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Les écrits érotiques de Stendhal/1

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STENDHAL
ÉROTIQUE
1801 – 1805

Milan, 12 floréal

On cite ici Mme N… comme la plus jolie femme de la ville, et véritablement elle n’est pas mal ; on lui donne 60.000 francs de rente, elle a un cavalier servente, bel homme, et qui dépense beaucoup pour elle ; elle est par conséquent inattaquable. Nous pourrions baiser deux comtesses qui logent près de chez nous, mais elles ont vingt-huit et trente ans, et un air de saleté qui répugne.

1 prairial

MMmes P… et D… sont revenues le 3 du lac de Garde. Parmi une foule de plaisanteries graveleuses qui ont amusé ces dames et leurs filles, Maseau, qu’on était allé… dans son lit, a quitté sa chemise et, prenant un flambeau, est venu les voir en cet état. Les filles étaient présentes et acceptantes.

3 août

Je suis ainsi que beaucoup d’autres embarrassé lorsqu’il s’agit d’enfiler pour la première fois une femme honnête. Voici un moyen très simple : Lorsqu’elle est couchée, vous la branlez, etc. ; elle commence à y prendre goût. Cependant, le costume fait qu’elle se défend toujours. Il faut alors, sans qu’elle s’en aperçoive, lui mettre l’avant-bras gauche sur le cou, dessous le menton, de manière à l’étouffer ; le premier mouvement est d’y porter la main. Pendant ce temps, il faut prendre le vit entre l’index de la main droite et le grand doigt, et le mettre dans la machine. Pour peu qu’on y mette de sang-froid, cela est immanquable. Il faut cacher le mouvement décisif de l’avant-bras gauche par des giries.

C’est Percheron qui m’a donné ce moyen, et il y est expert.

6 thermidor

En morale, l’amour des femmes est un mal infiniment petit. Tous les grands hommes grecs étaient libertins ; cette passion dans un homme indique l’énergie, qualité sine qua non genius. Le jugement de Bonaparte : c’est un homme qui a des couilles.

27 floréal

Rouget me conte qu’il a enculé une madame de St-S…, qui, après la cérémonie, a dit en pleurant : « Je suis donc comme toutes les femmes. » Cette excuse est profonde, à ce qu’il me semble.

3 vendémiaire

Pacé nous dit chez la Rive :

Un jeune homme s’était beaucoup échauffé auprès d’une femme, sans réussir ; la dame sonne, un valet se présente, elle dit :

— Apportez un verre d’eau à monsieur.

Le verre d’eau arrive, le jeune homme dit au laquais :

— Versez-le moi sur les doigts, et se lave le bout des doigts, etc.

Voilà qui est parfait ; moi, je serais allé mourir dans un coin, de douleur, si j’avais été amoureux, de vanité blessée, si je ne l’avais pas été.

L’esprit de ce jeune homme lui fait éviter le deuxième malheur et lui donne le seul moyen qui lui restât d’avoir sa belle.

8 germinal

Louason m’a raconté avec beaucoup de vivacité plusieurs événements qui lui sont arrivés, elle me traitait en amant heureux.

Je l’ai fait rire en lui répétant la pantomime que je faisais à Mme Mortier, elle m’a dit en riant beaucoup que Dugazon lui avait dit ou avait dit qu’elle avait le foutre tragique, qu’il lui en faudrait long comme cela.

Ces choses grossières, ici en squelettes, étaient tout à fait comiques entre nous. Moi je lui ai dit que Dugazon m’avait dit qu’elle avait des couilles ; j’espère que celui-là est plus fort.