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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/445

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rasseoir. Catherine Seyton dévorait en secret son chagrin, et désirait soutenir le courage abattu de sa maîtresse ; et l’abbé, portant ses pensées inquiètes vers l’avenir, s’efforçait vainement de former quelque plan qui justifiât une ombre d’espoir. Le jeune Roland se mêlait aussi dans les vives discussions qui avaient lieu parmi les dévoués serviteurs qui entouraient la reine : il délibérait avec eux sur ce qui restait à faire, et son courage ne l’abandonnait pas.

« Votre Majesté, dit-il, a perdu une bataille ; votre aïeul Bruce en a perdu sept successivement avant de s’asseoir triomphant sur le trône d’Écosse, et de proclamer d’une voix victorieuse l’indépendance de son pays sur le champ de bataille de Bannockburn. Ces bruyères que nous traversons ne sont-elles pas plus agréables que le château de Lochleven entouré de fossés, si bien fermé et si bien gardé ?… Nous sommes libres… ces mots doivent vous consoler de toutes vos pertes. »

Il frappait une corde retentissante ; mais le cœur de Marie n’eut point d’écho pour elle.

« Que ne suis-je encore dans Lochleven, disait-elle, au lieu d’être témoin du carnage fait par des rebelles sur des sujets qui, pour moi, se sont offerts à la mort. Ne me parlez pas de nouvelles tentatives, elles vous coûteraient la vie, à vous, et aux amis qui me les conseilleraient. Je ne voudrais pas sentir une seconde fois ce que j’ai éprouvé lorsque j’ai vu de cette montagne les épées des cruels cavaliers de Morton se souiller du sang des fidèles Seyton et des braves Hamilton, pour les récompenser de leur loyauté envers leur reine. Non, si je devais régner sur toute la Grande-Bretagne ; je ne voudrais pas encore sentir ce que j’ai éprouvé lorsque le sang de Douglas teignit mon manteau. Cherchez pour moi quelque endroit où je puisse cacher cette misérable tête, qui porte malheur à tout ce qui l’aime ; c’est la dernière faveur que Marie demande à ses fidèles sujets. »

Ce fut dans cette accablante tristesse que, fuyant avec une rapidité extrême, l’infortunée Marie, après que lord Herries et quelques partisans l’eurent rejointe, arriva enfin à l’abbaye de Dundrennam, située à environ soixante milles du champ de bataille. Dans cet endroit retiré du comté de Galloway, les moines n’avaient pas été aussi rigoureusement poursuivis par la réformation, et quelques-uns languissaient encore dans leurs cellules sans y être persécutés ; le prieur, les yeux noyés de larmes, vint