Aller au contenu

Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/349

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE XXXI.

le serment.


Empoisonné… mauvais augure ! mort abandonné, rejeté.
Shakspeare, Le roi Jean.


Quelque dégoûté que fût Roland Græme du château de Lochleven, quelque regret qu’il éprouvât d’avoir vu échouer les projets de Marie, jamais il ne s’était réveillé avec des pensées plus agréables que le matin qui suivit l’échec de l’entreprise de Douglas. D’abord il était convaincu qu’il avait mal compris ce que lui avait annoncé l’abbé, et que l’amour de Douglas n’avait pas Catherine Seyton pour objet, mais bien la reine. En second lieu, par cette espèce d’explication qu’il avait eue avec l’intendant, il se trouvait libre, sans manquer à son honneur envers la famille de Lochleven, de contribuer de son mieux à un projet quelconque qui aurait pour but de sauver la reine ; et indépendamment de la bonne volonté qu’il apportait de lui-même dans cette entreprise, il savait que c’était le moyen le plus sûr d’arriver à la faveur de Catherine Seyton. Il cherchait maintenant l’occasion de lui apprendre qu’il s’était dévoué à cette tâche : la fortune lui fut propice, et lui en fournit une extraordinairement favorable.

À l’heure ordinaire du déjeuner, l’intendant servit ce repas avec tout le cérémonial habituel. Dès qu’il l’eut placé sur la table dans l’appartement intérieur, il dit à Roland Græme, en lui jetant un regard ironique : « Je vous laisse, mon jeune monsieur, vaquer à l’office d’écuyer. Il y a long-temps assez que cet office a été rempli envers lady Marie par un des membres de la maison de Douglas.

— Quand il aurait été la fleur et le phœnix de ceux qui ont jamais porté ce nom, dit Roland, c’était un honneur pour lui. »

L’intendant partit sans répondre à cette bravade autrement que par un sombre regard de mépris. Græme, resté seul, s’empressa d’imiter aussi bien que possible la grâce avec laquelle Douglas avait l’habitude d’accomplir les cérémonies préliminaires obligées des repas de la reine d’Écosse. Il y avait plus qu’une vanité juvénile, il y avait un dévouement généreux dans l’empressement avec