Aller au contenu

La Canne de Monsieur de Balzac/Préface

La bibliothèque libre.
Michel Lévy frères (p. 1-2).


PRÉFACE



Il y avait dans ce roman…

— Mais ce n’est pas un roman.

— Dans cet ouvrage…

— Mais ce n’est pas un ouvrage.

— Dans ce livre…

— C’est encore moins un livre.

— Dans ces pages enfin… il y avait un chapitre assez piquant intitulé :

LE CONSEIL DES MINISTRES.

On a dit à l’auteur :

— Prenez garde, on fera des applications, on reconnaîtra des personnages ; ne publiez pas ce chapitre.

Et l’Auteur docile a retranché le chapitre.

Il y en avait un autre intitulé

UN RÊVE D’AMOUR.

C’était une scène d’amour assez tendre, comme doit l’être une scène de passion dans un roman.

On a dit à l’auteur :

— Il n’est pas convenable pour vous de publier un livre où la passion joue un si grand rôle ; ce chapitre n’est pas nécessaire, supprimez-le.

Et l’Auteur timide a retranché ce second chapitre

Il y avait encore dans ces pages deux pièces de vers.

L’une était une satire.

L’autre une élégie.

On a trouvé la satire trop mordante.

On a trouvé l’élégie trop triste, trop intime.

L’Auteur les a sacrifiées… mais il est resté avec cette conviction : qu’une femme qui vit dans le monde ne doit pas écrire, puisqu’on ne lui permet de publier un livre qu’autant qu’il est parfaitement insignifiant.

Heureusement celui-ci contient une lettre de M. de Chateaubriand, — un billet de Béranger, — des vers de Lamartine ; — il a pour patron M. de Balzac : tout cela peut bien lui servir de pièces justificatives.


1836