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Lettres à la princesse/Lettre196

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Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 269-270).


CXCVI

Ce 7 mars 1867.
Princesse,

Que vous dirai-je ? il a pris son parti et il a l’aiguillon au cœur. Toute partialité mise de côté et toute affection pour l’homme, et, comme si on ne le connaissait que du dehors, la vraie politique à suivre en ceci eût été, selon moi :

1o Ou de ne pas le poursuivre et de ne lui faire (ministre de l’intérieur) qu’un reproche d’homme à homme, d’ami à ami ;

2o Ou, l’ayant fait comparaître, de le renvoyer après explication et après son expression de regret, disant qu’il n’y avait lieu à poursuivre ;

3o Ou, enfin, après la séance d’hier, de le renvoyer avec absolution motivée sur ce regret qu’il a exprimé. — La prison, si elle est prononcée, est toujours odieuse, si courte qu’elle soit, appliquée à ce genre de délit ; elle honore les hommes sans les désarmer et leur confère à leur sortie plus d’importance qu’ils n’en avaient auparavant.

Je vous jure que je suis très-affecté, non pas individuellement, mais politiquement de tout cela.

Veuillez penser qu’il y a contradiction entre inaugurer un régime qu’on proclame plus indulgent et le faire précéder par un acte plus sévère qu’on n’eût fait du temps où il y avait des avertissements. L’empereur est mal servi.

C’est à ce seul point de vue que je diffère de Votre Altesse, sentant d’ailleurs comme elle et appréciant combien vous avez fait tout ce que pouvait suggérer une généreuse et indulgente amitié.

Mais évidemment il a brûlé ses vaisseaux.

Je mets à vos pieds, Princesse, l’hommage de mon tendre et respectueux attachement.