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Marc Aurèle ou La fin du monde antique/Chapitre XXXII

La bibliothèque libre.
Calmann-Lévy (p. 589-614).


CHAPITRE XXXII.


RÉVOLUTION SOCIALE ET POLITIQUE AMENÉE
PAR LE CHRISTIANISME.


Ainsi, à mesure que l’empire baisse, le christianisme s’élève. Durant le iiie siècle, le christianisme suce comme un vampire la société antique, soutire toutes ses forces et amène cet énervement général contre lequel luttent vainement les empereurs patriotes. Le christianisme n’a pas besoin d’attaquer de vive force ; il n’a qu’à se renfermer dans ses églises. Il se venge en ne servant pas l’État, car il détient presque à lui seul des principes sans lesquels l’État ne saurait prospérer. C’est la grande guerre que nous voyons aujourd’hui faite à l’État par nos conservateurs. L’armée, la magistrature, les services publics ont besoin d’une certaine somme de sérieux et d’honnêteté. Quand les classes qui pourraient fournir ce sérieux et cette honnêteté se confinent dans l’abstention, tout le corps souffre.

L’Église, au iiie siècle, en accaparant la vie, épuise la société civile, la saigne, y fait le vide. Les petites sociétés tuèrent la grande société. La vie antique, vie tout extérieure et virile, vie de gloire, d’héroïsme, de civisme, vie de forum, de théâtre, de gymnase, est vaincue par la vie juive, vie antimilitaire, amie de l’ombre, vie de gens pâles, claquemurés. La politique ne suppose pas les hommes trop détachés de la terre. Quand l’homme se décide à n’aspirer qu’au ciel, il n’a plus de pays ici-bas. On ne fait pas une nation avec des moines ou des yoguis ; la haine et le mépris du monde ne préparent pas à la lutte de la vie. L’Inde, qui, de tous les pays connus, a le plus versé dans l’ascétisme, n’est, depuis un temps immémorial, qu’une terre ouverte à tous les conquérants. Il en fut de même à quelques égards de l’Égypte. La conséquence inévitable de l’ascétisme est de faire considérer tout ce qui n’est pas religieux comme frivole et inférieur. Le souverain, le guerrier, comparés au prêtre[1], ne sont plus que des rustres, des brutaux ; l’ordre civil est tenu pour une tyrannie gênante. Le christianisme améliora les mœurs du monde ancien ; mais, au point de vue militaire et patriotique, il détruisit le monde ancien. La cité et l’État ne s’accommoderont plus tard avec le christianisme qu’en faisant subir à celui-ci les plus profondes modifications.

« Ils habitent sur la terre, dit l’auteur de l’Épître à Diognète[2] ; mais, en réalité, ils ont leur patrie au ciel. » Effectivement, quand on demande au martyr sa patrie : « Je suis chrétien », répond-il[3]. La patrie et les lois civiles, voilà la mère, voilà le père, que le vrai gnostique, selon Clément d’Alexandrie[4], doit mépriser pour s’asseoir à la droite de Dieu. Le chrétien est embarrassé, incapable quand il s’agit des affaires du monde[5] ; l’Évangile forme des fidèles, non des citoyens. Il en fut de même pour l’islamisme et le bouddhisme. L’avènement de ces grandes religions universelles mit fin à la vieille idée de patrie ; on ne fut plus Romain, Athénien ; on fut chrétien, musulman, bouddhiste. Les hommes désormais vont être rangés d’après leur culte, non d’après leur patrie ; ils se diviseront sur des hérésies, non sur des questions de nationalité.

Voilà ce que vit parfaitement Marc-Aurèle, et ce qui le rendit si peu favorable au christianisme. L’Église lui parut un État dans l’État[6]. « Le camp de la piété », ce nouveau « système de patrie fondé sur le Logos divin[7] », n’a rien à voir avec le camp romain, lequel ne prétend nullement former des sujets pour le ciel. L’Église, en effet, s’avoue une société complète, bien supérieure à la société civile ; le pasteur vaut mieux que le magistrat[8]. L’Église est la patrie du chrétien, comme la synagogue est la patrie du juif ; le chrétien et le juif vivent dans le pays où ils se trouvent comme des étrangers[9]. À peine même le chrétien a-t-il un père et une mère[10]. Il ne doit rien à l’empire et l’empire lui doit tout ; car c’est la présence des fidèles, disséminés dans le monde romain, qui arrête le courroux céleste et sauve l’État de sa ruine[11]. Le chrétien ne se réjouit pas des victoires de l’empire ; les désastres publics lui paraissent une confirmation des prophéties qui condamnent le monde à périr par les barbares et par le feu[12]. Le cosmopolitisme des stoïciens[13] avait bien aussi ses dangers ; mais un ardent amour de la civilisation et de la culture grecque servait de contrepoids aux excès de leur détachement.

À beaucoup d’égards, certainement, les chrétiens étaient des sujets loyaux. Ils ne se révoltaient jamais ; ils priaient pour leurs persécuteurs. Malgré leurs griefs contre Marc-Aurèle, ils ne prirent aucune part à la révolte d’Avidius Cassius. Ils affectaient les principes du légitimisme le plus absolu. Dieu donnant la puissance à qui il lui plaît, il faut obéir sans examen à celui qui la possède officiellement. Mais cette apparente orthodoxie politique n’était au fond que le culte du succès. « Il n’y a jamais eu parmi nous de partisan d’Albin, de partisan de Niger », dit avec ostentation Tertullien[14], sous le règne de Septime-Sévère. Mais, vraiment, en quoi Septime Sévère était-il plus légitime qu’Albin et que Pescennius Niger ? Il réussit mieux qu’eux, voilà tout. Le principe chrétien : « Il faut reconnaître celui qui exerce le pouvoir », devait contribuer à établir le culte du fait accompli, c’est-à-dire le culte de la force. La politique libérale ne doit rien et ne devra jamais rien au christianisme[15]. L’idée du gouvernement représentatif est le contraire de celle que professèrent expressément Jésus, saint Paul, saint Pierre[16], Clément Romain.

Le plus important des devoirs civiques, le service militaire, les chrétiens ne pouvaient le remplir. Ce service impliquait, outre la nécessité de verser le sang, qui paraissait criminelle aux exaltés, des actes que les consciences timorées trouvaient idolâtriques[17]. Il y eut sans doute plusieurs soldats chrétiens au iie siècle[18] ; mais bien vite l’incompatibilité des deux professions se révélait, et le soldat quittait le ceinturon ou devenait martyr[19]. L’antipathie était absolue ; en se faisant chrétien, on quittait l’armée. « On ne sert pas deux maîtres », était le principe sans cesse répété[20]. La représentation d’une épée ou d’un arc sur une bague était défendue[21]. « C’est assez combattre pour l’empereur que de prier pour lui[22]. » Le grand affaiblissement qui se remarque dans l’armée romaine à la fin du iie siècle, et qui éclate surtout au iiie siècle, a sa cause dans le christianisme. Celse aperçut ici le vrai avec une merveilleuse sagacité[23]. Le courage militaire, qui, selon le Germain, ouvre seul le Walhalla, n’est point par lui-même une vertu aux yeux du chrétien. S’il est employé pour une bonne cause, à la bonne heure ; sinon, il n’est que barbarie. Certes, un homme très brave à la guerre peut être un homme de médiocre moralité ; mais une société de parfaits serait si faible ! Pour avoir été trop conséquent, l’Orient chrétien a perdu toute valeur militaire. L’islam en a profité, et a donné au monde le triste spectacle de cet éternel chrétien d’Orient, partout le même malgré la différence des races, toujours battu, toujours massacré, incapable de regarder en face un homme de guerre, offrant perpétuellement son cou au sabre, victime peu intéressante, car elle ne se révolte pas et ne sait pas tenir une arme, même quand on la lui met dans la main.

Le chrétien fuyait aussi les magistratures, les charges publiques, les honneurs civils. Poursuivre ces honneurs, ambitionner ces fonctions, ou seulement les accepter, c’était donner une marque de foi à un monde que, par principes, on déclarait condamné et entaché à fond d’idolâtrie[24]. Une loi de Septime Sévère[25] permit aux « adeptes de la superstition juive » d’arriver aux honneurs, avec dispense des obligations contraires à leur croyance. Sûrement, les chrétiens pouvaient profiter de ces dispenses ; ils ne le firent pas. Couronner sa porte à l’annonce des jours de fête, prendre part aux divertissements, aux réjouissances publiques, était une apostasie[26]. Même interdit à l’égard des tribunaux. Les chrétiens n’y doivent jamais porter leur procès ; ils doivent s’en tenir à l’arbitrage de leurs pasteurs[27]. L’impossibilité des mariages mixtes[28] achevait d’élever un mur infranchissable entre l’Église et la société. Il était défendu aux fidèles de se promener dans les rues, de se mêler aux conversations publiques ; ils ne devaient se voir qu’entre eux[29]. Même les auberges ne pouvaient être communes, les chrétiens en voyage se rendaient à l’église et y participaient aux agapes, aux distributions des restes des offrandes sacrées[30].

Une foule d’arts et de métiers, dont la profession entraînait des rapports avec l’idolâtrie, étaient interdits aux chrétiens[31]. La sculpture et la peinture, en particulier, devenaient presque sans objet ; on les traitait comme des ennemies[32]. Là est l’explication d’un des faits les plus singuliers de l’histoire, je veux dire de la disparition de la sculpture dans la première moitié du iiie siècle. Ce que le christianisme tua d’abord dans la civilisation antique, ce fut l’art. Il tua plus lentement la richesse ; mais, à cet égard, son action n’a pas été moins décisive. Le christianisme fut, avant tout, une immense révolution économique. Les premiers devinrent les derniers, et les derniers devinrent les premiers. Ce fut vraiment la réalisation du royaume de Dieu, selon les juifs. Un jour, Rab Joseph, fils de Rab Josué ben Lévi, étant tombé en léthargie, son père lui demanda, quand il fut revenu à lui : « Qu’as-tu vu dans le ciel ? — J’ai vu, répondit Joseph, le monde renversé : les plus puissants étaient au dernier rang ; les plus humbles au premier. — C’est le monde normal que tu as vu, mon fils[33]. »

L’empire romain, en rabaissant la noblesse et en réduisant presque à rien le privilège du sang, augmenta, au contraire, les avantages de la fortune. Loin d’établir l’égalité effective entre les citoyens, l’empire romain, ouvrant à deux battants les portes de la cité romaine, créa une différence profonde, celle des honestiores (les notables, les riches) et des humiliores ou tenuiores (les pauvres)[34]. En proclamant l’égalité politique de tous, on introduisit l’inégalité dans la loi, surtout dans la loi pénale. La pauvreté rendait presque illusoire le titre de citoyen romain[35], et le grand nombre était pauvre. L’erreur de la Grèce, qui avait été le mépris de l’ouvrier et du paysan[36], n’avait point disparu[37]. Le christianisme ne fit d’abord rien pour le paysan ; il nuisit même aux populations rurales par l’institution de l’épiscopat, à l’influence et aux bienfaits duquel les villes seules avaient part ; mais il eut une influence de premier ordre sur la réhabilitation de l’ouvrier. Une des recommandations que l’Église fait à l’artisan est de s’acquitter de son métier avec goût et application[38]. Le mot d’operarius se relève ; dans leurs épitaphes, l’ouvrier et l’ouvrière chrétiens sont loués d’avoir été de bons travailleurs[39].

L’ouvrier, gagnant honnêtement sa vie de tous les jours, tel était bien, en effet, le chrétien idéal. L’avarice était pour l’Église primitive le crime suprême[40]. Or, le plus souvent, l’avarice, c’était la simple épargne[41]. L’aumône était considérée comme un devoir strict. Le judaïsme en avait déjà fait un précepte[42]. Dans les Psaumes et les livres prophétiques, l’ébion est l’ami de Dieu, et donner à l’ébion, c’est donner à Dieu[43]. Aumône, en hébreu, est synonyme de justice (sedaka). Il fallut limiter l’empressement des gens pieux à se justifier de la sorte ; un des préceptes d’Ouscha interdit de donner au pauvre plus du cinquième de son bien[44]. Le christianisme, qui fut à son origine une société d’ébionim, accepta pleinement l’idée que le riche, s’il ne donne son superflu, est un détenteur du bien d’autrui. Dieu donne toute sa création à tous. « Imitez l’égalité de Dieu, et personne ne sera pauvre », lisons-nous dans un texte qui fut quelque temps tenu pour sacré[45]. L’église elle-même devenait un établissement de charité. Les agapes et les distributions faites du superflu des offrandes nourrissaient les pauvres, les voyageurs[46].

C’était le riche qui, sur toute la ligne, était sacrifié[47]. Il entrait peu de riches dans l’Église, et leur position y était des plus difficiles[48]. Les pauvres, fiers des promesses évangéliques, les traitaient avec un air qui pouvait sembler arrogant[49]. Le riche devait se faire pardonner sa fortune, comme une dérogation à l’esprit du christianisme. En droit, le royaume de Dieu lui était fermé[50], à moins qu’il ne purifiât sa richesse par l’aumône ou ne l’expiât par le martyre[51]. On le tenait pour un égoïste, qui s’engraissait de la sueur des autres[52]. La communauté de biens, si elle avait jamais existé, n’existait plus ; ce qu’on appelait « la vie apostolique », c’est-à-dire l’idéal de la primitive Église de Jérusalem, était un rêve perdu dans le lointain ; mais la propriété du fidèle n’était qu’une demi-propriété ; il y tenait peu ; et l’Église y participait en réalité autant que lui[53].

C’est au ive siècle que la lutte devint grande et acharnée. Les classes riches, presque toutes attachées à l’ancien culte, luttent énergiquement ; mais les pauvres l’emportent[54]. En Orient, où l’action du christianisme fut bien plus complète ou, pour mieux dire, moins contrariée que dans l’Occident, il n’y eut plus guère de riches à partir du milieu du ve siècle. La Syrie et principalement l’Égypte devinrent des pays tout ecclésiastiques et tout monastiques. L’église et le monastère, c’est-à-dire les deux formes de la communauté, y furent seuls riches[55]. La conquête arabe, se précipitant sur ces pays, après quelques batailles à la frontière, ne trouva plus qu’un troupeau à conduire. Une fois la liberté du culte assurée, les chrétiens d’Orient se soumirent à toutes les tyrannies. En Occident, les invasions germaniques et d’autres causes ne laissent pas le paupérisme triompher complètement. Mais la vie humaine est suspendue pour mille ans. La grande industrie devient impossible ; par suite des fausses idées répandues sur l’usure, toute opération de banque, d’assurance[56], est frappée d’interdiction. Le juif seul peut manier l’argent[57] ; on le force à être riche ; puis on lui fait un reproche de cette fortune à laquelle on l’a condamné. C’est ici la plus grande erreur du christianisme. Il fit bien pis que de dire aux pauvres : « Enrichissez-vous aux dépens du riche » ; il dit : « La richesse n’est rien. » Il coupa le capital par la racine ; il défendit la chose la plus légitime, l’intérêt de l’argent ; en ayant l’air de garantir au riche sa richesse, il lui en retrancha les fruits ; il la rendit improductive. La funeste terreur répandue sur toute la société du moyen âge par le prétendu crime d’usure fut l’obstacle qui s’opposa, durant plus de dix siècles, au progrès de la civilisation.

La somme de travail dans le monde diminua considérablement. Des pays, comme la Syrie, où le confortable ne rapporte pas autant de jouissance qu’il coûte de peine, et où l’esclavage est ainsi une condition de la civilisation matérielle, furent abaissés d’un degré dans l’échelle humaine. Les ruines antiques y restèrent comme les vestiges d’un monde disparu et incompris. Les joies de l’autre vie, non acquises par le travail, furent autant de pris sur ce qui porte l’homme à l’action. L’oiseau du ciel, le lis ne labourent ni ne sèment, et cependant ils occupent par leur beauté un rang de premier ordre dans la hiérarchie des créatures. Grande est la joie du pauvre quand on vient ainsi lui annoncer le bonheur sans travail. Le mendiant à qui vous dites que le monde va être à lui, et que, passant sa vie à ne rien faire, il est un noble dans l’Église, si bien que ses prières sont de toutes les plus efficaces, ce mendiant-là devient vite dangereux. On l’a vu dans le mouvement des derniers messianistes de Toscane. Les paysans endoctrinés par Lazaretti, ayant perdu l’habitude du travail, ne voulurent plus reprendre leur vie habituelle. Comme en Galilée, comme dans l’Ombrie du temps de François d’Assise, le peuple s’imagina conquérir le ciel par la pauvreté. Après de tels rêves, on ne se résigne pas à reprendre le joug. On se fait apôtre, plutôt que de reprendre la chaîne qu’on avait crue brisée. Il est si dur de se courber tout le jour sous un labeur humiliant et ingrat !

Le but du christianisme n’était en rien le perfectionnement de la société humaine, ni l’augmentation de la somme de bonheur des individus. L’homme tâche de s’arranger le moins mal possible sur la terre, quand il prend au sérieux la terre et les quelques jours qu’il y passe. Mais, quand on lui dit que la terre est sur le point de finir, que la vie n’est qu’une épreuve d’un jour, l’insignifiante préface d’un idéal éternel, à quoi bon l’embellir ? On ne s’applique pas à décorer, à rendre commode la masure où l’on ne fait qu’attendre un instant. C’est surtout dans la relation du christianisme avec l’esclavage que ceci apparut avec évidence. Le christianisme contribua éminemment à consoler l’esclave, à rendre son sort meilleur ; mais il ne travailla pas directement à supprimer l’esclavage. Nous avons vu que la grande école de jurisconsultes sortie des Antonins est toute possédée de cette idée que l’esclavage est un abus, qu’il faut doucement supprimer. Le christianisme ne dit jamais : « L’esclavage est un abus. » Néanmoins, par son idéalisme exalté, il servit puissamment la tendance philosophique qui, depuis longtemps, se faisait sentir dans les lois et dans les mœurs.

Le christianisme primitif fut un mouvement essentiellement religieux. Tout ce qui, dans l’organisation sociale du temps, n’était pas lié avec l’idolâtrie lui parut bon à garder. L’idée ne vint jamais aux docteurs chrétiens de protester contre le fait établi de l’esclavage. C’eût été là une façon d’agir révolutionnaire, tout à fait contraire à leur esprit. Les droits de l’homme ne sont en rien une chose chrétienne. Saint Paul reconnaît complètement la légitimité de la possession chez le maître. Pas un mot, dans toute l’ancienne littérature chrétienne, pour prêcher la révolte à l’esclave, ni pour conseiller au maître l’affranchissement, ou seulement pour agiter le problème de droit public que fait naître chez nous l’esclavage. Ce sont des sectaires dangereux, comme les carpocratiens, qui parlent de supprimer les différences de personnes[58]. Les orthodoxes admettent la propriété comme absolue, qu’elle ait pour objet un homme ou une chose. L’affreux sort de l’esclave ne les touche pas à beaucoup près autant que nous[59]. Pour quelques heures que dure la vie, qu’importe la condition de l’homme ? « As-tu été appelé esclave, ne t’en soucie pas ; si tu peux te libérer, profites-en… L’esclave est l’affranchi du Seigneur, l’homme libre est l’esclave du Christ… En Christ, il n’y a plus de Grec ni de Juif, d’esclave ni d’homme libre, d’homme ni de femme[60]. » Les mots servus et libertus sont extrêmement rares sur les tombes chrétiennes[61]. L’esclave et l’homme libre sont également servus Dei, comme le soldat est miles Christi. L’esclave, d’un autre côté, se dit hautement l’affranchi de Jésus[62].

Soumission et attachement consciencieux de l’esclave envers le maître, douceur et fraternité de la part du maître à l’égard de l’esclave, à cela se borne, en pratique, la morale du christianisme primitif sur ce point délicat[63]. Le nombre des esclaves et des affranchis était très considérable dans l’Église[64]. Jamais celle-ci ne conseilla au maître chrétien qui avait des esclaves chrétiens de les affranchir ; elle n’interdit même pas les châtiments corporels, qui sont la conséquence presque inévitable de l’esclavage[65]. Sous Constantin, la faveur de la liberté parut rétrograder[66]. Si le mouvement qui part des Antonins se fût continué dans la seconde moitié du iiie siècle et dans le ive siècle, la suppression de l’esclavage fût venue par mesure légale et avec rachat. La ruine de la politique libérale et les malheurs du temps firent perdre tout le terrain que l’on avait gagné. Les Pères de l’Église parlent de l’ignominie de l’esclavage et de la bassesse des esclaves dans les mêmes termes que les païens[67]. Jean Chrysostome, au ive siècle, est à peu près le seul docteur qui conseille formellement au maître l’affranchissement de son esclave comme une bonne action[68]. Plus tard, l’Église posséda des esclaves et les traita comme tout le monde, c’est-à-dire assez durement[69]. La condition de l’esclave d’Église fut même empirée par une circonstance : savoir l’impossibilité d’aliéner le bien de l’Église. Qui était son propriétaire ? qui pouvait l’affranchir ? La difficulté de résoudre la question éternisa l’esclavage ecclésiastique et amena ce singulier résultat que l’Église, qui en réalité a tant fait pour l’esclave, a été la dernière à posséder des esclaves[70]. Les affranchissements se faisaient en général par testament ; or l’Église n’avait pas de testament à faire. L’affranchi ecclésiastique restait sous le patronat d’une maîtresse qui ne mourait pas[71].

C’est d’une façon indirecte et par voie de conséquence que le christianisme contribua puissamment à changer la situation de l’esclave et à hâter la fin de l’esclavage. Le rôle du christianisme, dans la question de l’esclavage, a été celui d’un conservateur éclairé, qui sert le radicalisme par ses principes, tout en tenant un langage très réactionnaire. En montrant l’esclave capable de vertu, héroïque dans le martyre[72], égal de son maître et peut-être son supérieur au point de vue du royaume de Dieu, la foi nouvelle rendait l’esclavage impossible. Donner une valeur morale à l’esclave, c’est supprimer l’esclavage. Les réunions à l’église, à elles seules, eussent suffi pour ruiner cette cruelle institution. L’Antiquité n’avait conservé l’esclavage qu’en excluant les esclaves des cultes patriotiques[73]. S’ils avaient sacrifié avec leurs maîtres, ils se seraient relevés moralement. La fréquentation de l’église était la plus parfaite leçon d’égalité religieuse. Que dire de l’eucharistie, du martyre subi en commun ? Du moment que l’esclave a la même religion que son maître, prie dans le même temple que lui, l’esclavage est bien près de finir[74]. Les sentiments de Blandine et de sa « maîtresse charnelle »[75] sont ceux d’une mère et d’une fille. À l’église, le maître et l’esclave s’appelaient frères[76]. Même sur la matière la plus délicate, celle du mariage[77], on voyait des miracles, certains affranchis épouser des dames nobles, des feminae clarissimae.

Comme il est naturel de le supposer, le maître chrétien amenait le plus souvent ses esclaves à la foi, sans y mettre pourtant une indiscrétion qui eût peuplé l’Église de sujets indignes[78]. C’était une bonne action d’aller au marché à esclaves et, en se laissant guider par la grâce, de choisir quelque pauvre corps à vendre pour lui assurer le salut. « Acheter un esclave, c’est gagner une âme »[79] devint un proverbe courant. Un genre de prosélytisme, plus ordinaire et plus légitime encore, consistait à recueillir les enfants trouvés, qui devenaient alors alumni chrétiens[80]. Parfois, certaines Églises rachetaient à leurs frais un de leurs membres de condition servile. Cela excitait fort les désirs des malheureux moins favorisés. Les docteurs orthodoxes n’encourageaient pas ces dangereuses prétentions : « Qu’ils continuent de servir pour la gloire de Dieu, afin qu’ils obtiennent de Dieu une liberté bien meilleure[81]. » L’esclave ou plutôt l’affranchi arrivait aux plus importantes fonctions ecclésiastiques, pourvu que son patron ou son maître n’y fît pas d’opposition[82].

Ce que le christianisme a fondé, c’est l’égalité devant Dieu. Clément d’Alexandrie[83], Jean Chrysostome surtout[84] ne manquent jamais une occasion de consoler l’esclave, de le proclamer frère de l’homme libre et aussi noble que lui, s’il accepte son état et sert pour Dieu, volontiers et de cœur. Dans sa liturgie, l’Église a une prière « pour ceux qui peinent dans l’amer esclavage[85] ». Déjà le judaïsme avait professé sur le même sujet des maximes relativement humaines[86]. Il avait ouvert aussi large que possible la porte des affranchissements[87]. L’esclavage entre Hébreux était fort adouci[88]. Les esséniens et les thérapeutes allèrent plus loin : ils déclarèrent la servitude contraire au droit naturel et se passèrent complètement du travail servile[89]. Le christianisme, moins radical, ne supprima point l’esclavage, mais il supprima les mœurs de l’esclavage. L’esclavage est fondé sur l’absence de l’idée de fraternité entre les hommes ; l’idée de fraternité en est le dissolvant. À partir du ve siècle, l’affranchissement, le rachat des captifs furent les actes de charité les plus recommandés par l’Église[90].

Ceux qui ont prétendu voir dans le christianisme la doctrine révolutionnaire des droits de l’homme et dans Jésus un précurseur de Toussaint Louverture se sont trompés complètement. Le christianisme n’a inspiré aucun Spartacus ; le vrai chrétien ne se révolte pas. Mais, hâtons-nous de le dire, ce n’est point Spartacus qui a supprimé l’esclavage : c’est bien plutôt Blandine ; c’est surtout la ruine du monde gréco-romain. L’esclavage antique n’a, en réalité, jamais été aboli ; il est tombé ou plutôt il s’est transformé. L’inertie où s’enfonça l’Orient à partir du triomphe complet de l’Église, au ve siècle, rendit l’esclave inutile. Les invasions barbares en Occident eurent un effet analogue. L’espèce de détachement général qui s’empara de l’humanité à la suite de la chute de l’empire romain amena d’innombrables affranchissements[91]. L’esclave fut une victime survivante de la civilisation païenne, reste presque inutile d’un monde de luxe et de loisir. On crut racheter son âme des terreurs de l’autre vie en délivrant ce frère souffrant ici-bas[92]. L’esclavage, d’ailleurs, devint surtout rural et impliqua un lien entre l’homme et la terre, qui devait un jour devenir la propriété[93]. Quant au principe philosophique que l’homme ne doit appartenir qu’à lui-même, c’est bien plus tard qu’il apparaît comme un dogme social. Sénèque, Ulpien l’avaient proclamé d’une façon théorique ; Voltaire, Rousseau et la Révolution française en firent la base de la foi nouvelle de l’humanité.

  1. Constit. apost., II, 34.
  2. Ἐπὶ γῆς διατρίϐουσιν, ἀλλ’ ἐν οὐρανῷ πολιτεύονται. Cf. Tert., Apol., 38, et l’uranopolis des stoïciens. Clém. d’Alex., Strom., IV, xxvi, fin.
  3. Actes de saint Pione, § 18 ; Le Blant, Inscr., I. p. 122-123 ; Man. d’épigr. chrét., p. 5-8 ; Jean Chrys., Homil. in sanctum Lucianum, Montf., II, p. 528.
  4. Clém. d’Alex., Strom., IV, 4.
  5. Infructuosi in negociis dicimur. Tertullien, Apol., 42, Cf. Ælius Aristide, Opp., II, p. 403, édit. Dindorf.
  6. L’auteur de l’épître à Diognète (voir ci-dessus, p. 426) admet cette définition. Voir aussi Celse, dans Orig., VIII, vers la fin.
  7. Ἴδιον στρατόπεδον εὐσεϐείας… ἄλλο σύστημα πατρίδος κτισθὲν λόγῳ θεοῦ. Origène, VIII, 73, 75.
  8. Orig., Contre Celse, III, 30.
  9. Épître à Diogn., 6.
  10. L’indication de la filiation et de la patrie est rare dans les inscriptions chrétiennes. Le Blant, Inscr., I, p. 124 et suiv., 128 et suiv. Il en est de même pour l’hérédité. Ibid., p. 131-133.
  11. Épître à Diogn., 6.
  12. Lire la plaisante scène du Philopatris. À partir de la fin du ive siècle, les choses changent. L’empire est devenu chrétien, et mourir pour lui, c’est mourir pour l’Église. Le Blant, le Détachement de la patrie, p. 23-25.
  13. Zénon, Chrysippe, Sénèque, Épictète, Marc-Aurèle, surtout Épictète, Diss., I, 9 ; II, 10 ; III, 24 ; Plut., De fort. Alex., 6.
  14. Tertullien, Ad Scap., 2.
  15. « Tolerare Christi famuli jubentur… pessimam etiam, si ita necesse est, flagitiosissimamque rempublicam, et, in illa angelorum quadam sanctissima atque augustissima curia cælestique republica, ubi Dei voluntas lex est, clarissimum sibi locum etiam ista tolerantia comparare. » Saint Augustin, De civ. Dei, II, 19.
  16. Ou celui qui tint la plume pour lui dans la Iª Petri.
  17. Le Blant, dans les Comptes rendus de l’Acad. des sc. mor. et pol., 1879, 1er sem., p. 379 et suiv.
  18. Voir ci-dessus, p. 276 et suiv.
  19. Tertullien, De corona, 11 ; De fuga in persec., 14 ; De idol., 19 ; Eusèbe, H. E., VIII, iv ; Actes de saint Maximilien.
  20. Saint Martin, saint Victricius, saint Taraque. Voir Le Blant, Inscr. chrét., I, p. 84-87 ; Comptes rendus de l’Acad. des sc. mor. et pol., loc. cit. Διὰ τὸ ἐχθρὸν εἷναι τὸ τοιοῦτο αὐτοῖς διὰ τὸν θεὸν ὃν φοροῦσι κατὰ συνείδησιν. Rescrit supposé de Marc-Aurèle.
  21. Clém. d’Alex., Pædag., III, xi, p. 106.
  22. Orig., Contre Celse, VIII, 73.
  23. Orig., Contre Celse, VIII, 73, 74, 75. Οὐ συστρατευόμεθα μὲν αὐτῷ (βασιλεῖ) κἂν ἐπείγῃ. Comp. saint Augustin, Epist., cxxxviii, ad Marcellinum, c. ii, § 15.
  24. Tertullien, De pallio, 5.
  25. Dig., L, ii, 3, § 3. Eis qui judaïcam superstitionem sequantur.
  26. Tertullien, De idol., 15 ; De spect., 26 ; De corona, 13 ; Constit. apost., II, 62.
  27. I Cor., vi, 1 et suiv. ; Clém. Rom., 48 ; Pseudo-Clém. ad Jac., 10 ; Homil., iii, 67. Voir ci-dessus, p. 97. Cf. Tertullien, De pudic., 2. Il en était de même chez les juifs et même chez les philosophes (Lucien, Eunuch., 1).
  28. I Cor., vii, 39 ; Tertullien, Ad ux., II, 2, 3, 6, 7, 8 ; De monog., 11 ; saint Cyprien, De lapsis, 6 ; concile d’Elvire, ch. xv, xvi. Le judaïsme ne les admit jamais, pas plus que le christianisme. Exode, xxiv, 16 ; Deutér., xxiii, 3 ; Esdras, x, 2, 7, 10 ; Nehem., xiii, 30 ; Talm. de Bab., Aboda zara, 36 b. Voir aussi Maimonide, Unions prohibées, ch. xii ; Eben haézer, I, p. 88 et suiv.
  29. Constit. apost., I, 4 ; II, 62.
  30. Actes coptes dits du concile de Nicée, dans les Arch. des miss., 3e série, t. IV, p. 468 et suiv. (Revillout).
  31. Tertullien, De idol. entier.
  32. Tertullien, Contre Hermogène.
  33. Talm. de Bab., Pesahim, 50 a.
  34. Duruy, Hist. rom., V, p. 487 et suiv. Cf. Paul, V, xxii, 1.
  35. Digeste, XLVIII, ii, 10, De accusationibus.
  36. Platon, Républ., V, iii, 4 ; Aristote, Polit., III, 5 ; IV, 8 ; Xénoph., Œcon., IV, 2 ; Plut., Périclès, 2.
  37. Cic., Tusc., V, 36 ; De off., I, 42 ; Pro Flacco, 18 ; Pro domo sua, 33 ; Sénèque, De benef., VI, 18 ; Val. Max., V, ii, 10 ; Suétone, Claude, 22 ; Dion Chrys., Or., xxiv, t. II, p. 43, Reiske ; Celse, dans Orig., I, 28, 29.
  38. Constit. apost., I, 4.
  39. De Rossi, Inscr. christ., I, p. 49, no 62 (amatrix pavperorvm et operaria) ; Bull., 1865, p. 52-53 (laborvm avtrix) ; Garrucci, Dissert, arch., II, p. 161 (cvmlaboronæ suæ) ; Marchi, Monum., p. 27 (amicvs pavpervm).
  40. I Cor., v, 10, 11 ; vi, 10, etc.
  41. Il faut envisager comme une exception le curieux tableau que présente Philosoph., IX, 12.
  42. Prov. iii, 27-28 ; x, 2 ; xi, 4 ; xxii, 9 ; xxviii, 27 ; Dan., iv, 24 ; Talm. de Jér., Peah, i, 1 ; Talm. de Bab., Kethouboth, 50 a ; Josèphe, Contre Apion, II, 39. Voir surtout le fils de Sirach, le livre de Tobie, les Actes, etc.
  43. Ps. xl, 2, etc.
  44. Talm. de Jér., Peah, i, 1.
  45. Μιμήσασθε ἰσότητα θεοῦ, καὶ οὐδεὶς ἔσται πένης. Cerygma Petri et Pauli, Hilg., IV, p. 59, 65.
  46. Voir ci-dessus, p. 597.
  47. La même antipathie se remarque chez les philosophes. Lucien, Nigrinus, 12 et suiv.
  48. Tertullien, Ad ux., II, 8 ; Apol., 3, Ad nat., I, 4 ; Min. Félix, 36 ; Clém. d’Alex., Quis dives salvetur, 2 ; Actes des martyrs, voir Le Blant, Rev. arch., avril 1880, p. 234 et suiv.
  49. Clém. d’Alex., Quis dives salv., 3 ; Pseudo-Ign., ad Polyc., 4.
  50. Hermas, vis. iii, 2, 6 ; mand. ix, 3 et suiv. ; Minucius Félix, 16 ; Tertull., De pat., 7 ; saint Cyprien, De lapsis, 11 ; Orig., Contre Celse, VII, 18.
  51. Clém. d’Alex., Quis dives salv. ; Origène, Exhort. ad mart., 14, 15 ; Le Blant, Revue arch., avril 1880, p. 326-327.
  52. Dum modo lætentur saginati vivere porci. Commodien, Carmen apol., v. 19.
  53. Lucien, Peregr., 13.
  54. Lire surtout Salvien.
  55. Voir les inscriptions chrétiennes de Syrie, notamment celle de saint Christophe (Kabr-Hiram).
  56. Voir le mémoire de M. Jourdain, Mém. de l’Acad. des inscr., t. XXVIII, 1re partie. Cf. Philos., IX, 12.
  57. Voir surtout les conciles de Tolède, sous les Visigoths.
  58. Clém. d’Alex., Strom., III, ii.
  59. Pierre d’Alexandrie, dans Lagarde, Reliquiæ juris eccl. ant., p. 66 ; saint Augustin, De serm. domini in monte, I, 59 (Opp. III, 2e part., col. 192) ; conc. de Gangres, canon 3 ; Léon le Grand, Epist. (Hardouin, Conc., I, 1752 et suiv.) ; conc. de Carth. de 419, canon 129 ; iiie conc. de Rome sous Symmaque ; Grég. le Grand, Epist., l. IX, ép. 65.
  60. Voir Saint Paul, p. 257, 436-437. Cf. Pseudo-Ign., ad Polyc., 4 ; Tatien, Adv. Gr., 4, 11 ; Tertullien, De cor., 13 ; De pat., 15 ; Lactance, Instit., V, 15.
  61. Le Blant, Inscr. chrét., I, p. 86, 117 et suiv. ; de Rossi, Bull., 1866, p. 24-25.
  62. Réponse d’Évelpiste, dans les Actes de saint Justin, 4. Comp. Le Blant, Inscr., I, p. 122 et suiv.
  63. Éphes., vi, 5-9 ; Col., iii, 22 ; Tit., ii, 9 ; I Petri, ii, 18 ; l’Égl. chrét., p. 99 ; Barnabé, 19 ; Clém. d’Alex., Pædag., III, ch. xi et xii ; Pseudo-Ign., ad Polyc., 4.
  64. Le Blant, Inscr., I, p. 118 et suiv. ; Tertullien, Apol., 1, 3 ; Ælius Aristide, Opp., II, p. 405 (Dindorf).
  65. Philosoph., IX, 12 ; Constit. apost., IV, 6, 12 ; conc. d’Elvire, canon 5 ; Jean Chrys., Adv. jud., viii, 6 ; saint Grég. le Grand, Epist., IX, ép. 65. Voir, au contraire, Clém. d’Alex., Pæd., III, xii, p. 113.
  66. Wallon, Hist. de l’escl., livre III, ch. x, § 1 et 2.
  67. Saint Augustin, In Ps., xcix, § 7 ; Salvien, De gubern. Dei, IV, 2 ; Jean Chrys., De virgin., 52.
  68. Jean Chrys., hom. xl, 5, in Epist. I ad Cor. ; hom. xxii, 2, in Eph. ; argum. in Philem. ; hom. xi, 3, in Acta Apost. ; sermo V, 1, in Gen. Cf. saint Grég. le Grand, Epist., VI, 12.
  69. Saint Grégoire le Grand, Epist., IX, 102 ; X, 3, 66 ; XI, 23 ; XII, 25, 36, 46.
  70. Concile d’Épone, serfs de saint Claude.
  71. Liberti Ecclesiæ, quia nunquam moritur eorum patrona, a patrocinio ejus nunquam discedant. 4e conc. de Tolède (en 633), can. 68, 70, 74 ; 4e conc. d’Orl. (en 541), can. 9 ; Décret, 1ª pars, dist. liv ; 2ª pars, causa xii, quæst. 2, ch. lv et suiv. Voir Revue crit., 26 avril 1880, p. 332.
  72. Se rappeler Blandine, Félicité, Potamiène.
  73. Caton. De re rustica, 143.
  74. On peut objecter l’esclavage musulman ; mais cet esclavage est plutôt une institution tutélaire qu’une vraie servitude.
  75. Σαρκίνη δέσποινα. Lettre des Églises, dans Eus., V, i, 18.
  76. Lactance, Div. inst., V, 16.
  77. De Rossi, Bull., 1866, p. 23, 35 et suiv. ; Tert., Ad ux., II, 8 ; Philos., IX, 11.
  78. Voir Tertullien, De idol., 17 ; concile d’Elvire, can. 41 ; Constit. apost., VIII, 32 (Lagarde, Reliquiæ, p. 87). Notez l’épisode de Carpophore et Calliste, Philos., IX, 12.
  79. Constit. apost., II, 62. Σωμάτιον πρίασθαι καὶ ψυχὴν περιποιήσασθαι. Cf. ibid., IV, 9.
  80. Ce mot est fréquent dans les inscriptions. Le Blant, I, p. 126, 409-411 ; de Rossi, Bull., 1866, p. 24-25. Cf. Tertullien, Apol., 9, 42. Notez aussi les noms de Projectus, Projecticius.
  81. Pseudo-Ign., Ad Polyc., 4.
  82. Exemple de Calliste (Philos., IX) ; plus tard l’intendant de Simplicia (Grégoire de Nazianze, Epist., 79). Const. apost., VIII, 73 ; Can. apost., 81 ; Bunsen, Analecta ante-nicæna, III, p. 30.
  83. Ἄνθρωποι γάρ εἰσιν ὡς ἡμεῖς · ὁ γὰρ θεὸς πᾶσιν τοῖς ἐλευθέροις καὶ τοῖς δούλοις ἐστὶν, ἂν σκοπῇς, ἴσος. Clém. d’Alex., Pædag., III, xii, surtout p. 113. Cf. Strom., IV, 19.
  84. Opp., I, 784 ; IV, 290 ; X, 164, 165 ; XI, 165, 166 ; XII, 346.
  85. Constit. apost., VIII, 10. Cf. Clém. d’Alex., Strom., II, 18 ; saint Cyprien, Epist., 60.
  86. Deutér., v, xvi, xxiii ; Prov., xxx, 10 ; Talm. de Bab., Ghittin, 45 a ; cf. Maimonide, traité de l’Esclavage. Jésus, fils de Sirach, est cependant très dur, xxxiii, 25 et suiv.
  87. Inscr. de Crimée, Journ. asiat., juin 1868, p. 525 et suiv.
  88. Zadoc Kahn, l’Escl. selon la Bible et le Talm., p. 25, 116, 141 ; Rabbinowicz, Législ. civ. du Th., p. lvi et suiv.
  89. Philon, De vita cont., 9.
  90. Voir les faits groupés par M. Paul Allard, les Escl. chrét., p. 327 et suiv., 337 et suiv.
  91. Nombreuses chartes d’affranchissement « à l’approche du soir du monde ».
  92. Affranchissements par testament, pro redemptione animæ suæ, vers l’an 500. Le Blant, Inscr. chrét. de la Gaule, nos 374 et 379, ou pro remedio animæ (Le Blant, II, p. 7-8).
  93. La substitution de sclavus à servus se fit quand les Othons vendirent en masse les populations slaves d’au delà de l’Elbe. Voir le Polyptyque d’Irminon de M. Guérard, I, p. 283.