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Page:Œuvres de Louise Ackermann.djvu/18

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Je puis être hardie dans mes spéculations philosophiques, mais, en revanche, j’ai toujours été extrêmement circonspecte dans ma conduite. Cela se comprend d’ailleurs. On ne commet guère d’imprudences que du côté de ses passions : or, je n’ai jamais connu que celles de l’esprit.

C’est dans cette même famille Schubart que j’eus l’occasion de rencontrer Paul Ackermann. Il venait d’arriver à Berlin. Sur la recommandation du pasteur Cuvier et du professeur Eichoff, ces dames l’avaient accueilli en compatriote et en ami. C’était un jeune homme doux, sérieux, austère. Destiné de bonne heure au ministère évangélique, il s’était aperçu, ses études théologiques terminées, qu’il n’était même plus chrétien. Mais, de cette saine et forte éducation protestante, il lui était resté, à défaut de la foi, une grande rigidité de principes. Ma sauvagerie, mes goûts studieux, loin de lui déplaire, se changèrent en attraits pour lui. Peu à peu et sans que je m’en aperçusse, il se prit pour moi d’une passion profonde. J’en fus d’abord plus effrayée que charmée, mais je finis bientôt par en être touchée. Grâce à une heureuse disposition de ma nature, si je suis extrêmement sensible aux sentiments affectueux que l’on peut éprouver pour moi, d’un autre côté je m’en passe facilement. Je me serais donc passée