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Les Veillées des maisons de prostitution et des prostituées/10

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NEUVIÈME TABLEAU

Ah ! le bon bouillon que j’aurai.

J’aurais de la peine à vous dire auquel des deux personnages que vous voyez, échappe cette exclamation, ah ! le bon bouillon que j’aurais ; si c’est à la putain étendue sur la table de cuisine et qui sent qu’elle va recevoir dans le con une copieuse décharge, que peut-être elle appelle un bouillon, ou au Jean-Jean qui l’exploite et qui jugeant avec raison que sa dulcinée doit être satisfaite de ses vigoureux coups de cul, lui destine le bouillon réparateur de ses forces perdues qu’il voit fumer sur l’angle du buffet, quoi qu’il en soit, un mot sur cette scène.

L’attitude des personnages est des plus burlesques : dans l’ardeur qui les anime ils ne gardent plus aucun ménagement, foutre est ce qui les occupe, le militaire a mis culotte bas pour être plus à son aise et l’a laissé retomber jusque sur ses talons, son schako roule à terre et lui naturellement si propre, si soigneux, n’y fait pas la moindre attention, n’est affairé que du bouillon qui fume et du plaisir que lui donne sa maîtresse, il couve des yeux l’une et l’autre.

On voit qu’il prend goût à la besogne, voyez comme ses yeux sont animés et comme ils brillent de plaisir, ses deux mains sont passées sous les fesses blanches et fermes de sa robuste partenaire, dont la gorge découverte expose à la vue deux tétons de la plus grande beauté, une cuisinière a souvent plus d’appâts qu’une princesse et la cuisinière est un morceau très-recherché du militaire.

Quant à elle, la bougresse, elle ne sait plus où elle en est, c’est à peine si elle a assez de force pour se retenir d’une main à la table, qui est en ce moment le trône des plaisirs, ses yeux sont fermés tant le chatouillement qu’elle éprouve est grand, elle a croisé ses jambes sur les reins de son fouteur, afin d’y joindre plus étroitement, son con n’est plus qu’un vaste réservoir de foutre, il coule à flots, elle rend trois et quatre décharges pour une : Ah !… ah !… s’écrie-t-elle, mon ami… va… va… jusqu’au fond… ah ! ah !… tu me vas au cœur… tu fous comme un ca… pi… taine… comme un ma… jor… oh ! oh !… gé…né…ral… Ce n’est qu’après l’avoir gratifié des plus beaux grades qu’en répétant une dernière fois… Ah ! je n’en puis plus, je me meure !… qu’en sentant le foutre de son amant se mêler au sien, elle en rend elle-même encore une cinquième et copieuse libation.

Quoique les militaires n’ayent jamais que des amours de passade comme ils les appellent, ils font encore une distinction entre les cuisinières bonne enfant et les chipies, les bonnes enfants sont pour eux, celles qui leur repassent de temps en temps une carotte par le trou de lavier (terme militaire), et qui surtout dans les ébats amoureux se laissent injecter le foutre dans le fond du vagin au lieu de désarçonner le cavalier et de retirer l’oiseau de la cage au moment où la semence va s’élancer comme font les chipies. Le militaire aime à avoir naturellement ses franches coudées et ne connaît pas de demi jouissances, aussi la cuisinière, qui craint de se voir engrossée et refuse de recevoir la décharge est-elle rarement sans être abandonnée par son amant après un court laps de temps. Au lieu qu’on a vu des militaires conserver toujours la même particulière pendant tout le séjour dans une garnison et cela sans le moindre désir d’en changer, ni la moindre velléité d’infidélité, parce qu’ils savaient que leur objet aimerait mieux dans l’action sucer jusqu’à la moindre parcelle de leur foutre que d’en laisser tomber une goutte par terre.

Nul doute que la putain que nous avons sous les yeux ne soit du nombre des bonnes d’enfant elle étreint trop amoureusement son cavalier et ses jambes croisées le retiennent trop bien pour que l’on doive supposer qu’elle veuille qu’il se retire au moment de la décharge.

(Ici l’explication des tableaux fut un moment suspendue par un profond soupir de la petite brune qui avait envié une heure avant le bonheur de Constance allant coucher avec son conducteur de cabriolet. Tous les regards se portèrent sur elle et l’on s’aperçut que la petite putain excitée par les tableaux et la lasciveté de leur explication, avait passé une main sous ses jupons et n’avait pu résister au désir de se branler, ce qui lui avait arraché le soupir interrupteur, elle venait de décharger. La gaîté que cet incident avait fait naître chez ces demoiselles étant un peu calmée, Nanette continua en passant au dixième tableau.)