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Le Divorce (Gagneur)/Notice sur l’auteur

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Librairie de la bibliothèque démocratique (p. v-viii).


M.-L. GAGNEUR


Dans les dix dernières années de l’Empire, pendant qu’une littérature hâtée, violente, malsaine, indifférente aux souffrances des classes populaires, achevait l’énervement des esprits et des caractères, précipitait la décomposition de la France impériale, M.-L. Gagneur consacrait un talent sain, libéral et fort à l’observation de nos misères sociales, à la critique de toutes les oppressions et de toutes les superstitions, à la recherche d’un idéal de justice et de liberté.

Sa première brochure avait pour titre : Projet d’association industrielle et domestique pour les classes ouvrières, et annonçait déjà ces préoccupations généreuses.

M.-L. Gagneur publia ensuite deux nouvelles : l’une dans le Siècle : l’Expiation ; l’autre : les Trois Sœurs rivales, dans la Presse.

Le Siècle s’attacha sa collaboration, et publia successivement de ce romancier :

Une Femme hors ligne. C’est une critique de l’esprit étroit et intolérant de la province, de la vie insupportable que cette intolérance crée aux femmes dont le caractère indépendant et fier ose braver les préjugés du monde.

Un Drame électoral. L’auteur y met en scène les intrigues du parti clérical et conservateur contre un candidat libéral qui n’a d’autre titre que son mérite personnel.

Dès ce moment, les tendances de M.-L. Gagneur s’accentuent, ainsi que les qualités de son style, « original, comme on l’a dit, à force de naturel ».

La Croisade noire. Ce roman, arrivé à sa septième édition, reproduit en plusieurs langues, et qui est resté l’œuvre capitale de M.-L. Gagneur, attira fortement l’attention et valut à l’auteur dès le début de violentes attaques comme de ferventes admirations.

C’est une vaste mise en scène du duel engagé entre l’esprit du passé et l’esprit moderne, sur tous les terrains : politique, religieux, moral, philosophique et scientifique. Aussi, aujourd’hui où cette lutte semble s’envenimer, la Croisade noire est-elle plus actuelle que jamais.

La portée très-élevée du livre n’enlève rien d’ailleurs à l’intérêt dramatique, au pathétique des situations, ni à la verve satirique avec laquelle sont flagellées les manœuvres congréganistes.

Le Calvaire des femmes, en deux volumes : Les Pécheresses, Les Réprouvées. C’est le tableau à la fois le plus fidèle et le plus émouvant de la situation de la femme dans toutes les conditions. L’auteur y dépeint avec l’observation et la chaleur qui lui sont propres, toutes les souffrances des classes populaires, tous les martyres de la femme pauvre. Il met en relief les vices de l’organisation actuelle du travail dans ses trois modes : la manufacture, l’atelier et le travail isolé, appelé : travail en chambre. Il conclut à l’association et à la coopération.

Cette portée sociale se dégage constamment des complications du drame, des situations les plus pathétiques.

Dans ce roman, comme dans la Croisade noire, l’auteur a l’art d’incarner dans ses personnages la thèse qu’il soutient. Aussi le lecteur est-il emporté par l’intérêt, sans ressentir aucunement l’aridité particulière aux démonstrations économiques ou philosophiques.

En 1869, M.-L. Gagneur publia les Forçats du mariage. C’est la critique du mariage actuel, des souffrances qu’il cause, souffrances rendues irrémédiables par l’indissolubilité du lien conjugal. L’auteur y conclut déjà au divorce.

Le dernier roman de M.-L. Gagneur, Chair à canon, fut publié d’abord dans le Corsaire. C’est toute l’histoire de la dernière guerre, présentée sous la forme attrayante et populaire du roman. Que de combats homériques ! Que de luttes sauvages ! Que de ruines ! Que de désastres !

Dans un immense panorama, l’auteur de Chair à canon déroule tout ce drame si rapide et si effroyable, ce drame sans précédent. Chacun des types glorieux, touchants ou sinistres qui ont surgi dans cette terrible période, y rencontre une incarnation.

Ce qui ressort de cette œuvre saine, patriotique et vigoureuse, c’est la haine de ces rois qui ne voient dans leurs peuples que de la chair à canon, et qui, dans un intérêt d’ambition personnelle, les conduisent au massacre et à la ruine ; c’est la régénération ; c’est la revanche par l’instruction et par le triomphe de l’idée démocratique, qui seule peut fonder dans l’avenir l’union des peuples, la République universelle.

Victor POUPIN.

Outre ces œuvres de longue haleine, M.-L. Gagneur, préoccupé de la lutte si grave et si décisive engagée entre les Monarchistes et les Républicains, a entrepris, en vue de la propagande républicaine, une série de petites brochures politiques à 20 centimes, présentées sous la forme dramatique. Ce sont :

Jean Caboche, qui obtint et obtient encore un immense succès dans les campagnes ;

Les Mésaventures électorales du baron de Pirouett, député du centre droit ;

Enfin, tout dernièrement, la Part du feu, ou les Terreurs du bourgeois Prudence et de son ami Furibus. L’auteur y fait ressortir surtout l’importance et l’urgence de la question sociale, question que dans tous ses ouvrages M.-L. Gagneur a toujours placée au premier rang.