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Le Correcteur typographe (Brossard)/volume 2/07/07

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Imprimerie de Chatelaudren (2p. 137-140).


VII

MISE EN PAGES


Pour la mise en pages, le metteur place d’abord, en tête de la galée, le folio ou titre courant de la page qu’il va monter, puis le blanc séparatif du texte. Le paquet de composition ou le placard est posé sur la galée, délié après enlèvement du porte-page, rapproché du blanc et bien dressé.

a) Le metteur applique la réglette, le long du bord libre de la composition ; il la maintient à l’aide de l’extrémité des doigts de la main droite, le pouce en dessus. Si la composition déborde au delà de la longueur voulue, il écarte légèrement la réglette, et à l’aide des deux mains, les pouces s’intercalant entre deux lignes de texte pour opérer la coupure, il repousse, suffisamment pour n’être point gêné et ne causer aucun accident, la partie excédante vers l’extrémité de la galée. Lorsque le texte, au contraire, est insuffisant, le metteur prend le paquet suivant qu’il pose sur la galée, délie et dispose comme précédemment, afin d’arriver au nombre de lignes nécessaires. Lorsque la composition est compacte, pour éviter de mettre en pâte, une interligne est d’abord glissée le long de la première ligne de texte à repousser.

La longueur voulue réalisée, ou plutôt le nombre de lignes exigé atteint, la réglette est à nouveau appliquée près de la composition ; de la main gauche, le compositeur agit fortement sur l’interligne de pied du texte, de manière à comprimer la composition ; de l’œil, en même temps, le metteur s’assure que la longueur de la page est conforme à la longueur indiquée sur la réglette par l’encoche. La moindre différence en plus ou en moins fait l’objet d’un examen attentif : elle peut tenir à des causes multiples dont les plus fréquentes sont imputables à une erreur d’interligne, à un excédent ou à un manque de blanc sous le folio ou avant un titre, à une intercalation de textes en corps différent de celui de l’ouvrage, à un parangonnage, etc.

b) En principe, chaque page doit se terminer par une ligne de pied : la ligne de pied, constituée par un lingot et complétée par des interlignes, doit être égale à la force de corps d’une ligne de texte ; elle est essentiellement destinée, en raison de sa rigidité, à soutenir l’ensemble de la page et à lui conserver son aspect rectiligne.

Généralement, la ligne de pied, remplacée au début de chaque feuille ou de certains cartons, par la signature de la feuille, compte dans la garniture lors de l’imposition : il est donc indispensable d’opérer à ce moment la diminution du blanc qu’elle représente. L’omission de ce retrait serait fort ennuyeuse, en raison de la fausse manœuvre qu’elle, occasionnerait. Aussi maintes imprimeries ont-elles admis, pour éviter tout désagrément, la suppression pure et simple de la ligne de pied ; on emploie en pied de page une interligne forte, en bon état, qui, bien que moins rigide que le lingot, donne cependant de bons résultats. Au contraire de la ligne de pied, cette interligne compte dans la hauteur de page.

c) La page mise de la longueur voulue est soigneusement dressée, puis liée solidement, placée sur un porte-page et déposée sous le rang ou sur le marbre, attendant le moment d’être tirée en épreuves pour le correcteur ou l’auteur.

L’arrangement des pages sous le rang ou sur le marbre diffère légèrement suivant les imprimeries. Ainsi qu’on l’a vu précédemment, les pages sont disposées par piles de 4 ou de 8 pages, rarement plus. Quelques auteurs conseillent surtout l’arrangement en serpentin par 4 pages : dans une feuille in-8, l’ordre apparent est le suivant, lorsque les 16 pages sont terminées :

  16 15 14 13  
09 10 11 12
08 07 06 05
01 02 03 04

Les deux piles extrêmes

  16 13  
09 12
08 05
01 04


comprennent les pages qui, lors de l’imposition, formeront le côté de première ; par contre, les piles du milieu

  15 14  
10 11
07 06
02 03


sont composées des pages du côté de deux. Ces dispositions évitent, le reclassement des pages au moment de la mise sur le marbre.

L’ordre du serpentin serait, le suivant dans une feuille in-18 en un seul cahier :

  36 35 34 33 32 31 30 29 28
19 20 21 22 23 24 25 26 27
18 17 16 15 14 13 12 11 10
01 02 03 04 05 06 07 08 09


et dans une feuille in-12 dont l’imposition serait prévue pour une pliure en un seul carton sans coupure :

  24 23 22 21 20 19
13 14 15 16 17 18
12 11 10 09 08 07
01 02 03 04 05 06

Il faut, convenir, toutefois, que, cet arrangement par 4 pages exige un emplacement assez considérable s’il s’agit de labeurs de quelque importance. Nombre de maisons, pour obvier à cet inconvénient, préfèrent les piles de 8 pages :

  16 15  
13 14
12 11
09 10
08 07
05 06
04 03
01 02


où les pages se trouvent, pour un in-8, groupées dans chaque pile par côté d’imposition ; pour un in-12, les trois piles sont dès lors constituées comme suit :

  24 23 16
21 22 15
20 19 14
17 18 13
08 07 12
05 06 11
04 03 10
01 02 09


la troisième pile devant, dans ces conditions, être remaniée lors de l’imposition.

Quelle que soit la méthode acceptée, il importe surtout qu’elle facilite non seulement le travail du metteur et, ultérieurement, de l’imposeur, mais aussi celui du corrigeur ; et c’est pour atteindre ce dernier but que certaines imprimeries préfèrent parfois l’arrangement tout simple des pages dans l’ordre où elles sont terminées :

  08 16  
07 15
06 14
05 13
04 12
03 11
02 10
01 09


laissant au corrigeur, ou encore à l’imposeur, le soin d’établir la classification des pages par piles de côtés.