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Lettres à la princesse/Lettre193

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Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 265-266).

CXCIII

Ce 1er mars 1867.
Princesse,

Sans le dire, il se trouve que je pense aux mêmes choses qui vous occupent. Il y a, en effet, deux systèmes, deux esprits qui sont en présence et aux prises en ce moment ; et, comme on a passé à moitié de l’un à l’autre, il est difficile d’avoir un pied par-ci et un autre par-là ; chacun vous tire à soi et vous pousse : dans quelle intention ? Dieu le sait. Il faut une bonne tête et un flegme sans pareil pour ne pas broncher dans cette position. J’espère que, la santé aidant, la bonne tête y suffira.

Je n’ai vu personne de ceux dont vous me parlez, Princesse, et j’en suis à la simple lecture des journaux, qui me laisse de la réflexion de reste. J’ai paru à l’Académie jeudi ; je suffis juste à ces légers excès, et il ne m’a pas été possible de faire plus. Je vais aujourd’hui essayer de paraître une heure à une réunion d’amis du vendredi[1] ; mais il est possible aussi qu’au dernier moment je me dédise. Que cela est triste d’être ainsi enchaîné ! Il en résulte une teinte de désenchantement universel qui s’étend sur tout. Vous voyez à quel point je suis prêt à être à l’unisson avec vous. Mais ce n’est qu’un instant pour vous, Princesse, et votre vaillante nature revient vite avec son ressort et rebondit.

Je mets à vos pieds l’hommage de mon tendre et respectueux attachement.


  1. Le dîner fondé par M. Bixio, qui avait lieu chez Brébant, tous les premiers vendredis du mois.