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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/20

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tionnent tout ce qui est beau en soi, mais ils sont particulièrement habiles à distinguer les attentions de ceux qui les aiment réellement, et ils savent y répondre. S’ils voient dans une compagnie une personne à eux entièrement inconnue, mais naturellement portée à chérir les enfants, les petits lutins semblent la deviner, comme par une sorte de sympathie tandis que les efforts gauches de ceux qui ne leur font des avances que pour se mettre bien avec les parents, réussissent rarement à les séduire. Le petit garçon ne parut donc point insensible aux caresses de la dame, et ce ne fut pas sans difficulté qu’elle parvint à s’arracher du lit, où il se trouvait, pour le laisser prendre le repos dont il avait besoin.

À qui appartient le jeune varlet que nous venons de sauver ? » demanda lady Avenel à sa femme de chambre Lilias, quand elles furent rentrées dans son appartement.

« À une vieille femme du hameau ; répondit la suivante, qui est venue jusqu’à la loge du portier pour demander de ses nouvelles : voulez-vous qu’on lui permette d’entrer ?

— Si je le veux ! » reprit lady Avenel avec un ton prononcé d’étonnement et de déplaisir ; « en doutez-vous ?… Quelle femme pourrait n’avoir pas pitié de ses souffrances maternelles, des inquiétudes que lui cause le sort d’un si aimable enfant !

— Mais, milady, répondit Lilias, cette femme est trop âgée pour être mère de l’enfant ; je pense plutôt que c’est sa grand’mère ou quelque parente éloignée.

— Qu’elle soit ce qu’elle voudra, répliqua la dame, son cœur doit éprouver des angoisses cruelles, tant que la vie de ce bel enfant est en danger. Allez donc la chercher promptement ; je ne serais pas non plus fâchée de savoir quelque chose sur la naissance et la famille de l’enfant. »

Lilias revint bientôt, conduisant une grande femme, très pauvrement vêtue, mais avec plus de propreté et de décence qu’un costume misérable n’en comporte ordinairement. Dès qu’elle se présenta, lady Avenel reconnut sa figure. Il était d’usage dans la famille que Henri Warden fît, tous les dimanches et deux autres jours de chaque semaine, un sermon ou une instruction dans la chapelle du château. La propagation du protestantisme entrait puissamment dans les vues politiques et religieuses du chevalier d’Avenel. Les habitants du village étaient, en conséquence, invités à assister aux prédications de Henri Warden, et beaucoup d’entre eux se laissèrent facilement gagner aux doctrines que professait