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Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Alciat 3

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ALCIAT (Térence), jésuite italien, issu de la même famille qu’Alciat le jurisconsulte, naquit à Rome, l’an 1570. Il étudia cinq ans en droit avant que de se faire jésuite. Ce fut au mois de mars 1591 qu’il entra dans cette société. Les emplois qu’il y a eus témoignent qu’on l’y regardait comme un sujet important. Il fut pendant treize ans préfet du collége de Rome ; il y enseigna cinq ans la philosophie, et dix-sept ans la théologie. Après cela, il fut directeur de la pénitence du Vatican, et sous-supérieur de la maison professe. Il assista à la neuvième congrégation générale des jésuites, comme député de la province de Rome ; et lorsqu’il mourut d’apoplexie, le 12 de novembre 1651, il était sous-provincial. Il n’était pas dans une moindre considération hors de la société ; car outre qu’il fut longtemps qualificateur de la congrégation du Saint Office, et consulteur de la congrégation des rites, il fut choisi par le pape Urbain VIII, pour réfuter le père Paul. Il préparait une édition des actes du concile de Trente, qui aurait été l’apologie de cette assemblée contre toutes sortes d’adversaires, et nommément contre ce redoutable Vénitien. Il avait déjà ramassé un grand nombre de matériaux pour cet important et pénible ouvrage, lorsque la mort le fit sortir de ce monde[a] ; mais encore qu’il eût donné plusieurs années à ce travail, il n’avait presque pas commencé la forme de son ouvrage. Le père Sforce Palavicin, qui fut chargé du même dessein, nous apprend pourquoi le père Alciat était demeuré si loin de l’exécution (A). Si M. Moréri avait seulement jeté les yeux sur la préface du cardinal Palavicin, il n’aurait pas mis entre les œuvres du père Alciat les Actes du concile de Trente. Il n’y faut mettre qu’un Sermon sur la Passion, prononcé devant le pape Clément VIII, en 1602, et la Vie de Pierre Fabri, compagnon de saint Ignace Loyola. Le père Alciat, déguisé sous le nom d’Eminius [b] Tacitus, l’a traduite en italien du latin de Nicolas Orlandino [c]. Cette traduction fut imprimée à Rome en 1629. Le latin fut imprimé à Lyon en 1617. M. Moréri remarque que le pape Urbain VIII disait que le père Alciat était digne du chapeau de cardinal. Nicius Érythræus le rapporte[d]. Si l’on demande à quoi tenait-il donc que ce jésuite n’eût pas ce qu’il méritait ? Urbain VIII n’était-il pas le distributeur de ces chapeaux ? La réponse est fort aisée : il faut conférer cette dignité à tant de gens par des raisons de politique, qu’on ne peut toujours y admettre ceux que l’on croit la mériter.

  1. Ex Bibliothecâ Scriptorum Societatis Jesu, Nathanaëlis Sutuelli.
  2. Leon Allatius in Apibus Urbanis, pag. 238, et Alegambe disent Erminius.
  3. Sotuellus, Bibl. Societ. Jesu.
  4. Nicius Erythr. Pinacoth. II, cap. XLVII.

(A) Le père Alciat, qui avait entrepris une Réfutation de Frà Paolo, était demeuré... loin de l’exécution. ] Il s’était imposé la loi de ne rien nier à son adversaire, sans apporter des preuves de sa négative ; de sorte qu’il employa bien des années à chercher des mémoires qui lui fournissent ces preuves. Le cardinal Palavicin prétend que c’était une œuvre de surégogation, parce qu’il n’y a point de lois qui obligent à la preuve celui qui nie : c’est à l’accusateur à prouver ; et, s’il ne le fait point, il mérite la peine du talion : mais la personne accusée peut se contenter d’un je nie le fait ; cela suffit à la faire absoudre, pendant qu’on ne prouve rien contre elle. Là dove questi s’era fatto lecito d’accusare senza provare, il che dalle leggi è punito colla pena del talione, guegli non volle negare senza haver la prova della falsità ; dal che ogni legge il disobligava. Quindi fu che spese moltissimi anni in cercar memorie certe di que’ successi[1]. N’en déplaise à ce cardinal, je ne crois pas qu’en cette rencontre ce fût assez de nier ce que le père Paul affirmait. Quand on a les rieurs contre soi, il faut avoir droit et demi, et accumuler preuve sur preuve, si l’on veut gagner sa cause. Ce cardinal ajoute que le père Alciat composait fort lentement, parce qu’il ne se pardonnait rien qui fût éloigné de la perfection : la vieillesse et les affaires de la Compagnie furent de nouveaux obstacles : Dapoi, la freddezza dell’ età decrepita, la natura perplessa, la penna altrettanto lenta, quanto esquisita, le occupazioni de’ nostri governi domestici, hanno cagionato ch’egli sia morto con lasciar solo qualche vestigio dell’ opera conceputa in idea[2]. Que ceci nous fasse comprendre qu’il y a des gens qui, à force de travailler à être de bons auteurs, demeurent toujours privés de la qualité d’auteur.

  1. Pallavic. Introduzione all’ Hist. del Concilio Trident., cap. V.
  2. Là même.

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