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Le Livre des ballades/Est desiré dans le plus haut des Cieux

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Ballade de l’Amant inquiet

Vous qui ſavez, Dames & Damoiſelles,
Ce qu’eſt l’Amour, notre gentil ſeigueur,
Quand il lui plaît torturer ſes fidèles,
Ci connaiſſez d’où me vient ma frayeur.
Rien parmi nous n’eſt plus beau ne meilleur
Que Dame, hélas ! dont ſuis en dépendance :
Paſſion tendre & courtoiſe prudence
Se ſont choiſi pour aſiles ſes yeux,
Et l’agrément de ſa douce préſence
Eſt défiré dans le plus haut des cieux.

Saint bataillon, milices éternelles,
Ô gardes-clefs du ciel ſupérieur,
Éclatants d’or ſous vos candides ailes,
Vous enviez d’en haut notre bonheur
De la bien voir & de lui faire honneur.
Juſqu’à ce jour, malgré votre puiſſance,

Elle eſt ſur terre, & ſa magnificence
Manque à l’éclat du Trône radieux,
Et c’eſt pourquoi ce fleuron d’innocence
Eſt déſiré dans le plus haut des cieux

Ains, ô Jéſus ! leurs prières ſont telles
Que moi, reſté dans ce monde trompeur,
Verrai ſes yeux, tout remplis d’étincelles,
Tôt ſe voiler d’une terne vapeur.
Un Ange prompt & de qui m’eſt grand’peur,
En habit vert couleur de l’eſpérance,
Viendra lui dire : « Ici tout eſt ſouffrance ;
Monter là-haut, ſur mes ailes, vaut mieux.
Car dès longtemps jour de la furvenance
Eſt déſiré dans le plus haut des cieux »


ENVOI.


Dames, & vous, Damoiſelles, je pense
(Puiſque j’ai fait rencontre & connaiſſance
De cette Dame au cœur religieux)
Que le ſalut de mon intelligence
Eſt déſiré dans le plus haut des cieux.


Frédéric Plessis.