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Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/293

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pour 10 fr. et remette cette somme à B en lui disant : Donnez-moi le chapeau immédiatement, ou, si vous voulez un délai d’un an, vous me restituerez une semaine de travail, plus deux heures, ou bien 10 fr., plus un vingtième en sus. Nous rentrons tout à fait dans l’hypothèse précédente.

D’accord, je l’espère du moins, sur la légitimité du crédit, voyons maintenant à quels arrangements il peut donner lieu.

B peut n’avoir pris qu’un engagement verbal, et cependant, il n’est pas impossible que A ne le transmette et ne l’escompte. Il peut dire à C : Je vous dois 10 fr. B m’a donné sa parole qu’il me donnerait 10 fr. et 10 sous dans un an. Voulez-vous accepter en paiement mes droits sur B ? — Si C a confiance, s’il croit, l’opération pourra se faire. Mais qui oserait dire que, pour multiplier les souliers et les chapeaux, il suffit de multiplier les promesses de ce genre, indépendamment de la confiance qui s’y attache ?

B peut livrer un titre écrit. Le titre, sous cette forme, évitera les contestations et dénégations ; il inspirera plus de confiance et circulera plus facilement que la promesse verbale. Mais ni la nature ni les effets du crédit n’auront changé.

Enfin un tiers, une Banque, peut garantir B, se charger de son titre et émettre à la place son propre billet. Ce sera une nouvelle facilité à la circulation. Mais pourquoi ? précisément parce que la signature de la Banque inspire au public plus de confiance que celle de B. Comment donc peut-on penser qu’une Banque soit bonne à quelque chose, si elle n’a pas pour base la confiance, et comment l’aurait-elle, si ses billets offrent moins de garantie que ceux de B ?

Il ne faut donc pas que ces titres divers nous fassent illusion. Il ne faut pas y voir valeur propre, mais la simple promesse de livrer une valeur, promesse souscrite par quelqu’un qui est en mesure de la tenir.