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L’Émigré/Lettre 024

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P. F. Fauche et compagnie (Tome Ip. 226-228).


LETTRE XXIV.

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le Marquis de St. Alban
au
Président de Longueil.


Je m’empresse de vous apprendre, mon cher Président, que votre amie est retrouvée. Madame de Montjustin vous écrit par le courrier une lettre qui vous apprendra comment je l’ai rencontrée, et ne vous laissera rien ignorer de tout ce qui l’intéresse. Les maîtres de la maison, instruits de l’état de la marchande de fleurs, l’ont accueillie avec la plus grande considération. Le titre de Duchesse n’a pas été auprès du bon Commandeur une faible recommandation ; mais il a fallu bien peu de temps à madame de Montjustin pour exciter ensuite pour sa personne le plus vif intérêt, et même de l’admiration. Madame la comtesse de Loewenstein, à qui je parle souvent de vous, est enchantée de la connaissance de la Duchesse, et partage votre joie. Je voudrais, m’a-t-elle dit, être à sa place pour éprouver tout ce que l’amitié doit avoir de plus doux, dans un moment ou l’on revoit une personne pour qui on a tremblé tant de fois. Madame de Loewenstein est avide de sentimens, comme un ambitieux l’est d’honneurs et de distinctions, un avare d’argent ; jugez par là, mon cher Président, du bonheur d’un homme qui aurait excité dans son ame un tendre sentiment. S’il suffit d’en connaître l’étendue pour le mériter, personne n’en est plus digne que votre ami. Chaque jour me fait découvrir de nouvelles qualités dans cette intéressante femme. Le charme de sa société écarte loin de moi jusqu’à l’idée du malheur. Je crois être dans un séjour enchanté, et chaque jour que j’ai à rester ici, est une partie d’un trésor dont je regrette d’avance la perte. Je vois avec peine avancer ma guérison, quand je songe qu’elle sera le terme de mon bonheur. Adieu, mon cher Président, je finis à votre exemple en disant. Vale et ama.

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