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Les Actes des Apôtres/35

La bibliothèque libre.
Librairie de L. Hachette et Cie (p. 133-137).

XXXV

SAINT PAUL À CORINTHE.



Grand’mère. Saint Paul partit ensuite pour Corinthe, autre grande ville de la Grèce.

Henriette. Je la connais.

Louis. Comment la connais-tu ? Tu n’y as jamais été.

Henriette. Je n’y ai pas été ; mais je sais qu’on y fait du raisin sec excellent que j’aime beaucoup.

Henri. Tu appelles cela connaître une ville ? Alors je les connais toutes, parce que j’ai mangé des choses qui viennent de partout.

Grand’mère. Laissons le raisin de Corinthe, mes enfants, et parlons du séjour qu’y fit saint Paul.

Il y trouva un Juif nommé Aquila, qui venait d’Italie avec Priscille sa femme. Ils avaient quitté Rome parce que l’Empereur Claude avait ordonné à tous les Juifs de sortir. Il confondait sous le nom général de Juifs, et les Juifs proprement dits et les Chrétiens. Saint Pierre avait converti tant de monde à Rome, que l’Empereur Claude eut peur et qu’il leur ordonna à tous de quitter Rome sous peine de mort.

Marie-Thérèse. Est-ce que les Juifs et les Chrétiens faisaient du mal ?

Grand’mère. Les Chrétiens non, mais les Juifs oui, parce qu’ils y causaient du trouble comme à Thessalonique, à Philippe, à Béroée, et partout. Ils excitaient le peuple contre les Chrétiens qui s’y trouvaient, ce qui amenait du tumulte et des désordres continuels. Claude, pour avoir la paix, bannit les uns et les autres. C’est alors qu’Aquila et sa femme furent obligés de quitter Rome.

Saint Paul vint donc loger chez Aquila, dont l’industrie était de faire des tentes ; saint Paul connaissait ce travail, et il aidait Aquila dans son commerce.

Marie-Thérèse. C’est un métier qui ne devait pas rapporter beaucoup ; à quoi peuvent servir des tentes ?

Grand’mère. C’était au contraire un très-bon état ; chacun avait sa tente qu’il emportait en voyage. Dans ce temps-là, il n’y avait ni chemins de fer, ni diligences, ni même des routes bien entretenues.

Louis. Et comment voyageait-on ?

Grand’mère, Les riches voyageaient à cheval ou en char découvert ; les gens du peuple et autres voyageaient à pied, ayant tout au plus un mulet ou un âne pour porter leurs provisions et leurs tentes.

Valentine. Pourquoi emporter des tentes ?

Grand’mère. Pour coucher la nuit. Il n’y avait pas d’auberges ni d’hôtels pour y manger et pour y dormir ; quand la nuit arrivait, on choisissait un emplacement commode ; on tendait la tente ou bien les tentes, si on était plusieurs, on mangeait des provisions qu’on avait emportées et on dormait sous la tente.

Jeanne. Et saint Paul voyageait comme cela ?

Grand’mère. Oh non ! saint Paul n’avait ni tente, ni provisions, ni âne, ni mulet ; lui qui était citoyen romain, qui avait été riche, il voyageait comme un pauvre, demandant un asile et du pain quand il rencontrait une maison habitée.

Jacques. C’est beau ça ! c’est très-beau ! se priver de tout par amour du bon Dieu !

Henri, riant. Je parie que tu ne le ferais pas !

Jacques. J’espère que si. Je demanderais du courage au bon Dieu, et je partirais.

Grand’mère. Et le bon Dieu te donnerait le courage, cher enfant, comme il le donne à tout Chrétien humble et modeste qui ne compte pas sur ses propres forces, mais sur celles qu’il demande au bon Dieu ; comme il le donne à nos pauvres religieux Capucins et à tous nos Missionnaires. Aujourd’hui encore, ces missionnaires mènent une rude et sainte vie pour l’amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Saint Paul aidait donc son ami Aquila à faire des tentes. Les jours de sabbat, il prêchait dans les synagogues ; et il convertissait des Juifs et des païens.

Il apprit que les Chrétiens de Thessalonique avaient beaucoup à souffrir ; les Juifs ne cessaient d’exciter contre eux les magistrats. Saint Paul leur envoya Silas et Timothée, qui étaient venus le rejoindre à Athènes. Ils y allèrent et ne tardèrent pas à revenir, lui apportant des nouvelles sur les persécutions.

Saint Paul ayant jugé qu’ils avaient besoin d’être encouragés, leur écrivit sa première Épître ou lettre, qui est pleine de charité et de tendresse. Quand vous serez plus grands (je ne parle qu’aux petits), vous lirez cette belle lettre connue sous le nom de Première Épître aux Thessaloniciens.

Elle fait partie de l’Écriture-Sainte, et a été inspirée du Saint-Esprit.

Saint Paul continua ses enseignements dans la synagogue ; il discutait avec les Juifs et les Grecs qui ne croyaient pas à sa parole, et il continuait à leur prêcher Notre-Seigneur et la religion du Christ.

Et comme malgré tout ce qu’il leur disait, ils continuaient à le contredire et à blasphémer le nom de Jésus-Christ, il secoua ses vêtements et leur dit :

« Que votre sang soit sur votre tête ; pour moi je vais désormais vers les Gentils. » Et secouant encore ses vêtements, il sortit.

Armand. Pourquoi secoua-t-il ses vêtements ?

Grand’mère. C’était, dans ce temps là, une manière de déclarer qu’on ne voulait plus avoir aucune relation avec les gens qu’on quittait et qu’on ne voulait même pas emporter de leur poussière.

En quittant la synagogue, il entra dans la maison de Titus-Justus, qui était un serviteur de Dieu et qui demeurait tout près de la synagogue. Cryspus, chef de la synagogue, crut en Notre-Seigneur avec toute sa maison. Et plusieurs autres Corinthiens, ayant entendu parler Paul, crurent aussi et furent baptisés.

La nuit, saint Paul eut une vision ; il vit le Seigneur qui lui dit :

« Ne crains rien, parle et ne te tais point, car je suis avec toi ; et nul ne pourra te nuire, parce que j’ai un peuple nombreux dans cette ville. »

Saint Paul écouta la parole du Seigneur et il demeura un an et six mois à Corinthe, enseignant la religion de son Divin Maître.