L’Encyclopédie/1re édition/RONDE

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RONDE, figure, (Littérat.) Eustathe prouve dans ses remarques sur Homere, que la figure ronde étoit celle que les anciens estimoient le plus. Ils la regardoient comme sacrée, & par cette raison ils faisoient leurs autels ronds, leurs tables rondes, & plantoient en rond les bois sacrés. (D. J.)

Ronde s. f. en Musique, est une note blanche & ronde sans queue, ainsi figurée O ; qui vaut une mesure entiere à quatre tems, c’est-à-dire, deux blanches ou quatre noires. La ronde est de toutes les notes en usage, celle qui a le plus de valeur ; autrefois au contraire elle étoit celle qui en avoit le moins, & elle s’appelloit semi-breve. Voyez Semi-breve & Valeur des notes. (S)

Ronde, s. f. terme militaire, qui signifie le tour ou la marche que fait un officier accompagné de soldats autour des remparts d’une ville de guerre pendant la nuit, pour voir si chacun fait son devoir, si les sentinelles sont éveillées, & si tout est en bon ordre. Dans les garnisons exactes la ronde marche tous les quarts d’heure, de sorte qu’il y a toujours quelqu’un sur le rempart. Voyez Mot. L’officier qui fait sa ronde, porte du feu, ou il en fait porter pour examiner plus exactement les différens postes qu’il doit visiter.

Ronde major, est celle que fait le major. Lorsque la ronde-major arrive à un corps-de-garde, la sentinelle qui est devant les armes, dès qu’elle l’apperçoit, lui demande qui va la ? on répond ronde-major. La sentinelle lui crie, demeure-là ; caporal hors de la garde. L’officier qui commande la garde, se présente accompagné de deux fusiliers qu’il place derriere lui, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche, présentant leurs armes ; il a aussi avec lui le sergent portant hallebarde, & le caporal de consigne qui porte le fallot. L’officier demande, qui va là ? on lui répond, ronde-major, il dit, avance qui a l’ordre. Le major avance, & l’officier, après avoir reconnu si c’est lui-même, ou l’aide-major de la place, lui donne le mot à l’oreille. Le major peut compter les soldats de garde, & visiter leurs armes. Cette ronde se fait pour visiter l’état des corps-de-garde & des sentinelles, savoir si tous les officiers & soldats sont à leurs postes, & si le mot est bon par-tout. C’est pourquoi il faut que le major visite les armes, & compte les soldats, & que l’officier lui donne le mot lui-même ; car autrement comment le major peut-il savoir si l’officier a le mot, comme il a été donné au cercle, si l’officier ne le lui donne ainsi ? Non-seulement l’officier doit donner le mot au major, mais encore dans la regle le major ne doit le recevoir que de lui ; l’officier doit bien reconnoitre, avant de donner le mot, si c’est le major, ou l’aide-major de la place, qui fait la ronde, & si sous ce prétexte quelqu’un ne vient pas surprendre l’ordre, & savoir l’état de la garde & des sentinelles. C’est pour cette raison qu’il fait porter le fallot, & les fusiliers qu’il prend, sont pour sa sûreté & celle de son poste. Aussi n’est-il obligé de donner l’ordre au major qu’à la premiere ronde qu’il fait, & qu’on appelle ronde-major ; & s’il en vouloit faire une seconde, il faudroit qu’il donnât lui-même l’ordre au caporal, qui viendroit le recevoir, comme une simple ronde. Lorsque le major a fait sa ronde, il va chez le gouverneur lui rendre compte de l’état où il a trouvé les postes. Il doit ensuite aller porter l’ordre au lieutenant de roi, s’il est dans la place, quoique le gouverneur soit présent.

Lorsqu’on dit que le major fait sa ronde, des que l’ordre est donné, on entend seulement qu’il ne l’a fait qu’après. Car il n’y a point pour lui d’heures prescrites. Il est bon même qu’il la fasse à des heures incertaines, afin de tenir toujours le corps-de-garde alerte ; mais il faut toujours qu’il fasse la premiere pour vérifier l’ordre dans tous les corps-de-garde.

L’officier doit aussi recevoir de la même maniere la ronde du gouverneur & celle du lieutenant de roi. Augmentant le nombre des fusiliers avec lesquels il la reçoit, à proportion de la dignité de celui qui la fait ; & s’ils la faisoient plusieurs fois dans une même nuit, il doit toujours la recevoir de la même maniere.

L’inspecteur général qui se trouve dans une place, peut aussi faire sa ronde, l’officier doit lui donner le mot, sans que l’inspecteur soit obligé de mettre pié à terre, s’il est à cheval. L’inspecteur particulier peut aussi faire la sienne ; mais il est reçu par un caporal, comme une simple ronde.

A l’égard des simples rondes, dès que la sentinelle qui est devant le corps-de-garde, les voit paroître, elle leur demande, qui va là ? on lui répond ronde. La sentinelle leur crie, demeure-là ; caporal hors de la garde, ronde. Le caporal de poste vient recevoir la ronde, & demande qui va-là ? on lui répond, ronde. Il dit, avance qui a l’ordre. La ronde avance, & donne le mot à l’oreille au caporal qui le reçoit l’épée à la main, la pointe à l’estomac de la ronde. Si le mot est bon, le caporal reçoit le numéro, & le fait mettre dans la boëte ; il fait signer celui qui fait la ronde, suivant l’usage particulier de la garnison, & la laisse passer. Si le mot n’est pas bon, il doit l’arrêter, & en rendre compte à l’officier qui examine ce que c’est.

Lorsque deux rondes se rencontrent sur le rempart, celle qui la premiere a découvert l’autre, a droit d’exiger l’ordre, à moins que ce ne fût le gouverneur, le commandant, le lieutenant de roi, ou le major qui la fissent ; car en ce cas, on le leur doit donner. On fait faire des rondes dans une place, tant pour visiter les sentinelles, & les empêcher de s’endormir, que pour découvrir ce qui se passe au-dehors. C’est pourquoi dans les places où il n’y a pas un chemin au-delà du parapet, il faut que celui qui fait la ronde, marche sur la banquette, & qu’il entre dans toutes les guérites, pour découvrir plus aisément dans le fossé, & qu’il interroge les sentinelles, s’il y a quelque chose de nouveau dans leurs postes, & leur fasse redire la consigne.

Plusieurs gouverneurs observent une très-bonne maxime, qui est de faire une ronde un peu avant qu’on ouvre les portes. Comme il est déja grand jour, cette ronde est très-utile, parce qu’on peut découvrir du rempart qui est très-élevé, ce qui se passe dans la campagne.

Le tiers des officiers qui ne sont pas de garde, doivent faire la ronde toutes les nuits à des heures marquées par le gouverneur, & doivent tirer tous au sort, sans distinction du capitaine ou du lieutenant, l’heure à laquelle ils doivent la faire ; & le major de la place a soin de faire écrire sur un registre, le nom de tous les officiers de ronde, & l’heure à laquelle ils doivent la faire, afin de pouvoir vérifier si quelqu’un y a manqué. Les officiers doivent la faire, à peine pour ceux qui y manquent, de quinze jours de prison, & de la perte de leurs appointemens pendant ce tems-là, qui sont donnés à l’hôpital de la place. Hist. de la milice françoise.

Ronde, (Ecrit) se dit communément de nos especes de lettre, dont les plains sont au premier degré droit d’obliquité sur la ligne perpendiculaire. Voyez le volume des Planches à la table de l’écriture. Il y a quatre sortes de rondes ; la titulaire, la moyenne du premier degré, qui s’emploie dans les lettres-patentes de grace, de rémission, dans les états du roi, & généralement dans tous les comptes qui se rendent à la chambre ; la moyenne du second degré, en usage dans le notariat ; la troisieme est la minute usitée dans les finances ; la quatrieme est la grosse de procureur, employée quelquefois aussi dans les finances.