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Esprit des lois (1777)/L30/C4

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CHAPITRE IV.

Continuation du même sujet.


César dit[1] que « quand un des princes déclaroit à l’assemblée qu’il avoit formé le projet de quelque expédition, & demandoit qu’on le suivît, ceux qui approuvoient le chef & l’entreprise, se levoient & offroient leur secours. Ils étoient loués par la multitude. Mais s’ils ne remplissoient pas leurs engagemens, ils perdoient la confiance publique, & on les regardoit comme des déserteurs & des traîtres ».

Ce que dit ici César, & ce que nous avons dit dans le chapitre précédent après Tacite, est le germe de l’histoire de la premiere race.

Il ne faut pas être étonné que les rois ayent toujours eu à chaque expédition de nouvelles armées à refaire, d’autres troupes à persuader, de nouvelles gens à engager ; qu’il ait fallu, pour acquérir beaucoup, qu’ils répandissent beaucoup ; qu’ils acquissent sans cesse par le partage des terres & des dépouilles, & qu’ils donnassent sans cesse ces terres & ces dépouilles ; que leur domaine grossît continuellement, & qu’il diminuât sans cesse ; qu’un pere qui donnoit à un de ses enfans un royaume[2], y joignît toujours un trésor ; que le trésor du roi fût regardé comme nécessaire à la monarchie ; & qu’un roi[3] ne pût même, pour la dot de sa fille, en faire part aux étrangers, sans le consentement des autres rois. La monarchie avoit son allure, par des ressorts qu’il falloit toujours remonter.


  1. De bello Gallico, liv. VI.
  2. Voyez la vie de Dagobert.
  3. Voyez Grégoire de Tours, liv. VI, sur le mariage de la fille de Chilpéric. Childebert lui envoie des ambassadeurs, pour lui dire qu’il n’ait point à donner des villes du royaume de son pere à sa fille, ni de ses trésors, ni des serfs, ni des chevaux, ni des attelages de bœufs, &c.