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Les Puritains d’Écosse/11

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CHAPITRE XI

Leur déjeuner était chaud ; cet usage
Sera suivi par tout voyageur sage.

Prior.

Le déjeuner de lady Bellenden ne ressemblait pas plus à nos déjeuners modernes que la salle pavée de Tillietudlem aux salles à manger de notre temps : on n’y voyait ni thé, ni café, ni une variété de petits pains, mais des viandes solides et substantielles, le jambon ecclésiastique, le chevaleresque aloyau, le noble baron de bœuf, le royal pâté de venaison, tandis que des flacons d’argent, échappés au pillage des covenantaires, circulaient pleins d’ale, d’hydromel, ou de vins généreux. L’appétit des convives était digne de cette magnificence et de ces mets substantiels. On ne s’amusait pas à la bagatelle ; les dents travaillaient avec cette persévérance qui n’est connue que de ceux qui, levés avant le jour, ont fait une route pénible. Lady Margaret voyait avec délices ses honorables hôtes faire honneur aux mets préparés pour eux.

Le colonel seul semblait négliger la bonne chère qui lui était offerte, et, placé près de miss Bellenden, il était plus occupé de lui faire la cour que de satisfaire son appétit. Édith écoutait, sans y répondre, les compliments qu’il lui adressait. Vainement prouvait-il que sa voix, qui dans les combats se faisait entendre comme la trompette guerrière, pouvait aussi moduler les accents d’une conversation intéressante : l’idée qu’elle était à côté de ce chef redoutable de la volonté duquel dépendait le sort de Henry, le souvenir de la terreur qu’inspirait dans tout le comté le nom seul de Claverhouse, la privèrent quelque temps du courage de lui parler. Enhardie enfin par le son de sa voix, elle se hasarda à jeter les yeux sur lui, et ne vit dans sa personne aucun des attributs de terreur dont ses craintes l’avaient entouré.

Grahame de Claverhouse, encore dans la fleur de la jeunesse, était d’une taille moyenne, mais élégante ; ses discours, ses gestes, ses manières, annonçaient qu’il avait vécu dans le monde des grands et des heureux ; ses traits avaient une régularité presque féminine : son visage ovale, un nez bien fait, des yeux presque noirs, un teint assez brun pour bannir l’air efféminé, de petites moustaches d’un brun clair, enfin une abondance de longs cheveux bouclés de la même couleur qui tombaient jusque sur ses épaules, formaient un ensemble comme les artistes aiment à en peindre et les dames à en contempler. Par cet extérieur et l’expression de douceur et de gaieté qui régnait sur son visage, on l’aurait pris pour un homme plus amoureux des plaisirs que de la gloire : il n’en était pourtant pas moins connu pour la sévérité de son caractère, et ses ennemis eux-mêmes étaient forcés de rendre justice à sa bravoure. Doué d’un esprit entreprenant, il savait concevoir et exécuter les desseins les plus hardis, et possédait toute la prudence de Machiavel. Profond politique, il était naturellement pénétré de ce mépris des droits individuels qu’inspirent les intrigues de l’ambition. De sang-froid au milieu des plus grands dangers, il craignait aussi peu la mort pour lui-même qu’il était impitoyable pour la donner aux autres.

Édith montrait tant de trouble en répondant aux compliments que le colonel ne cessait de lui prodiguer, que son aïeule crut devoir venir à son secours. — Dans notre vie retirée, dit-elle à Claverhouse, miss Édith Bellenden a si peu vu les personnes de son rang, qu’il n’est pas étonnant qu’elle éprouve quelque embarras pour répondre en termes convenables. Nous avons rarement, colonel, l’avantage de recevoir ici quelque officier, et le jeune lord Evandale est le seul que nous avons le plaisir de voir assez souvent. Et, puisque j’ai nommé cet excellent gentilhomme, puis-je demander si je ne devais pas avoir l’honneur de le voir ce matin ?

— Lord Evandale était en marche avec nous, Milady ; mais j’ai été obligé de le détacher avec sa compagnie pour dissiper un conventicule de ces importuns garnements qui ont eu l’impudence de s’assembler à cinq milles de mon quartier général.

— En vérité, je n’aurais jamais cru à tant de présomption chez ces rebelles. Dans quels temps vivons-nous, colonel ! Il y a en Écosse un mauvais esprit qui souffle aux vassaux des personnes de rang l’insubordination et la révolte. N’y a-t-il pas, colonel Grahame, des lois que punissent cette obstination ?

— Je crois que j’en pourrais trouver une.

— Ce sont eux qui m’ont privée de mon époux et de mes enfants, et sans la protection de notre auguste monarque et de ses braves soldats, ils me dépouilleraient de même de mes terres et de mes biens. Croiriez-vous que sept de nos fermiers ont osé refuser le paiement de leurs rentes ; qu’ils ont dit à mon intendant qu’ils ne reconnaissent plus pour roi et pour seigneur que ceux qui ont juré le Covenant !

— J’irai régler ce compte avec eux, si vous me le permettez, Milady : il est de mon devoir de soutenir l’autorité, surtout quand elle repose dans des mains aussi respectables que celles de lady Bellenden. Mais il n’est que trop vrai que les mauvais principes se propagent de plus en plus dans ce canton, et je vais être forcé de prendre contre les rebelles des mesures de sévérité qui s’accordent mieux avec mon devoir qu’avec mon caractère. Cela me rappelle, Milady, que j’ai des remerciements à vous faire pour l’hospitalité que vous avez daigné accorder à un détachement de mes dragons qui m’amène un prisonnier accusé d’avoir donné retraite au lâche assassin Balfour de Burley.

— Le château de Tillietudlem, colonel, a toujours été ouvert aux serviteurs de Sa Majesté, et quand il cessera de l’être, c’est qu’il n’y restera plus pierre sur pierre. Mais me permettrez-vous de vous faire observer, colonel Grahame, que le gentilhomme qui commande ce détachement ne me semble pas au rang qui lui conviendrait, si nous considérons quel sang coule dans ses veines ? Si j’osais me flatter de voir accueillir ma requête en sa faveur, je vous supplierais de lui accorder de l’avancement à la première occasion.

— Vous voulez parler du brigadier Francis Stuart, que nous nommons Bothwell, répondit Claverhouse en souriant : il a l’écorce un peu rude, et parfois il ne se plie que difficilement aux règles de la discipline ; mais le moindre désir de lady Bellenden doit être une loi pour moi. (Bothwell entrait sur ces entrefaites.) — Bothwell, lui dit le colonel, allez baiser la main de lady Marguerite, et remerciez-la. Grâce à l’intérêt qu’elle prend à votre avancement, la première commission vacante dans le régiment sera pour vous.

Bothwell accomplit d’un air de hauteur cet acte d’humilité, et dit ensuite tout haut ; — À coup sûr, personne ne peut se trouver déshonoré de baiser la main d’une dame ; mais quand il s’agirait d’obtenir le grade de général, je ne baiserais pas la main d’un homme, à moins que ce ne fût celle du roi.

— Vous l’entendez, dit Claverhouse en souriant ; voilà le grand écueil pour lui. — Il ne peut oublier sa généalogie.

— Mon noble colonel, je sais que vous n’oublierez pas votre promesse. Peut-être alors permettrez-vous au cornette Stuart de se souvenir de son grand-père que le brigadier doit oublier.

— Cela suffit, Monsieur, dit Claverhouse, dites-moi ce que vous veniez m’apprendre,

— Lord Evandale, mon colonel, vient de faire halte sur la route, en face du château, avec sa troupe ; il ramène quelques prisonniers.

— Lord Evandale ! dit lady Marguerite, colonel, vous lui permettrez de venir déjeuner. Vous savez que Sa Majesté elle-même n’a point passé devant mon château sans y prendre quelques rafraîchissements.

C’était la troisième fois depuis son arrivée, que Claverhouse entendait mentionner ce mémorable événement. Se hâtant d’interrompre à temps le récit : — Oh ! dit-il en souriant et en jetant les yeux sur Édith, je sais que je mettrais lord Evandale en pénitence si je le tenais en vue de ce château sans lui permettre d’y entrer.

— Bothwell, faites dire à lord Evandale que lady Marguerite le prie de venir déjeuner, et que je l’attends.

Le cœur d’Édith battait vivement. Elle espéra que l’influence qu’elle savait avoir sur lord Evandale lui fournirait le moyen de sauver Morton, si l’intercession de son oncle auprès de Claverhouse se trouvait infructueuse. En toute autre circonstance, elle n’aurait pas voulu s’adresser à lui pour en obtenir une grâce, parce que, malgré son inexpérience, sa délicatesse naturelle lui faisait sentir qu’une jeune femme qui contracte une obligation envers un jeune homme lui donne sur elle un avantage dont il est souvent porté à abuser. Mais une raison qui l’en aurait détournée bien plus encore, c’était qu’elle n’ignorait pas que toutes les commères des environs parlaient de son mariage avec lui comme d’une chose décidée. Depuis un an, lord Evandale lui rendait des soins très assidus ; elle ne pouvait se dissimuler qu’elle lui avait plu ; elle savait que s’il faisait une déclaration formelle de ses sentiments, ses prétentions seraient fortement appuyées par lady Marguerite et par tous ses amis. Elle n’avait donc d’autre motif à alléguer pour lui refuser sa main que la préférence secrète qu’elle accordait à un autre, et elle savait que l’aveu en serait aussi inutile que dangereux. Ainsi, elle résolut d’attendre le résultat de l’intercession de son oncle.

Son incertitude dura peu. Le major avait fait les honneurs de la table, riant et causant avec les militaires ; quand le repas fut terminé, il put quitter son siège, et s’approchant de sa nièce, il la pria de le présenter à Claverhouse d’une manière particulière. Celui-ci connaissait le caractère et la réputation du major, et il l’accueillit avec les plus grands égards. Ils ne tardèrent pas à se retirer à l’écart, et miss Bellenden, dont le cœur battait avec une nouvelle violence, ne les perdit pas de vue un seul instant.

Elle vit d’abord en Claverhouse cet air ouvert et poli qui semble disposé à accorder une faveur, mais accompagné de la réserve d’un homme qui ne veut s’engager à rien avant de bien savoir ce qu’on a à lui demander. À mesure que la conversation avançait, le front du colonel se rembrunissait, un air d’impatience se peignait dans ses traits, et Édith crut y lire la condamnation de Henry. Le langage du major paraissait calme quoique pressant, et il semblait appuyer sa demande de tout le crédit que devaient lui donner son âge et sa réputation. Enfin le colonel, pour se débarrasser d’une sollicitation qu’il regardait comme importune, fit un mouvement pour rejoindre la compagnie : alors il se trouva si près d’Édith, qu’elle l’entendit prononcer ces paroles ; — Impossible ! major, impossible ! L’indulgence, en pareil cas, excède mes pouvoirs. Pour toute autre chose je serais enchanté de vous être agréable. — Mais voici Evandale qui nous apporte des nouvelles. — Eh bien, Evandale, qu’avez-vous à nous apprendre ?

— Des nouvelles désagréables, mon colonel, répondit le capitaine. Un corps considérable de whigs est en armes dans les montagnes, et en pleine révolte. Ils ont brûlé publiquement l’acte de suprématie, celui de l’épiscopat, et l’ordonnance qui prescrit une fête expiatoire pour le meurtre de Charles Ier, déclarant que leur intention est de soutenir la réformation et le Covenant jusqu’à la mort.

Ce récit inattendu frappa d’une pénible surprise tous ceux qui l’entendirent, Claverhouse excepté. — Et vous appelez cela une nouvelle désagréable ! dit celui-ci, c’est la meilleure que j’aie apprise depuis six mois. Maintenant que ces misérables sont rassemblés, nous en aurons bientôt fini avec eux. Où sont ces misérables ?

— À dix milles d’ici, dans un lieu nommé Loudon-Hill, au milieu des montagnes. J’ai dispersé le conventicule contre lequel vous m’aviez envoyé. J’ai arrêté une vieille trompette de sédition qui prêchait ouvertement la révolte, avec un ou deux de ses auditeurs, et j’ai appris de quelques hommes de la campagne et de nos espions les détails que je viens de vous donner.

— Savez-vous quel est leur nombre ?

— Mille à douze cents peut-être.

— Il est donc temps de les joindre. — Bothwell, faites sonner le boute-selle.

Bothwell se hâta de transmettre cet ordre à six nègres parés d’un uniforme blanc richement galonné. Bientôt, grâce à ces noirs musiciens, les murs du château retentirent du son des trompettes.

— Vous partez donc ! s’écria lady Marguerite à qui ce signal rappela ses malheurs passés ; hélas ! parmi les braves serviteurs du roi rassemblés à cette heure dans mon château, combien en est-il que je n’aurai pas le bonheur de revoir ! Ne feriez-vous pas mieux de vous assurer de la force des rebelles ?

— Leur nombre ne peut pas encore être bien considérable, répondit Claverhouse, mais je ne dois pas perdre un instant. Ils deviendraient bientôt dix fois plus nombreux, si je donnais aux malveillants de ce canton le temps de les rejoindre.

— Il en est déjà qui sont en marche, dit lord Evandale, et l’on m’a assuré qu’ils attendent un renfort de presbytériens soi-disant soumis aux lois, et qui sont commandés par le jeune Milnwood, fils du fameux colonel des têtes-rondes Silas Morton.

Ce discours ne produisit pas la même impression sur tous les assistants. Édith tomba sur une chaise, accablée de terreur et de désespoir ; Claverhouse jeta sur le major un regard de triomphe qui semblait dire : — Eh bien, vous voyez quels sont les principes du jeune homme pour qui vous vous intéressez !

L’œil en feu, le major s’écria vivement : — C’est une infâme calomnie inventée par ces misérables rebelles pour se procurer des partisans. Je répondrais de Henry Morton comme de mon propre fils. Il a d’aussi bons principes qu’aucun officier des gardes. Édith Bellenden pourrait l’attester comme moi ; je l’ai souvent vu lire dans le même livre de prières qu’elle, et ils savaient par cœur les leçons aussi bien que le ministre. Mais faites-le venir ; écoutez sa justification.

— Innocent ou coupable, dit le colonel, je n’y vois nul inconvénient. — Major Allan, prenez un guide, et conduisez le régiment vers Loudon-Hill. Lord Evandale et moi, nous vous rejoindrons dans un quart d’heure. — Que Bothwell, avec une escorte, nous amène le prisonnier.

Allan sortit aussitôt, ainsi que tous les officiers, excepté lord Evandale et le colonel ; et le son de la musique militaire annonça que le régiment se mettait en marche.

Tandis que Claverhouse cherchait à calmer les terreurs de lady Marguerite et à ramener le major Bellenden à son opinion sur le jeune Morton, Evandale s’approcha de miss Édith, et lui dit d’un ton aussi tendre que respectueux : — Nous allons vous quitter, et pour remplir un devoir qui doit peut-être nous exposer à quelques dangers. — Adieu, chère miss Bellenden, et permettez-moi de dire chère Édith pour la première et peut-être pour la dernière fois.

Le son de sa voix annonçait en lui un sentiment bien vif ; il était impossible qu’Édith s’y trompât. Quoique accablée par le danger que courait l’amant préféré par son cœur, elle ne put s’empêcher d’être émue de compassion pour un brave jeune homme qui prenait congé d’elle pour s’exposer à tous les périls de la guerre.

— J’espère, dit-elle, que vous ne courez aucun danger ; que la crainte, plutôt que la force des armes, dispersera les insurgés, et que vous reviendrez bientôt recevoir les félicitations et les témoignages d’amitié de tous les habitants de ce château.

De tous ! répéta-t-il en appuyant sur ce mot ; que ne puis-je le croire ! Mais je ne compte pas sur un succès si prompt ; notre corps est trop peu nombreux pour intimider les rebelles. Ces hommes sont enthousiastes et déterminés ; ils ont des chefs non dépourvus de toutes connaissances militaires. Je ne puis m’empêcher de croire que l’impétuosité de notre colonel nous fait marcher trop précipitamment contre eux ; mais mon devoir est d’obéir.

L’occasion de parler en faveur de Henry se présentait d’elle-même ; c’était la seule voie qui parût encore ouverte pour le sauver. Cependant miss Bellenden hésita, retenue par la crainte d’abuser de la tendre confiance d’un amant qui venait de déclarer que son cœur était à elle. Pouvait-elle engager Evandale à intercéder pour un rival ? Mais le danger était trop urgent pour qu’elle restât dans l’indécision.

— Nous expédierons ce jeune homme de l’autre côté du château, dit Claverhouse. — Allons, lord Evandale, je suis fâché de vous interrompre, mais il faut monter à cheval. — Bothwell, pourquoi n’amenez-vous pas le prisonnier ? Faites charger les carabines de votre détachement.

— Milord, dit-elle à Lord Evandale, ce jeune homme est un ami intime de mon oncle. Vous devez avoir du crédit sur votre colonel. Ne puis-je réclamer votre intercession ? Mon oncle vous en aurait une éternelle reconnaissance.

— Vous évaluez mon crédit beaucoup trop haut, miss Bellenden ; j’ai été bien souvent malheureux dans de pareilles demandes.

— Essayez encore une fois, pour l’amour de mon oncle !

— Et pourquoi pas pour l’amour de vous ? Ne voulez-vous pas me permettre de croire que je vous obligerais personnellement ?

— Certainement, vous m’obligerez infiniment. Je m’intéresse beaucoup à M. Morton… à cause de mon oncle. Au nom du ciel. Milord, ne perdez pas un instant !

Le bruit des pas des soldats qui entraient avec leur prisonnier avait rendu Edith plus hardie et plus pressante dans ses sollicitations.

— Il ne mourra pas, dit lord Evandale, dussé-je mourir en sa place ! Mais, ne m’accorderez-vous pas aussi une grâce ?

— Tout ce qu’il est possible à la tendresse d’une sœur d’accorder.

— Voilà donc tout ce que vous pouvez accorder à mon attachement !

— Ne pariez pas ainsi, Milord, vous me désespérez : il n’est personne pour qui j’aie plus d’estime, et à qui j’accorderais plus volontiers une marque de considération, excepté…

Un soupir qu’elle entendit lui fit tourner la tête : c’était Morton, chargé de fers, et que les soldats conduisaient devant Claverhouse. Les mots qu’elle venait de prononcer avaient frappé ses oreilles, et un coup d’œil de reproche qu’il lui jeta en passant, la convainquit qu’il les avait mal interprétés. Il ne manquait plus rien pour compliquer la confusion et la détresse d’Edith : les couleurs dont son visage était animé l’abandonnèrent subitement et firent place à une pâleur mortelle. Evandale remarqua ce changement : sa pénétration lui faisant aussitôt soupçonner la nature de l’intérêt que l’objet de son attachement prenait au prisonnier, il porta ses regards alternativement sur Edith et sur Henry, et ses doutes furent confirmés.

— Je crois, dit-il après un moment de silence, que c’est ce jeune homme qui a été le meilleur tireur au perroquet.

— Je… ne sais pas trop, répondit Edith.

— C’est lui : j’en suis certain. Il n’est pas étonnant qu’un vainqueur intéresse vivement une belle.

Evandale quitta Edith en prononçant ces mots, et s’avança vers Claverhouse qui était assis devant une table, il se plaça à quelque distance du colonel, spectateur silencieux mais non désintéressé de ce qui allait se passer.