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L’Encyclopédie/1re édition/DENSITÉ

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DENSITÉ, s. f. (Physique.) est cette propriété des corps, par laquelle ils contiennent plus ou moins de matiere sous un certain volume, c’est-à-dire dans un certain espace. Ainsi on dit qu’un corps est plus dense qu’un autre, lorsqu’il contient plus de matiere sous un même volume. La densité est opposée à la rareté, Voyez Rareté & Condensation.

Par conséquent, comme la masse est proportionnelle au poids, un corps plus dense est d’une pesanteur spécifique plus grande qu’un corps plus rare ; & un corps est d’autant plus dense, qu’il a une plus grande pesanteur spécifique. La densité & le volume des corps sont deux des points principaux sur lesquels sont appuyées les lois de la méchanique : c’est un axiome, que les corps d’une même densité contiennent une quantité de masse égale sous un même volume. Si les volumes de deux corps sont égaux, leurs densités sont comme leurs masses ; par conséquent les densités de deux corps d’un égal volume, sont entr’elles comme leur poids. Si deux corps ont la même densité, leurs masses sont comme leurs volumes ; & par conséquent les poids des corps de même densité, sont entr’eux comme leurs volumes. Les masses de deux corps sont entr’elles en raison composée de leurs densités & de leurs volumes : par conséquent leurs poids sont aussi entr’eux dans ce même rapport ; & si leurs masses ou leurs poids sont les mêmes, leurs densités sont en raison inverse de leurs volumes. Les densités de deux corps sont entr’elles en raison composée de la directe de leurs masses & de l’inverse de leurs volumes. Toutes ces propositions sont aisées à démontrer par les équations suivantes. La densité d’un corps est le rapport de sa masse (c’est à-dire de l’espace qu’il occuperoit, s’il étoit absolument sans pores) à son volume, c’est-à-dire à l’espace qu’il occupe réellement. Donc nommant D la densité, M la masse, V le volume, on a  ; donc pour un autre corps on a  ; donc , &  ; d’où l’on tire toutes les propositions précédentes. Voyez Masse.

Les Péripatéticiens définissent la densité une qualité secondaire, par laquelle un corps est plein de lui-même, ses parties étant adhérentes les unes aux autres sans aucun interstice. Ainsi la forme de la densité consiste, selon ces philosophes, dans l’adhérence immédiate que les parties ont entr’elles : c’est pour cela que Porphyre dans ses prédicamens définit un corps dense, celui dont les parties sont si près l’une de l’autre, qu’on ne peut interposer aucun corps entr’elles : mais il n’y a point de tel corps.

Ces philosophes attribuent ordinairement la cause de la densité au froid ; Scaliger & quelques autres l’attribuent à l’humidité. Ne seroit-il pas plus sage d’avoüer son ignorance ? Plusieurs d’entre les philosophes modernes prétendent que la petitesse des parties des corps contribue beaucoup à leur densité, parce que les pores deviennent par ce moyen plus petits. Cependant ces philosophes ajoûtent que la densité des corps ne dépend pas seulement de la petitesse des pores, mais aussi de leur petit nombre, &c.

En effet, on est si éloigné aujourd’hui d’admettre des corps absolument denses dans le sens des anciens, que l’or même, qui est le plus dense & le plus pesant de tous les corps, contient, selon l’observation de M. Newton, beaucoup plus de vuides & de pores, que de substance. Voyez Pore, Or, &c.

Quand les pressions de deux liquides contenus dans des vases cylindriques sont égales, les quantités de matiere sont égales : par conséquent si les colonnes ont des bases égales, les volumes des fluides, c’est-à-dire les hauteurs des colonnes sont en raison réciproque des densités. On peut déduire de ce principe une méthode pour comparer ensemble des liqueurs différentes ; car si on verse différens fluides dans des tuyaux qui communiquent entr’eux, & que ces fluides s’y mettent en équilibre, leurs pressions sont égales ; & on trouve par conséquent le rapport des densités, en mesurant les hauteurs.

On peut comparer aussi les densités des fluides, en y plongeant un corps solide ; car si on plonge successivement dans les liquides qu’on veut comparer un corps solide qui soit plus leger qu’aucun de ces liquides, les parties de ce solide s’enfonceront entr’elles en raison inverse des densités des liquides. En effet il est évident par les principes de l’Hydrostatique, que la partie déplacée dans chaque fluide sera toûjours d’un poids égal au solide qui y est plongé ; ainsi cette partie déplacée, qui est égale à la partie enfoncée du corps, sera du même poids dans tous ces fluides, & sera par conséquent en raison inverse de la densité. Voyez Fluide, Aréometre, Balance hydrostatique.

La densité de l’air a été l’objet des recherches des Philosophes depuis l’expérience de Toricelli & l’invention de la machine pneumatique. Voyez Air, Raréfaction, & Condensation.

Il est démontré que dans le même vaisseau ou dans des vaisseaux différens qui communiquent entr’eux, l’air est de la même densité à la même distance du centre de la terre. La densité de l’air en général est en même raison que les poids dont on le charge, ou les puissances qui le compriment. Voyez Pression.

C’est pour cette raison que l’air d’ici-bas est plus dense que l’air supérieur ; cependant la densité de l’air d’ici-bas n’est pas proportionnelle au poids de l’atmosphere, à cause du froid & du chaud qui alterent sensiblement sa densité & sa rareté. Si l’air devient plus dense, le poids des corps qui s’y trouvent diminue ; si l’air devient plus rare, ce même poids augmente, par la raison que les corps perdent plus de leur poids dans un milieu plus pesant que dans un autre plus leger.

Par conséquent, si la densité de l’air est sensiblement altérée, des corps qui étoient également pesans dans un air plus leger, & dont la pesanteur spécifique est considérablement différente, ne seront plus en équilibre dans un air plus dense, & celui qui est spécifiquement plus pesant l’emportera. C’est sur ce principe qu’est fondé le manometre ou instrument pour mesurer les changemens de densité de l’air. V. Manometre. (O)