Aller au contenu

Origine et progrès de la puissance des Sikhs/Chapitre IV

La bibliothèque libre.

CHAPITRE IV.


Commencemens du règne de Randjit Singh. — Il s’agrandit aux dépens des autres serdars sikhs. — Traité avec le gouvernement anglais. — Il renonce à la rive orientale du Satledj.


1794-1808.


Dans le cours des années 1795, 1796 et 1797, le Penjab fut deux fois exposé aux invasions du shah Zaman, qui venait de remplacer le pacifique Timour sur le trône de Caboul. Les Sikhs n’osèrent pas lui résister en rase campagne, et ses expéditions occasionèrent une immense confusion, car elles forcèrent les serdars dont il traversa les possessions à les abandonner momentanément. En 1798, le shah se présenta encore une fois, et entra à Lahor sans rencontrer d’obstacles ; mais, après quelques mois de séjour, voyant qu’il lui était impossible de fonder un établissement durable dans le pays, ou de tirer quelque avantage de l’occupation du Penjab, il retourna dans ses possessions héréditaires à l’ouest de l’Indus, et les serdars sikhs rentrèrent chacun dans les terres qu’il avait évacuées à l’approche du shah. Randjit Sing était un de ceux qui s’étaient retirés devant le shah, car il fit comme tous les serdars qui se trouvèrent dans les mêmes circonstances que lui ; il abandonna son misal ; il employa le temps du séjour du shah à Lahor à faire une expédition au-delà du Satledj pour lever les tributs et réduire sous son autorité les villes ou villages dont il put s’emparer.

Après la retraite du shah, Randjit Sing songea aux moyens de s’assurer la possession de Lahor : il fut encouragé dans ce dessein par sa belle-mère Sada Kounwar, qui lui promit d’appuyer l’exécution de ses vues. Lahor était à cette époque possédée en commun par Tcheït Singh, Mohar Singh et Saheb Singh. Mais Randjit Singh, par un important service qu’il rendit à Zaman Shah, sut obtenir de ce prince la permission d’en prendre possession. Les Afghans avaient été obligés de quitter précipitamment le Penjab pour s’opposer aux desseins de la Perse sur Hérat, desseins qu’elle couvrait du prétexte de secourir Shah Mahmoud. En arrivant sur les bords du Djilam, l’armée afghane trouva le fleuve débordé par les pluies, ce qui rendait impossible le passage de l’artillerie. Ne voulant pas être arrêté par cette circonstance, Shah Zaman jeta ses canons dans le fleuve, et écrivit à Randjit Sing de les retirer et de les lui envoyer, lui faisant espérer qu’il l’aiderait à réaliser ses vues ambitieuses sur Lahor en échange du service qu’il demandait. Le Sikh retira huit canons sur douze du lit de la rivière où ils avaient été ensevelis, et les renvoya au shah, dont il reçut en retour l’investiture qu’il désirait. Les quatre autres canons ne furent retirés du Djilam qu’en 1823 ; ils sont maintenant déposés à l’arsenal de Lahor[1].

Armé de cette autorité influente sur la population musulmane de la ville, et appuyé par le crédit et les troupes de Sada Kounwar, Randjit Singh fit ses préparatifs pour s’emparer de Lahor. Les trois chefs sikhs qui l’occupaient étaient dissolus, débauchés et insoucians des moyens qui pouvaient assurer leur sécurité. Ils n’avaient que peu de troupes ou de vassaux, et leur administration était impopulaire au dernier degré. Pour préparer le succès de ses desseins, Randjit envoya Kazi Abdour Rahman, natif de Rasoulnagar, pour nouer des intelligences avec les principaux habitans musulmans. Mir Mohkam, intendant de Tcheït Singh, Mohammed Ashik et Mir Shadi promirent d’appuyer le projet, et s’engagèrent à livrer l’une des portes de la ville à Randjit Singh. Il s’avança donc, accompagné de sa belle-mère, et fut reçu dans la ville sans obstacle. Tcheït Singh et ses deux associés furent trop heureux d’accepter des djagirs. Randjit Sing établit ainsi son autorité dans la ville, et avisa aux moyens de conserver sa conquête. Cette heureuse tentative sur une ville si fameuse excita la jalousie des serdars, ses rivaux, qui réunirent leurs troupes à Basim dans l’intention de reconquérir Lahor. Goulab Singh Bhangi, Saheb Singh de Goudjrat, et Nadjam-oud-din de Kasour, étaient à la tête de la confédération, et se distinguaient surtout par leur animosité contre Randjit Singh. Mais après quelques mois de débats et quelques escarmouches sans résultat, les serdars, voyant le jeune chef bien préparé à la résistance, abandonnèrent leur entreprise, et depuis lors la ville est toujours restée au pouvoir de Randjit Singh.

Les Musulmans de Kasour, ville considérable située à environ 25 kôs[2] S. E. de Lahor, avaient encouru le juste ressentiment de Randjit Singh, autant à cause de la part que leur chef avait prise à la coalition que des déprédations commises par eux aux portes de Lahor. Sa preinière expédition fut dirigée contre eux, et de 1801 à 1802 Nadjam-oud-din fut forcé de se soumettre à Randjit Singh ; il se reconnut pour son vassal, et s’engagea à lui fournir un contingent de troupes sous les ordres de son frère Koutab-oud-din. Dans la même année, le jeune chef étant venu se baigner au réservoir sacré du gourou Ram Dos à Taran Turan, y rencontra le serdar Fateh Singh, de Alouwala-misal, et contracta avec lui des liens d’amitié, scellés par un échange de turbans.

L’année 1802 fut marquée par la naissance de Kharak Singh[3], l’héritier présomptif du maha-radja Randjit Singh : il naquit de Rad Kounwar, fille de Khadjan Singh de Naki. Dans la même année, le fort de Tcheniot, occupé par Djasa Singh, fils de Karam Singh Doulou, chef des Bhangis, fut assiégé et pris, après une courte résistance, par Randjit Singh, qui n’assigna au chef vaincu pour sa subsistance qu’une rente insignifiante[4].

Au mois de décembre 1862, Randjit Singh réunit ses troupes à celles de Sada Kounwar et du chef Alouwala, et les forces des trois misals alliés vinrent attaquer la famille de Goulab Singh, le dernier serdar puissant du Bhangi-misal, qui avait toujours été en guerre avec Maha Singh, et s’était mis à la tête de la ligue formée dans le but de recouvrer Lahor. Goulab Singh était mort en 1800, laissant sa veuve Rani Soukha pour tutrice de son jeune fils Gourdat Singh. Le moment était opportun pour renverser à jamais la puissance des Bhangis. Rani Soukha fut donc sommée de rendre le fort de Lohgarh à Amritsar, et le grand canon Banghi, enfin de se soumettre aux confédérés. Incapable de résister, la veuve abandonnée évacua Lohgarh, et s’enfuit avec son enfant et sa famille, qui depuis a toujours vécu dans l’indigence et l’obscurité[5].

Pendant ces événemens, une discorde de famille ensanglanta Kasour : Nadjam-oud-din fut assassiné, et remplacé dans son serdari par son frère Koutab-oud-din. Les circonstances paraissant favorables, Randjit Singh, avec toutes les forces de ses alliés, envahit le territoire de Kasour ; mais, après trois mois de pillage dans le pays ouvert, voyant qu’il ne pouvait rien contre les places fortes qui sont nombreuses dans ce district, il accepta un paiement en argent et se retira. Pendant cette année Sansar Teband, radja de Kôt Kangra, dans les montagnes, descendit dans les plaines et pilla quelques villages du territoire de Sada Kounwar, situés dans le Ghani-misal. Mais Sada Kounwar invoqua le secours de son gendre, qui arriva immédiatement avec Fateh Singh Alouwala et eut bientôt chassé les montagnards. Il saisit cette occasion pour assiéger Soudjanpour, occupé par Boudh Singh Bhagat, qui fut obligé de payer une forte somme d’argent, de livrer une grosse pièce d’artillerie et les trois districts de Bahrampour, Dharamkot et Soukhalgarb.

Du Douab de Djalandhar, où ces événemens l’avaient amené, Randjit Singh passa le Ravi et retourna à Lahor, en faisant un détour par Salkot et Rasoulnagar et pillant tout ce qu’il rencontrait. La veuve de Tchour Mal fut, dans cette expédition, dépossédée de Phagwara, abandonné à Fateh Singh Alouwala en récompense de ses services. Sansar Tchand osa encore, vers la fin de l’année (1804) redescendre dans la plaine et prendre quelques villes dans le Djalandhar, mais il se retira à l’approche de Randjit Singh et de ses alliés. En février suivant, le radja des montagnes reparut encore et prit Hosheiarpour et Bidjwara, où il essaya de s’établir définitivement. Mais il fut chassé de ces deux villes par les Sikhs, et Randjit Singh, après cette expédition, fit une tournée financière, si l’on peut parler ainsi. Il se fit donner, à titre de présens ou de tributs, des sommes considérables par les vieux-chefs sikhs Tara Singh Gheïba, Dharam Singh d’Amritsar et Boudh Singh de Feizoullapour. Cette conduite excita la jalousie et les craintes de tous les serdars qui avaient joui jusque-là de leur indépendance et d’une possession non contestée. Ils voyaient bien que Randjit Singh voulait leur imposer sa suzeraineté ; mais ils étaient si divisés, si envieux les uns des autres, si peu capables de se donner un chef, qu’ils ne tentèrent rien et ne purent arrêter aucune mesure commune pour se délivrer de ses exactions arbitraires et le faire renoncer à ses habitudes d’amende et de confiscation à son profit, qui semblaient l’amener systématiquement à visiter les familles de tous les chefs qui mouraient. Ce fut pendant cette année que mourut aussi Dal Singh, beau-frère de Tcharat Singh, ce qui rendit, par droit de seigneurie, Randjit Singh maître d’Akalgarh[6] et de Djaminabad ; ces places étant tenues par Dal Singh comme une dépendance du Soukartchaki-misal. Dal Singh était tombé en disgrace peu de temps avant sa mort.

Les dissensions des quatre fils de Timour Shah, Hameïoun, Mahmoud, Shah Zaman et Shah Shoudja, commencèrent alors à diviser l’empire afghan, à y avilir l’autorité royale. Cet état de choses encouragea Randjit Singh à diriger ses vues vers l’ouest, et après avoir fêté le Dasrah[7], à Lahor, par des excès encore plus

violens qu’à son ordinaire, il résolut, dans l’année 1804, de chercher à s’agrandir en s’emparant des provinces de cet empire situées à l’est de l’Indus. En conséquence, il passa le Ravi en octobre, et ayant rallié les troupes des Alouwalas, il arriva à Ramnagar, sur le Tchenab, et de là à Djhang, occupé par Ahmed Khan, chef puissant. Le khan fit sa soumission et paya une forte somme aux envahisseurs. Sahiwal et Kot Maharadja, possessions de deux Musulmans béloutchis, furent ensuite visités. La reconnaissance de la suzeraineté de Randjit Singh, des chevaux et d’autres présens, les sauvèrent du pillage. La saison avançait ; on fit des préparatifs pour visiter les environs du Moultan : mais le gouverneur, Mozaffar Khan, prévint les desseins des visiteurs et détourna le fléau de ses sujets par l’envoi de nombreux et riches présens. Des rapports furent établis avec tous les chefs musulmans et les familles établies sur les rives Tchenab ou du Djilam. Quoique le total des tributs et présens reçus dans cette première expédition ne fût pas très considérable, le résultat des opérations de la saison fut cependant très avantageux pour les vues ultérieures du Sikh ambiteux. En effet, tous les chefs jusqu’à l’Indus commencèrent à voir de quel côté ils devaient tourner leurs espérances et leurs craintes ; la plupart d’entre eux se résignèrent à se soumettre au roi de Lahor et s’abstinrent dès-lors de toute relation avec la cour de Caboul et ses officiers.

En février 1805 Randjit Singh retourna dans sa capitale, établie depuis peu à Lahor, et y célébra les fêtes religieuses. Quelque temps après il se rendit avec un magnifique cortège à la fête annuelle des bords du Gange, à Hardwar, pour y faire ses ablutions : s’étant ainsi acquitté des cérémonies de sa religion, il repartit au commencement de juin et employa la saison des pluies à affermer aux enchères les revenus des districts placés sous son administration personnelle. Tel a toujours été son seul mode d’administration : le fermier a plein pouvoir, même de vie et de mort, sur ceux qui sont confiés à sa merci ; son bail n’est qu’une permission de voler.

Après le Dasrah de 1805, Randjit Singh conduisit pour la seconde fois son armée dans les pays mahométans situés entre le Tchenab et l’Indus, et le chef de Djhang fut sommé de payer un tribut annuel : la demande s’élevait à 120, 000 roupies. Mais avant la conclusion de cette affaire Randjit Singh fut rappelé par la nouvelle de l’approche de Djaswant Rao Holkar et Emir Khan, qui venaient de l’est, poursuivis par l’armée anglaise de lord Lake. Fateh Singh Alouwala resta donc pour terminer les négociations avec les chefs de l’ouest, et Randjit s’étant transporté en personne à Amritsar, y rencontra le Mahratte fugitif, avec qui il avait à jouer un rôle difficile. Djaswant Rao menaçait de continuer sa marche du côté de l’ouest jusque sur les terres du Caboul. Cependant lord Lake était arrivé jusque sur le Biah, ou Bias, et se préparait à avancer encore ; et il ne pouvait qu’être très désavantageux de laisser opérer et agir son armée dans le Penjab. D’un autre côté Randjit Singh, quoiqu’il pût trouver un auxiliaire utile en suivant un autre parti, sentait bien qu’il lui était impossible de résister. Dans ces circonstances difficiles, les rapports qu’il entretint avec Djaswant Rao Holkar furent amicaux, mais non encourageans, et ce chef, déçu dans ses espérances de déterminer les Sikhs à des hostilités contre les Anglais, céda aux difficultés qui l’accablaient et conclut un traité avec lord Lake, le 24 décembre 1805. Des témoignages d’amitié furent échangés entre le général anglais et Randjit Singh ; et dans le cours de janvier 1806, les deux armées qui avaient causé tant d’alarmes dans le Penjab rentrèrent dans l’Hindoustan, laissant les chefs sikhs célébrer le Houli en toute liberté, et avec des réjouissances proportionnées aux craintes qu’ils avaient éprouvées. Les excès auxquels Randjit Singh se livra à cette fête lui causèrent une maladie qui le retint dans l’inactivité pendant quatre mois. Cependant à la fin de la saison des pluies, il reprit la campagne et exécuta quelques desseins qui ont eu une influence matérielle sur sa destinée et sa fortune.

Les radjas de Patiala et de Naba étaient en contestation pour quelques parcelles de territoire, situées entre le village de Doladdi et la ville et le fort de Naba. Le chef Djhind, radja Bhag Singh, était allié au chef de Naba ainsi que les chefs de Ladwa et de Keïthal, mais leurs forces réunies ne pouvaient lutter avec celles de leur puissant voisin de Patiala. Dans cette extrémité Bhag Singh de Djhind, oncle maternel de Randjit Singh, fut député pour réclamer en faveur des plus faibles l’assistance de son neveu. Le Dasrah n’était pas encore passé que Randjit Singh traversa le Sattledj pour prendre part à la querelle. Il effectua son passage à Loudiana, et s’étant emparé de la place, il la remit au radja Bhag Singh, au préjudice de Rani Nouroun Nissa, mère de Rao Ilias, à qui elle appartenait ; Saniwal fut aussi pris à une veuve sans défense[8], cette classe d’occupans étant regardée par Randjit Singh comme des usurpateurs. La place fut donnée en djagir à Mokham Tchand Dewan, mais rendue peu de temps après sur l’offre d’un nazarana de 30, 000 roupies. Les troupes de Patiala ayant abandonné Doladdi, Randjit Singh s’approcha de Mansourpour où le maha-radja Saheb Singh, successeur d’Amar Singh, avait pris position avec toutes ses forces. Le maha-radja, par une somme d’argent et le don d’un pièce d’artillerie, se concilia Randjit Singh, Djaswant Singh de Naba contribua aussi à satisfaire sa cupidité. Ce fut alors seulement qu’il ramena dans le Penjab son armée mal organisée, vrai fléau qui ravageait tout sur son passage. Doladdi, sur la demande de Bhag Singh, fut rendue au Patiala, et Randjit Singh saisit l’occasion de traverser le Dewali et de faire ses ablutions dans le réservoir sacré de Thanesar. Il repassa le Satledj après s’être acquitté de ce devoir et se dirigea par Rahoun, résidence de Tara Singh Gheïba[9], sur les feux sacrés de Djawala Moukhi. Là, il rencontra Sansar Tchand de Kangra qui implora son assistance contre Amar Singh de Gourkha, qui s’appropriait la succession de tous les chefs des montagnes depuis Gogra jusqu’au Satledj, et qui faisait ravager Kangra par ses troupes. Le prix demandé par Randjit Singh pour ses services ayant paru excessif, rien ne fut conclu dans l’entrevue des deux chefs ; mais plus tard la position du radja des montagnes étant devenue encore plus difficile, la négociation fut reprise[10].

L’année 1807 fut marquée par la perte et le recouvrement de Parsour et Tchamara, possessions de Nar Singh, vieux serdar sikh qui était mort. Un djagir fut donné à son fils pour pourvoir aux besoins de som existence. Randjit Singh prépara ensuite une expédition formidable contre Kasour qui lui donnait de grands sujets d’inquiétude. Il espérait que cette conquête, faite sur des Masulmans, rehausserait sa popularité et son crédit chez les Sikhs. En février 1807, il attaqua le territoire de Kasour avec des forces considérables, et Koutab-oud-din fut réduit à se réfugier dans la ville fortifiée. Des discordes civiles et des séditions achevèrent la raine de la famille Pathan, et au mois de mars, le chef fut obligé de se rendre à discrétion. On lui laissa quelques villages au sud du Satledj, sous la condition de fournir un contingent de troupes lorsqu’il en serait requis. Kasour et tout le territoire occupé par cette famille dans le Penjab, fut repris et donné en djagir à Neïal Singh Atharawala. De Kasour Randjit Singh se dirigea au sud-ouest du côté de Moultan où il occupa et maintint quelques garnisons dans diverses dépendances de ce gouvernement. En avril, la ville de Moultan fut prise, mais le gouverneur se retira dans la citadelle où les principaux habitans s’étaient réfugiés avec ce qu’ils avaient de plus précieux. Dépourvu des moyens nécessaires pour faire un siège, Randjit Singh accepta de Mozaffar Khan une somme considérable en argent et retourna à Lahor au mois de mai[11]. Mais avant que la saison des pluies fût arrivée, il détacha quelques troupes qu’il envoya à Adina Nagar, au pied des montagnes de Kangra, et leva dans le voisinage quelques tributs sur les chefs sikhs et montagnards qui avaient été jusque-là exempts de toute redevance sous la dépendance du Ghani-misal, avec lequel Randjit avait vécu en bonne intelligence. C’était le domaine de Sada Kounwar. Une telle mesure offensa cette femme, et c’est alors que commencèrent les différends et les intrigues qui l’ont conduite plus tard à sa perte.

L’épouse du radja de Patiala était une femme ambitieuse et intrigante qui avait long-temps cherché à se débarrasser de son mari, ou au moins à faire créer un apanage séparé pour son fils mineur Karam Singh. Lorsque Djaswant Rao Holkar, en se réfugiant dans le Penjab, traversa le territoire de Patiala, elle avait essayé de s’en faire un appui. Ce chef ambitieux avait vu qu’il pourrait probablement trouver son profit à la servir, et ne l’avait point repoussée, mais pressé alors par l’approche de lord Lake, il laissa les choses au point où elles en étaient entre le radja et la Rani. La querelle s’étant réveillée, elle envoya en 1807, pendant la saison des pluies, demander appui à Randjit Singh lui promettant, en échange, une fameuse pièce de bronze qui appartenait à sa famille, et était connue sous le nom de Kari Kahn, et de plus un collier de diamans d’une grande valeur. Randjit Singh saisit cette occasion de s’immiscer dans les affaires de ses voisins, et passa le Satledj à Hariki Patan, au confluent de ce fleuve avec le Biah. Dans le mois de septembre, il s’empara sur sa route vers Patiala, de toutes les possessions qu’avait laissées en mourant Ilias Raï, et les distribua à ses serviteurs et à ses alliés. Avant que Randjit Singh eût atteint Patiala, le radja et la rani se réconcilièrent ; celle-ci ayant obtenu pour son fils, par la médiation des chefs de Djhind et de Thanesar, un djagir séparé de 50, 000 roupies de revenu. Le radja ne se pressait pas de livrer le canon et le collier promis, mais Randjit Singh en appela à la demande qu’il avait reçue et son appel étant appuyé par à force, on lui remit les deux objets, quoique ce fût avec une répugnance évidente. Randjit Singh satisfait, vint attaquer Naraïangarh, qui fut pris et donné au chef Alouwala après un assaut qui coûta aux assaillans quatre cents hommes tués ou blessés.

Devant Naraïangarh mourut le vieux chef Tara Singh Gheïba qui servait dans l’armée de Randjit Singh. Son corps fut transporté secrètement par ses serviteurs au-delà du Satledj dans sa forteresse de Rohoun où on lui rendit les derniers devoirs, tandis que sa veuve et son fils faisaient leurs préparatifs pour se maintenir dans leurs possessions. Mais lorsque le cadavre était encore sur le bûcher, un détachement des troupes de Randjit Singh, envoyé dès que l’événement fut connu, arriva pour demander la remise des trésors et s’emparer par force du territoire occupé par Tara Singh Gheïba. Après une résistance opiniâtre, la famille fut contrainte de se soumettre, et quoique les fils eussent d’abord reçu quelques secours pour pourvoir à leurs besoins, ils furent bientôt privés de tout moyen d’existence et ils ont depuis vécu dans l’indigence.

En revenant de Naraïangarh, Randjit Singh s’empara de Mounda, au sud du Satledj, sur le fils de Dharam Singh, et le vendit au serdar Djhind ; Bhalolpour et Bhartgarh furent aussi enlevés à la veuve de Bhagaïl Singh[12]. En décembre Randjit Singh retourna à Lahor où son épouse Mehtab Kounwar lui donna deux enfans jumeaux qui reçurent les noms de Shir Singh et Tara Singh. Mais Randjit Singh ne les a jamais reconnus comme ses fils. La fidélité de Mehtab Kounwar était depuis quelque temps suspecte à son époux qui l’avait en conséquence reléguée auprès de sa mère Sada Kounwar. Le bruit courut que celle-ci avait enlevé les enfans d’un charpentier et d’un tisserand et les avait produits comme ceux de sa fille, après avoir préparé depuis quelque temps le public à cet événement en faisant répandre que Mehtab était enceinte. Shir Singh a été récemment honoré d’un commandement militaire et d’un djagir, il a été heureux comme chef de l’expédition dans laquelle le prétendant mahométan Seïd Ahmed perdit la vie en 1831, mais ni l’un ni l’autre de ces enfans n’a encore été reconnu par Randjit Singh, et Tara Singh languit toujours dans l’abandon.

Le commencement de 1808 fut signalé par la prise de Pathan Kot, situé au pied des montagnes de Kangra et appartenant à Djeïmal Ghani[13] ; les chefs des montagnes ou des plaines du voisinage furent aussi soumis à des exactions. Mokham Tchand Dewan fut en même temps employé à entamer des négociations avec les chefs du Daliala Misal, à la tête desquels Tara Singh Gheïba avait toujours figuré pendant sa vie. La plupart des chefs furent confirmés dans leurs possessions, sous condition de fidélité à Randjit Singh, et sous promesse de tenir toujours prêts à la première demande leurs contingens de cavalerie. Sial Kot et Shaïkhoupoura, au sud du Satledj furent ensuite occupés et réunis au gouvernement direct de Randjit Singh par Mokham Tchand qui continua à tenir la campagne pendant la saison des pluies et s’empara de diverses places sur les deux rives du Satledj, dans la vallée d’Anandpour Makawal, et acquit à son maître tout ce qui ayait d’abord été possédé par Tarab Singh on Bhagaïl Singh.

L’étendue de ces occupations permanentes et de ces usurpations de Randjit Singh au sud et à l’est du Satledj, excitèrent les alarmes des chefs sikhs établis entre ce fleuve et la Jumna. Dans une conférence qu’ils eurent à ce sujet, il fut résolu par eux d’envoyer à Delhi une ambassade composée du radja Bhag Singh de Djhind, Bhaï Dal Singh de Keïthal, et Tcheïn Singh Dewan de Patiala, chargés de demander que leurs possessions fussent mises sous la protection du gouvernement anglais. La mission se rendit à Delhi auprès de M. Seton, résident, en mars 1808. La réponse qu’ils reçurent, bien qu’elle ne fût pas décisive, était encourageante ; on leur dit qu’on ne souffrirait pas que Rapdjit Singh étendit ses usurpations du côté de l’est à leur préjudice. Mais on n’eut pas plutôt donné à Lahor connaissance de cette mission, que Randjit Singh, sérieusement inquiet, envoya des agens aux trois chefs pour les inviter à le venir trouver leur promettant de dissiper leurs craintes. Ils se rendirent donc à son camp à Amritsar, où ils furent reçus avec une faveur et des attentions marquées. Rien ne fut épargné pour chercher à les détacher de tout projet d’alliance avec le gouvernement anglais.

On avait alors conçu de vives inquiétudes sur la possibilité d’une attaque de l’Inde par l’empereur Napoléon, et lord Minto résolut d’envoyer quelques ambassadeurs pour s’assurer de l’état des pays intéressés dans la question, et pour sonder les sentimens des chef et des peuples. La puissance sans cesse grandissante de Randjit Singh, qui venait d’établir récemment son pouvoir dans le Penjab, demandait à être arrêtée dans son cours, et d’ailleurs la collision qui avait failli résulter de ses derniers succès et de ses desseins bien connus sur la rive orientale du Satledj était encore une raison d’envoyer un agent anglais à Lahor. Monsieur et aujourd’hui sir Charles Metcalfe fut le négociateur choisi en cette occasion, et Randjit Singh reçut avis de son arrivée lorsqu’il était encore avec les chefs de Djhind et de Keïthaï. Le contenu des dépêches leur fut communiqué et devint le sujet d’une conférence et d’une délibération très agitée. On fixa Kasour pour le lieu de réception de M. Metcalfe, et en effet Randjit Singh s’y rendit en septembre 1808. L’ambassadeur fut reçu à son arrivée avec les cérémonies usitées en pareil cas, mais il avait à peine trouvé moyen de commencer la discussion des matières qu’il était venu traiter avec le chef sikh, que celui-ci leva tout à coup son camp de Kasour et passa le Satledj avec son armée. Farid Kôt fut immédiatement pris par les troupes et donné à Sada Kounwar au préjudice de Goulab Singh ; de là Randjit Singh s’avança contre le territoire musulman de Maler Kotila. La famille Pathan qui l’occupait, réduite à l’extrémité, consentit à payer une somme considérable, promettant en outre un lakh de roupies. Le radja de Patiala abandonna quelques-unes de ses propriétés comme gage du paiement. M. Metcalfe accompagna Randjit Singh à Farid Kôt, mais il protesta contre toute opération militaire à l’est du Satledj. Il s’arrêta donc près de ce fleuve jusqu’à ce que son gouvernement eût décidé ce qu’il devait faire dans cette conjoncture. Il adressa dans l’intervalle une vigoureuse remontrance contre de telles agressions commises alors même qu’il était venu pour discuter et traiter ce sujet avec Randjit Singh. Celui-ci n’en continuait pas moins d’avancer, il s’empara d’Ambala et de ses dépendances qu’il donna aux chefs de Naba et de Keïthal. Il exigea ensuite un tribut de Shahabad et Thanesar, et en retournant par Patiala il fit un fraternel échange de turbans avec le faible radja Saheb Singh. Après cette expédition il revint auprès de M. Metcalfe à Amritsar. Le gouvernement de Calcutta avait pris en octobre une détermination, et son envoyé avait reçu ordre de déclarer que le pays compris entre le Satledj et la Jumna était mis sous la protection anglaise. Quoique le gouvernement britannique n’eût pas dessein de forcer Randjit Singh à rendre les villes ou villages dont il s’était emparé jusque-là, l’envoyé devait insister sur la reddition de tout ce que Randjit Singh avait usurpé dans la dernière campagne. Pour donner plus de poids à cette demande et appuyer la négociation, un corps de troupes sous les ordres du colonel aujourd’hui sir David Ochterlony, s’avança sur les frontières ; une armée de réserve fut formée et placée sous le commandement du major général Saint-Léger, elle devait être prête à toutes les opérations que l’activité et les desseins hostiles de Randjit Singh pourraient rendre nécessaires.

Le colonel Ochterlony passa la Jumna à Bouria le 16 janvier 1809, et à son arrivée près d’Ambala les troupes de Randjit Singh se retirèrent jusqu’au Satledj. Prenant sur sa route quelques places occupées par l’armée sikhe, le commandant anglais atteignit Loudiana, sur le Satledj, et y prit position le 18 février suivant. Sa marche fut saluée par les chefs et la population, comme un gage de protection et de tranquillité ; tous rivalisaient pour lui en témoigner leur gratitude et leur satisfaction.

À cette époque Randjit Singh prétendait, dans ses conférences avec l’envoyé anglais, que la Jumna, et non le Satledj, était la limite des possessions britanniques ; il affirmait que, du droit de sa suprématie sur la nation sikhe, non moins qu’en sa qualité de souverain de Lahor, il pouvait légitimement imposer sa suzeraineté à tous les chefs de cette nation qui habitaient entre les deux fleuves. L’indépendance de Patiala et des autres principautés ne pouvait se discuter avec un chef dont la domination ne se basait que sur le pillage et l’usurpation, sur la force de son armée qui était son seul appui. Cependant l’arrivée du colonel Ochterlony sur le Satledj lui ouvrit les yeux ; il craignit, ce qui serait arrivé en effet, que s’il résistait plus long-temps on ne fit des offres de protection aux chefs du Penjab, ce qui eût contrarié ses vues ambitieuses et aurait pu l’engager dans une querelle, et peut-être dans une guerre avec une puissance contre laquelle il ne pouvait lutter : sa résolution fut aussi hâtée par un accident qui se présenta dans son camp. Le Moharram, le mois sacré de l’année des mahométans, commençait en 1809, vers les derniers jours de février ; les Musulmans qui accompagnaient l’envoyé britannique se préparèrent à célébrer la mort de Hassan et de Hussein, les deux fils d’Ali, avec les cérémonies usitées pour cette fête. Les akalis, ou prêtres fanatiques des Sikhs, prirent ombrage de cette observance de l’islamisme dans le camp sikh, sous les murs d’Amritsar[14]. Ils se réunirent sous le commandement de Phoula Singh, fanatique intraitable, et attaquèrent à coups de fusil le camp de l’envoyé anglais. Celui-ci réclama une escorte, et quoiqu’elle ne fût composée que de deux compagnies de cipayes et de soixante hommes, elle chargea résolument les agresseurs et les mit en déroute, après quoi les cercueils furent ensevelis avec le rituel ordinaire. Lorsque Randjit arriva tout était fini. Il vint aussitôt en personne faire ses excuses à l’ambassadeur, exprimant son admiration sur la discipline et l’ordre observés par le détachement anglais, promettant de faire tous ses efforts pour prévenir la répétition de pareils désordres. Cette circonstance fit une grande impression sur son esprit ; elle lui donna à réfléchir sur la faiblesse de son armée, comparée aux troupes disciplinées par les Européens ; elle le détermina à obtenir la paix en faisant les sacrifices qui lui étaient demandés.

Le gouvernement pensait qu’après s’être interposé pour arrêter les vues ambitieuses de Randjit Singh, il ne devait pas en attendre un secours bien actif dans le cas ou il aurait eu à combattre l’invasion par l’ouest. Si le danger fût devenu plus imminent de ce côté, il eût probablement paru nécessaire d’étendre davantage notre influence directe dans le Penjab, pour désarmer un chef qui s’était montré si peu notre ami. Mais avec le temps les choses s’arrangèrent ; les craintes qu’on avait eues s’évanouirent ; le seul objet auquel dut pourvoir le gouvernement anglais fut d’assurer sa frontière et de prouver son crédit et sa puissance, en exigeant de Randjit Singh des réparations pour les actes d’hostilité qu’il venait de commettre sur la rive orientale du Satledj. Randjit Singh exprima alors un vif désir d’obtenir une assurance écrite de nos intentions pacifiques et bienveillantes envers lui : aussi dès qu’on eut obtenu la reddition des places qu’il avait prises dans sa dernière campagne, un traité de paix et de mutuelle amitié fut conclu à Amritsar par notre envoyé, le 25 avril 1809. Voici son objet :

Après les préambules d’usage pour exprimer le désir de la paix et qualifier les parties contractantes :

Article 1er. — Une paix éternelle subsistera entre le gouvernement anglais et l’état de Lahor ; celui-ci sera considéré avec respect par son allié et traité sur le pied des puissances les plus favorisées ; le gouvernement anglais renonce à toute influence sur le pays et les sujets du radja, au nord du Satledj.

Art. 2. — Le radja ne pourra en aucun cas entretenir dans les villes qu’il occupe sur la rive orientale du Satledj plus de troupes qu’il n’est nécessaire pour la police de leurs territoires ; il ne commettra ni ne permettra aucune attaque contre les possessions ou les droits des chefs ses voisins.

Art. 3. — Dans le cas d’une violation des précédens articles, ou d’une atteinte portée à l’amitié qui doit unir les deux gouvernemens, ce traité sera considéré comme nul.

Le quatrième et dernier article règle l’échange des ratifications.

Après la conclusion du traité, M. Metcalfe partit le 1er mai suivant. Toutes les difficultés avec Randjit Singh furent dès-lors aplanies ; et depuis on n’a plus eu qu’à rendre nos rapports avec lui plus étroits par des lettres amicales, et des échanges de présens. Cependant les officiers anglais résidant sur la frontière reçurent ordre de surveiller sa conduite, de demander avec insistance réparation dans tous les cas où il pourrait violer le traité, soit en s’interposant entre les chefs et serdars à l’est et au sud du Satledj, soit en attaquant leurs droits et leurs territoires. Cette ligne de conduite suivie jusqu’à ce jour avec persévérance a délivré Randjit Singh de toute crainte pour lui-même : lui a fait perdre la défiance qu’il avait long-temps nourrie contre nous, et maintenant l’alliance entre les deux puissances est aussi étroite, aussi entière qu’elle peut l’être entre des états constitués comme ceux de l’Inde. Elle ne repose pas cependant sur une base plus solide que le caractère personnel de Randjit Singh et sa conviction particulière que le gouvernement anglais désire sincèrement le voir heureux et puissant, et regarderait la ruine de son empire avec les troubles et les déchiremens qui en seraient la conséquence inévitable comme un événement fâcheux pour lui-même. Nous reviendrons plus tard sur cette question.

  1. Le capitaine Murray ne dit pas que Randjit Singh obtint l’investiture du souverain afghan. Ce fait, avec les circonstances qui l’accompagnent, est raconté ici sur l’autorité du capitaine Wade. (Note de l’auteur.)
  2. Mesure itinéraire de l’Hindoustan évaluée par Rennel à 2 milles anglais ou 1735 pas géométriques, et par M. Langlès aux trois quarts d’une lieue de France.
  3. Le capitaine Wade place cet événement après la mort de Dal Singh et lorsque Randjit se mettait en mesure d’occuper son djagir et le fort d’Alipour, ce qui n’a dû arriver, suivant le capitaine Murray, qu’en 1804. L’année 1802 est cependant la date assignée par ces deux officiers à la naissance de Kharak Singh. (Note de l’auteur.)
  4. Djasa Sing de Tchandaniot ou Tcheniot se rendit, dit-on, à Randjit Singh sur la promesse qu’il serait réintégré dans ses possessions, promesse jurée sur les livres sacrés. Il n’en fut pas moins fait prisonnier et dépouillé. Randjit Singh, accusé de parjure, fit voir les livres sacrés sur lesquels il avait juré ; lorsqu’on eut enlevé les enveloppes qui devaient les couvrir, on trouva des briques au lieu de livres. (Note de l’auteur.)
  5. Goulab Singh mourut, dit-on, d’un excès de table. Lohgarh fut pris d’assaut, les assiégeans s’y étant introduits par une porte laissée ouverte pour servir d’embrasure à un énorme canon. La place fut prise pendant un orage du mois de décembre. Gourdat et sa mères étant échappés, furent pendant toute une nuit exposés au froid et à la pluie. Ils trouvèrent asile auprès de Djodh Singh, chef du Ramgarhia-misal, dont le fort de Ramgarh était peu éloigné. Randjit Singh trouva sa tante, la sœur de Maha Singh, dans le fort, mais il la renvoya dans un rath, ou chariot couvert, dès le matin suivant, partager les infortunés de Rani Soukha. (Note de l’auteur.)
  6. D’abord Alispour, possession des Musulmans Tchittas. Les Sikhs changèrent le nom de cette ville lorsqu’ils la prirent en 1770. (Note de l’auteur.)
  7. Sur cette fête, voy. le Mémoire de Sir John Malcolm, dans les Bombay Transactions, vol. III, pages 73-89. D’après sir John, dasrah vient de dasmi dasrah, la dixième nuit ; la fête tirerait ainsi son nom de sa durée ; mais cette étymologie est sévèrement critiquée par le rédacteur du Quarterly oriental Magazine (v. II, p. 226, Calcutta, 1814), qui donne pour étymologie de ce mot Daçahara, épithète de Ganga, qui signifie la déesse qui expie (ôte) les dix péchés. Cette fête est célébrée, selon cet auteur, en commémoration de la descente de cette déesse dans le mois djeïeschth (juin-juillet.) Mais comme la déesse Darga, épouse de Siva, porte aussi ce nom, ce mot peut aussi signifier la fête de cette déesse, fête autrefois nommée Dargapadja (adoration de Darga.)
  8. Maï Lakchmi, veuve de Sadha Singh. Elle demanda secours à Randjit Singh contre son fils, qui la retenait en prison.
  9. Le capitaine Wade dit que Tara Singh mourut dans cette expédition. Il évalue toutes les choses que s’appropria Randjit dans cette occasion en argent, bijoux, etc., à huit lakhs de roupies. C’est, assure-t-on, la première prise de cette importance faite par le souverain de Lahor. Mais le capitaine Murray place la mort de Tara Sing en 1807-8, pendant la seconde expédition de Randjit Singh au-delà du Satledj. Le capitaine Wade paraît avoir confondu ces deux expéditions. (Note de l’auteur.)
  10. Le résultat de l’expédition de Randjit Singh dans cette saison depuis son départ d’Amritsar jusqu’à son retour, lui rapporta, selon Khoushwakt Raï, sept éléphans, neuf pièces d’artillerie, cinquante chevaux et environ deux lakhs de roupies en argent. (Note de l’auteur.)
  11. Mozaffar Khan paya, dit-on, une somme de huit mille roupies et donna cinq chevaux. C’est au retour de cette expédition que Randjit Singh rencontra un zemindar qui venait, monté sur un beau cheval, lui offrir ses respecls. Randjit désira avoir le cheval, mais ses serviteurs trop zélés le demandèrent grossièrement. Le cavalier offensé s’élança sur l’éléphant de Randjit et le frappa. Les gardes accoururent, mais aucun ne put démonter le zemindar. Après avoir blessé ou démonté quelques-uns de ses adversaires, celui-ci fut enfin tué et son cheval pris. (Note de l’auteur.)
  12. Ce fut à cette époque, c’est-à-dire vers la fin de 1807, que Mokham Tchand se présenta à la cour de Randjit Singh, et fut élevé par lui à la dignité de dewan (ministre). Il avait déja servi en cette qualité Saheb Singh de Goujrat, et jusqu’à lui Randjit Singh n’avait pas encore eu d’officier de ce grade. (Note de l’auteur.)
  13. Khoushwakt Raï donne pour date à la prise de Pathan Kot et de Sial Kot la saison de 1807-8. (Note de l’auteur)
  14. Khoushwakt Raï dit que les Akalis voulaient attaquer la mission pendant la nuit, et que pour prévenir leurs desseins, Randjit Singh envoya cinq cents hommes de ses meilleures troupes pour protéger le camp de sir Charles Metcalfe. Le matin, sir Charles s’éloigna d’Amritsar, et les Akalis exhumèrent les cercueils des Musulmans et les brûlèrent avec tout ce que ceux-ci avaient abandonné. (Note de l’auteur.)