Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, IV.djvu/516

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sa mère, firent pleurer cet enfant. Aussitôt que madame Clapart vit les joues d’Oscar sillonnées de pleurs, elle se trouva sans force ; et, comme toutes les mères en pareil cas, elle chercha la péroraison qui termine ces espèces de crises, où elles souffrent à la fois leurs douleurs et celles de leurs enfants.

— Allons, Oscar, promets-moi d’être discret à l’avenir, de ne plus parler à tort et à travers, de réprimer ton sot amour-propre, de, etc., etc.

Oscar promit tout ce que sa mère lui demanda de promettre, et après l’avoir attiré doucement à elle, madame Clapart finit par l’embrasser pour le consoler d’avoir été grondé.

— Maintenant, dit-elle, tu écouteras ta mère, tu suivras ses avis, car une mère ne peut donner que de bons conseils à son fils. Nous irons chez ton oncle Cardot. Là est notre dernière espérance. Cardot a dû beaucoup à ton père, qui en lui accordant sa sœur, mademoiselle Husson, avec une énorme dot pour ce temps-là, lui a permis de faire une grande fortune dans la soierie. Je pense qu’il te placera chez monsieur Camusot, son successeur et son gendre, rue des Bourdonnais… Mais, vois-tu, ton oncle Cardot a quatre enfants. Il a donné son établissement du Cocon-d’Or à sa fille aînée, madame Camusot. Si Camusot a des millions, il a aussi quatre enfants de deux lits différents, et il sait à peine que nous existons. Cardot a marié Marianne, sa seconde fille, à monsieur Protez, de la maison Protez et Chiffreville. L’Étude de son fils aîné, le notaire, a coûté quatre cent mille francs, et il vient d’associer Joseph Cardot, son second fils, à la maison de droguerie Matifat. Ton oncle Cardot aura donc bien des raisons pour ne pas s’occuper de toi, qu’il voit quatre fois par an. Il n’est jamais venu me rendre visite ici ; tandis qu’il savait bien, lui, venir me voir chez Madame-mère pour obtenir les fournitures des Altesses impériales, de l’Empereur et des grands de sa cour. Maintenant les Camusot font les ultra ! Camusot a marié le fils de sa première femme à la fille d’un huissier du cabinet du roi ! Le monde est bien bossu quand il se baisse ! Enfin, c’est habile, le Cocon-d’Or a la pratique de la Cour sous les Bourbons comme sous l’Empereur. Demain nous irons donc chez ton oncle Cardot, j’espère que tu sauras t’y tenir comme il faut ; car là, je te le répète, est notre dernier espoir.

Monsieur Jean-Jérôme-Séverin Cardot était depuis six ans veuf de sa femme, mademoiselle Husson, à qui le fournisseur, au temps de