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Les Fastes (Merrill)/Ombre

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Les FastesChez Léon Vanier (p. 20-21).
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OMBRE

Toujours la voix des luths en les lointains bosquets,
Et des pas égarés au sable des allées,
Et les galants, et leurs belles aux airs coquets.


Mais l’amour a lassé ces âmes désolées
Où tout désir est mort comme aussi tout plaisir,
Et même le remords des heures envolées.


Leurs longs doigts indolents saccagent à loisir
Les pâles dahlias, les lys et la verveine,
Sans la volupté, las ! d’avoir à les choisir.


Vaine, oh ! vaine est la vie, et la mort est plus vaine,
Vaine comme ces fleurs qui renaissent l’hiver
Des sèves dont jamais ne tarira la veine.



Donc ce ne sera plus que paroles en l’air,
Des étreintes de mains et de feintes tendresses,
Et tout le doux regret des spasmes de la chair.


Et lentement la voix des luths fond en caresses
Lascives pour leurrer vers l’oubli de la nuit
Les mauvais amoureux et leurs molles maîtresses

Dont les pas las s’en vont vers les lointains, sans bruit.