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Esquisse géologique du massif du Mont-Dore et de la chaîne des Puys

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ESQUISSE GÉOLOGIQUE[1]

DU

MASSIF DU MONT-DORE

ET DE LA

CHAINE DES PUYS



Le massif du Mont-Dore et les monts Dômes, ou chaîne des Puys, forment, dans le département du Puy-de-Dôme, deux groupes de montagnes volcaniques assez différentes, dont la configuration topographique s’explique aisément par la géologie.

Le massif du Mont-Dore représente un ensemble volcanique assez ancien, aujourd’hui démantelé ; la chaîne des Puys, au contraire, qui n’a pas été usée par le temps, contraste par l’état de fraîcheur de ses formes topographiques.

Massif du Mont-Dore

Généralités. — Ce massif présente une forme ellipsoïde dont le grand axe (N. S.) mesure 32 kilomètres et le petit axe (E. 0.) 25 kilomètres. Il a été comparé, quelquefois à tort, à l’Etna qui est trois fois plus considérable, car il est assez complexe au point de vue géologique. Il résulte, en effet, de la juxtaposition de plusieurs centres éruptifs distincts et n’offre pas la belle unité du Cantal ; aussi son hétérogénéité se traduit-elle, d’une manière frappante, dans les détails de son modelé.

Toutefois, dans son ensemble, il se montre sous la forme de deux troncs de cônes, accolés par leur grande base, entaillés de profondes vallées, qui pénètrent jusqu’au cœur du massif et permettent d’observer sa constitution.

Les pentes du sud se relient aux pentes inverses du Cézallier qui est, pour ainsi dire, le trait d’union le soudant au grand volcan du Cantal.

Le flanc nord s’étend, assez loin, jusque sous la chaîne des Puys, tandis qu’à l’O. les coulées les plus basses se continuent par les contreforts cristallins de la Corrèze, et qu’à l’E. elles dominent le bassin tertiaire d’Issoire.


Géologie. — Les études géologiques, pétrographiques, orographiques, hydrographiques, etc., permettent de croire que le massif du Mont-Dore comprend deux centres éruptifs principaux auxquels on pourrait donner les noms de massif du Sancy au sud, et de massif de la Banne d’Ordanche, au nord. De ces deux centres, qui sont en même temps deux points élevés de la région, partent des coulées de lave qui rayonnent dans tous les sens. Une notable partie des laves issues du second centre ne se retrouvent pas dans le premier.

En dehors de ces deux volcans principaux, qui étaient soudés l’un à l’autre et constituent une notable partie du massif, il existe un groupe de points éruptifs greffés sur le flanc E., qui s’étendent entre le puy de l’Angle et le puy de Pessade, et dont le centre se trouve au puy de la Croix-Morand. Ces points d’éruption excentriques ont donné des dykes de lave généralement trachytiques ou des coulées de trachyte, d’andésite et de basalte plus ou moins étendues et qui ont dû être primitivement coalescentes.

Ces volcans adventifs, réduits parfois à l’état de necks, troublent, vers l’E., l’allure topographique assez régulière des volcans de la Banne d’Ordanche et du Sancy.

Le massif du Mont-Dore est assis sur un socle de roches cristallines dont l’altitude moyenne est de 1,000 mètres et dans lesquelles domine le granité. Le gneiss et les micaschistes sont moins bien représentés.

C’est à la fin du miocène qu’eurent lieu, comme dans le Cantal, les premières éruptions de ce massif. Le soulèvement des Alpes, dont le contre-coup modifia si profondément la topographie du Massif Central, fut vraisemblablement une des causes principales des éruptions des volcans du Mont-Dore.

Elles débutèrent par de petits volcans isolés (Rochefort), qui furent ensuite ensevelis sous des coulées de lave puis, à la Banne d’Ordanche, près de La Bourboule, par des sorties de roches acides assez spéciales de couleur variable (blanche, rouge, noire), connues sous les noms de rhyolile, de perlite (ravin de l’Usclade et de la Gâcherie), et se continuèrent par des éruptions de phonolite et de trachyte, noyés au milieu de cinérites acides. Il y eut ensuite un arrêt dans l’activité éruptive, qui se manifesta dans toute son ampleur au pliocène inférieur.

Les deux centres éruptifs de la Banne d’Ordanche et du Sancy fonctionnèrent ensemble ou successivement, en donnant alternativement des pluies de cendres, mélangées à des blocs arrachés de la profondeur (cinérites), qui entrent pour une large part dans la constitution du massif et des coulées de laves de nature différente.

L’entassement des produits volcaniques, autour des deux centres de sortie principaux, forma les deux volcans du Sancy et de la Banne d’Ordanche, sur les flancs orientaux desquels étaient accolés les volcans adventifs de la région du puy de l’Angle, de la Croix-Morand et de Pessade. La sortie des laves de ces derniers cônes éruptifs fut probablement synchronique de celle des premiers.

On peut essayer de se représenter, au moment de sa complète édification, l’ensemble volcanique du Mont-Dore sous la forme de deux grands cônes, un cône sud (cône du Sancy) dont l’altitude atteignait environ 2,500 mètres, et un cône nord (cône de la Banne d’Ordanche) de 2,000 mètres de haut, flanqués vers l’E. d’une série d’éminences représentant des cônes adventifs ayant donné des dykes ou des coulées de lave plus ou moins étendues.

La série volcanique du Sancy comprend de bas en haut des labradorites, des basaltes inférieurs, des andésites, des trachytes et enfin des basaltes supérieurs. La coupe que l’on peut relever à la grande Cascade est très instructive à cet égard.

La série de la Banne d’Ordanche est assez différente. Elle est formée de bas en haut de trachytes plus ou moins vitreux, de véritables roches porphyriques (microgranulites et micropegmatites), de basaltes demi-deuil (ophitiques), d’andésites à haüyne, de phonolites et de basaltes supérieurs. Sur le flanc nord, il n’y a pas moins de 5 niveaux basaltiques bien différenciés.

Les cônes adventifs donnèrent des laves se rapprochant beaucoup de celles de la Banne d’Ordanche, mais parmi lesquelles dominent cependant les trachytes. Cette dernière roche constitue aujourd’hui la plupart des sommets du massif du Mont-Dore le pic de Sancy, le puy Ferrand, la montagne de Bozat, le Capucin, le puy Gros, les puys de l’Ouïre, de l’Aiguillier, de Pessade, de Baladou, de Mone, du Barbier, de l’Angle, etc.

L’andésite, plus résistante, couronne les sommets du puy du Paillaret, de Chagourdet, de Cuzeau.

Enfin, le basalte, qui est la roche éruptive la plus récente, a disparu du centre du massif, décapité par l’érosion. Il ne forme plus qu’une ceinture autour du groupe montagneux. Cependant, les lambeaux que l’on trouve encore en quelques points élevés, jusqu’à plus de 1,600 mètres, témoignent de son ancienne extension. Citons les puys de Chambourguet, de Cliergue, de la Croix-Morand, de Cornillou, du Verdier et de la Banne d’Ordanche qui doivent leur conservation à cette couverture de roches très résistantes. Un certain nombre de ces sommités s’alignent pour constituer la ligne de partage des eaux entre les bassins de la Loire et de la Garonne.

Il faut faire me mention à part à quelques dykes phonolitiques qui ont percé toutes les roches antérieures aux basaltes et qui se présentent actuellement sous forme d’énormes pylones formés par des gerbes de prismes tels sont les dykes si pittoresques des roches Tuilière, Sanadoire et Malleviale.

La série des roches éruptives du Mont-Dore s’étage entre le miocène supérieur et le pliocène supérieur. Dans l’intervalle des périodes éruptives, les flancs des volcans se couvraient d’une végétation qu’une nouvelle éruption venait ensevelir. Ainsi a été conservée, au milieu des cinérites, une flore qui a été synchronisée avec celle du pliocène inférieur et moyen, et qui comprenait des bambous, des érables, etc., indiquant un climat plus chaud que le climat actuel. On constate le même fait dans le massif du Cantal.

À la fin du pliocène, les flancs du groupe volcanique du Mont-Dore furent envahis par les glaciers, qui transportèrent au loin les blocs détachés des hauts sommets, sillonnèrent les vallées qui entaillaient le massif et formèrent des moraines plus ou moins bien conservées (vallées de la Dordogne, de Chaudefour, etc.). C’est principalement sur le flanc ouest du massif que l’action des glaciers est la mieux marquée.

Les environs de Bort, de Champs et toute la région de l’Artense sont encombrés de débris de moraines et couverts d’une infinité de buttes cristallines moutonnées, striées, usées et polies par les glaciers. Le paysage de cette contrée éminemment pittoresque rappelle, dit M. Boule, certains paysages glaciaires de la Finlande.

Au commencement du quaternaire, le massif du Mont-Dore devait avoir une physionomie assez semblable à celle qu’il possède actuellement.

Le réveil de l’activité éruptive qui donna naissance à la chaîne des Puys, amena la réouverture d’anciennes fractures par lesquelles eurent lieu de nouvelles sorties de laves (basaltes). C’est à cette époque que vinrent se greffer sur les flancs du volcan à demi-ruiné les petits volcans de Servière, de Compéret, d’Ebert, d’Orcival, de la Godivelle, de Montchalm et de Montcineyre. Ces deux derniers donnèrent des coulées, s’étendant assez loin, au fond des vallées creusées dès cette époque (coulée de la Couze Pavin et coulée de la Couze de Compains).

Les modifications apportées au massif du Mont-Dore depuis ce moment sont insignifiantes. Toutefois, les alternatives de gelées, de pluies et de chaleur usent de plus en plus les hauts sommets pendant que l’eau des torrents ravine profondément les cinérites. Il ne semble pas qu’il faille une longue série de siècles pour décapiter le pic de Sancy et amener la réunion des deux vallées de la Dordogne et de Chaudefour.


La chaîne des Puys

Généralités. — La chaîne des Puys ou monts Dômes, située un peu au nord du massif du Mont-Doré et de direction générale N.S., comprend plus de soixante volcans échelonnés sur 35 kilomètres de long et 5 de large. Elle n’offre généralement en largeur que deux cônes éruptifs, rarement un seul ou trois.

Cette curieuse guirlande volcanique est assise sur un socle de roches granitiques, de terrain primitif (gneiss et micaschistes), de précambrien, percés de filons de granulite, de kersantite et de porphyre. Elle domine à l’ouest, la vallée de la Sioule, à l’est, le bassin tertiaire ; mais tandis que le soubassement se relie à la première par des pentes relativement faibles, il offre au contraire un escarpement prononcé à sa limite avec la Limagne.

À l’est de la série des monts Dômes court une bande de terrains cristallins, plus élevée d’environ 100 mètres que la base des volcans et échancrée d’un certain nombre d’entailles est-ouest, faites par l’érosion et se prolongeant par des vallons profonds jusque dans la Limagne. La chaîne éruptive des Puys n’est donc pas installée, comme on l’a dit, sur la partie la plus élevée de la région cristalline séparant la Limagne de la vallée de la Sioule, mais à l’ouest et, en général, assez au-dessous de ce faîte. Cette disposition permet de comprendre pourquoi les matières fondues se sont épanchées largement, vers l’ouest, où rien ne venait les arrêter et où elles forment du nord au sud comme une vaste nappe longue de 30 kilomètres de long de coulées de nature variée et coalescentes, tandis qu’elles n’ont pu se diriger, vers l’est, que grâce aux échancrures, aux vallées, entaillées dans la partie cristalline axiale.

Si l’on part de la Limagne et que l’on s’élève, sans suivre les vallons, jusqu’aux points les plus élevés de la région cristalline, on traverse une série de gradins plus ou moins émoussés par l’érosion, en relation avec les dislocations du sol, et dont deux, au moins, sont d’une netteté remarquable. Le premier surplombe la Limagne d’environ 200 mètres. Le second constitue le gradin supérieur, à l’ouest et au pied duquel s’étend la chaîne des Puys, tandis qu’à l’est s’échelonnent symétriquement une série de points éruptifs de faible étendue.

La limite du terrain cristallin et de la Limagne se fait par une grande faille (faille occidentale de la Limagne) de plus de 60 kilomètres, le long de laquelle le bassin tertiaire s’est effondré. C’est par cette cassure que sont sorties les laves des volcans de Gravenoire et de Beaumont, et c’est par une série de failles parallèles qui découpent le tertiaire en voussoirs successifs, qu’arrivent au jour un grand nombre de sources minérales (Royat, Châtelguyon, Clermont, etc.). Ce sont là des failles éruptives et hydrothermales.

Il semble bien que le socle cristallin a a été découpé de la même façon que la Limagne en une série de gradins, dont l’ensemble figurerait un pli anticlinal morcelé, tandis que la Limagne pourrait être considérée comme un grand pli synclinal. La série volcanique des Puys serait sur un de ces gradins, au pied d’un voussoir surélevé. Le tassement des voussoirs, les uns par rapport aux autres, dut contribuer, dans une assez large mesure, à la sortie de matières fondues.

Un coup d’œil sur la chaîne des Puys laisse voir ces volcans alignés, par groupes, suivant des directions N.N.O. et N.N.E., qui sont les directions des plis et des cassures hercyniennes. Ils paraissent donc installés sur une série de diaclases anciennes qui ont rejoué à l’époque tertiaire et au quaternaire. Ces diaclases étant des plans de moindre pression devaient facilement servir de cheminée d’ascension aux matières fondues, comme on l’a constaté dans d’autres régions l’Italie, l’Islande, etc.

L’altitude moyenne des monts Dômes est de 1,150 mètres, mais un certain nombre dépassent 1,200 puy de Pariou 1,210, puy de Montchier 1,215, puy de Laschamps 1,260 ; enfin le puy de Dôme, le géant de la chaîne, situé dans une position assez centrale, dresse sa cime jusqu’à 1,465 mètres et les domine tous de plus de 200 mètres.


Forme des volcans. Au point de vue de la forme, on doit distinguer les volcans domitiques qui sont plus anciens, des autres volcans, généralement à cratère, qui sont bien conservés. Les volcans domitiques ont des aspects variés ils sont parfois irréguliers et constituent d’importantes masses rocheuses, comme le puy de Dôme, qui a dû atteindre une hauteur d’environ 1,800 mètres. D’autres fois, ils ont l’aspect d’une coupole plus ou moins régulière (puys de Sarcouy et de Clierzou). Ces volcans, constitués par une roche acide, très poreuse, appelée domite, et des scories, sont les ruines de volcans pliocènes. Ils possédaient un cratère, comme les volcans quaternaires, et certains sont constitués par des alternances de coulées et de couches de scories (Chaudron). Le Puy de Dôme comprend une cheminée (neck) remplie de lave domitique compacte, flanquée de projections domitiques.

L’état de fraîcheur des volcans à cratère est parfois remarquable. Ils ont éclaté, pour la plupart, au milieu d’une région domitique démantelée comprenant des coulées et des dépôts d’atterrissement. Les cratères, souvent bien conservés, atteignent des profondeurs allant jusqu’à 100 mètres (puy de Pariou). Les puys de Côme et de Pariou montrent deux cratères concentriques emboîtés, d’autres, comme les puys de la Nugère et de Louchadière, ont été en partie démolis par la sortie des laves. Ceux de la Vache et de Lassolas ont été éventrés par la pression des matières fondues et égueulés jusqu’à leur base, où l’on observe l’extrémité de la cheminée volcanique, le neck formé par un culot de lave. Plusieurs offrent deux ou trois cratères accolés tels sont les puys de Barme, de Montgy, de Montchier, qui ont dû fonctionner successivement ou simultanément.


Coulées. — Les coulées sont de nature différente. Si l’on place à part les volcans domitiques, on peut dire que les éruptions qui ont donné naissance à la chaîne des Puys ont fréquemment débuté par des éruptions basiques (basaltes inférieurs). Tel est le puy de Pariou, ceux de Côme, de la Nugère, de Louchadière. Puis sortirent des laves plus acides, des andésites (puys de Pariou et de la Nugère), des labradorites (puys de Côme, de Louchadière, de la Raviole). En dernier lieu il y eut une récurrence de laves basiques (basalte supérieur) (puys de la Vache, de Lassolas, petit puy de Dôme, Tartaret, etc.). Un même volcan a donné parfois des laves de deux ou trois natures différentes, souvent il n’a formé qu’une coulée, mais les plus importants en ont donné deux, trois (puys de Côme, Pariou, la Nugère). Les volcans de Barme et de Montgy sont des plus typiques à cet égard, car ils laissent voir les coulées superposées, de composition un peu variable et si bien conservées qu’on les croirait actuelles.

Les coulées couvrent souvent de vastes étendues, comme celles des puys de Côme, de Barme, de Louchadière, de plusieurs kilomètres de large et 5 à 8 kilomètres de long. Elles descendent parfois jusqu’à la Sioule. Vers l’est, au contraire, elles sont resserrées au fond de vallées étroites et profondes, à pente rapide, et constituent comme de longs boyaux de matières fondues qui n’ont pu s’étaler qu’en arrivant dans la plaine de la Limagne (coulée inférieure de la Nugère, du puy de la Raviole, du petit puy de Dôme, du Pariou).

Certaines de ces coulées constituent des régions arides, cahotiques, de véritables déserts de pierres, sur lesquels ne croissent que de.3 lichens et quelques mousses, et dont l’aspect sauvage et désolé tranche sur la contrée environnante généralement cultivée. Les cheires d’Aydat, celle de Louchadière dont le volume a été évalué 150.000.000 de mètres cubes et qui ne couvrent pas moins de 15 kilomètres carrés, sont des plus typiques à cet égard.


Hydrologie, glacières naturelles. — Si l’on songe que les courants de matières fondues se sont épanchés fréquemment dans des vallées, parcourues par des cours d’eau, il est permis de supposer qu’elles n’ont pas changé le réseau hydrographique de la région, et qu’elles n’ont servi que de toit, de voûte, aux ruisseaux dont les eaux doivent encore circuler au-dessous d’elles. C’est en effet ce que l’on observe, car à l’extrémité de la plupart des coulées on voit réapparaître ces ruisseaux qui constituent des sources d’une fraîcheur et d’une limpidité remarquables. Elles ont été, en effet, admirablement filtrées à travers les laves et les scories qui sont poreuses (sources de Royal., sous la coulée, du petit puy de Dôme ; sources de Nohanent, sous la coulée du Pariou sources de Sayat, Blanzat et Malauzat, sous la coulée du puy de la Raviole sources de Mazayes, sous la coulée de Louchadière, etc.). A la surface de certaines coulées il se produit un phénomène des plus curieux. Aux points où la couche de lave est peu épaisse et dans des cavités situées sur la coulée, l’eau monte à la surface par capillarité, en raison de la porosité de la lave. S’il fait très chaud, cette eau s’évapore rapidement en produisant un abaissement de température suffisant pour la congeler. Ainsi se forment des amas de glace durant les plus chaudes journées de l’été, pendant lesquelles l’évaporation est très active. Le fait peut être constaté près de Pontgibaud et de Chambois, dans la coulée de Louchadière ; dans la cheire d’Aydat et dans celle de la Nugère.

Petite chaîne des puys. — Il existe, à l’ouest de la vallée de la Sioule, une série de volcans (volcan de Banson, de Neufons, de Lavialle, de Chalusset), de direction générale N.S., comme ceux de la chaîne des Puys, mais moins bien conservés. Ils paraissent un peu antérieurs aux volcans à cratère et sont probablement d’âge pliocène supérieur. Leurs coulées ont été parfois assez fortement découpées par l’érosion. Ils forment une traînée éruptive, à laquelle je donne le nom de petite chaîne des Puys, car elle forme le pendant de la chaîne des monts Dômes par rapport à la Sioule.


Origine géologiques des lacs du massif du Mont-Dore et de la chaîne des Puys

Un grand nombre d’auteurs se sont occupés de cette question, en particulier Lecoq, MM. Delebecque et Berthoule. M. Boule en a, le premier, donné une classification rationnelle ; c’est elle que nous suivons ici.


1o Lacs ayant une origine volcanique

A) Lacs remplissant un cratère. — Un cratère affectant généralement la forme d’une coupe circulaire, le lac qui le remplit doit épouser cette forme. C’est ce que l’on constate dans le lac de la Godivelle d’en-haut. — La narse d’Espinasse, au pied du puy de l’Enfer, se présente dans les mêmes conditions, mais la moitié du cratère paraît avoir été emportée par explosion, de sorte que le lac, aujourd’hui réduit à un marécage, n’est bordé par le cratère que sur la moitié de son pourtour c’est une des raisons qui l’ont empêché de se maintenir à l’état de lac. Je place avec doute le lac de Servières dans cette catégorie je croirais plus volontiers qu’il occupe la dépression comprise entre les deux cônes volcaniques de Servières et de Comperet.

B) Cratères d’explosion ou d’effondrement. Ces lacs ont un faciès assez spécial ; ils se montrent avec des parois escarpées et présentent souvent une grande profondeur et un fond assez plat. Ils rappellent les lacs célèbres de Nemi et d’Albano dans les monts du Latium. M. Boule les regarde comme produits par effondrement. Les avis sont partagés à l’étranger sur l’origine des lacs analogues. Au type de ces lacs appartiennent le Pavin, au pied du puy de Montchalm, le gour de Tazenat, à l’extrémité nord de la chaîne des Puys et peut-être le lac Chauvet.

C) Lacs de barrage. — 1. Les coulées volcaniques se sont parfois étendues au travers d’une vallée qu’elles ont barrée, ce qui a permis à l’eau située en amont de s’accumuler devant cette digue et de former un lac. Ainsi ont pris naissance le gracieux lac d’Aydat formé par le barrage des coulées des puys de la Vache et de Lassolas, les lacs de la Cassière, de Côme, de Guéry, de La Landie. Les lacs anciens de Randarnne, de Verneuges, de Ceyssat, aujourd’hui asséchés et remplis de randannite et de tourbe, peuvent être classés dans la même catégorie.

2. D’autres fois, c’est un cône volcanique qui s’est dressé au milieu de la vallée et a retenu les eaux venant de l’amont. Les lacs Chambon et de Montcineyre sont dans ce cas. Il est bon de remarquer ici que ces lacs ne peuvent pas persister aussi longtemps que les précédents, car la digue qui leur sert de limite est formée de substances poreuses et éminemment meubles, comme les scories volcaniques. C’est ce qui s’est produit au lac Chambon, qui était jadis plus étendu, puisqu’il atteignait le village du Chambon. Ces lacs sont destinés à disparaître dans un temps peu éloigné.

3. Il arrive maintes fois que les coulées volcaniques en se juxtaposant délimitent des espaces creux plus ou moins étendus dans lesquels l’eau vient s’accumuler pour former des lacs, des étangs, des mares. Un grand nombre de dépressions de cette nature s’observent sur les flancs sud du mont Dore et sur ceux du Cézallier. Il faut citer les lacs de Bourdouze, des Esclauzes, de Chambedaze et de la Godivelle d’en-bas.

Une même coûtée volcanique par son bossellement, son irrégularité, présente aussi dans certains cas des cuvettes naturelles retenant l’eau de pluie. Ainsi se forment des marécages qui peuvent ensuite s’assécher, et dans lesquels se dépose la tourbe, la randannite, comme dans l’ancienne coulée du puy de la Vache, à Rouillat.

2o Lacs d’origine glaciaire

D’après M. Boule ces lacs ne se rencontreraient que sur les plateaux où l’on observe des traces d’une puissante extension glaciaire, antérieure au creusement des vallées actuelles. Ils seraient formés en partie par des barrages morainiques et en partie par des excavations pratiquées dans la roche dure (gneiss ou basalte). Autrefois beaucoup plus nombreux, ils ont été en partie transformés en tourbières. Les lacs de la Crégut, de Laspialade, des Bordes, se présentent de cette façon.


(Extrait du Bulletin de l’Académie des Sciences, Belles-lettres et Arts de Clermont-Ferrand, 1903)


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CLERMONT-FERRAND, IMPRIMERIE L. BELLET
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  1. Cette courte esquisse, dans laquelle on n’a pu donner d’indications bibliographiques, a paru au commencement de l’étude de MM. Bruyant et Eusébio intitulée : Introduction à l’Aquicuiture générale en Auvergne ; étude couronnée par la Société centrale d’Aquiculture de France au concours de 1902 (1re médaille d’or).