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Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, II.djvu/197

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LVI

DE MADAME GASTON À LA COMTESSE DE L’ESTORADE.


Ah ! ma bien-aimée, entends le terrible, le fatal, l’insolent mot de l’imbécile La Fayette à son maître, à son roi : Il est trop tard ! Ô ! ma vie, ma belle vie ! quel médecin me la rendra ? Je me suis frappée à mort. Hélas ! n’étais-je pas un feu follet de femme destiné à s’éteindre après avoir brillé ? Mes yeux sont deux torrents de larmes, et… je ne peux pleurer que loin de lui… Je le fuis et il me cherche. Mon désespoir est tout intérieur. Dante a oublié mon supplice dans son Enfer. Viens me voir mourir ?




LVII


DE LA COMTESSE DE L’ESTORADE AU COMTE DE L’ESTORADE.


Au Chalet, 7 août.

Mon ami, emmène les enfants et fais le voyage de Provence sans moi ; je reste auprès de Louise qui n’a plus que quelques jours à vivre : je me dois à elle et à son mari, qui deviendra fou, je crois.

Depuis le petit mot que tu connais et qui m’a fait voler, accompagnée de médecins, à Ville-d’Avray, je n’ai pas quitté cette charmante femme et n’ai pu t’écrire, car voici la quinzième nuit que je passe.

En arrivant, je l’ai trouvée avec Gaston, belle et parée, le visage riant, heureuse. Quel sublime mensonge ! Ces deux beaux enfants s’étaient expliqués. Pendant un moment j’ai, comme Gaston, été la dupe de cette audace ; mais Louise m’a serré la main et m’a dit à l’oreille : — Il faut le tromper, je suis mourante. Un froid glacial