion.../Partie 1, Chapitre 37

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Chez Antoine Vitté (p. 411-412).

Chapitre  XXXVII


REFVTATION DE LA SECONDE RAISON,
Que cette pratique generalle de Communier toutes les Semaines, approche plus de la Communion de tous les iours obſervée en la primitiue Egliſe.



MAis ſans doute que vous meſpriſerez le conſeil d’Auila, comme contraire à l’eſprit de l’Egliſe dont vous pretendez appuyer voſtre ſentiment, en diſant, que la pratique de Communier tous les huict iours approche plus de la Communion de tous les iours obſeruee en la primitiue Egliſe, & que le ſaint Concile de Trente ſouhaitteroit de reſtablir. C’eſt la ſeconde raiſon, que vous apportez pour fortifier voſtre opinion. Mais pour le Concile de Trente, ie m’inſcris en faux encore vne fois, & vous ſouſtiens, que le Concile teſmoigne bien deſirer qu’il ne ſe diſe point de Meſſe ſans Communians ; mais qu’il ne parle en aucun endroict de reſtablir la Communion de tous les iours.

Pour la pratique de la Primitiue Egliſe, ie vous ay deſia reſpondu, que voſtre frequente Communion en approche veritablement, ſi elle eſt animee du meſme Eſprit ; mais que ſi elle n’en a que le corps, & qu’elle soit deſtituee de la Manducation Spirituelle par la pureté de la foy, et par l’ardeur de la charité, qui doit estre l’ame de la manducation corporelle, comme disent les peres ; vostre comparaison est semblable à celle d’une personne qui diroit qu’un homme mort approche fort d’un homme vivant. Et je repeterois icy volontiers ces excellentes paroles de Saint Bonaventure que j’ay desja rapportées au commencement de ce discours ; que celuy qui se trouve dans l’estat des chrestiens de l’eglise primitive, c’est à dire dans la sainteté de son baptesme, dans l’innocence, dans la charité, et dans la ferveur du Saint Esprit, fait fort bien de les imiter dans leurs frequentes communions : mais que celuy qui se trouve dans l’estat de l’eglise finissante, c’est à dire, froid et lent aux choses de Dieu, fait beaucoup mieux de ne communier que rarement. Que si l’on se trouve dans un estat comme moyen entre ces deux, l’on doit aussi se gouverner d’une maniere temperée, se retirant quelquefois par reverence de cette table, et d’autresfois s’en approchant par amour, et prendre, ou quitter l’une ou l’autre de ces deux voyes, d’éloignement, ou de frequentation, selon que nous reconnoistrons en nous un plus grand advancement dans la pieté.