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Des sciences occultes au XIXe siècle - Magnétisme animal

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DES
SCIENCES OCCULTES
AU XIXe SIÈCLE.

MAGNÉTISME ANIMAL.


La science moderne a coutume de placer en tête de ses plus beaux titres de gloire sa constitution même comme science. Les anciens, à l’en croire, eurent des connaissances, mais pas de véritables sciences ; ils avaient la curiosité plutôt que l’esprit scientifique. Aussi, ce que la science moderne vante par-dessus tout, c’est sa législation. Elle y tient plus encore qu’à ses conquêtes. Après avoir purgé ses domaines si long-temps usurpés, son principal souci est de veiller à ce que désormais il ne s’y introduise rien de suspect ; et, sur ce point, elle se flatte d’avoir perfectionné sa police intérieure, comme on a fait celle des villes.

On cite comme un des premiers et des plus heureux résultats de cette réforme, l’abolition d’une classe entière de pseudo-sciences et d’arts chimériques correspondans qui occupèrent pendant des siècles dans l’arbre encyclopédique la place des connaissances réelles et des arts utiles. Parmi ces sciences, il suffit de rappeler l’astrologie, la magie, la théurgie, l’alchimie, la cabale. Toutes ces doctrines, et d’autres encore, licites ou illicites, sacrées ou profanes, portèrent long-temps le titre de sciences occultes, soit parce que leurs théories et leurs pratiques impliquaient l’existence d’un monde surnaturel, soit parce qu’elles supposaient dans la matière, à côté et en dehors des lois qui règlent les phénomènes naturels, des influences, des qualités, des puissances occultes dont l’étude constituait une science d’un ordre plus relevé soit parce que ces connaissances transcendantes, très difficiles à acquérir et réservées par conséquent à quelques privilégiés, donnaient à celui qui en avait le secret un empire mystérieux et redoutable sur la nature et sur les hommes. La philosophie moderne fit justice de ces vains simulacres de science, et ouvrit de nouvelles et meilleures routes dans la recherche de la vérité.

Que cette épuration ait été légitime et un immense bienfait, c’est ce que personne ne serait tenté de nier aujourd’hui. Le mouvement scientifique du XVIe siècle n’a de comparable en grandeur que le mouvement religieux et social du christianisme. Cependant le spectacle de cette destruction en grand de tant d’idées amassées par le temps, de tant de systèmes si laborieusement construits, de toute cette science de laquelle s’étaient nourries des centaines de générations, de tous ces prodigieux ouvrages de l’esprit humain, est à la fois triste et menaçant. Si en effet cette destruction fut juste et conforme à l’ordre, qui nous répond à nous, hommes nouveaux, de la solidité de nos œuvres d’un jour ? Si l’élite du genre humain et le genre humain tout entier ont été livrés pendant des milliers d’années à une sorte de folie scientifique, qui nous dit qu’en sortant de ce rêve nous ne sommes pas entrés dans un autre peut-être plus long que le premier ? Ce sont là des questions qui ne peuvent jamais être résolues par l’époque qui les pose. Il en faut laisser la solution aux générations pour qui notre présent sera le passé. Celles-là feront aussi leur science, et leur science jugera la nôtre, de même que la nôtre a jugé l’ancienne. Mais la nature, la forme et la date de la sentence sont des secrets.

Une question plus abordable, parce que nous avons sous la main les élémens de sa solution, est celle de savoir si cette espèce d’illusion logique qui perpétua si long-temps le règne des sciences dites occultes, et qui projeta son ombre sur toutes les autres branches du savoir, a aussi complètement cessé qu’on le croit généralement. Cette question, bien qu’assez peu respectueuse, n’a cependant rien d’absurde. Elle n’est pas même paradoxale. On trouvera, à la réflexion, que la continuation de l’illusion dont il s’agit est non-seulement possible, mais encore extrêmement probable.

Le premier fait à constater est l’étonnante durée et l’universalité d’empire des doctrines occultes. Si on consent à retrancher les deux ou les trois derniers siècles, on les verra, à partir de là, se prolonger sans interruption sur toute la terre, dans tous les temps, et confondre leur origine avec celle de la société humaine. Cette longue autorité est d’autant plus extraordinaire, que ces sciences, même les plus fantastiques en apparence, tendaient toutes à la pratique. C’était à leur décision souveraine que les individus et les gouvernemens confiaient leurs intérêts les plus chers et les plus positifs. C’est de la cage des poulets sacrés que sortirent les plus importantes résolutions du sénat et des généraux de Rome. C’est la sentence d’une magicienne, d’un chiromancien, d’un tireur d’horoscopes, qui réglait les actes de la vie publique et privée de la plupart des hommes. Au XVe et au XVIe siècles, il n’y avait pas de si petit prince en Europe qui n’eût son astrologue, qu’on envoyait chercher dans toutes les occasions importantes pour qu’il demandât aux astres s’il fallait partir ou rester, livrer bataille ou se retrancher. S’agissait-il d’accomplir une vengeance, de nuire à son ennemi, de tuer ses troupeaux, de dévaster son champ, de gagner un cœur, c’était la magie qui fournissait les sorts, les formules d’exécration, les philtres, et prescrivait les cérémonies appropriées au but. Enfin, c’est à la médecine occulte, à la thérapeutique mystérieuse d’incantation, d’attouchement, d’insufflation, des amulettes, des talismans, des songes, qu’on confiait de préférence les plus précieux des biens, la santé et la vie. Le rapport étroit et immédiat de ces pseudo-sciences avec la vie, leur contact continuel avec l’expérience, auraient dû, ce semble, en faire apercevoir plutôt la vanité. Que des recherches de simple curiosité spéculative, telles que celles de l’antique cosmologie ou de la dialectique scolastique, puissent s’épuiser en efforts stériles, et n’enfanter que des systèmes tout-à-fait arbitraires, c’est ce qui se conçoit sans peine, parce que dans ces régions désertes de la pensée, l’esprit peut bâtir ce qui lui plaît ; mais que des doctrines relatives à des objets placés dans la sphère de l’observation, incessamment soumises dans de continuelles applications à l’épreuve de l’expérience, puissent, quoique extravagantes jusqu’à l’absurde, forcer la conviction raisonnée des savans, et servir de règle pratique dans le cercle même des réalités matérielles, c’est ce qui semble inexplicable. A priori, une pareille illusion paraît contradictoire et impossible ; toutefois l’histoire prouve qu’elle est non-seulement réelle, mais encore en quelque sorte nécessaire. Sa perpétuité et son universalité ne permettent pas de la regarder comme un phénomène accidentel ; elle dépend donc d’une cause également continue et universelle.

Il sert de peu d’alléguer les raisons banales de la faiblesse naturelle de l’esprit humain, de l’influence de l’autorité, de la force des habitudes, de l’entraînement de l’exemple, de l’amour du merveilleux, et autres semblables. Il reste toujours à comprendre comment ces sources d’erreur peuvent indéfiniment prévaloir contre les témoignages immédiats des sens, contre les enseignemens de la plus grossière expérience, contre les suggestions les plus spontanées du sens commun, enfin contre la raison elle-même armée de règles et de méthodes logiques les plus compliquées. On ne fait donc par là qu’analyser cet égarement de la raison dans ses élémens ; ce n’est pas l’expliquer, c’est seulement l’excuser, sinon l’absoudre.

Quoi qu’il en soit, le fait est constant. Il est avéré qu’une sorte de délire scientifique, systématiquement et régulièrement constitué, a possédé pendant une longue suite de siècles le monde intellectuel. On le voit se développer partout dans l’histoire comme un fruit naturel de l’esprit humain. Dès-lors il devient difficile de croire à sa cessation subite et complète. Ainsi, tout en admettant un changement de position et de direction depuis deux ou trois cents ans, il est à présumer, avant toute vérification directe, que l’esprit scientifique du passé a dû se maintenir au milieu de nous dans une proportion quelconque. Toutes les analogies sont contre la possibilité d’une transformation soudaine. Ces sortes de saltus, comme disait Leibnitz, sont inconnus dans la nature. La raison scientifique, considérée dans sa manifestation dans le temps, a nécessairement des phases. Mais ce développement ne procède pas par momens détachés ; il faut plutôt se le représenter comme une progression continue et sans intervalles. La science tend incessamment vers un idéal logique qu’elle cherche à réaliser, mais elle ne le fait que peu à peu et toujours imparfaitement ; car, d’une part, cet idéal, tel qu’il se présente à un moment donné, ne peut jamais être réalisé en même temps dans les différentes sphères du savoir, et d’autre part ce but idéal ne reste pas fixe ; il change lui-même aussitôt qu’il est atteint ou près d’être atteint, et en changeant il se déplace, laissant toujours ainsi un espace à combler à l’activité humaine. Cette évolution indéfiniment transitoire, quoique toujours uniforme dans sa marche, a pour résultats le perfectionnement graduel de l’idée scientifique et la conscience de plus en plus claire des moyens de réaliser cette idée. Sa conséquence dernière, si elle pouvait être atteinte, serait de faire disparaître toute différence entre ce qui est cru et ce qui est su, c’est-à-dire d’égaler en toutes choses le domaine de la science à celui de la foi.

Si cette manière de concevoir le mouvement de la science est exacte, il est tout simple qu’il y ait à tous les momens de cette évolution des disparates dans les diverses sciences ou branches de sciences, et en conséquence il n’y a pas lieu de s’étonner ni de douter que la science actuelle conserve encore sur bien des points, quoique à son insu, une forte empreinte du caractère logique de la science ancienne.

Du reste, nous n’en sommes pas réduits à raisonner sur des probabilités. Il est facile de prouver par le fait, non-seulement que l’esprit scientifique des anciens âges subsiste encore avec force dans plusieurs de nos sciences les plus accréditées, dans la médecine par exemple, mais encore que des corps entiers de doctrines, dont l’étroite parenté avec les connaissances occultes les plus décriées est d’une irrécusable authenticité, s’établissent au milieu de nous, y vivent et s’y propagent sans autorisation légale, et même y font une assez belle figure. Parmi ces intruses se place en première ligne le magnétisme animal, objet spécial de notre étude dans ce travail.

Le mot médecine vient de nous échapper à l’occasion des sciences occultes. Nous ne l’avons pas cherché ; nous l’avons involontairement rencontré. Nous ne serions pas surpris que la médecine actuelle se crût blessée de cette rencontre, quoiqu’elle soit un simple rapprochement, et non une assimilation. Mais la situation particulière de cette science, considérée du point de vue logique, est si propre à éclaircir et à justifier les considérations qui précèdent, que nous n’hésiterons pas à en faire usage, au risque même de quelque scandale. Ce n’est pas que les médecins modernes soient tout-à-fait sans scrupule sur la valeur de leur science. Il en est un certain nombre qui sentent les côtés faibles de sa constitution, seulement il en est très peu qui se fassent une idée bien nette de la nature et de l’étendue de ce déficit. Une comparaison directe de la science médicale avec les fausses sciences du temps passé serait choquante, et, sous bien des rapports, peu équitable. Mais on ne s’écartera pas beaucoup de la vérité en réduisant l’assertion à ceci, savoir : que les propositions dogmatiques qui composent aujourd’hui la croyance du médecin, et les préceptes pratiques qui dirigent sa conduite dans l’exercice de l’art, sont en général, qu’il le sache ou l’ignore, des connaissances, logiquement parlant, pseudo-scientifiques, c’est-à-dire des notions acquises et acceptées hors des conditions indispensables de crédibilité que la critique philosophique impose aujourd’hui à toute affirmation dogmatique. Ce sont de simples croyances, en droit hors de la science, mais qui la simulent. De là naît pour la médecine une illusion tout-à-fait analogue dans son principe et dans ses résultats à celle qui a signalé le règne des doctrines occultes.

La démonstration développée de ce fait nous conduirait plus loin que nous ne voulons et ne pouvons aller. Nous nous bornerons à éclaircir notre pensée par un seul exemple.

La médecine occulte du moyen-âge avait un très riche formulaire, comme on en jugera par les recettes suivantes tirées de son Codex.

Pour le mal de tête, une plante de verveine appliquée sur la nuque (auct. Forestus).

Pour l’épilepsie, un brin de sureau suspendu au cou (auct. Anton. Hartmann et Bartholin).

Pour l’hypochondrie, un sachet de safran sur le cœur.

Pour faciliter la sortie des dents, les yeux d’écrevisse.

Pour arrêter le crachement de sang, appliquer sur l’estomac un crapaud tué pendant que le soleil est dans le signe du lion (auct. Hoffmann, Method. medend., lib. I, cap. 19), etc., etc.

Parmi les recettes ingénieuses de la thérapeutique, magnétique ou sympathétique de cette époque, une des plus remarquables est celle dont on se servait encore à Rome au XVIIe siècle pour la guérison de la lèpre et autres maladies cutanées. C’est le père Kircher (De arte Magneticâ, lib. III, pars 7) qui en a donné la meilleure description comme témoin oculaire. Dans les montagnes des environs de Bracciano, il y avait une caverne ; dans cette caverne, il y avait des serpens, et ce sont ces serpens qui guérissaient la lèpre. Voici comment : « Le malade, dit le docte jésuite, ayant été d’abord purgé, est transporté dans la grotte, dont la température est sensiblement plus élevée que celle de l’air extérieur ; on le déshabille, on l’étend tout nu par terre ; la chaleur du lieu ne tarde pas à le faire suer, et dès qu’il sue, il s’endort. Pendant qu’il est ainsi endormi et sans mouvement, les serpens des environs, alléchés par l’odeur de la sueur, sortent de leurs trous par centaines, s’enroulent autour du corps du patient et se mettent à le lécher délicatement sans lui faire aucun mal, Mais comme le moindre mouvement les mettrait en fuite, il est important que le malade demeure immobile. Aussi, pour prévenir de sa part les mouvemens involontaires que la peur ou le dégoût des reptiles pourrait provoquer, on lui administre quelquefois une dose d’opium. Au bout de deux à quatre heures de sommeil on le retire de la caverne, et on recommence les jours suivans jusqu’à la parfaite guérison, qui ne se fait pas attendre. »

En fait de ridicule et d’extravagance, il serait difficile de trouver quelque chose de plus satisfaisant. Le médecin moderne sourit en lisant cette recette, et se réjouit en son cœur d’être né à une époque où les progrès de la méthode scientifique ont purgé la médecine de ces pratiques superstitieuses. Il s’étonnera que de telles rêveries aient pu trouver crédit auprès des savans. Il prouvera admirablement, s’il consent toutefois à discuter le fait, qu’aucune théorie supportable ne peut justifier une médication de cette nature ; il mettra en avant tout ce qu’on sait ou croit savoir sur l’éléphantiasis d’une part, et de l’autre sur les serpens, et il démontrera victorieusement qu’il n’y a aucun rapport imaginable entre cette maladie et ces reptiles. Si on allègue les expériences, il demandera par qui, comment, dans quelles conditions ont été faites ces prétendues expériences ; il fera remarquer l’extrême invraisemblance de cette convocation de serpens ; il voudra qu’on lui donne détail de chaque cas dans toutes ses circonstances, qu’on indique le nombre des malades et celui des serpens, qu’on signale les précautions prises pour écarter toutes les causes d’erreur, qu’on montre enfin que cette croyance est une conclusion légitimement déduite des faits observés. Et après avoir épuisé son arsenal d’objections, il conclura lui-même que l’histoire de la caverne n’est qu’un conte de vieille femme, que l’ignorance et la crédulité les plus honteuses ont pu seules accréditer.

Nous sommes tout-à-fait de l’avis de ce médecin. Cependant il importe à notre but de remarquer que, dans la pensée des médecins de ce temps, cette médication avait une signification toute différente. Elle y prenait une forme scientifique régulière. Sa crédibilité se justifiait suffisamment par sa liaison avec des dogmes physiologiques et pathologiques universellement reçus, par sa conformité avec d’autres faits d’un genre analogue précédemment connus. Théoriquement elle était parfaitement explicable par les idées alors en vigueur, et son introduction dans la science courante n’avait rien d’insolite ni d’extraordinaire. Comme simple observation, elle était attestée par des témoignages auxquels la critique historique d’alors ne trouvait rien à redire. C’était un fait de notoriété publique, certifié par les médecins et professeurs de Rome : on citait les noms, les lieux, les personnes ; on racontait comment cette découverte avait été faite par hasard par un lépreux qui, s’étant égaré, et surpris par la pluie, s’était réfugié dans la caverne à moitié nu, et s’y était endormi ; qu’à son réveil il fut saisi d’horreur en se voyant couvert de serpens, et s’enfuit précipitamment, mais qu’il s’aperçut bientôt qu’il était guéri. Le fait ayant été divulgué, d’autres malades allèrent alors se livrer aux bienfaisantes caresses des serpens, et revinrent guéris comme le premier. Ainsi, historiquement, le fait n’avait rien de fabuleux ni de suspect. Quant à la propriété curative des attouchemens des serpens, il n’y avait rien qui répugnât aux idées médicales de ce siècle. Ce n’était qu’un exemple de plus des cures opérées per translationem ou transplantationem, les serpens se chargeant des principes morbides exhalés sur la peau du malade, de même que des chiens couchés avec un goutteux prenaient la goutte à leur compte. La possibilité de cette transplantation et son mécanisme n’offraient pas plus de difficultés. Les esprits vitaux ou autres effluves subtiles et éthérées, attirés ou repoussés par des mouvemens occultes de sympathie ou d’antipathie, offraient immédiatement une explication très sortable. L’existence de ces esprits était mise elle-même hors de contestation ; car ce n’est que par eux qu’on pouvait se rendre compte des innombrables faits d’actions à distance et de mouvemens invisibles offerts par la nature, et dont on donnait surtout pour exemple les phénomènes de l’aimant. Ces esprits étaient alors des espèces de factotums dans la science, comme les esprits familiers dans les ménages. La race n’en est pas éteinte, et leurs enfans s’appellent aujourd’hui des fluides.

On voit donc que la médication par les serpens était rationnelle, comme on parle à présent. Cette opinion n’était pas raisonnable, au sens absolu, mais parfaitement raisonnée. Fondée sur des expériences, plausiblement expliquée, conséquente dans toutes ses parties, elle était revêtue d’une forme logique régulière. Son admission n’était pas le résultat d’une crédulité aveugle et passive, mais le produit d’une conviction acquise dans un but et par une méthode scientifiques. Cependant, dit-on, la méthode était fautive, les théories fantastiques, les expériences illusoires ! sans doute ; mais il ne s’agit pas de cela. Nous ne voulons constater ici autre chose sinon que cette opinion réunissait en sa faveur tout ce que la critique scientifique du temps exigeait pour qu’un dogme médical quelconque fût reconnu vrai, certain et fondé en raison.

Voyons maintenant si la philosophie médicale moderne a fait assez de progrès pour rendre impossible cette sorte d’illusion.

Les termes de comparaison abondent. Il n’y a qu’à ouvrir un traité de médecine pratique, un Codex, un dictionnaire ; on en trouve un à chaque page. Nous prendrons le suivant non comme le plus convenable à notre but, mais comme un des plus populaires et des plus connus.

Chacun a entendu parler de la gastrite, et même, il y a quelques années, chacun croyait l’avoir. Sans faire ici de médecine, nous dirons qu’on désigne par ce mot l’inflammation de la membrane qui revêt intérieurement l’estomac. Quant à la chose signifiée par le mot inflammation, la définition en serait infiniment plus difficile. Il suffit de dire qu’on s’en ferait une idée suffisamment claire, quoique bien grossière, en se représentant l’état de la peau du visage prise de fluxion ou d’érysipèle. La peau, dans ces cas, devient, comme on sait, rouge, chaude, gonflée et douloureuse. Placez tous ces caractères sur la peau interne de l’estomac, et vous aurez à peu près l’image d’une gastrite. C’est du moins ce que disent les livres et nos maîtres. Personne n’ignore non plus que, cette maladie étant constatée, la première chose que fait le médecin est d’appliquer sur le creux de l’estomac un certain nombre de sangsues (quinze, vingt, trente) qu’on y laisse se gorger de sang, et dont on ne ferme ensuite les piqûres qu’après qu’elles ont coulé plus ou moins long-temps. Cette soustraction de sang, opérée sur ce point déterminé, passe pour agir puissamment et favorablement sur l’organe intérieur souffrant. C’est parmi les moyens imaginés pour le traitement de la gastrite le plus universellement employé. Le médecin qui négligerait de l’appliquer serait taxé d’imprudence, sinon d’ignorance, et celui qui le prescrit se croit parfaitement en règle avec sa conscience et avec sa science.

Cette confiance morale et cette quiétude logique reposent pourtant sur des fondemens si faibles, qu’on n’a plus le courage de faire le procès au P. Kircher, à l’endroit de ses serpens. Si vous demandez au médecin la démonstration scientifique de cette méthode, vous serez étonné de reconnaître qu’il est incapable de la produire, et il sera probablement aussi étonné que vous de son impuissance à cet égard. C’est qu’en effet il ne s’était jamais posé directement la question à lui-même. Il est, sans s’en douter, dans l’illusion logique de ses confrères du XVIe siècle. Forcé de répondre, il invoquera inévitablement et avant tout l’expérience. Mais alors on lui demandera, comme à l’homme à la caverne, quelle garantie il a que cette expérience a été véritablement faite, et qu’elle est concluante ? S’il cite des faits, on lui prouvera avec une étonnante facilité, que ces faits sont mal déterminés, variables, sujets à interprétations multiples et diverses, contradictoires, étrangers à la question, insignifians, en somme inconcluans, et par conséquent nuls et non avenus. Si, sortant du terrain de la pure observation empirique, où il est déjà si mal à l’aise, il s’adresse à la théorie, il tombe dans un abîme de difficultés et d’invraisemblances. Quelque notion qu’il se fasse de l’état morbide de l’estomac appelé gastrite, il lui est tout-à-fait interdit d’établir un lien de causalité, je ne dis pas évident, mais même plausible, entre la saignée locale exécutée sur l’épigastre et la modification interne que cette opération est censée produire dans l’estomac même. Le seul but appréciable de cette pratique est en effet de dégorger la surface intérieure de l’estomac, d’en soutirer l’excès de sang dont on la suppose pénétrée, et dont l’accumulation anormale dans son tissu est, selon les idées reçues, un des élémens principaux de l’état inflammatoire. Mais comment prouvera-t-il que le moyen est ici approprié au but ? Ces deux surfaces, la saine et la malade, sont complètement séparées, non-seulement par d’épais tissus, mais même par des espaces vides ; leurs vaisseaux capillaires sanguins sont tout-à-fait indépendans. Comment dès-lors supposer qu’en dégorgeant l’une, on dégorgera l’autre ? Ce résultat, loin d’être évident, n’est pas même probable, et dans l’état actuel des connaissances anatomiques il est incompréhensible. La théorie ne justifie donc en aucune façon la pratique. Si on se rejette sur l’efficacité de la perte de sang, considérée comme une simple saignée, on change la question, et on en pose une nouvelle, non moins problématique peut-être, celle de l’influence des émissions sanguines. Si enfin on se réduit modestement à donner pour raison de cette médication l’irritation révulsive produite par les morsures des sangsues, on aura à prouver d’abord la vérité de la théorie de la révulsion en général, ce qui ne sera pas aisé, et il faudra ensuite, dans le cas particulier de la gastrite, montrer que la puissance de la cause est proportionnée à l’effet à produire.

La croyance moderne à l’efficacité des sangsues dans la gastrite n’a, on le voit, au fond, pas plus de valeur scientifique que la croyance ancienne à l’efficacité des serpens pour la lèpre. Elle est intrinsèquement frappée des mêmes vices logiques. Cependant elle est, comme son aînée, acceptée à titre de vérité scientifiquement acquise et scientifiquement démontrée ; elle fait partie intégrante de la doctrine médicale généralement adoptée, enseignée, appliquée. Quoique absolument dénuée des motifs de crédibilité exigés aujourd’hui dans tout ce qui prétend au nom de science, elle s’établit sans difficulté aucune dans la foi du médecin et s’y place honorablement à côté d’une foule d’autres qui, à la vérité, la valent bien ; elle résiste bravement à l’épreuve indéfiniment répétée de la pratique. Si, passagèrement et par éclairs, quelque doute s’élève sur la légitimité d’une acquisition de cette nature, il est immédiatement étouffé par la prodigieuse difficulté d’une vérification personnelle, et par la réflexion tranquillisante que cette vérification a dû être faite quelque part par quelqu’un ; et on continue non point à expérimenter cette connaissance, mais seulement à l’appliquer. On s’en sert parce qu’il est admis qu’il faut s’en servir. C’est une formalité.

S’il est vrai qu’on puisse ainsi, avec de l’attention, prendre notre science actuelle en flagrant délit de lèse-logique dans une foule de cas où elle ne se doute pas même de sa mauvaise position, on concevra moins difficilement comment un corps de croyances pseudo-scientifiques peut se maintenir long-temps en présence et en dépit des applications pratiques dont les mécomptes devraient, à ce qu’il semble, en dévoiler bientôt la vanité. Si ce phénomène intellectuel nous étonne tant dans l’histoire des doctrines astrologiques, magiques, spargyriques et théurgiques, c’est que leurs dogmes positifs, étant tout-à-fait sortis de notre croyance sous leur forme originaire, observés à la mesure de notre science actuelle, ils paraissent des monstres. Ce sont ces dogmes qui nous effraient d’abord, et ce n’est, si on nous passe le terme, que par ricochet que nous reportons notre surprise et notre investigation critique sur l’étrange aberration d’esprit qui les mit au monde et les y laissa vivre. Si, à notre époque, nous sommes en général, et sur tant de points, très peu portés à suspecter les fondemens de notre foi scientifique, c’est parce que les dogmes dont elle se compose, fruits de nos propres œuvres, n’étonnent pas plus notre intelligence que la forme de nos habits ne choque nos yeux. Il arrive de là que, lorsqu’on accole brusquement, comme nous venons de le faire, telle ou telle science du passé à telle ou telle science du présent, la médecine rationnelle du XIXe siècle et la médecine occulte du XVIe, la méthode des serpens et la méthode des sangsues, on produit sur l’esprit l’effet blessant et insupportable qu’une dissonance musicale produit sur l’oreille. Cependant de même que cette dissonance peut, au moyen d’intermédiaires appropriés, être atténuée au point de devenir insensible, de même une assertion du caractère extérieur le plus paradoxal peut, à l’aide de transitions convenables, se faire accepter par la raison.

Du reste, il ne faut prendre cette comparaison que pour ce qu’elle vaut. Assurément nous ne prétendons pas que le second de ces exemples soit aussi ridicule que le premier, ni qu’il implique des erreurs et des préjugés aussi grossiers. Mais le degré de ridicule ne fait rien à l’affaire. Ce ridicule d’ailleurs tient en grande partie à des circonstances accidentelles de lieu, de temps, de langage. Le seul point important à constater par ce rapprochement, c’est que, dans les deux cas, il y a le même genre, sinon le même degré, d’illusion, et que la position logique des deux médecins et des deux sciences qu’ils représentent, est, dans ces mêmes cas, à peu près semblable. Voilà tout ce qu’on a voulu prouver ; et prouver cela, c’est prouver que le règne du vieil esprit de la fausse science dure encore assez sensiblement, et que si son arrêt de bannissement a été légalement et solennellement prononcé il y a deux siècles et non rapporté depuis, il est certain que la sentence n’a pas été partout exécutée.

Le magnétisme animal va nous offrir, sur une plus grande échelle et en traits plus frappans, la confirmation de ce qui précède. Cette doctrine semble, après bien des aventures, se trouver aujourd’hui dans une période d’ascendance. Sa littérature abonde en livres qu’on achète ; elle a à Paris des chaires publiques et privées, et deux ou trois journaux. En Allemagne, elle est officiellement classée parmi les branches de l’enseignement médical ; elle se fait souvent écouter et quelquefois presque accepter par nos académies. Elle renouvelle fréquemment ses appels à la curiosité publique par des affiches, des prospectus, des annonces, et fournit à la conversation un texte encore peu usé. Enfin, elle a créé dans la science une spécialité, et dans l’état deux professions, celle de magnétiseur et celle de somnambule. À tous ces titres elle constitue une très respectable actualité.

Quelques mots d’abord sur son histoire.

C’est d’ordinaire au médecin allemand Mesmer qu’on attribue l’introduction du magnétisme animal et l’établissement de ses dogmes fondamentaux : c’est une erreur. Les idées qu’il fit entrer dans sa doctrine avaient subi, dans les deux siècles précédens, une élaboration systématique, et pris la forme d’une doctrine arrêtée. Les titres seuls de bon nombre de livres des XVIe et XVIIe siècles[1] prouvent que le mot était déjà alors très répandu, et la lecture de ces ouvrages et d’une foule d’autres montre que la chose ne l’était pas moins. Mesmer n’en fut pas l’inventeur, mais le restaurateur. C’est là un point mis il y a long-temps hors de question par Thouret[2], et nos propres recherches nous ont convaincu qu’il y a peu d’exemples d’un plagiat aussi complet. Néanmoins cette restauration était assez imprévue, et se présentait d’ailleurs avec quelques dehors assez spécieux pour faire l’effet d’une espèce de nouveauté scientifique en France, lorsque Mesmer l’y apporta, en 1778.

Le système de Mesmer n’a, dans ses principes et dans sa pratique, presque rien de commun que le nom avec celui des magnétismes modernes. En voici brièvement la substance.

Il existe une influence mutuelle entre les corps célestes, la terre et les êtres animés. Cette influence s’exerce au moyen d’un fluide prodigieusement subtil, qui remplit tout. L’action de ce fluide est soumise à des lois mécaniques déterminables. La plus universelle de ces lois est un balancement alternatif, dont le flux et reflux de la mer est un exemple visible, mais dont la répétition incessante au sein de la matière est la cause de tous les phénomènes de l’univers sans exception, et la source de toutes les propriétés des corps. Le corps humain jouit, en vertu du principe universel, de propriétés analogues à celles de l’aimant ; il a deux pôles. Il a donc une vertu magnétique, et cette vertu, quoique commune à tous les êtres, peut, en tant qu’on la considère dans les corps animés, être appelée magnétisme animal. Cet agent magnétique est le principe de tous les actes vitaux ; et comme il est susceptible d’être poussé, concentré, soutiré, accéléré, augmenté ou diminué par des moyens artificiels, il acquiert, entre les mains du médecin, une puissante influence médicatrice. Il peut guérir immédiatement ou médiatement toutes les maladies.

Cette doctrine, où l’on voit, à travers les traces non équivoques de l’ancienne médecine magnétique, des élémens empruntés aux récentes découvertes sur l’électricité, Mesmer offrait de la démontrer par des faits. Ces faits consistaient en des phénomènes physiologiques produits sur le corps de l’homme et par des guérisons de maladies. Les phénomènes physiologiques devaient prouver l’existence du principe universel, les guérisons la puissance curative de ce principe. Ces phénomènes étaient des mouvemens nerveux du corps et des membres, des bâillemens, des agitations et des sensations intérieures extraordinaires, des impressions de chaleur ou de froid, des sueurs, l’accélération du pouls, des pleurs, des rires involontaires, et enfin des convulsions violentes qu’il appelait des crises. Pour déterminer ces effets, Mesmer se servait d’appareils et d’instrumens qui, par leur construction, leur matière, leur mode d’application, étaient analogues à ceux employés en physique dans les expériences sur l’électricité, la lumière, etc., et appropriés à la nature supposée de son fluide universel. C’étaient des baquets remplis de limaille de fer ou d’eau, des tiges de fer, des baguettes pointues. Les traitemens avaient lieu en commun.

Après bien des vicissitudes inutiles à retracer ici, la commission mixte de l’Académie des Sciences et de la Faculté de Médecine, chargée par le roi d’examiner le système de Mesmer, fit paraître, après cinq mois d’expériences, son fameux rapport, rédigé par Bailly (11 août 1784). Elle déclara, 1o que l’agent annoncé par Mesmer n’existe pas ; 2o que les effets physiologiques observés dans les salles de traitement avaient pour seules causes l’influence des attouchemens, de l’imagination et de l’imitation ; 3o que ces effets étaient dangereux ; 4o que les faits de guérison allégués n’avaient aucune valeur. Ce rapport fut signé par B. Franklin, Bailly, d’Arcet, Lavoisier, Sallin, de Bory, Leroy, Majault et Guillotin. La société royale de médecine fit aussi, d’après les ordres du roi, un rapport analogue dans ses conclusions.

Malgré ces décisions solennelles parties de si haut, Mesmer continua d’écrire, de traiter des malades et de propager sa doctrine par tous les moyens à sa disposition. N’ayant pu s’arranger avec le gouvernement pour la vente de ce qu’il appelait son secret, il le céda à des souscripteurs volontaires dont il tira, dit-on, plus de 340,000 fr. Des sociétés nombreuses, dites sociétés d’harmonie, s’établirent dans les principales villes de France et du Nord. Celle de Strasbourg fut une des plus célèbres. Le magnétisme animal devint une mode, il en eut la vogue, l’entraînement et la popularité, et ensuite le retour.

Dans l’année même où les premiers savans de la France condamnaient le mesmérisme à Paris, un jeune officier, M. Chastenet de Puységur, fit une découverte qui devait complètement transformer la doctrine du médecin allemand, et commencer une ère toute nouvelle pour le magnétisme animal. Cette découverte fut celle du somnambulisme artificiel, ou sommeil lucide. Ce fut un jeune paysan de sa terre de Busancy, près Soissons, nommé Victor, qui lui offrit le premier exemple de cet état singulier avec quelques-uns de ses merveilleux effets. M. de Puységur ayant annoncé sa découverte, d’autres faits vinrent bientôt la confirmer. Toute l’attention des magnétiseurs se porta, dès ce moment, sur cet étrange phénomène. Les procédés de Mesmer, étant reconnus inutiles à sa production, furent bientôt abandonnés, ainsi que les traitemens en commun. Sa théorie toute empruntée à la physique, parut également impropre à expliquer le fait nouveau, et se transforma en une autre dont il sera bientôt parlé.

C’est de la découverte du somnambulisme que les historiens du magnétisme datent le commencement de ce qu’ils appellent sa seconde époque, la première étant à peu près remplie par le mesmérisme.

Une troisième et dernière époque est celle où nous sommes en ce moment. Elle commence en 1813 avec la publication de l’Histoire critique du Magnétisme animal de M. Deleuze, le livre le plus remarquable et même le seul véritablement remarquable, à notre connaissance, de la littérature magnétique en France, ouvrage d’un esprit droit, philosophique, ingénieux, sensé, instruit et honnête, écrit avec goût et talent. Le magnétisme animal eut dès-lors une sorte de renaissance. Le docteur Bertrand, M. Dupotet, donnèrent des leçons publiques. On fit dans plusieurs des grands hôpitaux de Paris des expériences somnambuliques. Les écrits se multiplièrent ; les plus estimables sans contredit furent ceux du docteur Bertrand[3], qui essaya non sans talent, mais avec peu de succès, ce nous semble, d’introduire la lumière de la psychologie dans la théorie du somnambulisme, et celle de la critique philosophique dans son histoire.

Les évènemens les plus intéressans de la carrière du magnétisme, dans les dernières années, sont ses relations avec les corps savans[4]. En 1825, le magnétisme se crut assez fort pour frapper de nouveau à la porte des académies, où il avait été jadis si mal reçu. Comme il s’était singulièrement transformé depuis, il espéra qu’on ne le reconnaîtrait point. Un médecin, M. Foissac, invita simultanément l’Académie des Sciences et l’Académie de Médecine à se livrer à un nouvel examen du magnétisme animal. L’Académie des Sciences lui renvoya des remerciemens. L’Académie de Médecine, après bien des résistances, nomma une commission nombreuse composée de ses membres les plus considérables. Les travaux de cette commission durèrent cinq années, et ce ne fut qu’en juillet 1831 qu’elle en apporta le résultat à l’Académie par l’organe de son rapporteur, M. Husson. Son rapport ne parut pas valoir celui de Bailly. Les conclusions étaient assez favorables au magnétisme ; la réalité de quelques-uns des phénomènes contestés du somnambulisme y était reconnue. L’Académie ne permit pas l’impression de ce travail, qui dès-lors ne représente que l’opinion du rapporteur et non celle de la compagnie.

Deux ans après (en 1835) un second appel fut fait à la même académie par le docteur Berna. On y répondit encore ; mais cette fois le magnétisme fut très mal traité. Le rapporteur était M. Dubois (d’Amiens).

Ces derniers débats donnèrent lieu au fameux prix Burdin. Voici ce que c’est que ce prix.

Le docteur Burdin, membre de l’Académie de médecine, fatigué de ces interminables disputes sur le magnétisme, résolut d’en finir par un coup d’éclat. Il prit la résolution désespérée de constituer de ses deniers un prix de 3,000 francs, qu’il déposa chez Me Haylig notaire à Paris, et qu’il promit d’adjuger à celle ou celui qui, magnétisé ou non magnétisé, endormi ou éveillé, lirait sans le secours de ses yeux en présence d’une commission académique. Ce concours devait rester ouvert deux ans. Ce programme fut solennellement proclamé le 5 septembre 1837.

Plusieurs concurrens se présentèrent, et d’abord Mlle Pigeaire, amenée tout exprès pour cela de Montpellier. On annonçait qu’elle devait lire les yeux couverts d’un large et épais bandeau de velours noirs, et, en effet, c’est avec ce bandeau qu’elle a lu devant tous les journalistes de Paris, devant des députés, des pairs de France, devant des savans, devant des ignorans, devant tout le monde. Mais cet élégant bandeau ne convenant pas à l’académie, et Mlle Pigeaire assurant qu’elle ne pourrait lire avec aucun autre, on s’en rapporta à elle sur ce point, et il n’y eut rien de fait. Plusieurs autres propositions n’eurent également aucune suite. Le dernier concurrent sérieux fut Mlle Diana, qui vint tenter l’aventure sous les auspices du docteur Teste : elle devait, en moins de dix minutes de sommeil, lire des mots écrits placés dans une boîte de carton opaque hermétiquement fermée et cachetée. Au bout d’une heure, elle n’avait rien vu et ne vit rien. Son magnétiseur assura que c’était extraordinaire ; mais il fut le seul de son avis.

La clôture du concours Burdin ayant eu lieu le 1er octobre 1840, cet honorable académicien alla reprendre chez Me Haylig ses 3,000 fr., et la grande question de la vision somnambulique reste encore pendante.

Passons maintenant aux dogmes magnétiques.

La doctrine communément reçue aujourd’hui par la majorité des magnétistes peut se résumer brièvement comme il suit :

L’homme peut agir matériellement à distance, et sans l’intermédiaire d’aucun moyen physique ou mécanique, sur les autres êtres de son espèce, et en général sur tous les corps, par la seule force de sa volonté ou de certains gestes. La réalité de cette faculté est un fait d’expérience.

Cette action s’exerce au moyen d’un fluide invisible, impalpable, d’une subtilité extrême. Ce fluide ne paraît être ni l’électricité, ni le calorique, ni aucun des impondérables connus. On peut le considérer soit comme une modification du fluide universel qui pénètre tous les corps, soit comme un fluide particulier propre à l’organisation animale, et dans ce dernier cas, qui est le plus probable, il n’est autre chose que le fluide nerveux. On l’appela magnétique parce que plusieurs de ses effets ont de l’analogie avec ceux de l’aimant.

L’homme a la faculté de disposer de ce fluide, de lui imprimer des mouvemens, de le projeter au dehors avec une force et dans une direction déterminées, de l’accumuler et de le fixer dans des corps par sa seule volonté aidée de quelques mouvemens.

L’action magnétique exercée par un homme sur un autre homme donne lieu à des effets de diverse nature. Il peut produire simultanément, successivement, ou isolément, 1o des phénomènes physiologiques généraux, tels que des sensations de froid ou de chaud, des mouvemens nerveux plus ou moins violens, des variations dans la circulation et autres du même ordre ; 2o des modifications purement médicatrices ; 3o un état physiologique et psychologique spécial qui est le sommeil magnétique, le somnambulisme.

Jusqu’ici ce système ne paraît pas au premier abord différer sensiblement de celui de Mesmer ; mais en réalité, il est tout autre. La théorie de Mesmer était entièrement physique, celle-ci est physiologique. L’agent magnétique mesmérien était soumis aux lois mécaniques et passives du mouvement ; l’agent magnétique moderne en est indépendant et paraît participer à la spontanéité de la vie organique et de la vie spirituelle. Pour se rendre maître du premier, il fallait des appareils, des instrumens physiques ; pour se faire obéir du second, il ne faut qu’une détermination libre de la volonté. Cette distinction, dont les magnétiseurs ne se sont pas bien rendu compte, a jeté beaucoup d’embarras et de confusion dans leurs théories, car en cherchant à rattacher leur nouveau principe au principe de Mesmer, et des deux n’en faire qu’un, il en est résulté que leur fluide actuel se trouve, comme Arlequin, habillé de pièces et de morceaux, et doué de propriétés inconciliables.

Les pratiques employées par nos magnétiseurs sont assez conformes à leur théorie. De simples mouvemens des mains, appelés passes, long-temps promenées à petite distance, et en procédant toujours de haut en bas, soit sur le corps entier, soit sur certaines parties, l’application des mains, soit sur la tête, soit sur l’épigastre, forment à peu près, avec quelques variations, les seules manœuvres de la magnétisation. Plusieurs même considèrent ces pratiques comme indifférentes par elles-mêmes, mais utiles cependant pour fixer et régulariser l’attention de l’opérateur. Le principe véritablement efficace réside uniquement dans la disposition morale et dans la volonté du magnétiseur. M. Deleuze a résumé ainsi les conditions psychiques requises pour l’efficacité de l’action magnétique :

Volonté active vers le bien ;

Croyance ferme en sa puissance ;

Confiance entière en l’employant.

La croyance et la confiance ne sont ici que des conditions médiates, en tant qu’elles influent sur l’énergie de la volonté. Puységur disait : Croyez et veuillez ; d’autres disent seulement : Veuillez. C’est là tout le formulaire et tout le cérémonial de la magnétisation. La secte des magnétiseurs spiritualistes, fort répandue dans le nord de l’Europe, y joint la prière et des actes religieux.

Quant aux effets magnétiques, quelques-uns, tels que l’action curative et un certain nombre de modifications physiologiques, sont les mêmes que ceux signalés par Mesmer, sauf les convulsions appelées crises, dont on ne voit presque plus d’exemples. Mais il en est un tout-à-fait nouveau, c’est l’état somnambulique sur lequel il importe de s’arrêter un peu plus en détail, car le magnétisme animal actuel roule presque exclusivement sur ce phénomène.

Voici ce qu’on en apprend, en écrivant sous la dictée des magnétistes.

Considéré dans sa réalisation parfaite, dans la totalité de ses manifestations, le sommeil lucide est rare. En le supposant parfait, et il y en a plus d’un exemple, il offre successivement ou simultanément les caractères suivans :

Le sujet soumis à la magnétisation éprouve d’abord quelques sensations insolites ; bientôt on observe des bâillemens, des inspirations longues et lentes, des efforts répétés de déglutition ; les paupières s’appesantissent et se ferment ; la tête s’incline légèrement en avant. Ces phénomènes sont les préliminaires, ou, comme on dit en médecine, les prodrômes du somnambulisme. Dès qu’ils cessent et que le sujet reste immobile, il est endormi du sommeil magnétique.

Arrivé à cet état, le somnambule devient en quelque sorte un nouvel être.

1o Tous les organes des sens sont complètement engourdis. Il reste absolument isolé et sans communication avec le monde extérieur. Sa peau est insensible aux excitations les plus douloureuses.

2o Étant mis en rapport, au moyen d’un contact préalable, avec une ou plusieurs personnes, il entend aussitôt leurs paroles, mais il n’entend aucun autre bruit.

3o Il a les yeux fermés, et il voit mieux que l’homme éveillé. Il voit non-seulement les choses voisines, mais encore les choses éloignées. Aucune distance, aucun obstacle, aucune obscurité ne peut soustraire l’objet qu’il regarde à sa vue.

4o Il sent ou comprend la volonté de son magnétiseur sans l’intermédiaire d’aucun moyen d’expression sensible. Il lit dans sa pensée, il obéit à sa volonté. Il peut, sur un ordre mental de celui-ci, acquérir ou perdre l’usage d’un sens, être frappé d’insensibilité ou d’impuissance paralytique dans tel ou tel membre, éprouver les sensations spéciales de chaque sens, sans la présence des objets qui les provoquent dans l’état ordinaire.

5o Il voit le fluide magnétique.

6o Il voit ou sent l’intérieur de son corps et de celui des autres ; il voit surtout ses maladies et celles des autres.

7o Il connaît instinctivement le remède qui convient à ses maux et aux maux des personnes avec lesquelles il est mis en rapport.

8o Il prévoit l’avenir, et il a des pressensations de ce qui doit survenir dans son propre organisme et dans celui des autres à des époques plus ou moins éloignées.

9o Ses facultés morales et intellectuelles sont exaltées et très supérieures à celles qu’il manifeste à l’état de veille. Il s’exprime avec plus de facilité et d’élévation, et acquiert quelquefois le don des langues.

10o Dès qu’il est réveillé, il perd absolument tout souvenir de ce qu’il a senti, vu, entendu ou pensé, pendant son sommeil ; mais, lorsqu’il est remis en somnambulisme, il a le souvenir très distinct de ce qui s’est passé dans ses sommeils antérieurs.

En récapitulant ces phénomènes, on trouve l’insensibilité extérieure, l’audition sans le secours des oreilles, la vision sans le secours des yeux, et, à toute distance, la communication des pensées, l’instinct médical, la prévision et l’oubli au réveil. Tenons-nous-en là.

L’existence de tous ces phénomènes, suivant les magnétiseurs, est une vérité de fait donnée par l’expérience. Ils déclarent en conséquence que la seule question à élever à leur égard, c’est celle de savoir s’ils sont démontrables et vérifiables par l’expérience, et que, s’ils sont trouvés tels, ils doivent être acceptés purement et simplement à titre de fait, quelle que soit la difficulté ou même l’impossibilité de les expliquer dans l’état actuel de nos connaissances.

Nous partageons tout-à-fait sur ce point la façon de voir des magnétiseurs.

Il s’en faut cependant que cette manière de poser la question soit généralement acceptée. Les magnétiseurs exceptés, qui y tiennent naturellement beaucoup, il est très peu d’esprits, surtout parmi les hommes de science, qui puissent s’y faire. Ce n’est pas qu’ils se refusent à admettre comme certains des faits décidément inexplicables, ou, ce qui revient au même, inexpliqués, l’existence des aérolithes par exemple. Ils prétendent qu’ils rejettent les phénomènes somnambuliques non point parce qu’ils sont inexplicables, mais parce qu’ils sont impossibles. Il est évident en effet que, si ces faits sont impossibles, ils ne peuvent pas avoir lieu tels qu’on les raconte, et dès-lors toute tentative de vérification est nécessairement illusoire et du temps perdu. Cette fin de non-recevoir a l’avantage non-seulement de détruire d’un seul coup tout l’édifice magnétique existant, mais encore de supprimer toute recherche ultérieure. Mais qu’est-ce que l’impossible, et en quel sens un fait quelconque peut-il être à priori déclaré tel ? C’est ce qu’on n’explique pas clairement. Dans ce grand fait de l’univers, il n’y a d’impossible que ce qui n’est pas. La réalité y est la seule mesure de la possibilité. Tout ce qui est réel est possible, et tout ce qui est possible existe. La réalité pour l’homme n’étant pas cependant la réalité existante, mais seulement la réalité connue, il fait un paralogisme lorsqu’il conclut de celle-ci à celle-là. Or, le vice de l’objection per impossibile contre les faits magnétiques est précisément ce paralogisme. La réalité et la possibilité coexistant toujours inséparablement dans les choses, l’homme ne peut mesurer la dernière que sur la première, mais comme il ne peut savoir sur cette réalité, seule mesure du possible, que ce qui lui est successivement révélé par l’expérience, il n’a, dans aucun cas, le droit d’affirmer que telle ou telle expérience ne pourra jamais être faite, ou, ce qui revient absolument au même, d’affirmer l’impossibilité d’un fait quelconque.

Pour sortir de l’abstraction, énonçons l’objection comme on la pose vulgairement. Un fait est impossible, dit-on, lorsqu’il est en opposition avec les lois de la nature. Or, qu’est-ce qu’une loi de la nature ? Si je l’entends bien, on veut désigner par là l’ordre régulier et uniforme dans lequel se produisent et se rangent un certain nombre de phénomènes. Nous appelons lois de la nature ce qui arrive constamment de la même manière, dans un certain ordre et sous certaines conditions qu’il nous est donné d’apercevoir. Mais comment a-t-on connu cet ordre et cet arrangement ? Par l’observation et l’expérience. Or, l’observation et l’expérience ne nous présentent autre chose que des faits. Notre science n’est qu’un recueil de faits qui nous sont donnés, et que nous sommes forcés d’accepter tels qu’ils se présentent. À mesure que ces faits arrivent à notre connaissance, nous les comparons et les classons suivant leurs analogies et leurs différences. Cet arrangement considéré dans notre esprit est une théorie ; considéré dans les choses mêmes, c’est ce que nous appelons une loi. Mais cette loi n’étant et ne pouvant être que l’expression des faits mêmes en tant qu’ils ont un ordre, et non leur principe, on ne peut arguer de la loi contre le fait, puisque la loi n’est que le fait même. Invoquer la loi, ce n’est donc qu’invoquer un fait. Et de quel droit alors un fait s’opposerait-il à un autre ? Il faudrait pour cela qu’ils fussent contradictoires. Dans ce cas sans doute ils s’excluraient réciproquement, et leur coexistence serait nécessairement impossible, car l’impossible, pour la raison humaine, se résout dans le contradictoire. Un cercle ne peut pas être un carré, car affirmer l’un c’est nier l’autre, et réciproquement. Dans la nature il ne saurait y avoir de contradiction ; un fait peut différer d’un autre, mais non le contredire. C’est par exemple un fait général, c’est-à-dire une loi, certes des mieux déterminées, que toutes les planètes tournent autour du soleil d’occident en orient, à peu près dans le plan de son équateur ; il ne serait pas impossible pour cela que d’autres planètes à découvrir eussent une marche inverse, et en fait on n’a pas opposé cette loi aux comètes pour leur ôter le droit qu’elles exercent journellement de prendre, à tort et à travers, le chemin qu’il leur plaît. De même, puisqu’il s’agit de magnétisme, de ce qu’un homme parle tout éveillé, il ne s’ensuit pas nécessairement que ce même homme ou un autre homme ne puisse pas parler étant endormi. Le sommeil dit magnétique, s’il existe, ne contredit en rien le sommeil dit naturel, et on ne peut pas affirmer l’impossibilité du premier en vertu seulement de la réalité constatée du dernier. Il y aurait en ce cas deux espèces de sommeil au lieu d’une, ce qui ne dérangerait aucune loi de la nature.

Disons donc que tout ce qu’on peut raisonnablement opposer à priori à une assertion concernant un fait extraordinaire, c’est-à-dire très différent des faits connus, se réduit à une simple improbabilité de tous les degrés.

On insiste, et on dit qu’avec ce système il faudra admettre les miracles de Mahomet, et croire, par exemple, qu’il n’est pas absolument impossible qu’il ait mis la lune dans sa poche. Nous aurions beaucoup à dire en général sur ces faits appelés miracles par les chrétiens, prodiges par les païens, prestiges par les partis ennemis, jongleries par les philosophes, folies par les médecins, mythes par quelques Allemands ; mais nous n’entrerons pas incidemment dans cette vaste question de surnaturalisme historique. Quant au miracle de Mahomet, nous répondrons que cet évènement est de ceux qui sont impossibles, parce qu’il renferme une véritable contradiction intrinsèque. Il implique en effet qu’un corps de 782 lieues de diamètre a trouvé place dans un espace de 6 pouces carrés, ou autrement que 6 pouces = 782 lieues. Il faudrait, pour rendre le fait possible, que la lune fût assez petite pour entrer dans la poche, ou la poche assez grande pour contenir la lune ; mais alors il n’y aurait plus de miracle, et partant plus de difficulté. Enfin, les esprits sévères qui pourraient faire de ces questions et autres analogues se rassureraient immédiatement sur les inconvéniens de notre opinion, s’ils réfléchissaient qu’on pourrait très bien la faire coïncider avec la leur dans le résultat, en s’accordant à dire de part et d’autre indifféremment, ou bien qu’un fait prouvé est toujours possible, ou bien qu’un fait est impossible tant qu’il n’est pas prouvé. Laquelle de ces formules qu’on choisisse, on est en sûreté.

Tant que les magnétistes se tiennent sur ces hauteurs, ils ne s’exposent guère. Forts de l’avantage des lieux, ils foudroient la petite philosophie de leurs adversaires. Aussi ils aiment en général à s’y tenir aussi long-temps qu’ils peuvent. Après avoir établi d’une manière générale la possibilité métaphysique des faits magnétiques, ils cherchent à établir leur probabilité expérimentale à l’aide de toutes les analogies que la physiologie, la pathologie, les sciences physiques et naturelles, la psychologie, l’histoire sacrée et profane, peuvent leur fournir. Cette marche est régulière et légitime. S’il se trouvait en effet que ces phénomènes, réputés si monstrueusement extraordinaires, se rattachent par des liens plus ou moins étroits à d’autres phénomènes dont la réalité n’est pas contestée ; si on pouvait les retirer de leur isolement et les mettre pour ainsi dire en bonne compagnie, on aurait moins de répugnance à faire connaissance avec eux. Tout l’extraordinaire d’une chose tenant d’ailleurs à peu près uniquement à sa rareté (car sans cela il faudrait passer sa vie à s’étonner), la faire voir partout, c’est lui ôter son merveilleux. Cela ne la rend pas au fond plus explicable, mais seulement plus croyable, et c’est tout ce qu’on veut ici.

Les analogies alléguées par les magnétiseurs en faveur de l’action physique à distance exercée par la magnétisation ne manquent pas. Les décharges foudroyantes de la torpille, du gymnote, de l’anguille de Surinam, et autres poissons électriques qui, de loin, tuent ou engourdissent leurs ennemis ; la fascination de l’oiseau par le regard du serpent, et de la perdrix par celui du chien, sont les exemples qu’ils choisissent d’ordinaire. L’existence et les principales propriétés de leur fluide trouvent aussi des appuis plausibles dans les exemples des autres agens impondérables admis en physique. Quant à l’efficacité médicatrice des manœuvres magnétiques, l’histoire tout entière se lève pour leur venir en aide. Ils citent des centaines de guérisons de maladies opérées par l’imposition des mains, l’insufflation, ou de simples paroles prononcées avec l’intention efficace de faire du bien. Pyrrhus guérissait les malades, selon Plutarque, en les touchant du bout de son pied ; Vespasien (vid. Suétone) guérit un aveugle et un paralytique en crachant sur l’œil de l’un et en touchant le second de son pied. Les cures miraculeuses de l’ancien et du nouveau Testament ont été faites aussi par le geste, la voix et l’attouchement. Les rois de France guérissaient par privilége spécial les écrouelles, en faisant le signe de la croix sur le front des malades et disant : Le roi t’a touché, Dieu te guérisse ! Le gentilhomme irlandais Valentin Gretrakes, au XVIIe siècle opéra publiquement à Londres, à Oxford, des centaines de cures de toutes sortes de maux, par l’application de ses mains sur les parties malades. Gassner, curé de Ratisbonne, eut les mêmes succès en Allemagne, dans le XVIIIe siècle.

Mais c’est surtout pour le somnambulisme magnétique et les étonnantes facultés des somnambules qu’on fait appel à toute la nature, à tous les témoignages. Et d’abord il y a, dit-on, un somnambulisme naturel, bien connu et non contesté, qui par l’oubli au réveil et plusieurs autres circonstances, notamment la faculté de marcher, d’écrire, de se livrer sans erreur à des occupations qui supposent une sorte de vision, se rapproche beaucoup du sommeil magnétique. Le plus connu de ces faits de somnambulisme naturel est celui d’un abbé qui se levait la nuit, et, tout endormi, sans lumière, écrivait ses sermons, biffait et corrigeait des mots, des lettres. C’est la fameuse histoire racontée dans l’Encyclopédie. Pourquoi donc un état analogue ne pourrait-il pas être artificiellement reproduit ?

Après le somnambulisme spontané viennent certaines maladies nerveuses, et en première ligne la catalepsie, qui a offert à divers médecins de tous les temps des exemples d’insensibilité extérieure, et quelquefois de transport des sens, de prévision et de lucidité à distance. Ici se placent les fameuses cataleptiques de Petetin de Lyon, l’histoire non moins remarquable de Mlle de Strombeck, les faits de catalepsie avec vision, odoration, audition par l’épigastre, prophétisation, sens médical, observés par M. Despine, directeur et médecin des eaux d’Aix, par Barrier, médecin à Privas, par Dumas de Montpellier, le cataleptique de l’hôpital Della-Vita à Bologne, en 1832[5], et grand nombre d’autres observés en divers temps, en divers lieux, par des hommes de l’art, comme de simples cas de maladies, hors de toute préoccupation systématique et de toute relation avec le magnétisme animal.

Parmi les analogies plus indirectes et plus ou moins éloignées, on rappelle les facultés admirables des animaux, et particulièrement l’instinct médical, l’instinct des voyages, des localités, en vertu desquels, sans instruction, ni expérience, ni intervention possible des sens, ils s’administrent des remèdes d’un effet certain dans leurs maladies, retournent, par exemple, d’un lieu où on les a transportés pendant la nuit dans une voiture fermée, par le plus court chemin et sans hésitation, à leur ancien domicile ; les songes si pleins de mystères, les présages, les pressentimens si souvent vérifiés des malades, et ces appétits bizarres subitement développés, et dont la satisfaction immédiate a produit tant de fois des guérisons inespérées. Quant à l’impressionabilité extrême du somnambule pour tout ce qui vient de son magnétiseur, sa soumission volontaire et comme irrésistible à ses ordres, à ses simples désirs, l’exquise délicatesse de sens qui lui fait trouver une saveur à l’eau magnétisée, et distinguer par le tact un corps magnétisé de celui qui ne l’est pas : toutes ces choses ont des points de contact avec les effets des passions en général, avec la domination morale qu’un caractère fort et un esprit supérieur exercent sur une ame plus faible, avec ces impulsions spontanées de sympathie ou d’antipathie qui, parmi les hommes, déterminent l’amour et la haine, avec la sagacité spéciale du chien pour tout ce qui concerne la personne de son maître, et l’inconcevable finesse d’odorat qui lui fait retrouver au fond de l’eau, parmi un grand nombre de cailloux jetés en même temps, celui qu’a touché et lancé son maître.

Enfin l’histoire est encore ici le champ le plus riche. Les magnétistes trouvent déjà le somnambulisme dans les temples de l’Égypte, de l’Inde, de la Grèce. Selon eux, les prophètes, les inspirés, les phythonisses, les sibylles, les miraculés de tous les temps, de toutes les religions, les possédés, les extatiques, les énergumènes, les convulsionnaires, les visionnaires, les trembleurs, les voyans, les devineresses, etc., étaient des somnambules plus ou moins caractérisés.

Parmi tous ces exemples analogiques tirés de sources si différentes, il en est quelques-uns d’une grande force et d’un grand poids. Ce sont ceux du somnambulisme spontané et de la catalepsie. On y retrouve à peu près tous les caractères attribués au sommeil magnétique, et leur authenticité historique n’est pas facile à ébranler. La plupart des autres, empruntés à la physiologie générale, à la physique, à l’histoire naturelle, à la psychologie, sont tirés de trop loin pour faire à part beaucoup d’impression ; mais, réunis aux précédens, ils établissent en faveur de la réalité de quelques phénomènes somnambuliques, et du somnambulisme lui-même, une probabilité très suffisante pour donner quelque embarras aux incrédulités systématiques.

Quant aux témoignages prétendus historiques sur les effets du magnétisme animal comme agent curatif et sur les faits de somnambulisme, l’usage qu’en font les magnétistes est un paralogisme perpétuel. De la réalité, à eux démontrée expérimentalement, disent-ils, des phénomènes magnétiques et somnambuliques, ils concluent à la réalité des phénomènes plus ou moins semblables consignés dans les récits de l’histoire, et puis ils donnent la vérité de ceux-ci-en garantie de la vérité de ceux-là. Pour que cette induction eût quelque ombre de valeur, il faudrait d’abord établir que tous ces faits, plus ou moins merveilleux, racontés dans les livres saints et profanes, ont une réalité historique positive et certaine, considérés comme simples évènemens, et ensuite que ces évènemens, tels qu’ils se présentent lorsqu’on les réduit à ce qui a pu être constaté par les sens des témoins, ne sont pas susceptibles d’une autre explication que le magnétisme. Jusque-là tout se réduit à des assertions d’une insignifiance presque puérile. Mais une investigation critique de cette nature dépasse de beaucoup les forces des écrivains en magnétisme. Le problème du merveilleux historique est une question qui ne paraîtra facile qu’à ceux qui sont incapables de la traiter et de la résoudre. Démêler d’une manière précise, rigoureuse, dans ces sortes de faits, à quelque genre de merveilleux qu’ils appartiennent, les élémens divers qui leur donnent la forme sous laquelle ils ont apparu aux yeux des contemporains, déterminer ce qui, dans un évènement quelconque de cette nature, s’est réellement passé, soit matériellement dans les circonstances extérieures, soit psychologiquement dans l’esprit des acteurs, des spectateurs et des narrateurs, c’est un des nœuds gordiens les plus embrouillés de la philosophie de l’histoire. Prenons un exemple :

Numa Pompilius, roi de Rome, retiré dans une grotte près de la ville, avait des communications avec une nymphe qui lui apparaissait de temps en temps et lui enseignait plusieurs choses importantes sur le gouvernement et sur le culte des dieux. Voilà le récit orthodoxe. Que s’est-il passé ? — Rien de plus simple, dit un critique. C’est un conte fait à plaisir par Numa pour donner plus d’autorité à ses réformes politiques — Un second arrive et dit : — Ce n’est pas cela ; la nymphe Égérie est une simple allégorie, une expression métaphorique dont s’est servi Numa pour dire que tout le bienfait de ses institutions devait être rapporté aux dieux. Un troisième survient : — Numa était un mage, un habile thaumaturge ; il avait disposé dans sa grotte un mannequin habillé en nymphe, qui, adroitement montré de temps à autre aux paysans qui passaient à quelque distance dans la campagne, et soigneusement caché ensuite, jouait le personnage d’Égérie. À l’Opéra, on voit tous les jours de ces prestiges[6]. Un quatrième : — Vous calomniez Numa. Il aura eu une rencontre avec une jeune fille dans un bosquet, et, comme on connaissait la piété du roi, on aura dit que c’était une nymphe. Un cinquième : — Numa a dit voir et entendre une nymphe ; c’était évidemment une hallucination de la vue et de l’ouïe. Nos maisons de fous sont pleines de gens qui ont des apparitions de ce genre. Un sixième : — Numa allait consulter une jeune fille nommée Égérie, qui lui révélait des choses cachées ; cette Égérie ne peut avoir été autre chose qu’une somnambule. Vient enfin le mythologue, qui dit : — Vous cherchez à expliquer un fait, c’est peine perdue. Il n’y a pas de fait, il n’y a pas de grotte, pas de nymphe, peut-être pas de Numa ; il n’y a qu’un récit sur Numa ; c’est ce récit qu’il faut expliquer, et non la chose racontée.

Voilà bien des clés pour déchiffrer cette énigme, et on ne voit pas que celle du magnétisme animal y réussisse mieux que les autres.

S’étant ainsi introduit avec quelque succès comme fait probable, d’après les analogies de la science et de l’histoire, le magnétisme animal n’a plus qu’à montrer expérimentalement que ce qui est possible et probable est réel ; mais, sur ce point essentiel, il perd tout d’un coup ses avantages. Il annonce des expériences, des faits décisifs qu’on ne pourra nier, dit-il, qu’à condition de nier toute autorité en matière de témoignage, et on ne trouve dans le très vaste répertoire de faits de somnambulisme accumulés depuis quarante ans, aucune observation capable de satisfaire pleinement une critique rigoureuse. Loin que la quantité de ces relations compense leur peu de valeur intrinsèque, la confiance décroît pour ainsi dire en raison directe du nombre des témoins. Le ton enthousiaste des narrateurs, les preuves de naïvetés de tout genre qu’ils donnent à chaque instant, leur inexpérience presque enfantine dans l’art d’observer, ne permettent pas de compter beaucoup sur leur discernement critique ni sur leur impartialité scientifique. On ne parle ici que de ceux qui écrivent avec conviction et dont les erreurs ne sont pas des mensonges. Il y a des exceptions, nous en avons cité, mais elles sont rares.

Montrer en détail l’insuffisance des preuves de fait apportées dans la discussion par les magnétiseurs, sur toutes les parties de leur doctrine, ce serait faire un livre. Prenons un seul phénomène, la vision. Il passe pour le plus merveilleux de tous ; c’est celui qu’on déclare particulièrement impossible à priori et indigne de toute vérification. C’est donc celui sur lequel ont dû porter et ont porté en effet les efforts des magnétiseurs ; c’est celui qui a figuré dans le programme de défi de M. Burdin ; c’est celui dont la réalité une fois constatée rendrait immédiatement croyables tous les autres. Eh bien ! ce phénomène dont tous les livres des magnétiseurs donnent des exemples, et de nombreux exemples, n’a jamais été constaté dans aucune des expériences régulièrement instituées devant les commissions académiques pour sa vérification, ou, lorsqu’il s’est produit, il a été prouvé qu’il y avait supercherie. Dès-lors quelle garantie offrent des observations plus ou moins nombreuses faites à huis-clos, en présence de témoins incapables de comprendre ce que c’est qu’une expérience, par un expérimentateur incapable de l’instituer ? Pour notre part, nous avons vu tout ce que l’audace du mensonge peut attendre en ce genre de la crédulité, non pas seulement de la multitude, qui voit tout ce qu’on lui montre comme on le lui montre, mais encore de gens qui passent pour savoir regarder. C’est bien ici le cas du mot de Pline : Nullum tam impudens mendacium est ut teste careat. Voici des exemples récens :

Mlle Pigeaire a lu dans un livre devant tout Paris, pendant trois mois, les yeux couverts d’un épais bandeau de velours noir. Les procès-verbaux de ces séances ont été revêtus des noms les plus considérables de l’art, de la littérature, des sciences. Que prouvent ces adhésions, ces convictions, déclarées et signées ? Rien. Ce fait n’avait certes rien qui méritât l’admiration et l’étonnement. Ce n’est pas merveille qu’une petite fille de douze ans sache lire assez couramment dans un livre imprimé. Or, c’est là, en réalité, tout ce que Mlle Pigeaire faisait voir. Mais il est impossible de lire avec un tel bandeau ! Le fait prouvait, au contraire, que rien n’était plus possible, et même certain, puisqu’elle lisait. Tout le mystère consiste en ce que le bandeau destiné à boucher les yeux ne les bouchait pas, quoiqu’il parût les boucher.

On ne trouvera pas cette explication trop téméraire quand on aura lu ce qui suit. Il s’agit de deux faits qui me sont propres. Je serai court. En 1841, je fus invité par le plus zélé et le plus brillant défenseur dont le magnétisme animal puisse se vanter, par M. le docteur Frappart, à venir vérifier par moi-même chez lui, sur une jeune somnambule récemment arrivée de province, où elle avait fait merveille, le fait de la vision magnétique. Cette somnambule était Mlle Prudence, dont le nom a beaucoup d’éclat dans le monde magnétique. Le fait dont j’allais, me disait-on, être le témoin et le témoin convaincu, était vu journellement tous les soirs, depuis quelques semaines. On laissait les spectateurs libres d’instituer, de modifier, de régler l’expérience à leur gré. On ne pouvait moins attendre de la loyauté de M. Frappart. La jeune fille étant déclarée endormie par son magnétiseur, on mit sur ses yeux un appareil composé, 1o de bandes de taffetas gommé étendues d’une paupière à l’autre, et couvrant tout le globe de l’œil ; 2o une couche de terre glaise (terre à modeler des sculpteurs) épaisse de cinq ou six lignes, et formant une espèce de masque qui couvrait les yeux, le nez, le front, les joues, jusque vers la bouche ; 3o sur cette couche de terre un bandeau noir noué derrière la tête ; 4o sur le bandeau noir une nouvelle couche de terre glaise. Cet appareil placé, je fus admis à l’examiner. Je le fis avec une extrême attention. Je ne pus y découvrir ni même soupçonner aucun défaut. On apporta des cartes, des livres ; la somnambule lut, elle joua aux cartes, elle vit. J’y retournai le lendemain, le surlendemain, même résultat. M. Frappart me demanda ce que je pensais, et si j’étais convaincu. Avant de répondre, je voulus expérimenter sur moi-même le degré d’efficacité de cet appareil d’occlusion. Je fis ces expériences conjointement avec M. le docteur Dechambre. Je n’en dirai ici que le résultat. Elles nous prouvèrent que cet appareil n’empêchait nullement de voir, et que la lumière pouvait facilement arriver à l’œil dans plusieurs directions et de plusieurs manières. Nos expériences furent publiées. M. Frappart les répéta sur lui et sur d’autres, et s’exécuta de bonne grace.

Dans le second fait, il s’agit d’un jeune homme de vingt ans, nommé Calixte, dont la renommée magnétique est européenne. Depuis plusieurs années, il donne chaque lundi, rue Saint-Honoré, sous la direction de M. Ricard, professeur de magnétisme, des soirées somnambuliques. On le regarde comme un des plus parfaits somnambules qui aient existé. Sa lucidité surtout passe pour incomparable. Pour la prouver, on applique sur ses deux yeux une poignée de coton cardé qu’on fixe au moyen d’un mouchoir lié derrière la tête. Ce moyen d’occlusion, en usage dans le colin-maillard, est plus simple que celui employé sur Prudence, mais non moins infaillible. C’est avec ce bandeau sur les yeux que Calixte fait preuve d’une clairvoyance qui excite les applaudissemens du public et confond la science orgueilleuse du philosophe. Il lit, joue aux cartes, reconnaît, désigne et décrit les objets qu’on lui présente ; bref, il prouve parfaitement qu’il voit malgré son bandeau, et nous avons d’autant moins de raison d’en douter, que, nous étant appliqué et fait appliquer, M. Dechambre et moi, un bandeau absolument semblable, absolument de la même manière, avec la même quantité de coton, et avec toutes les précautions possibles, nous avons joui tout éveillés de la lucidité que cet intéressant jeune homme n’acquiert qu’étant endormi. C’est une expérience que chacun peut faire. Seulement, quelques exercices sont nécessaires pour apprendre à se servir du bandeau et obtenir des résultats prompts et décisifs. Nous eûmes encore cette fois le plaisir de convaincre M. Frappart qu’il possédait, lui aussi, sans s’en douter, la même faculté que ce somnambule, qu’il appelait une des perles du magnétisme expérimental. La seconde perle était Mlle Prudence.

On peut juger par-là du degré de confiance que méritait le bandeau de Mlle Pigeaire.

Le magnétisme animal, quoique si peu en mesure, comme on voit, de se donner pour une science, ne laisse pas que d’en avoir la prétention. Étudié, pratiqué, exploité uniquement par des hommes peu capables d’en tirer ce qu’il peut avoir de réel dans quelqu’une de ses parties, et qui ne cherchent dans son étude que la satisfaction d’une curiosité crédule ou un instrument de charlatanisme, il est devenu peu à peu, entre des mains si peu faites pour le régulariser scientifiquement, une sorte de rendez-vous où viennent se réunir une à une toutes les absurdités des anciens arts occultes. De même qu’il a trouvé dans l’histoire tous les faits qu’il prétendait avoir constatés par l’expérience, il retrouve maintenant dans l’expérience tout ce qui existait dans l’histoire. Il offre théoriquement et pratiquement une petite encyclopédie magique, théurgique et mystique, à l’usage de l’époque. Les magnétiseurs ont assumé tous les pouvoirs des anciens mages et sorciers, les somnambules toute la science des pythonisses et des devineresses.

Des magnétiseurs ont le pouvoir d’arrêter les nuages et de commander à la pluie, comme les sorciers lapons et les mages babyloniens, de dessécher les plantes, de faire des plaies, de mouvoir, de soulever certains corps par la seule force du regard et de la volonté, de fasciner des animaux comme faisaient les psylles et les marses, de jeter des sorts, de guérir la fièvre à dix lieues de distance, de faire passer instantanément per transplantationem une maladie de leur corps dans celui d’un autre, etc.

Il n’y a pas jusqu’aux amulettes et à leurs vertus et propriétés qui n’aient été comprises dans cette restauration. Les bagues, les pièces de monnaie magnétisées, en remplissent les fonctions.

Le somnambulisme a dû naturellement aussi entrer en possession de la petite magie populaire. Beaucoup de tireuses de cartes sont des somnambules et disent la bonne aventure en dormant. Enfin les fous, qui jadis se disaient possédés par le diable, se croient aujourd’hui persécutés par les magnétiseurs. On ne saurait avoir plus de popularité.

Le magnétisme animal n’est pas la seule pseudo-science ni le seul art occulte de notre époque ; il y en a d’autres encore. Nous nommerons seulement la phrénologie, qui ne prospère pas autant que le magnétisme, quoiqu’elle le vaille bien.


Louis Peisse.
  1. Particulièrement ceux de Tentzel (de Medicina diastatica s. magnetica) ; de Maxwel (de Medicina magnetica, 1679) ; de Nicolas de Loques (Traité des vertus magnétiques du sang, 1664) ; de Van-Helmont (de Magnetica vulnerum curatione) ; de Goclenius (Tractatus de magnetica vulnerum curatione) ; du P. Kircher (Magnes, sive de arte magnetica, 1654).
  2. Recherches et Doutes sur le magnétisme animal, 1784, Paris.
  3. Traité du somnambulisme, 1822. Du magnétisme animal en France, etc., Paris, 1826.
  4. On en trouvera le récit complet et détaillé dans l’Histoire académique du magnétisme animal de M. Dubois (d’Amiens) et Burdin jeune.
  5. Le célèbre professeur Orioli, pendant son séjour à Paris, nous a personnellement affirmé la vérité des faits relatifs à cette cataleptique. Entre autres prodiges, elle lut deux vers latins qu’il avait écrits chez lui avant de sortir de sa chambre, sur un morceau de papier, dont il n’avait fait part à personne, et resté ployé dans sa poche.
  6. C’est le système uniforme développé dans un livre, d’ailleurs curieux, ingénieux et savant de M. Eusèbe Salverte. (Des Sciences occultes. Paris, 1829. in-8o.)