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Histoire financière de la France/Chapitre V

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CHAPITRE V.


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Règne de Charles-le-Sage.


1384 - 1380.


SOMMAIRE.


Abus et déprédations réprimés. — Réformateurs envoyés dans les provinces. - Protection accordées l’agriculture. - L'instruction publique et le commerce encouragés par des immunités. - Marque d’or et d’argent. - Réforme des monnaies. - Juifs admis à posséder des biens-fonds. - Appel des provinces cédées aux Anglais, à l’occasion d’une imposition établie arbitrairement par le prince de Galles. - Fouage ou taille par feu établie à la suite d’une assemblée de notables tenue en grand parlement ou lit de justice. - Premier exemple de dotation de la liste civile. - Budget de dépenses publiques. - La royauté remise en possession de la nomination aux places de finances; du recouvrement et de l’emploi des revenus publics. - Collecteurs nommés par les taillables et solidarité des habitants. - Généraux des finances et généralités. - Élus royaux et pays d’élection. - Le parlement n’est encore qu’un corps judiciaire. - Succès obtenus sur les Anglais. - Abolition du fouage. - Trésor formé par Charles V.


1364.— Les premiers soins de Charles V, à son avénement au trône, se portèrent vers les finances, qu’il trouva dans le plus grand désordre. La pénurie du trésor, les retards qu'éprouvait la paye des gens d’armes, les excès qui en résultaient, et les plaintes qui s’élevaient de toutes parts, témoignaient hautement contre les « deliz, exacions, fraudes, baraz, malices, roberies, pilleries et rapines, » que commettaient les préposés à l’établissement, à la répartition, au recouvrement ou à l’emploi des deniers publics, sans exception des officiers royaux, qui, tous, détournaient et appliquaient à leur profit la substance du peuple, « par leurs mauvaises convoitises, par cauteles, voyes diverses et malices exquises. » Le roi s'occupa de rendre les impôts moins onéreux et plus productifs par la suppression de certaines immunités usurpées, par la réduction des gages et du nombre des agents du fisc, et par la diminution de moitié du droit sur le sel; modération qu’il accorda à la prière des membres d’une assemblée fut convoquée à Compiègne (1367). Il interdit aux gens d’église, aux nobles, et à ses officiers, de se rendre cautions des fermiers des aides. En même temps les revenus de la couronne s’augmentaient par la réunion au domaine des biens et droits qui en avaient été détachés à titre de donations depuis le règne de Philippe-le-Bel, et par une administration meilleure. Des règlements fixaient les époques de paiement de l’impôt, les frais d'exécution, les modes acquittement des assignations, des versements au trésor, et d’apurement des gestions. Des réformateurs eurent commission d’aller dans les provinces pour y rechercher les malversations qui se commettaient dans les finances, dans les forêts, dans la marine, dans la revue des troupes, avec l’autorisation d'appeler les récompenses du monarque sur les agents fidèles, et de punir aussitôt les coupables par la pertes de leurs charges, sans avoir égard aux sollicitations des princes du sang, ou des membres du conseil. Enfin, pour la première fois depuis le commencement de la monarchie, peut-être, les dépenses publiques furent réglées annuellement, et des fonds affectés à chaque branche de service[1].

Le roi favorisa l’agriculture en protégeant les cultivateurs vassaux contre les exigences des seigneurs et des officiers de sa maison. Pour ranimer le commerce, il donnait des édits de protection en faveur des marchands italiens, espagnols, portugais, qui fréquenteraient les ports, ou qui s’établiraient dans les villes du royaume; il leur accordait l’exemption des droits de péages, travers et chaussées, dus tant au domaine qu'aux seigneurs, et prononçait de nouveau l’abolition de tous les péages qui, n’étaient pas justifiés par leur ancienneté. Les manufacturiers furent assujettis à des règlements qui, à l’imitation de ceux de Saint-Louis, n’eurent pour objet que de conserver la bonne qualité dans la fabrication des étoffes. Dans la vue encore de propager l'instruction publique et la culture des lettres, les écoliers de l’université furent déclarés exempts des aides sur les denrées qu’ils achetaient pour leur consommation et sur celles qu’ils récoltaient; l’immunité s’étendit aux livres, enluminures et parchemins qui leur étaient nécessaires. On renouvela les ordonnances rendues sous le règne précédent pour soumettre l'orfèvrerie à des essais et à des marques légales, qui, en garantissant aux métaux mis en œuvre la finesse du titre, assurèrent à cette branche de l'industrie nationale la supériorité quelle conserve encore en Europe. Enfin, une refonte générale des monnaies, par laquelle le prix donné aux espèces fut rapproché de la valeur marchande de la matière, mit le commerce à l'abri des pertes que lui faisaient éprouver les mutations fréquentes du signe monétaire.

La condition des juifs éprouva quelques changements par la faculté d’acquérir des biens-fonds, laquelle ne leur fut accordée et conservée que moyennant de fortes taxes et des redevances annuelles pour tenir lieu des impôts qu’ils ne devaient pas supporter.


1369.- Cette administration ferme et éclairée, tant de soins donnés au bonheur public, que secondaient les vues d’une sage politique, et les ressources de économie, acquirent à Charles V l’affection de ses sujets et la confiance des seigneurs tant dans les provinces conservées à la couronne que dans celles qui avaient été cédées à l’Angleterre par le traité se Brétigny. Celles-ci formaient, avec la Guyenne, le duché d’Aquitaine, que gouvernait le prince de Galles. Les frais d’une expédition malheureuse en Castille et le faste que ce prince déployait à sa cour avaient obéré son trésor. Pensant que ses nouveaux sujets se prêteraient à le remplir, dans une assemblée ou parlement de barons qui fut tenue à Niort, il demanda l’établissement d’un fouage, ou imposition par feu, sous la condition expresse que durant sept années les monnaies ne subiraient aucune altération. Plusieurs provinces accédèrent, non sans quelque résistance, à ces propositions. Dans les autres, les hauts barons refusèrent leur consentement à l’impôt, et rappelèrent au prince le serment qu’il avait fait de maintenir les immunités et franchises dont jouissaient leurs terres. Ces représentations mal accueillies furent suivies d'émeutes populaires. Aussitôt plusieurs seigneurs; d’accord avec la noblesse, les prélats et les communautés, portèrent leurs plaintes au roi de France comme au légitime souverain, et formèrent un appel au parlement de Paris des violences exercées par le gouverneur d’Aquitaine. Cette démarche, si elle était accueillie, menaçait d’une rupture avec le prince de Galles et avec le roi père. Charles V, quoiqu’il fût en mesure d’entreprendre la guerre, voulut avoir l'avis des trois ordres de l’état avant d’adopter une résolution. Il convoqua donc au parlement un conseil extraordinaire où siégèrent, avec les magistrats et les princes du sang, des membres des trois ordres. L’assemblée, consultée au sujet de l’appel, répondit que le roi n’avait pu le rejeter, et que, si les Anglais en prenaient occasion de lui déclarer la guerre, elle serait injuste[2].

1370.- Une rupture ouverte suivit de près cette détermination. A la demande du roi l’assemblée régla qu’il serait ajouté aux droits établis sous le règne précédent une nouvelle imposition d’un sou pour livre sur les sels, du treizième sur le vin vendu en gros, du quart du vin vendu en détail, et un fouage, ou taille par feu, fixé à raison de six francs dans les cités, et de deux francs dans les campagnes. On établi des droits d'entrée dans quelques villes : ils furent fixés pour Paris à quinze sous par queue de vin de France, et à vingt-quatre sous par queue de vin de Bourgogne. La nation, bien persuadée des bonnes intentions et de la sage administration du roi, ratifia par son empressement à payer ces nouveaux impôts les dispositions des députés[3].

1372.- Le produit de la gabelle fut affecté à l’entretien de la maison du roi et de la reine, premier exemple de cette dotation du trône et de la famille royale sur le produit des subsides généraux, à laquelle on a donné dans la suite le nom de liste civile[4].
Dans certaines provinces les nobles obtinrent pour eux et pour leurs hommes d’armes l’exemption des aides de guerre moyennant un don en argent comptant qu’ils firent au roi. A l’occasion de ce nouveau subside, Charles V se remit en possession du droit de nommer les agents des finances et d’assurer le recouvrement des taxes, retirant ainsi aux communes une prérogative dont les états-généraux tenus sous le roi Jean avaient dépouillé la couronne. Dans les pays d’états, cependant, le recouvrement continua d’être fait par des préposés au choix des provinces, et elles ne consentaient les subsides qu’à cette condition[5].

Les gabelles, les aides, dénomination qui s’appliquait dès lors plus particulièrement aux droits sur les boissons, furent affermées séparément par diocèse. On afferma pareillement l’imposition foraine établie sur les denrées et marchandises qui exportaient des pays d’aides à l’étranger, ou dans les provinces non soumises aux aides; mais à cette occasion les vins, le blé, la laine et le sel furent exceptes de la taxe. En même temps le roi établit, dans chaque siège d’évêché, deux élus qui étaient chargés de l'adjudication des droits affermés; de l’assiette des tailles sur les paroisses; de la surveillance du recouvrement; du choix, parmi les sergents royaux, de ceux qui seraient nécessaires pour les contraintes, et de la fixation du salaire de ces agents. Ces élus royaux jugeaient encore en première instance les questions contentieuses relatives aux impositions de tous genres; mais ces officiers n’avaient de commun que le nom avec les asséeurs dont Saint-Louis avait accordé le choix aux taillables, et qui avaient la répartition entre les imposables de la somme assignée à chaque paroisse. Charles V respecta cette institution. Il ordonna encore que les collecteurs de l’impôt seraient choisis par les habitants des lieux mais sous la condition que ceux-ci répondraient de leur gestion. Ainsi s’établit la solidarité des taillables pour le collecteur, solidarité qui devint dans la suite une cause de ruine pour les habitants des campagnes.

La hiérarchie financière se trouva complétée par la confirmation d’un petit nombre de trésoriers pour le domaine, et de receveurs particuliers des autres impôts. En même temps, et eu égard aux plaintes qui s’élevaient contre les officiers des finances, le roi ordonna de nouveau qu’ils seraient « visités dans leurs œuvres et gouvernements, et que ceux qui ne seraient pas trouvés suffisants en discrétion, loyauté diligence, ou qui n'exerceraient pas leurs offices en personne seraient remplacés. » A ces moyen d’une sage surveillance on ajouta l'indication des formalités dont devaient être revêtus les registres que les receveurs enverraient à la chambre des comptes pour justifier du résultat de leur gestion.

Le roi conserva l’institution des généraux des finances, en réduisant toutefois à quatre le nombre de ces officiers. Ils continuèrent d’être chargés de la réunion et de la direction des deniers perçus et du soin de rendre la justice en dernier ressort sur le fait des impôts. Afin de mieux remplir leurs fonctions, les généraux se partagèrent la France en quatre arrondissements. Cette division devint l’origine des généralités, dont le nombre fut augmenté de beaucoup dans la suite; et la création des élus royaux procura le nom de pays d'élection aux provinces du royaume où ces Officiers furent établis.


1372.- L'assemblée qui accorda à Charles V les subsides a la suite eut lieu l'organisation financière dont il vient d’être parlé ne ressemblait en rien, quant au mode de nomination de ses membres, aux assemblées qui avaient été réunies précédemment sous le nom d'états-généraux : celle-ci était plus exactement une réunion de personnages notables choisis parmi les prélats, les seigneurs et les bourgeois de Paris, qui, réunis aux premiers magistrats du royaume, s'assemblèrent dans le lieu même des séances du parlement, « le roi séant en son lit de justice [6] [7]. »

Ce changement, si important pour ses conséquences, fut tout entier l’effet de la sage circonspection de Charles V. Il appartenait peut-être à ce prince habile de consolider par des institutions durables l’édifice financier dont les bases avaient été jetées par Philippe-le-Bel, en déterminant la part que la nation, représentée par les députés des trois ordres, devait prendre dans le vote des impôts. Mais au moment d'une nouvelle guerre avec un prince puissant qui élevait des prétentions à la couronne de France, sans cesse inquiété par les complots du roi de Navarre, éclairé d'ailleurs par sa propre expérience sur l’influence dangereuse des factieux dans une assemblée publique, Charles V avait à craindre, en convoquant les états-généraux, d’exposer le royaume au renouvellement des troubles qui avaient agité sa régence. Ces considérations durent conduire le monarque à désirer une assemblée, conservant aux yeux de la multitude l’image de la représentation nationale introduite sous Philippe-le-Bel, et maintenue depuis, assurât cependant une entière déférence à des demandes qui, de sa part, n’avaient que le bien public pour objet. Cette assemblée se trouva dans la réunion de personnes attachées au roi on désignées par lui, et de magistrats à sa nomination, qui délibéraient en sa présences.

Quels que soient les motifs qui aient porté Charles V à modifier la forme des assemblées qui semblaient investies du droit de délibérer sur des premiers intérêts des peuples, il est certain qu’une innovation conseillée par la prudence, mais qui ne devait être qu'exceptionnelle et seulement suspensive, priva la France d’un droit public en matière d’impôt, et que l’absence de ce droit, déjà établi par la possession, contribua aux malheurs qui signalèrent les deux règnes suivants. De ce moment, en effet, datent et l’usage de substituer aux convocations d’états-généraux les assemblées des notables, d’autant plus dociles en fait d’impositions publiques qu’ils n’y contribuaient que faiblement pour la plupart, et l’usage plus commode encore pour le gouvernement de considérer comme légalement établis les impôts demandés, lorsque les actes contenant l’expression de sa volonté avaient été enregistrés dans les parlements du royaume. Ces parlements, au temps de Charles V, étaient bien différents déjà des réunions connues sous le même nom dans les premiers siècles de la monarchie. Celles-ci, composées de nobles guerriers et de prélats assemblés chaque année aux champs de mars et de mai, décidaient de la paix et de la guerre, et des dons à faire au roi, qui les présidait à elles s’occupaient d’affaires générales, mais elles ne connaissaient pas des intérêts privés. Les derniers parlements, au contraire, dont on attribue l’institution à Pepin, et qui durent des améliorations à Saint-Louis, ne furent originairement qu’un tribunal d’appel que la sagesse des rois ouvrit à leurs sujets, victimes de la partialité des baillis ou autres juges seigneuriaux. Ce tribunal était le propre conseil du roi, et le suivait partout. Les barons continuèrent d’abord d’en faire partie ; mais, appelés par inclination, autant que par habitude, à la profession des armes, qui ne demandait que de la bravoure, ils étaient illettrés. Il fallut bien choisir dans les classes inférieures des adjoints plus instruits ; et, lorsque Philippe-le-Bel eut rendu les parlements sédentaires, en instituant des cours à Paris, à Rouen, à Troyes et à Toulouse, la retraite absolue des seigneurs laissa les assesseurs naturellement investis du droit exclusif de rendre la justice au peuple[8].

Le sage Charles V n’attribua pas toutefois la délibération en matière d’impôts à cette cour de judicature. Les magistrats du parlement ne formaient, ainsi qu’on l’a vu, qu’une partie des assemblées, tenues par ce prince sous le nom de grands parlements ou de lit de justice. Mais pendant les malheurs du règne suivant, cette cour, ayant acquis une importance politique, se ménagea pour un temps plus éloigné la prérogative d’autoriser seule le recouvrement des impôts créés par l’autorité royale ; et les princes durent adopter volontiers ce moyen d’obtenir des ressources sans recourir à la convocation toujours inquiétante des notables ou des états-généraux. Docile d’abord à la volonté des rois, le parlement ne profita des circonstances favorables qui s’offrirent que pour faire jouir ses membres des exemptions des charges publiques qui formaient privilège de la noblesse, qu’il avait remplacée. Dans la suite, il s’habitua, au nom du peuple, à une résistance souvent inutile, plusieurs fois réprimée, mais qui, devenant d’autant plus forte qu’elle eut à défendre les intérêts même de la compagnie, finit par avoir les conséquences les plus funestes pour l’état et pour la royauté.


1375. — Après six années de guerre, durant laquelle les Anglais, plusieurs fois battus par le connétable Bertrand Duguesclin, perdirent tout ce qu’ils avaient conquis sous les règnes précédents, à l’exception de Calais, une, trève de deux ans fut conclue. Charles profita de ses loisirs pour étendre et consolider par de nouveaux règlements les réformes qu’il avait introduites dans l’administration du royaume, et auxquelles résistèrent encore les habitudes vicieuses des financiers, favorisés par un relâchement de surveillance inséparable d’une guerre dont les provinces avaient été le théâtre. Un grand nombre de villes du midi, qui s’étaient déclarées pour le roi à l’époque de la rupture avec l’Angleterre, obtinrent, en récompense, des privilèges, dont le plus profitable fut la liberté accordée à leurs habitants de commercer librement dans toute la France, sans payer aucun droit pour les marchandises qu’ils achèteraient. Le roi essaya d'introduire quelque discipline parmi les gens de guerre qui désolaient l’habitant des campagnes, et prépara l’établissement d’une armée permanente en affectant le produit des fouages au paiement des troupes.


1377. — A l’expiration de la trève, cinq armées attaquèrent à la fois les places et les corps de troupes que l’Angleterre avait en France ou dans la Bretagne, en même temps que des galères construites pour la première fois dans nos ports, et qui déjà avaient détruit une flotte anglaise, débarquaient en Angleterre des troupes qui portèrent la guerre et le pillage sur le territoire ennemi.


1580. — Partout des succès dus à l’habileté des combinaisons semblaient présager une paix glorieuse et l’affranchissement du sol de la France; mais elle ne devait pas recueillir les avantages que lui promettait la bonne administration d’un prince « qui ne trouvait les rois heureux qu’en ce qu’ils avaient le pouvoir de faire du bien. » Ce monarque, à qui la postérité décerna le surnom de Sage, mourut des suites du poison que lui avait fait donner Charles-le-Mauvais.

La somme que les impôts rendaient au trésor, déduction faite de tous les prélèvements pour frais de recouvrement de régie, s’élevait à un million six cent mille livres environ en écus d’or.

Charles V marqua le dernier jour de sa vie par des lettres qui portaient à la fois la remise de tout ce qui restait dû sur les fouages, l’abolition de cet impôt, et l’ordre de ne plus le rétablir dans le royaume[9]. Précédemment, par un règlement concernant l’ordre à observer dans l'administration des finances pendant la minorité de son fils, il avait ordonné que ce qui resterait chaque année des revenus de l'état, après l'acquittement des dépenses, serait confié à la garde de magistrats qu’il nommait. Lui-même, par de semblables réserves annuelles, avait formé, en riches meubles et en lingots, un trésor que les chroniques évaluent à dix-huit millions, somme énorme pour le temps, si elle n’était pas évidemment exagérée. Cette accumulation de richesses que justifient à peine les grands desseins que Charles-le-Sage avait conçus pour l’expulsion entière des Anglais ne devait pas profiter à l'état.


  1. Ordon. du Louvre, t. 4, 5, 6 et 17.
  2. Ordon. du Louvre, t. 6, préface. - Chronique de Froissard, t.1. - Mézerai; etc.
  3. Ordon. du Louvre, t. 6, p. 508, 2 et suiv., 68, 157, 441, 554, et cxxv, à la table. - Pasquier, t. 1, p. 90. «Le Guydon général des finances, p. 153.
  4. Dans une ordonnance portant. règlement sur les finances, donnée par Charles V le 13 novembre 1371 on trouve une désignation des dépenses publiques à la charge du trésor et l'indication des gouvernements sur lesquels le paiement de chaque branche de service était assigné. L'extrait suivant de l’ordonnance peut être considéré comme le budget de cette époque :
    Art.18 Assignations pour le paiements
    de gens d'armes
    L m. francs
    50,000 f.
    19. Assignations pour le paiement
    de gens d'armes et arbalestriers
    de nouvelle formation
    XLII
    42,000
    Id. Pour le faict de mer VIII
    8,000
    20. Pour l'ostel du roy VI
    6,000
    id. Pour mettre es coffres du roi V
    5,000
    A reporter
    CXI m. francs
    111,000 f.
    D’autre part
    CXI m. francs
    111,000 f.
    Art. 21. Il plaist au roy que le receveur
    general ait chascun mois pour
    les choses qui surviegnent
    chascun jour en la chambre
    X
    10,000
    Id. Pour payer les dettes X
    10,000
    Total CXXXI m. francs
    131,000 f.

    En admettant, comme permet de le faire l’explication donnée par l’article 21, que cette distribution fût celle des assignations mensuelles, on pourrait en inférer que les dépenses. générales de l’état que payait le trésor s’élevaient annuellement à la somme de un million cinq cent soixante-douze mille francs en écus d’or, dont soixante-douze mille étaient affectés aux dépenses du roi, de la reine et du dauphin. Cette conjecture est fortifiée par la disposition que contient l’art. 23 du même règlement.

  5. Ordon. du Louvre, t. 6, p. 155.
  6. Pasquier, t. 1, p. 87, D. — Mézerai. - Anquetil.
  7. Nos rois siégeaient en lit de justice sur un trône couvert d’un dais, connu alors sous le nom de lit : de là le nom de lit de justice donné à ces assemblées. La délibération y fut d'abord libre, et chacun donnait son avis à haute voix. « Lorsqu’en 1396, Charles VI tint son conseil en la chambre de parlement, et que, pour ce, y fut dressé son lict de justice, le roi requit tous les dessusdists par leur loyauté et par le serment qu’ils avoient et ont à lui, que loyalement, en leur honneur et comme tenus y sont, ils le consultassent en tout ouvertement. » Henri II paraît avoir le premier porté atteinte au précieux et important usage de délibérer et de voter hautement. Dans une séance tenue en 1559, ce prince lit arrêter deux conseillers qui, nous la foi publique, et même sur sa parole, avaient dit librement leur avis en sa présence : dès lors la liberté des délibérations s’anéantit insensiblement. Le chancelier venait dans les rangs prendre la voix, que chacun lui donnait tout bas; et le roi n'entendait des avis que ce que le chancelier venait lui rapporter.
  8. Montesquieu, Esprit des lois. — Généralité de Paris. — Hist. du parlement.
  9. Ordon. du Louvre, t. 6, préface, p. xj et xvij; note 3, p. zvij; table, p. clxxxj ; note e, p. 554; t. 7, p. 710, et t. 6, p. ix et 47. «-Moreau de Beaumont, t. 2, p. 154.