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Discours sur l’origine et l’histoire des Arsacides

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DISCOURS

sur l’origine et l’histoire des arsacides[1],
Par M. J. Saint-Martin.

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On pense assez généralement que cette sorte de gouvernement qui dominait il y a quelques siècles, et qu’on appelle système féodal, était particulière à l’Europe, et que c’est dans les forêts de la Germanie qu’il faut en chercher l’origine ; cependant, si au lieu d’admettre les faits sans les discuter, comme il arrive trop souvent, on examinait un peu cette opinion, elle disparaîtrait devant la critique, ou du moins elle se modifierait singulièrement ; et l’on verrait que si c’est des forêts de la Germanie que nous avons tiré le gouvernement féodal, il n’en est certainement pas originaire.

Si l’on veut comparer l’Europe telle qu’elle était au XIIe. siècle, avec la monarchie fondée en Asie par les Arsacides, trois siècles avant notre ère, partout on verra des institutions et des usages pareils ; on y trouvera les mêmes dignités et jusqu’aux mêmes titres, jusqu’à des marquis, des barons, des chevaliers et de simples hommes d’armes. De même, un grand nombre d’hommes y jouissaient de tous les droits de la liberté, tandis qu’un plus grand nombre en était entièrement privé. On s’imagine ne voir ordinairement dans l’Orient, qu’un misérable troupeau d’esclaves soumis à un despote : sans doute, sous les Arsacides, les Persans, les Syriens et les autres indigènes d’Asie, étaient presque tous esclaves ; mais ils l’étaient comme les Gaulois et les Romains, sous la domination des Francs, et par le même droit, celui de la conquête ; c’étaient eux qui formaient la masse de la population. Il n’en était pas ainsi des Parthes : comme nos belliqueux ancêtres, ils étaient grands amis de la liberté, mais beaucoup pour eux et fort peu pour les autres ; boire, chasser, combattre, faire et défaire des rois, c’étaient là les nobles occupations d’un Parthe. Ceux qui préfèrent une orageuse liberté à ce qu’ils appellent une tranquille servitude, auraient pleinement trouvé à se satisfaire chez eux ; car, de même que dans les diètes polonaises, le sang coulait souvent dans leurs assemblées électorales ; et plus d’une fois le tranchant du glaive venait interrompre les discours d’un imprudent orateur. Le trône appartenait bien à une seule famille ; le droit d’aînesse même était reconnu ; mais malheur à celui qui n’y joignait pas d’autres titres : cette nation turbulente n’aimait à obéir qu’à des princes dont la victoire avait légitimé les droits. Tel était ce peuple, devant lequel la puissance romaine fut forcée de s’arrêter. Comment se composaient ses redoutables armées ? comme chez nous. Les seigneurs parthes, tout couverts de fer eux et leurs chevaux, ne ressemblaient pas mal à nos preux chevaliers, à nos hommes d’armes ; c’est sur eux seuls que reposait la force des armées : le peuple qui se faisait tuer à pied, était compté pour rien ; on ne faisait état que du noble chevalier assez riche pour soudoyer d’autres braves, ou assez illustre et assez brave lui-même, pour en attacher d’autres à sa fortune. Quand Marc-Antoine marcha vers l’Orient, pour venger la défaite de Crassus, le roi des Parthes n’eut besoin pour le vaincre, que de huit cent cinquante chevaliers ou hommes d’armes ; peu auparavant, vingt cinq chevaliers parthes avaient conquis la Judée et pris Jérusalem. Il serait facile de pousser plus loin le parallèle, de faire voir l’extrême ressemblance qui existait entre la monarchie arsacide et les royaumes de l’Occident : nous n’y trouverions pas, il est vrai, les titres de duc et de comte, empruntés à l’empire romain par la féodalité moderne ; mais nous y verrions un connétable commander les armées et des marquis défendre les frontières. Des barons, des dynastes, des seigneurs féodaux de toute espèce, dont je ne rapporte pas les noms, et parmi lesquels il y en avait beaucoup, comme chez nous, qui étaient chargés de fonctions sacerdotales, se partageaient le reste du territoire, et formaient la partie noble de la nation ou plutôt la nation elle-même ; tandis que le peuple, attaché à la glèbe, était serf dans toute la force du terme. À la tête de ce système politique était un prince qu’on appelait le roi des rois, et qui l’était effectivement, puisque ses premiers vassaux portaient le titre de roi ; leur nombre était fixé à sept, comme les sept électeurs du saint empire romain.

Si nous ne sommes pas les inventeurs du système féodal, qu’on ne croie pas qu’il a été imaginé par les Parthes. Qu’est-ce que le gouvernement féodal ? c’est tout simplement l’occupation militaire d’un vaste territoire, partagé entre tous les soldats : les rangs y sont distribués comme les grades dans une armée ; c’est la conséquence inévitable d’un gouvernement militaire ou d’une conquête. Les Arsacides ne furent pas les inventeurs de ce mode de gouvernement, puisqu’ils ne furent pas les premiers conquérans de l’Asie ; ils succédèrent à d’autres empires et à d’autres conquérans ; les prédécesseurs des Assyriens, ceux qui chassèrent ces derniers, les Mèdes et les Perses, avaient un gouvernement tout-à-fait pareil ; les Arsacides n’ont fait que les imiter. Les titres de maître du monde, de grand roi, de roi des rois et d’autres encore, qui sont arrivés jusqu’à nous, de peuple en peuple, de tradition en tradition, ont toujours servi à désigner le suprême monarque de l’Asie, même dans les pays qui ne reconnaissaient pas précisément sa domination. Quand les Grecs, qui faisaient profession de braver la puissance du roi de Perse, mais qui recevaient ses subsides, disaient le roi, le grand roi, on savait bien de qui il s’agissait, on n’ignorait pas que ce titre ne s’appliquait qu’au prince qui régnait en Asie, et qui de droit ou de fait était le souverain du monde. Malgré les mémorables victoires des Grecs, qui pourraient bien avoir été un peu exagérées par l’amour-propre national, la Grèce, sans Alexandre, aurait fini par devenir une province du grand roi : déjà il était parvenu à y faire exécuter ses ordres, en intervenant dans tous les différends des Grecs ; il en avait autant qu’il le voulait à sa solde, et il s’en fallait de bien peu qu’il ne fût réellement leur maître ; sans Alexandre, la Grèce subissait le joug, presque sans s’en douter.

Quand le roi de Macédoine triompha de Darius, il devint monarque de l’Asie ; c’est là le nœud qui explique toute la conduite politique de ce conquérant. Les Grecs, peu familiarisés avec le droit public de l’Orient, n’ont jamais pu y rien comprendre, et jamais ils n’ont pu pardonner à Alexandre de les avoir forcés de vivre en paix chez eux ; ils n’ont voulu voir en lui que l’oppresseur de leurs démocraties. C’est à travers une multitude de vaines déclamations, que la mémoire de ce grand homme nous est parvenue, et après plus de vingt siècles, nous le jugeons encore avec tous les préjugés de ses ennemis. Si l’on doit accorder quelque estime au funeste génie des conquérans, pourquoi n’admirerions-nous pas Alexandre ? nous admirons tant d’autres personnages qui sont célèbres au même titre, et qui certes ne le valent pas ! Le nom de ce héros semble destiné à partager éternellement la gloire de tous les autres conquérans qui tous, sont forcés de subir avec lui une comparaison qui n’est pas à leur avantage. Il n’eut presque qu’un défaut, et c’était un défaut macédonien ; il le paya bien cher, puisqu’il lui coûta la vie. Est-il un homme qui avec de si faibles moyens ait fait tant et de si grandes choses ? c’est avec trente mille hommes qu’il acheve la conquête de l’Asie. Qu’on ne dise pas qu’il a triomphé de multitudes sans courage : ses adversaires pouvaient avoir moins d’habileté militaire ; mais Darius et les Persans étaient braves, et c’était quelque chose dans un tems où la vaillance, presque seule, décidait du destin des batailles. Les Scythes, les Bactriens, les Indiens lui opposèrent une longue résistance ; enfin dans toutes ses batailles contre Darius, Alexandre eut toujours en tête 40,000 Grecs aussi expérimentés que ses Macédoniens, et animés par toute la haine qu’ils pouvaient avoir contre un compatriote, qu’ils regardaient comme l’oppresseur de leur patrie. À peine hors de la jeunesse, au milieu des factions, il soumet au joug des républiques guerrières et jalouses de leur liberté ; il abandonne l’Europe ; d’innombrables nations reconnaissent ses lois ; rien ne l’arrête, ni les sables de la Libye, ni les neiges de la Scythie. Que sont les campagnes des tems modernes, auprès de ces immenses courses militaires ? partout il laisse d’admirables preuves de son génie ; il ne renverse pas, il fonde un nouvel empire. Les plus hautes montagnes du monde sont d’impuissantes barrières pour ses ennemis : les sommets glacés de l’Imaüs s’abaissent et s’ouvrent devant lui ; nos géographes ne savent où le suivre dans ses courses lointaines. Tranquille dominateur de l’Asie, plus grand encore par son génie que par son épée, méditant de plus vastes projets que tous ceux qu’il avait achevés, il meurt à Babylone dont il voulait faire la capitale du monde : l’univers se taisait devant lui, et il n’avait pas trente deux ans ! L’armée d’un pareil chef devait être une pépinière de grands capitaines : tous furent d’habiles généraux, tous avaient sa vaillance, mais aucun son génie. Alexandre voulait devenir Persan en Asie ; ils y restèrent Grecs : ces deux mots expliquent leur histoire. Alexandre aurait fondé un empire durable ; ils n’y eurent qu’une domination précaire, mal défendue par des mercenaires étrangers et abhorrée des indigènes : aussi les Arsacides n’eurent-ils pas grand’peine à leur arracher le sceptre de l’Asie.

Nous ne déroulerons pas ici le long récit des faits historiques qui concernent cette dynastie, et que nous avons soumis au jugement de l’Académie. La monarchie arsacide était le centre d’un vaste système politique, en rapport avec les Romains du côté de l’occident, tandis qu’à l’orient il était en contact avec l’empire chinois. Ainsi, d’un côté on voit les Parthes chercher des ennemis aux Romains jusqu’aux rives du Danube, et de l’autre on voit les monarques chinois intervenir comme médiateurs dans les sanglans démêlés des princes arsacides. Cette puissante monarchie féodale se composait de quatre royaumes principaux, possédés par une même famille : la branche aînée avait la Perse, et son chef, décoré du titre de roi des rois, avait la haute souveraineté sur tous les princes de son sang. Les rois d’Arménie tenaient le second rang ; venaient ensuite ceux de la Bactriane, chefs de toutes les tribus alanes et gothiques répandues sur les bords de l’Indus, ou dans les régions inconnues qui se prolongent au nord de l’Inde et à l’orient de la Perse. Au dernier rang était le roi arsacide des Massagètes,qui possédait toute la Russie méridionale, et qui gouvernait les tribus gothiques, alanes, saxonnes, mèdes, persannes et indiennes, fixées sur les rives du Wolga et du Tanaïs. Qu’on ne s’étonne pas de voir tous ces peuples placés loin des positions géographiques que leurs noms semblent indiquer ; si nous ne savions pas comment l’Alcoran a transporté des membres d’une même tribu arabe, les uns sur les rives du Gange, et les autres au pied des Pyrénées, il serait difficile d’en rendre raison. Le séjour des Mèdes et des Indiens en Europe est moins étonnant, leur point de départ était moins éloigné. Quoique ce soit en Asie qu’il faille chercher la première origine des Arsacides ; quand ils soumirent cette partie du monde, ils venaient de l’Europe, et ils faisaient partie d’une puissante nation, dispersée depuis les bords du Danube, jusqu’aux contrées les plus reculées de la haute Asie : ce peuple était les Daces ; c’était là le nom national des Arsacides, ils le donnèrent à leurs sujets. Trois siècles avant notre ère, la Hongrie et la Bactriane portaient également le nom de Dacie, et cette dénomination, toujours très-reconnaissable, mais diversement modifiée par les idiomes qui se sont succédés en Europe et en Asie, sert encore à désigner les Allemands et les descendans des anciens Persans.

Il est facile de voir par tout ce que nous venons de dire, que l’origine des Arsacides est liée à une autre question d’une très-haute importance, question souvent débattue, mais qui est loin d’être encore résolue, et dont la solution expliquerait les rapports intimes de langue, de grammaire, d’institutions, de mœurs, de religion et d’organisation physique, qui rapprochent tous les peuples de l’Europe ancienne et moderne, des nations de l’extrême Orient. On sait que c’est des frontières de l’Asie que venaient les barbares qui détruisirent l’empire romain ; leur voisinage des nations asiatiques, explique la ressemblance que l’on remarque entre eux. Mais croit-on que ce soit la seule fois qu’une pareille révolution se soit opérée ? croit-on qu’elle ne se soit pas renouvelée plusieurs fois et à des époques bien plus anciennes, lorsqu’il n’existait pas encore des empires assez puissans pour arrêter ces redoutables émigrations ? La terre classique est encore soumise au joug des Turks qui, jadis, étaient voisins des Chinois ; ils dominent encore dans la basse Asie et en Égypte : hé bien ! long-tems avant les époques marquées dans les histoires ordinaires, des hommes qui n’étaient pas de la même race, mais qui venaient presque d’aussi loin, soumirent l’Asie et l’Europe à leur domination, et le Nil reconnut leurs lois. À travers l’empire actuel de Russie, ils envahirent la Grèce et la Germanie, pénétrèrent en Espagne, et, comme les Vandales depuis, ils franchirent les colonnes d’Hercule, et passèrent en Afrique, où ils s’étendirent jusqu’aux rives lointaines du Sénégal. Une Inde, différente de l’Inde asiatique, exista en Europe ; les rites et les institutions des Brahmanes y furent en pleine vigueur ; là aussi, les hommes à soixante ans avaient rempli leur carrière terrestre ; et, dès-lors, dégagés de tous leurs devoirs envers le monde et leur famille, ils n’aspiraient plus qu’à rentrer dans le sein de la divinité, dont leur ame n’était qu’une émanation, et ils hâtaient ce moment fortuné par une mort volontaire. C’était par une route plus difficile, que d’autres arrivaient au même but : séparés du reste des hommes, confinés dans des monastères éloignés, soumis à de rigoureuses austérités, plongés dans de profondes méditations sur l’essence divine, ces pieux cénobites croyaient s’identifier avec l’être dont ils recherchaient la nature ; et les peuples, touchés de la sainteté de leur vie, leur décernaient vivans les honneurs divins ; et, en les reconnaissant pour rois, ils croyaient n’avoir pas d’autre chef que Dieu lui-même. Plusieurs des traits de ce tableau de l’Inde européenne subsistent encore dans l’Inde asiatique et dans les régions limitrophes. Partout, en remontant à des époques fort éloignées de nous, on retrouve en Europe et en Asie, à des distances immenses et avec les mêmes noms, des divisions d’une même nature, dispersées par les étonnantes révolutions dont nous venons de parler.

Les peuples sont, pour ainsi dire, les seuls personnages qui figurent dans cette partie intéressante de l’histoire, qui est celle de nos ancêtres. À peine connaissons-nous les noms de quelques-uns des conducteurs de ces antiques et puissantes colonies ; ce n’est qu’en approchant de nous, que les ténèbres se dissipent peu à peu, et que les faits historiques paraissent avec toutes leurs circonstances. La puissance des Arsacides est la première de ces grandes dominations, qui puisse être soumise aux narrations de l’histoire. Les matériaux ne manquent pas ; mais qu’on s’imagine un temple magnifique qui, dès long-tems, a succombé sous la faux destructive du tems, et dont les débris mutilés et entassés confusément, ou dispersés au loin, semblent ne plus permettre de reconnaître le plan de l’édifice : telle se présente l’histoire des Arsacides. Il n’existe aucun corps d’annales : un grand nombre de passages concis, tronqués, altérés et dispersés, qui appartiennent à des auteurs de tems, de langues et de nations très-différens, sont les seuls moyens de rétablir cette histoire. Les Grecs, les Latins, les Arméniens, les Syriens, les Arabes, les Persans, les médailles, les inscriptions, l’antiquité profane et ecclésiastique ; il faut tout mettre à contribution, pour refaire cette grande portion des annales du genre humain : il faut soigneusement discuter et envisager, sous tous ses rapports, chacun des points de ce long enchaînement de faits, pour lui assigner la véritable place qu’il doit occuper dans la série des tems. C’est en l’an 250 av. J.-C. que les Parthes tentent, pour la première fois, de ravir le sceptre de l’Asie aux successeurs d’Alexandre. Arsace succombe dans cette entreprise, mais son frère Tiridate fut plus heureux : avec l’aide des barbares du Nord, il parvint à faire reconnaître son indépendance. Moins d’un siècle après, Mithridate, non pas le redoutable ennemi des Romains, il n’était qu’un vassal des Arsacides, mais le sixième roi des Parthes qui portait le même nom, met fin à la puissance des Grecs. Conquérant et législateur, il domine de l’Euphrate à l’Indus, et des princes de son sang règnent dans l’Inde, dans la Scythie et en Arménie. Après sa mort, les Grecs tentent un dernier effort : la victoire leur sourit un instant ; mais bientôt, l’imprudence de leur chef et des alliés qui viennent des frontières de la Chine, pour combattre sous les drapeaux des Arsacides, mettent fin à une lutte trop inégale, et l’empire de l’Asie reste, sans contestation, aux descendans d’Arsace. La défaite de Crassus et celle d’Antoine, dont la honte ne put être effacée par les victoires de Corbulon et de Trajan, font voir que les Parthes ne dégénérèrent pas. Tant que leur empire subsista, ils furent la terreur des Romains ; jamais leurs dissensions ne favorisèrent les projets des étrangers. C’est chez eux-mêmes qu’était l’ennemi qui devait les terrasser. Un de leurs plus faibles vassaux, Ardeschir, seigneur d’un petit canton de la Perse, accrut peu à peu ses forces, en soumettant d’autres petits seigneurs ; puis, profitant habilement de l’enthousiasme religieux et de la haine que les peuples nourrissaient contre les Parthes, dont ils n’avaient pas oublié l’origine étrangère, il sut se rendre redoutable au grand roi, qui succomba en l’an 226 de notre ère, et laissa l’empire à la dynastie des Sassanides, après que sa race eut occupé quatre cent soixante seize ans le trône de la Perse. La mort du roi des rois n’amena pas la chute totale des Arsacides : les princes de la Bactriane, de concert avec ceux de la Scythie et de l’Arménie, unirent plus d’une fois leurs efforts à ceux des Romains, contre les nouveaux possesseurs de la Perse ; mais insensiblement leur puissance s’affaiblit : les Bactriens, déjà presque abattus par les Persans, se soumirent au commencement du Ve. siècle aux Huns Ephthalites ; les Arsacides du Nord cédèrent devant Attila. Une partie de leurs sujets cherchèrent un asyle dans les gorges du Caucase et sur les bords de la Baltique, où sont encore leurs descendans ; tandis qu’une autre partie, confondue parmi ces peuples qui renversèrent l’empire romain, en fuyant les troupes victorieuses du redoutable roi des Huns, vint se fixer sur les rives de l’Océan Atlantique. Les Arsacides d’Arménie subsistèrent plus long-tems ; ils embrassèrent le christianisme, trente ans avant que Constantin l’eût fait monter sur le trône ; de sorte que le royaume d’Arménie fut réellement la première monarchie chrétienne : elle finit en 428. Des Arsacides, déchus du rang des rois, se conservèrent en Perse, où ils régnèrent, au Xe. siècle, sous le nom de Samanides : d’autres, passés en Occident, s’y illustrèrent par leurs exploits en Afrique et en Italie, en combattant sous les drapeaux de Bélisaire, et ils finirent par monter sur le trône de Constantinople. Enfin, on les voit encore briller parmi les derniers défenseurs du nom chrétien, en Arménie, où leurs exploits viennent se confondre avec ceux de nos croisés. Telles furent les destinées des Arsacides.


  1. Ce morceau a été lu à l’Académie Royale des Inscriptions et Belles-Lettres, dans la Séance publique du 27 Juillet 1821.