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Page:Œuvres de C. Tillier - III.djvu/39

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SUR LA RÉFORME ÉLECTORALE.

sont enfin qu’un vil engrais qui n’est propre qu’à la rendre seconde. Cette guerre commencée au moyen âge, nul ne sait quand elle finira ; mais, assurément, les nations ne jouiront d’une paix complète que quand le droit aura triomphé du fait.

Vous céderez, dites-vous, quand vous verrez noircir l’orage ; mais serez-vous assez puissant pour dire à la vague populaire soulevée : « Tu monteras jusqu’à mes pieds, mais tu n’iras pas plus loin. Tiens, voilà mon urne électorale, brise-la sur les durs rivages et va-t-en ! » Vous avez lu l’histoire, système ; vous savez que plus d’un homme s’est repenti d’avoir résisté un jour de trop. Si Louis XVI eût cédé à temps aux justes exigences de son peuple, il eût peut-être fini sa carrière sur un trône constitutionnel. Vous céderez à propos ! Mais vous ne connaissez donc pas le peuple, vous qui parlez ainsi ? Une fois qu’on le pousse sur la pense des révolutions, il faut qu’il descende jusqu’au bas ; il dépasse toujours le but qu’il se propose. En 1830, il ne s’était armé d’abord que pour abolir les ordonnances ; mais l’audace lui venant avec le succès, il éleva ses coups jusqu’à la royauté. Qu’eût-il fallu pour que, passant sur les débris du trône, il allât jusqu’à la république ? quelque lambeau de drapeau rouge qui eût tout-à-coup surgi d’entre ses rangs. Cette république, Lafayette, le roi de la révolution, l’a tenue entre ses mains ; avec quelque prudence de moins et quelque énergie de plus, il l’eût installée, au lieu de la royauté, à l’Hôtel-de-ville. Mais le vétéran de 89 ne se souvenait plus de ses jeunes années ; il fit à sa patrie l’injure de craindre pour elle les menaces des souverains absolus ; il se trouvait d’ailleurs l’ami particulier du duc d’Orléans, et il lui fit cadeau de la France. À la place du vieux Lafayette, mettez Napoléon ; ou il eût gardé le trône pour lui, ou d’un coup de pied il l’eût jeté à bas, et eût entouré la France d’une pléiade de républiques dont celle-ci eût été le soleil. Voilà ce qu’eût pu produire la résistance intempestive de Charles X. Ô petites causes, ne savez-vous donc plus amener de grands résultats !…

Croyez-moi, d’une façon ou de l’autre, il faut que le peuple in-