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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/257

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tion, en observant que ces articles avaient presque doublé de valeur depuis les magnifiques préparatifs faits par le comte de Leicester pour recevoir la reine et toute sa cour dans son superbe château de Kenilworth.

« Ah ! » dit la comtesse avec vivacité, » il paraît que cette nouvelle est vraie, Jenny.

— Certainement, madame, répondit Wayland ; et je m’étonne qu’elle ne soit point parvenue à vos oreilles. La reine d’Angleterre doit aller, à l’époque des voyages d’été, passer une semaine de fêtes chez le comte de Leicester ; et il y a des gens qui vous diront que l’Angleterre aura un roi et Élisabeth d’Angleterre un mari, avant que la saison des voyages soit terminée.

— Ils mentent comme des misérables, » dit la comtesse, incapable de contenir son impatience.

« Pour l’amour de Dieu ! madame, faites attention, » dit Jeannette en tremblant d’effroi ; « faut-il s’embarrasser des nouvelles d’un colporteur ?

— Oui, Jeannette ! s’écria la comtesse, tu as eu raison de me reprendre. De pareils propos, qui ternissent la réputation du plus noble et du plus illustre pair du royaume, ne peuvent trouver cours que parmi des hommes vils, abjects et infâmes.

— Que je meure, madame, » dit Wayland Smith, qui sentait que cette sortie était dirigée contre lui, « si j’ai rien fait pour mériter cet étrange emportement ! Je n’ai fait que répéter ce que tout le monde dit. »

Cependant la comtesse avait repris son sang-froid, et, dans l’alarme que lui avait causée l’attitude inquiète de Jeannette, s’efforçait de faire disparaître toute trace de déplaisir. « Je serais fâchée, dit-elle, mon brave homme, que notre reine renonçât à son titre de vierge, si cher à ses sujets… N’en croyez rien. » Puis, comme pour détourner la conversation : « Mais quelle est cette pâte si soigneusement enfermée dans une boîte d’argent ? » ajouta-t-elle en examinant le contenu d’une cassette où des drogues et des parfums étaient distribués dans des cases séparées.

« C’est un remède, madame, contre une maladie dont j’espère que vous n’aurez jamais sujet de vous plaindre. Gros comme un pois de ce médicament, avalé chaque jour pendant une semaine, fortifie le cœur contre ces vapeurs noires qui naissent de la solitude, de la mélancolie, d’une affection mal récompensée, et d’un espoir déçu…