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Ma tante Geneviève, ou Je l’ai échappé belle/00-1

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Avant-Propos



AVANT-PROPOS.


Quoique j’aie toujours été, ou que j’aie passé pour inconséquente, et même folle pendant les trois premiers quarts de ma vie, j’aime l’ordre, à présent que l’âge m’a mûrie… Ainsi donc, pour procéder par ordre, je crois devoir, en attendant que je sois arrivée au moment où mon histoire personnelle sera assez intéressante pour mériter l’attention du lecteur, commencer par lui faire savoir ce qu’était ma tante Geneviève, qui, tant par son droit d’aînesse que par l’influence majeure que son existence a eu sur la mienne, doit nécessairement être connue avant moi.

Je parle de cette tante exclusivement, parce que de tous les parens que j’ai eus (apparemment comme tout le monde) je n’ai jamais connu qu’elle, qui seule m’a tenu lieu de toute une famille.

Elle m’a enseigné à lire, à écrire… et mon catéchisme, comme aurait pu faire un père habile. Elle m’a appris le tricot, la couture, le blanchissage, le repassage, le ressemelage et la cuisine, comme la mère la plus experte dans tous ces utiles talens. Elle m’a promenée, soignée et nettoyée étant enfant, comme une bonne sœur aînée qui aurait été chargée de cette besogne. Quand je fus plus grandelette, elle jouait avec moi comme aurait aimé à le faire un petit frère espiègle. Lorsque je commençai à être raisonnable, elle me faisait des confidences comme m’en aurait fait une cousine attachée. Dans ses belles humeurs, elle me caressait comme une tante qui aurait été jalouse de ma mère ; dans ses mauvaises, elle me brusquait comme un oncle qui aurait été en procès avec mon père… Et sur ses vieux jours, la pauvre et chère bonne femme me sermonait et me rabâchait comme une vieille grand’mère.

Que de titres pour me ressouvenir d’elle !… aussi je ne l’oublierai jamais : ou près, ou éloignée d’elle, toutes les peines que j’ai endurées, tous les plaisirs que j’ai goûtés, m’ont toujours rappelé sa mémoire. Les premiers mots que j’ai su bégayer, ont été ma tante Geneviève, et les derniers que je pourrai articuler, seront encore ma pauvre tante Geneviève !