En Allemagne (1882-1886)/Berlin, la cour et la ville/14

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En Allemagne, Texte établi par Introduction et notes de G. Jean-Aubry, Mercure de FranceŒuvres complètes de Jules Laforgue. VI (p. 148-149).


THÉÂTRES



Berlin est une Mecque musicale. De même qu’on peut y faire son instruction purement musicale avec soixante-quinze centimes par soir, de même l’Opéra vous offre bon nombre d’œuvres en une saison. Les artistes sont prêts à jouer successivement, à part le répertoire classique, Lohengrin, le Vaisseau fantôme, la Walkyrie, Tannhaüser, Siegfried, Tristan et Isolde, les Maîtres Chanteurs et même Rienzi.

De temps en temps, l’Opéra remplace sa représentation par ce qu’on appelle une Symphonie-soirée.

Une première n’a aucun aspect particulier.

Il arrive qu’on engage une étoile étrangère pour quelques représentations, laquelle étoile chante alors en italien, tandis que les autres artistes chantent en allemand. Cela ne choque pas. Edwin Booth est venu jouer ainsi en anglais, Rossi en italien et un autre artiste en russe.

On lit cet avis en entrant à l’Opéra : « Les dames sont priées de laisser leur chapeau au vestiaire. » (Les dames vont au parterre.) Pas d’ouvreuses. On ne crie ni programmes, ni lorgnettes. Les préposés aux vestiaires s’appellent « garderobiers ». Deux niches : dans l’une, une dame vend le livret de l’Opéra qu’on joue ; dans l’autre, un homme vous sert des verres d’eau de Seltz, de laquelle on fait une consommation considérable.

Depuis un an, on a un foyer. C’est une grande salle nue et blanche, éclairée de globes électriques. Dans un coin, un comptoir avec des gâteaux et des limonades. Quelques sièges. Tout le monde tourne dans le même sens, tandis que les officiers se tiennent au milieu, debout, isolés.