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Les sports de la neige/15

La bibliothèque libre.
Traduction par René Auscher.
Hachette & Cie (p. 78-80).
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COMMENT ON SE RELÈVE

Jeune homme, si vous voyez quelque part, sur une pente, une jeune fille étendue sur la neige, fuyez. Mais si vous voyez que réellement elle n’arrive pas à se relever toute seule, allez vers elle et arrêtez-vous par un beau Christiania ! Si vous n’en êtes pas capable, tâchez au moins de ne pas tomber à ses côtés, vous ne pourriez lui être d’aucun secours. Voici le discours que vous lui tiendrez :

Elle. — Ah ! voulez-vous être assez aimable…

Vous. — Je regrette infiniment, Mademoiselle ! mais dans les statuts du Ski Club auquel j’appartiens, le paragraphe premier dit : « Aucun membre n’a le droit de relever de la neige une dame qui est tombée. Par contre, c’est son devoir de lui apprendre comment on se relève sans aide étrangère. »

Elle. — Mais comment puis-je faire ? je glisse toujours vers le bas quand j’essaie de me relever.

Vous. — Pardon, Mademoiselle, couchez-vous tranquillement sur le côté dans la neige. Ensuite tournez-vous jusqu’à ce que votre corps soit placé dans la direction de la pente, les skis vers le bas, horizontaux et transversalement à cette pente. Ensuite, attirez, en pliant vos genoux, les skis aussi haut que possible vers votre corps. Bien. Et ensuite levez-vous. Cela va tout seul. Bravo !

Elle. — C’est étonnamment simple, une fois qu’on le sait.

Vous. — Comme tout dans le ski.

Il ne doit pas y avoir d’autres préliminaires à une suite éventuelle de la conversation commencée. Mais si la dame tombe encore une fois en votre présence, sur le plateau, non sur la pente, il est alors utile de lui faire savoir que, dans ce cas, la meilleure manière consiste à placer d’abord sur les skis la partie inférieure du tronc parce que, sans cette précaution, les skis repartent d’eux-mêmes.

Celui qui veut se lever autrement que par cette méthode se met dans une grande agitation, se laisse entraîner à toutes sortes d’imprécations imméritées contre les skis et en définitive n’arrive pas à se relever.

Mais si on tombe par hasard de telle sorte que les pointes des skis soient écartées et dirigées en l’air dans des directions opposées et qu’on soit couché sur les extrémités enterrées sous la neige, il faut, avant tout, chercher à sortir d’une attache. C’est le sauvetage le plus rapide de cette situation embarrassée. Si on ne peut pas atteindre l’attache avec une main, ou bien — si on est assez prudent pour porter des attaches de Huitfeld avec boucles brevetées — si on ne peut abattre la boucle avec une canne, il est inutile de dépenser ses forces sans résultat, il vaut mieux appeler quelqu’un à son secours. Ce n’est pas une honte, et c’est bien plus sage que de se faire très mal par orgueil. Enfin, lorsqu’on est de nouveau sur ses skis, il est bon de bien épousseter chaque fois ses vêtements avec un gant. Cette petite peine est récompensée, une fois rentré chez soi, parce que les vêtements sèchent plus vite. En outre, c’est une pause agréable, une autre manière de se remuer sans tomber dans l’agitation et l’excès de fatigue.

Lorsqu’on est épuisé, tout est inutile, les chutes se succèdent à brefs intervalles. Ce qu’il y a de mieux à faire, dans ce cas, mais ce que presque personne ne fait, c’est de se reposer durant un bon quart d’heure.

Si cela ne suffit pas, on rentre chez soi. Mais nous n’en sommes pas encore là. Nous voudrions bien aussi remonter la pente au plus tôt.