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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/22

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enfant un lieu de refuge. Comment donc me demandez-vous pourquoi je n’habite pas mes foyers et au milieu des miens ?

— C’était une question oiseuse, en effet ; la misère des temps force tant de gens à errer comme des vagabonds ! Mais pourquoi chercher un asile dans une contrée ennemie ?

— Mes voisins étaient papistes ; il a plu au ciel de me donner une vue plus claire de l’Évangile, et je suis venue jusqu’ici pour jouir du ministère de cet homme de Dieu, Henri Warden, qui, pour la gloire et la consolation d’un grand nombre, enseigne l’Évangile dans sa pureté et sa vérité.

— Êtes-vous pauvre ? » demanda encore la dame.

« Vous ne m’entendez demander l’aumône à personne, répondit l’Anglaise. »

Ici il se fit une pause. Les manières de la vieille femme, si elles ne manquaient point au respect, n’étaient rien moins que gracieuses ; et elle ne paraissait pas disposée à un plus long entretien. Lady Avenel l’entama de nouveau sur un sujet différent. « Vous avez appris le danger qu’a couru votre petit garçon ?

— Oui, madame, et aussi par quelle providence spéciale il en a été retiré. Fasse le ciel qu’il s’en montre reconnaissant, ainsi que moi-même !

— Quel est votre degré de parenté ?

— Je suis sa grand’mère, la seule parente qu’il ait sur la terre pour prendre soin de lui.

— Son entretien doit nécessairement vous être à charge, dans l’état d’abandon auquel vous êtes réduite ?

— Je ne m’en suis jamais plainte à personne, répliqua Madeleine Græme, avec le même accent froid et indifférent dont elle avait répondu aux autres questions.

« Si votre petit-fils pouvait être reçu dans une noble famille, ajouta lady Avenel, ne serait-ce pas un avantage et pour lui et pour vous ?

— Reçu dans une noble famille ! » s’écria la vieille femme en se redressant et en fronçant les sourcils au point de donner à son front ridé l’expression du dédain le plus sauvage ; « et pourquoi, s’il vous plaît ? Pour être page de milady ou laquais de milord, pour disputer aux autres valets les restes du repas du maître ? Voudriez-vous qu’il fût occupé à chasser les mouches de la figure de milady quand elle dort, à porter la queue de sa robe quand elle marche, à lui donner une assiette quand elle mange, à la précéder