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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/181

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toujours les passions bonnes ou mauvaises, ne manqua pas de jouer son rôle dans cette occasion, et « Malheur aux amis perfides et aux maîtres durs et inflexibles ! » fut le toast qui fit vider plus d’un pot de bière.

Pendant ce temps, M. Ireby prenait plaisir à retenir le bouvier écossais dans la salle de son vieux manoir. Il fit servir devant lui une tranche de bœuf froid et un pot de bière écumante, et observa d’un air de satisfaction l’excellent appétit avec lequel Robin Oig fêtait ce souper auquel il était peu accoutumé. Le gentilhomme du Cumberland poussa même la condescendance jusqu’à allumer sa pipe et pour accorder sa dignité patricienne avec son goût pour les conversations agriculturales, il crut devoir se promener en long et en large, tandis qu’il causait avec son hôte le bouvier.

« J’ai passé près d’un autre troupeau, dit le gentillâtre, à la tête duquel était un de vos compatriotes. Ses bêtes étaient moins nombreuses que les vôtres : la plupart était sans cornes. Quant à lui, c’était un gros homme ; mais ce n’était pas un de vos gens à jaquette ; il portait décemment une culotte… Savez-vous qui il peut être ?

— Mais oui, je pense que ce peut, que ce doit être Hugh Morrison ; je ne croyais pas qu’il eût déjà fait autant de chemin. Il a gagné un jour sur nous, mais ses bêtes du comté d’Argyle doivent être fatiguées. À quelle distance était-il en arrière ?

— À environ six ou sept milles, répondit le gentillâtre, car je l’ai dépassé à Chrystenbury-Crags, et je vous ai rejoint à Hollan-Bush. Mais si ses bêtes sont fatiguées, peut-être y aurait-il quelque bon marché à faire avec lui.

— Oh ! non. Hugh Morrisson n’est pas un homme à bons marchés ; il vous faut rencontrer pour cela quelque bon montagnard, comme Robin Oig. Mais je vais vous souhaiter une bonne nuit et aller au clachan voir si la mauvaise humeur de Harry Wakefield est passée. »

La compagnie du cabaret était encore réunie et occupée à causer de la prétendue trahison de Robin Oig, lorsque le coupable entra dans la salle. Sa présence, comme il arrive souvent en pareil cas, interrompit un moment la discussion dont il était l’objet, et il fut reçu avec ce silence glacial qui, mieux que mille exclamations, apprend au nouveau venu qu’il est vu avec déplaisir. Surpris et offensé, mais non effrayé de l’accueil qu’il reçut, Robin entra d’un air assuré et même un peu hautain, ne salua personne